LA COUR DE CASSATION, TROISIÈME CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :
Met hors de cause la société Swiss Life, la société Mutuelles du Mans assurances, la société MC prestations conseils, ès qualités, la société Deviq immobilier et la société Cabinet Gaxieu ;
Attendu, selon l'arrêt attaqué (Montpellier, 13 octobre 2009) que la société Actipolis a fait réaliser en 1991 une zone d'activité dite ZAE Actipolis, dont la voirie était en partie située sur un collecteur d'eaux pluviales mis en place en 1986 lors de la création d'une zone d'aménagement concertée voisine ; qu'à la suite d'un effondrement de la voirie consécutif à des malfaçons affectant le collecteur d'eaux pluviales, la société Actipolis a au vu du rapport de l'expert désigné en référé le 17 mai 1994, fait assigner le 21 juin 1996 en responsabilité et indemnisation, notamment, M. X..., maître d'oeuvre, la société Marquet et la société Devicq immobilier ; que M. X... a appelé en cause la société Axa Corporate solutions (AXA) et le GIE G20 venant aux droits du Groupe Canonne ; que la société Devicq a assigné en garantie ses assureurs la société Les Mutuelles du Mans (MMA) et la société La Baloise, aux droits de laquelle vient la société Swiss life, ainsi que la société GAN assureur de la société Marquet ; que la société Actipolis a sollicité la condamnation in solidum de ces sociétés à l'indemniser du coût des travaux de reprise des désordres et de ses préjudices accessoires ;
Sur le moyen unique du pourvoi principal :
Attendu que la société GAN fait grief à l'arrêt attaqué de la condamner in solidum avec la société Marquet, M. X..., la société Axa Corporate solutions assurances et le GIE 20 à payer à la société Actipolis la somme de 583 997, 12 HT, alors, selon le moyen :
1°/ que la police d'assurance souscrite par la société Marquet auprès du GAN était une police d'assurance « responsabilité décennale des entrepreneurs de génie civil » qui s'appliquait exclusivement aux travaux de génie civil pour des désordres remplissant les conditions de l'article 1792 du code civil ; que cette assurance, qui avait pour seul objet de couvrir les dommages des ouvrages de génie civil, ne relevait pas du régime de l'assurance obligatoire de l'article L. 241-1 du code des assurances ; qu'en la soumettant néanmoins à ce régime à raison de la qualité d'ouvrage du collecteur d'eaux pluviales pour en déduire que la garantie du GAN était due en l'espèce, la cour d'appel a violé l'article 1134 du code civil ;
Mais attendu qu'ayant relevé, par des motifs non critiqués, que la police souscrite auprès de la société GAN couvrait la responsabilité décennale de la société Marquet pour les désordres affectant les ouvrages de génie civil et que les dommages invoqués, de nature décennale, trouvaient leur origine dans les travaux de génie civil commencés et réalisés par cette société pendant la période de validité du contrat, la cour d'appel a, par ces seuls motifs, retenu à bon droit que la société Gan devait sa garantie ;
D'où il suit que le moyen n'est pas fondé ;
Mais sur le moyen unique du pourvoi incident :
Vu les articles L. 241-1 et A. 243-1, annexe I, du code des assurances ;
Attendu que pour condamner le GIE G20, venant aux droits du groupe Canonne, à payer en sa qualité d'assureur de M. X..., in solidum avec d'autres, certaines sommes à la société Actipolis, l'arrêt retient que si la construction du collecteur défectueux a débuté avant la prise d'effet du contrat elle ne s'est achevée qu'à la fin du second semestre de l'année 1989, de sorte que le fait générateur du sinistre se situe au cours de sa période de validité ;
Qu'en statuant ainsi, sans relever l'existence d'une clause de reprise du passé et alors que l'assurance de responsabilité décennale obligatoire couvre, pour la durée de la responsabilité pesant sur l'assuré, les seuls travaux ayant fait l'objet d'une ouverture de chantier pendant la période de validité du contrat d'assurance, la cour d'appel a violé les textes susvisés ;
PAR CES MOTIFS :
CASSE ET ANNULE, mais seulement en ce qu'il condamne le GIE G20, venant aux droits du groupe Canonne, à payer, in solidum avec la société Marquet, la société GAN assurances Iard, Jean X... et la société Axa Corporate solutions assurance, à la société Actipolis la somme de 583 997, 12 euros hors taxe, l'arrêt rendu le 13 octobre 2009, entre les parties, par la cour d'appel de Montpellier ; remet, en conséquence, sur ce point, la cause et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant ledit arrêt et, pour être fait droit, les renvoie devant la cour d'appel de Montpellier, autrement composée ;
Condamne la société GAN assurances Iard aux dépens ;
Vu l'article 700 du code de procédure civile, condamne la société GAN assurances Iard à payer à la société Actipolis, la somme de 2 500 euros, à la société Swiss Life, la somme de 1 000 euros, à la société MMA, la somme de 1 000 euros, au GIE G20, la somme de 1 000 euros, à la société Axa Corporate solutions assurances, la somme de 1 000 euros ; rejette les autres demandes ;
Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite de l'arrêt partiellement cassé ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, troisième chambre civile, et prononcé par le président en son audience publique du vingt-cinq janvier deux mille onze.
