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25/01/2011 | FRANCE | N°09-72834

France | France, Cour de cassation, Chambre sociale, 25 janvier 2011, 09-72834


LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l'arrêt suivant :

Attendu, selon l'arrêt attaqué, que M. X... a été engagé, le 16 décembre 2002, par la commune d'Orléans en qualité de correspondant de nuit dans le cadre d'un contrat relatif aux activités d'adultes-relais d'une durée déterminée de trois ans renouvelable une fois ; qu'il est devenu par avenant du 6 octobre 2003 agent de médiation; qu'après avoir été en arrêt de travail pour maladie, M. X... a été déclaré apte avec des réserves par le médecin du travail ; que le maire de la commune lui a notifié qu

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LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l'arrêt suivant :

Attendu, selon l'arrêt attaqué, que M. X... a été engagé, le 16 décembre 2002, par la commune d'Orléans en qualité de correspondant de nuit dans le cadre d'un contrat relatif aux activités d'adultes-relais d'une durée déterminée de trois ans renouvelable une fois ; qu'il est devenu par avenant du 6 octobre 2003 agent de médiation; qu'après avoir été en arrêt de travail pour maladie, M. X... a été déclaré apte avec des réserves par le médecin du travail ; que le maire de la commune lui a notifié que son contrat qui prenait fin le 15 décembre 2005 ne serait pas renouvelé ; que M. X... a saisi la juridiction prud'homale d'une demande à titre de dommages et intérêts pour discrimination et à titre d'indemnité de précarité ;
Sur le second moyen :
Attendu que M. X... fait grief à l'arrêt de le débouter de sa demande en paiement de l'indemnité de précarité prévue au contrat, alors, selon le moyen, que la cassation à intervenir sur l'une ou l'autre des branches du premier moyen entraînera la cassation du chef du rejet de la demande d'indemnité de précarité en application de l'article 624 du code de procédure civile ;
Mais attendu qu'en vertu de l'article L. 5134-106 du code du travail, le salarié dont le contrat est rompu par son employeur dans les conditions prévues à l'article L. 5134-104 bénéficie d'une indemnité calculée sur la base de la rémunération perçue ; qu'il résulte de l'article L. 5134-104 que, sans préjudice des cas prévus aux articles L. 1243-1 et L. 1243-2, le contrat de travail relatif à des activités d'adultes-relais peut être rompu, à l'expiration de chacune des périodes annuelles de leur exécution, à l'initiative du salarié, sous réserve du respect d'un préavis de deux semaines, ou de l'employeur, s'il justifie d'une cause réelle et sérieuse ;
Et attendu qu'ayant estimé que l'article 7 du contrat de travail fixant les conditions pour le bénéfice du salarié à une indemnité de précarité renvoyait aux conditions prévues par l'article 6 du contrat, lequel reproduit les dispositions de l'article L. 5134-104 du code du travail, la cour d'appel, qui a retenu que le contrat n'avait pas été rompu par l'employeur dans les conditions prévues par l'article 6 du contrat, en a justement déduit que le salarié ne pouvait prétendre à l'indemnité prévue par l'article 7 du contrat ;
D'où il suit que le moyen n'est pas fondé ;
Mais sur le premier moyen :
Vu les articles L. 5134-103, L. 1132-1, L. 1133-3, et R. 4624-31 du code du travail ;
