LA COUR DE CASSATION, TROISIÈME CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :
Attendu, selon l'arrêt attaqué (Aix-en-Provence, 29 janvier 2009), que M. X... et sa soeur Catherine X..., propriétaires indivis d'un immeuble, ont apporté ce bien à un groupement d'exploitation en commun, dit Les Lavandes (GAEC), en vue notamment de la réalisation de chambres d'hôtes ; que des travaux de rénovation ont été confiés à M. Y... sur la base de devis adressés à Mme X..., que les travaux ont été interrompus après le paiement d'une facture libellée au nom du GAEC ; que M. et Mme X... et le GAEC ont, après expertise, assigné M. Y... sur le fondement de la responsabilité contractuelle, en réparation de désordres et indemnisation de leur préjudice ;
Sur le premier moyen :
Vu les articles 1134 et 1165 du code civil, ensemble l'article 32 du code de procédure civile ;
Attendu que pour déclarer recevable l'action en responsabilité contractuelle engagée par M. X... et le GAEC Les Lavandes et condamner M. Y... à payer à ceux-ci et à Mme X..., ensemble, une somme de 48 988,50 euros au titre du coût des travaux de réfection et celle de 20 000 euros au titre de conséquences financières, l'arrêt retient que les consorts X... sont propriétaires indivis de l'immeuble mis à disposition du GAEC dont ils sont les seuls associés, que si le premier devis est établi à l'ordre de Mme X... seule, les deux autres ne mentionnent pas l'identité du maître d'ouvrage, que M. Y... a libellé sa facture à l'ordre du GAEC sur la demande de Mme X... et qu'il se déduit de ces éléments que Bernard X... a été nécessairement représenté et que l'existence et la qualité du GAEC étaient connues de M. Y... ;
Qu'en statuant ainsi par des motifs impropres à caractériser l'existence d'un lien contractuel entre M. Y... et les différents demandeurs, la cour d'appel n'a pas donné de base légale à sa décision ;
PAR CES MOTIFS, et sans qu'il y ait lieu de statuer sur les autres moyens :
CASSE ET ANNULE, dans toutes ses dispositions, l'arrêt rendu le 29 janvier 2009, entre les parties, par la cour d'appel d'Aix-en-Provence ; remet, en conséquence, la cause et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant ledit arrêt et, pour être fait droit, les renvoie devant la cour d'appel d'Aix-en-Provence, autrement composée ;
Condamne Mme X..., M. X... et le GAEC Les Lavandes, ensemble, aux dépens ;
Vu l'article 700 du code de procédure civile, rejette la demande de Mme X..., de M. X... et du GAEC les Lavandes ; les condamne, ensemble, à payer 2 500 euros à M. Y... ;
Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite de l'arrêt cassé ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, troisième chambre civile, et prononcé par le président en son audience publique du vingt-cinq janvier deux mille onze.
MOYENS ANNEXES au présent arrêt :
Moyens produits par la SCP Richard, avocat aux Conseils pour M. Y...
