LA COUR DE CASSATION, DEUXIÈME CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :
Sur le moyen unique :
Attendu, selon l'arrêt attaqué (Aix-en-Provence, 18 septembre 2009), que MM. Jean-Paul, Nicolas et Thierry X... (les consorts X...) ayant assigné la société Prosegur Compania de Seguridad (la société) devant le tribunal de commerce de Marseille dans un litige relatif à l'application d'un contrat, ce tribunal a reçu l'exception d'incompétence de la société et renvoyé les parties à mieux se pourvoir ; que les consorts X... ont interjeté appel de cette décision ;
Attendu que la société fait grief à l'arrêt de renvoyer l'affaire devant le tribunal de commerce de Marseille, alors, selon le moyen, qu'en présence d'une option de compétence, le défendeur qui soulève l'exception d'incompétence de la juridiction saisie est recevable à faire une désignation principale suivie d'une désignation subsidiaire de la juridiction qu'il estime compétente ; qu'en l'espèce, la cour d'appel a pu constater que la société Prosegur, société de droit espagnol ayant son siège à Madrid, a signé le 24 juillet 2007 avec les consorts X... une convention de cession d'actions comportant une clause attribuant compétence au tribunal de commerce de Lyon pour tout litige relatif à la conclusion, la validité, l'interprétation et l'exécution de cette convention ; qu'ainsi, conformément à l'article 42, alinéa 1er, du code de procédure civile selon lequel la juridiction compétente est, sauf disposition contraire, celle du lieu où demeure le défendeur, il existait en l'espèce une option de compétence -juridiction espagnole ou tribunal de commerce de Lyon- en vertu de laquelle la société Prosegur était fondée à soutenir que la demande devait être portée, non pas devant le tribunal de commerce de Marseille, mais devant le tribunal de commerce de Lyon ou, subsidiairement, devant les juridictions espagnoles ; qu'en affirmant cependant "qu'en l'absence d'une option légale de compétence, la société Prosegur n'était pas recevable à désigner comme principalement compétente la juridiction consulaire lyonnaise et subsidiairement les juridictions hispaniques", la cour d'appel a violé l'article 75 du code de procédure civile, ensemble l'article 42, alinéa 1er, du même code et l'article 1134 du code civil ;
Mais attendu que l'arrêt énonce exactement que l'article 75 du code de procédure civile impose que le demandeur à l'exception d'incompétence désigne la juridiction devant laquelle il demande que l'affaire soit portée et interdit, hors le cas où il existe une option de compétence, qu'il se dispense de faire un choix en opérant une désignation principale accompagnée d'une désignation subsidiaire ; qu'ayant relevé que la société avait invoqué à titre principal la compétence de la juridiction consulaire lyonnaise et à titre subsidiaire celle des juridictions hispaniques, la cour d'appel a décidé à bon droit que l'exception d'incompétence n'était pas recevable ;
D'où il suit que le moyen ne peut être accueilli ;
PAR CES MOTIFS :
REJETTE le pourvoi ;
Condamne la société Prosegur Compania de Seguridad aux dépens ;
Vu l'article 700 du code de procédure civile, rejette la demande de la société Prosegur Compania de Seguridad ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, deuxième chambre civile, et prononcé par le président en son audience publique du vingt janvier deux mille onze.
MOYEN ANNEXE au présent arrêt :
Moyen produit par Me Le Prado, avocat aux Conseils pour la société Prosegur Compania de Seguridad
Il est fait grief à l'arrêt infirmatif attaqué :
D'AVOIR déclaré irrecevable l'exception d'incompétence opposée par la société PROSEGUR et en conséquence, disant n'y avoir lieu à évocation, d'AVOIR renvoyé l'affaire devant le Tribunal de commerce de Marseille afin qu'il soit jugé au fond ;
AUX MOTIFS QUE, « aux termes de l'article 74 du Code de procédure civile, les exceptions de procédure doivent à peine d'irrecevabilité être soulevées simultanément et avant toute défense au fond ; que devant les juridictions consulaires la règle est celle de l'oralité des débats posée par l'article 871 du Code de procédure civile, les prétentions des parties étant formulées au cours de l'audience et leur recevabilité appréciée au jour des plaidoiries ; que si les parties ont échangé des conclusions développant successivement leurs moyens et prétentions, il n'en demeure pas moins qu'à l'audience la société PROSEGUR a contesté la compétence territoriale du Tribunal de commerce de Marseille en invoquant celle du Tribunal de commerce de Lyon en application de la clause contenue dans la convention de cession et, à défaut, celle des tribunaux espagnols ; que l'exception d'incompétence ainsi déclinée in limine litis satisfaisait aux conditions de l'article 74 du Code de procédure civile ; mais attendu qu'aux termes de l'article 75 du même Code, le demandeur à une exception d'incompétence doit faire connaître, à peine d'irrecevabilité, la seule juridiction devant laquelle il demande que l'affaire soit portée ; que cet article lui interdit, hormis le cas où il existe une option de compétence, de se dispenser de choisir en invoquant une désignation principale suivie d'une désignation subsidiaire ; que la société PROSEGUR a invoqué à titre principal la compétence du Tribunal de commerce de Lyon en application de la clause attributive de compétence contenue dans la convention de cession d'actions, et à titre subsidiaire celle des juridictions espagnoles ; qu'en l'absence d'une option légale de compétence, la société PROSEGUR n'était pas recevable à désigner comme principalement compétente la juridiction consulaire lyonnaise et subsidiairement les juridictions hispaniques ; que les contredisants sont dès lors fondés à soutenir que l'exception d'incompétence n'était pas recevable faute de choix opéré … » (arrêt attaqué p. 4 et 5) ;
ALORS QU'en présence d'une option de compétence, le défendeur qui soulève l'exception d'incompétence de la juridiction saisie est recevable à faire une désignation principale suivie d'une désignation subsidiaire de la juridiction qu'il estime compétente ; qu'en l'espèce, la Cour d'appel a pu constater que la société PROSEGUR, société de droit espagnol ayant son siège à Madrid, a signé le 24 juillet 2007 avec les consorts X... une convention de cession d'actions comportant une clause attribuant compétence au Tribunal de commerce de Lyon pour tout litige relatif à la conclusion, la validité, l'interprétation et l'exécution de cette convention ; qu'ainsi, conformément à l'article 42 al. 1er du Code de procédure civile selon lequel la juridiction compétente est, sauf disposition contraire, celle du lieu où demeure le défendeur, il existait en l'espèce une option de compétence - juridiction espagnole ou Tribunal de commerce de Lyon - en vertu de laquelle la société PROSEGUR était fondée à soutenir que la demande devait être portée, non pas devant le Tribunal de commerce de Marseille, mais devant le Tribunal de commerce de Lyon ou, subsidiairement, devant les juridictions espagnoles ; qu'en affirmant cependant « qu'en l'absence d'une option légale de compétence, la société PROSEGUR n'était pas recevable à désigner comme principalement compétente la juridiction consulaire lyonnaise et subsidiairement les juridictions hispaniques », la Cour d'appel a violé l'article 75 du Code de procédure civile, ensemble l'article 42 alinéa 1er du même Code et l'article 1134 du Code civil.