Attendu qu'en vertu du premier de ces textes, le contrat relatif à des activités d'adultes-relais est un contrat de travail de droit privé à durée indéterminée ou à durée déterminée conclu en application du 1° de l'article L. 1242-3 dans la limite d'une durée de trois ans renouvelable une fois ; que, selon le deuxième, aucun salarié ne peut faire l'objet d'une mesure discriminatoire, directe ou indirecte, notamment en matière de renouvellement de contrat, en raison de son état de santé ; qu'aux termes du troisième, les différences de traitement fondées sur l'inaptitude constatée par le médecin du travail en raison de l'état de santé ou du handicap ne constituent pas une discrimination lorsqu'elles sont objectives, nécessaires et appropriées ; qu'il résulte de ce dernier texte qu'il ne s'applique qu'en cas d'inaptitude constatée par le médecin du travail conformément aux dispositions de l'article R. 4624-31 du code du travail ;
Attendu que pour débouter M. X... de sa demande de dommages et intérêts liée à l'existence d'une discrimination fondée sur l'état de santé, l'arrêt retient qu'après un arrêt de maladie du salarié, la visite de reprise du 16 mai 2005 conclut que l'intéressé est apte avec les réserves suivantes : « doit rester strictement sur les mêmes horaires de travail 19h-1h ; éviter au maximum les changements de secteur, et revoir dans 3 mois ou avant si besoin », que la visite du 8 septembre 2005 à l'initiative du médecin conclut dans les mêmes termes, que sur vingt huit contrats à durée déterminée conclus par la ville en 2002, soit contrats adultes relais (21) soit contrats emploi consolidé (7), deux seulement dont celui de M. X... n'ont pas été renouvelés à leur terme, l'autre l'étant toutefois deux mois après, que ces éléments de fait laissent supposer l'existence d'une discrimination en raison des problèmes de santé de M. X..., que cependant selon le contrat d'agent de Médiation, M. X... avait des fonctions, soit de nuit, soit de jour, selon les nécessités du service, qu'en outre, s'il intervenait à la Source, il pouvait être amené de façon ponctuelle à oeuvrer à l'Argonne, qu'en d'autres termes son contrat impliquait une certaine souplesse au niveau du quartier d'intervention, ainsi qu'une totale souplesse au niveau des horaires, de jour ou de nuit, que dès lors le fait de devoir rester « strictement» sur les mêmes horaires de nuit et, dans toute la mesure du possible, dans le même quartier, impliquait une rigidité incompatible avec les souplesses précitées, nécessaires à l'efficacité de son travail et relevant de la nature même du poste, qu'ainsi les réserves émises par le médecin sur son aptitude constituaient des raisons objectives, nécessaires et appropriées de ne pas renouveler son contrat ;
Qu'en statuant ainsi, sans constater qu'un avis d'inaptitude avait été régulièrement émis par la médecin du travail, ce dont il résultait que l'article L. 1133-3 du code du travail n'était pas applicable et que le salarié avait fait l'objet d'une mesure discriminatoire directe en matière de renouvellement de contrat en raison de son état de santé, la cour d'appel a violé les textes susvisés ;
PAR CES MOTIFS :
CASSE ET ANNULE, mais seulement en ce qui concerne la demande à titre de dommages et intérêts pour discrimination, l'arrêt rendu le 26 mars 2009, entre les parties, par la cour d'appel d'Orléans ; remet, en conséquence, sur ce point, la cause et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant ledit arrêt et, pour être fait droit, les renvoie devant la cour d'appel de Bourges ;
Condamne la commune d'Orléans aux dépens ;
Vu l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991, condamne M. X... à payer à la SCP Masse-Dessen et Thouvenin la somme de 2 500 euros ;
Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite de l'arrêt partiellement cassé ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre sociale, et prononcé par le président en son audience publique du vingt-cinq janvier deux mille onze.