PREMIER MOYEN DE CASSATION :
IL EST FAIT GRIEF à l'arrêt attaqué d'avoir déclaré recevable l'action en responsabilité contractuelle exercée par Monsieur Bernard X... et par le GAEC LES LAVANDES à l'encontre de Monsieur Eric Y..., puis d'avoir condamné celui-ci à leur payer, ainsi qu'à Madame Catherine X..., la somme de 48.988,50 euros au titre du coût des travaux, cette somme devant être révisée en fonction de l'évolution de l'indice BT01 du coût de la construction, ainsi que les intérêts capitalisés sur cette somme, outre 20.000 euros à titre de dommages-intérêts, avec intérêts capitalisés ;
AUX MOTIFS QU'Eric Y... affirme qu'il n'a contracté qu'avec Catherine X... et que, par suite, tant Bernard X... que le GAEC sont irrecevables à agir ; qu'il résulte cependant des pièces produites, d'une part, que les bâtiments sur lesquels Eric Y... est intervenu sont la propriété de Catherine et Bernard X... qui les ont acquis en commun et les ont mis à la disposition du GAEC dont ils sont les seuls associés, d'autre part, que sur demande de Catherine X..., Eric Y... a libellé sa facture à l'ordre du GAEC, bénéficiaire du permis de construire pour l'aménagement de chambres d'hôtes ; qu'il faut en déduire, encore que le premier devis soit établi à l'ordre de Catherine X... seule - les deux autres ne mentionnant pas l'identité du maître de l'ouvrage - que Bernard X... a été nécessairement représenté et que l'existence et la qualité du GAEC étaient connues d'Eric Y... ; que la demande est en conséquence recevable ;
ALORS QUE, est irrecevable, tout prétention émise par une personne dépourvue du droit d'agir ; que la conclusion d'un contrat d'entreprise suppose la rencontre de la volonté du maître d'oeuvre et du maître de l'ouvrage ; que les conventions n'ont d'effet qu'entre les parties contractantes et qu'elles ne nuisent, ni ne profitent au tiers ; qu'en décidant que Monsieur Bernard X... et le GAEC LES LAVANDES avaient la qualité de partie au contrat d'entreprise, pour en déduire qu'ils avaient qualité pour agir à l'encontre de Monsieur Y... en responsabilité contractuelle, aux motifs inopérants tirés de ce que le premier avait la qualité de propriétaire indivis du bâtiment et que le second, titulaire du permis de construire, avait acquitté une facture, sans constater que Monsieur Y... aurait eu la volonté de contracter avec Monsieur Bernard X... ou avec le GAEC LES LAVANDES, la Cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard des articles 1134 et 1165 du Code civil, ensemble au regard de l'article 32 du Code de procédure civile.
DEUXIEME MOYEN DE CASSATION :
IL EST FAIT GRIEF à l'arrêt attaqué d'avoir condamné Monsieur Eric Y... à payer à Madame Catherine X..., à Monsieur Bernard X... et au GAEC LES LAVANDES les sommes de 48.988,50 euros au titre du coût des travaux de réfection, cette somme devant être indexée sur l'indice BT01 du coût de la construction, et 20.000 euros à titre de dommages-intérêts, le tout avec intérêts de droit capitalisés ;
AUX MOTIFS QU' qu'Eric Y... soutient que seuls ont été effectués, payés et réceptionnés les travaux relatifs au premier devis de sorte que, aucun vice ne les affectant, les deux autres devis non acceptés ne peuvent être source de responsabilité ; qu'il a cependant reconnu, tant dans ses premières conclusions qu'au cours de l'expertise, que les trois devis servaient de base à son intervention et que les travaux avaient été simplement suspendus au cours de l'hiver, de sorte qu'en l'absence de réception formelle et de manifestation non équivoque des maîtres de l'ouvrage d'accepter les travaux en l'état, l'inachèvement dans des proportions majeures constaté par l'expert est incompatible avec sa thèse ;
ALORS QUE la déclaration d'une partie ne peut être retenue contre elle comme constituant un aveu que si elle porte sur des points de fait et non sur des points de droit ; qu'un aveu ne peut dès lors porter sur l'analyse des rapports juridiques existant entre les parties, et notamment sur l'existence et la qualification d'un contrat ; qu'en retenant néanmoins, à l'encontre de Monsieur Y..., l'aveu selon lequel les trois « devis » servaient de base à son intervention et constituaient la convention des parties, la Cour d'appel a violé l'article 1354 du Code civil.