MOYENS ANNEXES au présent arrêt :
Moyen produit au pourvoi principal par la SCP Delvolvé, avocat aux Conseils pour la société GAN assurances Iard
IL EST REPROCHE A L'ARRET ATTAQUE D'AVOIR condamné la société GAN ASSURANCES IARD in solidum avec la société MARQUET, M. X..., la société AXA CORPORATE SOLUTIONS ASSURANCES et le GIE G20 â payer à la société ACTIPOLIS la somme de 583. 997, 12 € HT,
AUX MOTIFS QUE les désordres, suivant les constatations de l'expert judiciaire, étaient typiquement de nature décennale au sens de l'article 1792 du code civil ; que les voies et réseaux divers constituaient des ouvrages au sens de cet article même lorsqu'ils n'étaient pas rattachés à un bâtiment ; que tel était le cas du collecteur d'eaux pluviales défectueux implanté sous la parcelle acquise par la société ACTIPOLIS ; que la société MARQUET avait contracté en 1993 auprès du GAN une police d'assurance de « responsabilité décennale des entrepreneurs de génie civile » incluant notamment les travaux de canalisation et indiquant dans l'article 1er de ses conditions générales qu'elle avait pour objet de garantir les conséquences pécuniaires de la responsabilité civile décennale encourue par l'assuré pour les dommages aux ouvrages qui compromettaient leur solidité ou les rendaient impropres à leur destination ; que le GAN déniait sa garantie aux motifs que le sinistre était survenu postérieurement à la résiliation de la police d'assurance à effet du ler janvier 1990 pour non paiement de primes, que le collecteur était un ouvrage de génie civil et non de bâtiment et qu'il n'était pas soumis à l'assurance obligatoire, même si l'entreprise était tenue par la garantie légale de l'article 1792 du code civil ; qu'or il résultait du rapport d'expertise que la réalisation du collecteur avait fait appel aux techniques des travaux de bâtiment ; que dès lors elle était soumise au régime de l'assurance obligatoire prévue par l'article L. 241-1 du code des assurances ; que par ailleurs il résultait des articles L. 241-1 et A 243-1 de l'annexe I du code des assurances que la garantie au titre du contrat d'assurance obligatoire de responsabilité était acquise dès lors que le sinistre avait pour origine un fait générateur qui se situait entre la date de prise d'effet du contrat et sa résiliation ; que tel était le cas en l'espèce, étant établi que les dommages trouvaient leur origine dans des travaux réalisés courant 1988 et au cours du premier semestre de l'année 1989 soit pendant la période de validité du contrat,
ALORS QUE la police d'assurance souscrite par la société MARQUET auprès du GAN était une police d'assurance « responsabilité décennale des entrepreneurs de génie civil » qui s'appliquait exclusivement aux travaux de génie civil pour des désordres remplissant les conditions de l'article 1792 du code civil ; que cette assurance, qui avait pour seul objet de couvrir les dommages des ouvrages de génie civil, ne relevait pas du régime de l'assurance obligatoire de l'article L. 241-1 du code des assurances ; qu'en la soumettant néanmoins à ce régime â raison de la qualité d'ouvrage du collecteur d'eaux pluviales pour en déduire que la garantie du GAN était due en l'espèce, la cour d'appel a violé l'article 1134 du code civil.
Moyen produit au pourvoi incident par la SCP Masse-Dessen et Thouvenin, avocat aux Conseils pour le GIE 20 pris en la personne de ses liquidateurs amiables MM. Guy Y... et Z...
Le moyen reproche à l'arrêt attaqué d'avoir condamné un assureur de responsabilité décennale (le GIE G20), in solidum avec un maître d'oeuvre (M. X...), un entrepreneur (la société MARQUET) et d'autres assureurs de responsabilité décennale (la société AXA CORPORATE SOLUTIONS ASSURANCE ainsi que la société GAN ASSURANCES) à payer au propriétaire d'un collecteur d'eau de pluie (la société ACTIPOLIS) la somme de 583. 997, 12 € en réparation de dommages à l'ouvrage ;
AUX MOTIFS QUE, après résiliation de son contrat avec AXA, M. X... avait souscrit auprès de la société CANONNE, aux droits de qui venait le GIE G20, une police portant le n° 1002. 596 garantissant sa responsabilité décennale ; qu'elle avait pris effet le 1er janvier 1989 et avait été résiliée le 31 décembre 1991 ; qu'il résultait du rapport d'expertise que la construction du collecteur défectueux, si elle avait débuté avant la prise d'effet de ce contrat, ne s'était achevée qu'à la fin du second semestre de l'année 1989, de sorte que le fait générateur du sinistre se situait au cours de sa période de validité ; que le GIE G20 devait donc être tenu avec son assuré, concurremment avec la société AXA (arrêt attaqué, p. 16, dernier al. ; p. 17, al. 1 et 3) ;
ALORS QUE l'assurance de responsabilité obligatoire couvre, pour la durée de la responsabilité pesant sur l'assuré, les seuls travaux ayant fait l'objet d'une ouverture de chantier pendant la période de validité du contrat d'assurance ; qu'en retenant la garantie de l'assureur dont la police avait pris effet au 1er janvier 1989, tout en constatant que la construction de l'ouvrage confiée à son assuré avait débuté avant la prise d'effet de la police, la cour d'appel a violé les articles L. 241-1 et A. 243-1, Annexe I, du code des assurances.