MOYENS ANNEXES au présent arrêt :


Moyens produits par la SCP Masse-Dessen et Thouvenin, avocat aux conseils pour M. X...

PREMIER MOYEN DE CASSATION :

Le moyen fait grief à l'arrêt attaqué d'avoir débouté M. X... de ses demandes de dommages et intérêts liés à l'existence d'une discrimination fondée sur l'état de santé du salarié,
AUX MOTIFS QUE la visite de reprise du 16 mai 2005, après un arrêt de maladie, conclut que l'intéressé est apte avec les réserves suivantes : « Doit rester strictement sur les mêmes horaires de travail 19h-1h. Eviter au maximum les changements de secteur, et revoir dans 3 mois ou avant si besoin » ; que la visite du 8 septembre 2005, à l'initiative du médecin, conclut dans les mêmes termes (les mots 19h -1h étant remplacés par de nuit) ; que selon le contrat d'agent de Médiation, Monsieur X... avait des fonctions, soit de nuit, soit de jour, selon les nécessités du service ; qu'en outre, s'il intervenait à La Source, il pouvait être amené, de façon ponctuelle à oeuvrer à l'Argonne (c'est ce qui lui avait été demandé, à lui et à son collègue, du 13 au 18 septembre 2005) ; qu'en d'autres termes, son contrat impliquait une certaine souplesse au niveau du quartier d'intervention, ainsi qu'une totale souplesse au niveau des horaires, de jour ou de nuit ; il suffisait ainsi que se produise une situation de tension à la suite d'un incident quelconque pour qu'il puisse être appelé pour apaiser les esprits, notamment vis à vis des jeunes ; que dès lors, le fait de devoir rester «strictement» sur les mêmes horaires de nuit et, dans toute la mesure du possible, dans le même quartier, impliquait une rigidité incompatible avec les souplesses précitées, nécessaires à l'efficacité de son travail et relevant de la nature même du poste ; qu'ainsi les réserves émises par le médecin sur son aptitude constituaient elle des raisons objectives, nécessaires et appropriées de ne pas renouveler son contrat ; que l'article 7 du contrat (de travail) vise une rupture à l'initiative de la Ville dans les conditions du présent alinéa ; qu'il s'agit donc d'une rédaction inappropriée et les parties ont voulu parler d'une rupture par la Ville dans les conditions de l'article 6, c'est-à-dire à tout moment en cas de faute grave ou de force majeure, ou à chaque date anniversaire annuelle pour une cause réelle et sérieuse ; que le terme rupture implique une résiliation au cours du contrat, et ne saurait viser l'échéance du terme au bout de 3 ans, étant rappelé que l'absence de renouvellement ne peut être critiquée (voir paragraphe précédent).
ALORS QUE, les différences de traitement fondées sur l'inaptitude constatée par le médecin du travail en raison de l'état de santé ou du handicap ne constituent pas une discrimination lorsqu'elles sont objectives, nécessaires et appropriées ; que pour rejeter la demande d'indemnités fondée sur l'existence d'une discrimination liée à l'état de santé du salarié, la Cour d'appel, après avoir reconnu l'existence d'une différence de traitement, a considéré que cette différence de traitement était légitime aux motifs que « le fait de devoir rester « strictement» sur les mêmes horaires de nuit et, dans toute la mesure du possible, dans le même quartier, impliquait une rigidité incompatible avec les souplesses précitées, nécessaires à l'efficacité de son travail et relevant de la nature même du poste » ; Qu'en statuant ainsi alors qu'une différence de traitement fondée sur l'état de santé d'un salarié n'est légitime que si elle est objective, nécessaire et appropriée, la Cour d'appel n'a pas donné de base légale au regard de l'article L. 1133-3 (ancien article L. 122-45-4) du Code du travail tel qu'interprété à la lumière de la Directive n° 2000-78 du 27 novembre 2000 ;
ET ALORS en tout cas QUE ne constitue pas un avis d'inaptitude une simple préconisation délivrée par le médecin du travail dans le cadre d'une visite de reprise après un arrêt de travail ; que l'inaptitude au poste ne peut être retenue qu'après une étude de poste et des conditions de travail et deux examens médicaux séparés de deux semaines ; qu'en se fondant sur les seules réserves émises par le médecin sur l'aptitude de Monsieur X... sans constater qu'un avis d'inaptitude aurait été régulièrement émis, la Cour d'appel a violé l'article R 4624-31 du Code du travail ensemble l'article L. 1133-3 (ancien article L. 122-45-4) du Code du travail tel qu'interprété à la lumière de la Directive n° 2000-78 du 27 novembre 2000 ;
SECOND MOYEN DE CASSATION :