TROISIEME MOYEN DE CASSATION :
IL EST FAIT GRIEF à l'arrêt attaqué d'avoir condamné Monsieur Eric Y... à payer à Madame Catherine X..., à Monsieur Bernard X... et au GAEC LES LAVANDES la somme de 48.988,50 euros, révisée en fonction de l'indice BT01 du coût de la construction, avec intérêts capitalisés, au titre du coût des travaux de réfection ;
AUX MOTIFS QUE l'expert a relevé de nombreux inachèvements et malfaçons ayant pour cause essentielle la violation des règles de l'art et l'approximation des investigations préalables à l'établissement des devis ; qu'en l'absence de contestation de détail, la Cour fera siennes ses constatations et conclusions, ainsi que l'évaluation des travaux de réfection et achèvement de 77.038,50 €uros ; que par une exacte interprétation de la portée des devis et des preuves fournies, les premiers juges en ont déduit le prix des tuiles de récupération dont les maître de l'ouvrage ne démontrent aucunement qu'ils n'en ont pas la disposition ; que, la demande en restitution d'un trop perçu ayant par ailleurs été rejetée par des motifs adoptés, le jugement attaqué sera confirmé sur ces points avec indexation du coût des travaux de réfection jusqu'à la date du paiement ;
ALORS QUE seul celui qui a personnellement souffert d'un dommage peut en demander réparation ; qu'en allouant globalement à Madame Catherine X... et à Monsieur Bernard X..., propriétaires indivis de l'immeuble sur lequel les travaux avaient été exécutés, et au GAEC LES LAVANDES, bénéficiaire du permis de construire pour l'aménagement de chambre d'hôtes, une somme au titre du coût des travaux de réfection, sans indiquer lesquels d'entre eux seraient, en réalité, conduits à supporter le coût de ces travaux de réfection, la Cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard de l'article 1147 du Code civil.
QUATRIEME MOYEN DE CASSATION :
IL EST FAIT GRIEF à l'arrêt attaqué d'avoir condamné Monsieur Eric Y... à payer à Madame Catherine X..., à Monsieur Bernard X... et au GAEC LES LAVANDES la somme de 20.000 euros à titre de dommages-intérêts, outre intérêts capitalisés ;
AUX MOTIFS QUE les consorts X... et le GAEC mettent en compte, au titre de leur préjudice personnel, la valeur locative de deux des appartements dont la construction était projetée, des frais de déplacement de leur domicile actuel jusqu'à la propriété concernée, et la perte des revenus des chambres d'hôtes ; qu'une entreprise a certes attesté de ce que ses travaux devaient être achevés en mai 2004, aucune preuve n'étant cependant rapportée des suites réservées à son marché qui n'est pas produit et de la disponibilité des fonds nécessaires à la réalisation de l'opération ; que les premiers juges ont dès lors fait une exacte appréciation des éléments de la cause en limitant les dommages-intérêts à 20.000 €uros ;
1°) ALORS QUE seul un préjudice certain peut donner lieu à réparation ; qu'en allouant néanmoins aux consorts X... et au GAEC LES LAVANDES une indemnité devant compenser une perte des revenus issus de la location des chambres d'hôtes, après avoir pourtant constaté qu'aucune preuve n'était rapportée de ce que les travaux nécessaires auraient été réalisés et qu'il n'était pas démontré que les fonds nécessaires à la réalisation de l'opération étaient réunis, la Cour d'appel, qui a indemnisé un préjudice purement éventuel, a violé l'article 1147 du Code civil ;
2°) ALORS QUE, subsidiairement, seul celui qui a personnellement souffert d'un dommage peut en demander réparation ; qu'en allouant globalement à Madame Catherine X... et à Monsieur Bernard X..., propriétaires indivis de l'immeuble sur lequel les travaux avaient été exécutés, et au GAEC LES LAVANDES, bénéficiaire du permis de construire pour l'aménagement de chambre d'hôtes, une somme au titre de la perte des revenus des chambres d'hôtes, sans indiquer qui, des consorts X... ou du GAEC LES LAVANDES, aurait subi la perte financière alléguée, la Cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard de l'article 1147 du Code civil.