Le moyen fait grief à l'arrêt attaqué d'avoir débouté M. X... de ses demandes de paiement de l'indemnité de précarité prévue au contrat.
AUX MOTIFS QUE l'article 7 du contrat (de travail) vise une rupture à l'initiative de la Ville dans les conditions du présent alinéa ; qu'il s'agit donc d'une rédaction inappropriée et les parties ont voulu parler d'une rupture par la Ville dans les conditions de l'article 6, c'est-à-dire à tout moment en cas de faute grave ou de force majeure, ou à chaque date anniversaire annuelle pour une cause réelle et sérieuse ; que le terme rupture implique une résiliation au cours du contrat, et ne saurait viser l'échéance du terme au bout de 3 ans, étant rappelé que l'absence de renouvellement ne peut être critiquée (voir paragraphe précédent).
ALORS QUE la cassation à intervenir sur l'une ou l'autre des branches du premier moyen entraînera la cassation du chef du rejet de la demande d'indemnité de précarité en application de l'article 624 CPC.


Synthèse
Formation : Chambre sociale
Numéro d'arrêt : 09-72834
Date de la décision : 25/01/2011
Sens de l'arrêt : Cassation partielle
Type d'affaire : Sociale

Analyses

CONTRAT DE TRAVAIL, EXECUTION - Employeur - Discrimination entre salariés - Discrimination fondée sur l'état de santé ou le handicap - Prohibition - Portée

CONTRAT DE TRAVAIL, EXECUTION - Employeur - Discrimination entre salariés - Discrimination fondée sur l'état de santé ou le handicap - Possibilité - Conditions - Différences de traitement objectives nécessaires et appropriées - Avis d'inaptitude régulièrement émis par le médecin du travail - Nécessité CONTRAT DE TRAVAIL, DUREE DETERMINEE - Contrat relatif aux activités d'adultes-relais - Expiration - Renouvellement - Refus de l'employeur - Motifs - Etat de santé du salarié - Possibilité - Conditions - Défaut - Effets - Discrimination prohibée

En vertu de l'article L. 5134-103 du code du travail, le contrat relatif à des activités d'adultes-relais est un contrat de travail de droit privé à durée indéterminée ou à durée déterminée conclu en application du 1° de l'article L. 1242-3 dans la limite d'une durée de trois ans renouvelable une fois ; selon l'article L. 1132-1 du même code, aucun salarié ne peut faire l'objet d'une mesure discriminatoire, directe ou indirecte, notamment en matière de renouvellement de contrat en raison de son état de santé ; aux termes de l'article L. 1133-3, les différences de traitement fondées sur l'inaptitude constatée par le médecin du travail en raison de l'état de santé ou du handicap ne constituent pas une discrimination lorsqu'elles sont objectives, nécessaires et appropriées. Il résulte de ce dernier texte qu'il ne s'applique qu'en cas d'inaptitude constatée par le médecin du travail conformément aux dispositions de l'article R. 4624-31 du code du travail. Par suite, viole ces textes la cour d'appel qui, pour rejeter la demande à titre de dommages-intérêts pour discrimination fondée sur l'état de santé retient que les réserves émises par le médecin du travail sur l'aptitude du salarié constituaient des réserves objectives, nécessaires et appropriées de ne pas renouveler son contrat, sans constater qu'un avis d'inaptitude avait été régulièrement émis par le médecin du travail, ce dont il résultait que l'article L. 1133-3 du code du travail n'était pas applicable et que le salarié avait fait l'objet d'une mesure discriminatoire directe en matière de renouvellement de contrat en raison de son état de santé


Références :

articles L. 5134-103, L. 1132-1, L. 1133-3 et R. 4624-31 du code du travail

Décision attaquée : Cour d'appel d'Orléans, 26 mars 2009


Publications
Proposition de citation : Cass. Soc., 25 jan. 2011, pourvoi n°09-72834, Bull. civ. 2011, V, 29
Publié au bulletin des arrêts des chambres civiles 2011, V, 29

Composition du Tribunal
Président : Mme Collomp
Avocat général : M. Lalande
Rapporteur ?: M. Frouin
Avocat(s) : SCP Barthélemy, Matuchansky et Vexliard, SCP Masse-Dessen et Thouvenin

Origine de la décision
Date de l'import : 03/12/2011
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CCASS:2011:09.72834
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