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18/01/2011 | FRANCE | N°08-19701;08-19702

France | France, Cour de cassation, Chambre sociale, 18 janvier 2011, 08-19701 et suivant


LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l'arrêt suivant :

Vu la connexité, joint les pourvois n° E 08-19.701 et F 08-19.702 ;
Attendu, selon les arrêts attaqués (Versailles, 25 juin 2008), que l'union départementale des syndicats de la confédération générale du travail force ouvrière du Val d'Oise et la fédération des employés et cadres de la CGT-FO ont saisi le juge des référés afin d'obtenir l'interdiction, pour les sociétés Media Saturn France et Boulanger, d'ouvrir le dimanche avec les salariés, sauf autorisation administrative dérogatoire ;
Sur l

e premier moyen, commun aux deux pourvois :
Attendu que les sociétés Media Satur...

LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l'arrêt suivant :

Vu la connexité, joint les pourvois n° E 08-19.701 et F 08-19.702 ;
Attendu, selon les arrêts attaqués (Versailles, 25 juin 2008), que l'union départementale des syndicats de la confédération générale du travail force ouvrière du Val d'Oise et la fédération des employés et cadres de la CGT-FO ont saisi le juge des référés afin d'obtenir l'interdiction, pour les sociétés Media Saturn France et Boulanger, d'ouvrir le dimanche avec les salariés, sauf autorisation administrative dérogatoire ;
Sur le premier moyen, commun aux deux pourvois :
Attendu que les sociétés Media Saturn France et Boulanger font grief aux arrêts d'avoir accueilli ces demandes, alors, selon le moyen :
1°/ qu'aux termes de l'article 17 des statuts de l'union départementale Force ouvrière du Val d'Oise : «la CE (commission executive) représente officiellement l'union. Elle veille à l'application des décisions du congrès et prend toutes les mesures pour assurer la bonne administration de l'union» ; qu'il ne résulte, ni de cet article, ni d'aucune autre disposition desdits statuts, que la commission exécutive a le pouvoir d'intenter une action en justice ; que l'action ne pouvait donc être régulièrement décidée que par le congrès ; qu'ainsi, en déclarant recevable l'action engagée par la commission exécutive à l'encontre des sociétés Boulanger et Media Saturn France, la cour d'appel a violé l'article 117 du code de procédure civile ;
2°/ qu'aux termes de l'article 28 des statuts de la Fédération des employés et cadres CGT Force ouvrière : «la commission administrative a pour rôle de veiller à l'application des décisions du congrès et, le cas échéant, de celles du Conseil national» ; que, selon l'article 27, la commission administrative comprend les membres du Bureau fédéral, le secrétaire désigné par chacune des sections fédérales ou un membre de leur bureau, les membres de la commission de contrôle ; qu'il ne résulte, ni de ces articles, ni d'aucune autre disposition desdits statuts, que la commission administrative, et encore moins le Bureau fédéral qui n'est qu'un de ses composants, ait le pouvoir d'intenter une action en justice ; que l'action ne pouvait donc être régulièrement décidée que par le congrès ou le Conseil national ; qu'ainsi, en déclarant recevable l'action engagée par le Bureau fédéral, la cour d'appel a encore violé l'article 117 du code de procédure civile ;
3°/ que le mandat d'engager une action en justice, qui doit être exprès et spécial, est d'interprétation stricte ; qu'ainsi, en décidant que le mandat d'engager une action "pour parvenir à la fermeture des différentes sociétés qui ouvrent leur magasin le dimanche sans disposer des autorisations" permettait aux organisations syndicales demanderesses de former une demande tendant à ce qu'il soit fait interdiction à la société Boulanger et à la société Media Saturn France "d'employer des salariés le dimanche", la cour d'appel a violé les articles 1989 du code civil et 416 du code de procédure civile ;
Mais attendu, d'abord, que c'est par une interprétation nécessaire de leur statut, que les juges du fond ont retenu que l'action en justice dont ils étaient saisis par l'UD CGT-FO et la fédération des employés et cadres de la CGT-FO avait été régulièrement engagée ;
Attendu, ensuite, que la cour d'appel, qui a constaté que l'assignation contenait des demandes plus réduites que celles contenues dans le mandat donné, a exactement décidé que celui-ci n'avait pas été dépassé et que l'action était recevable ;
D'où il suit que le moyen n'est pas fondé ;
Sur le second moyen, commun aux deux pourvois :
Attendu qu'il n'y a pas lieu de statuer sur ces moyens qui ne seraient pas de nature à permettre l'admission du pourvoi ;
PAR CES MOTIFS :
REJETTE les pourvois ;
Condamne les sociétés Media Saturn France et Boulanger aux dépens ;
Condamne les sociétés Media Saturn France et Boulanger à payer in solidum la somme globale de 2 500 euros à l'union départementale des syndicats de la confédération générale du travail FO du Val-d'Oise et à la fédération des employés et cadres de la CGT FO ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre sociale, et prononcé par le président en son audience publique du dix-huit janvier deux mille onze.

MOYENS ANNEXES au présent arrêt :


Moyens communs produits au pourvoi n° E 08-19.701 par Me Jacoupy, avocat aux Conseils pour les sociétés Media Saturn France et Boulanger
PREMIER MOYEN DE CASSATION :

Le premier reproche à l'arrêt attaqué d'avoir déclaré l'Union Départementale des Syndicats de la Confédération Générale du Travail Force Ouvrière du Val d'Oise et la Fédération des Employés et Cadres de la C.G.T. F.O. recevables en leur action,
AUX MOTIFS PROPRES QUE,
« Considérant que les deux organisations syndicales en cause produisent leurs statuts et les extraits des procès-verbaux de réunions, tant de la commission exécutive s'agissant de l'UNION DEPARTEMENTALE CGT-FO que du bureau fédéral s'agissant de la FEDERATION EMPLOYES ET CADRES CGT-FO, relatifs à l'action intentée, extraits seuls nécessaires à l'examen de la contestation soulevée par la SOCIETE MEDIA SATURN FRANCE qui ne justifie pas d'un intérêt à avoir communication intégrale du procès-verbal de réunions dont l'ordre du jour abordait d'autres points.
Qu'il est établi que l'organe de décision de l'UNION DEPARTEMENTALE CGT-FO 95 a été réuni sur la question d'un « mandat à donner pour faire respecter la règle relative au repos dominical» et au vu des éléments produits, attestant des conditions de déroulement du vote, tels qu'analysés par le premier juge dont il convient d'adopter les motifs, la délibération a été régulière.
Qu'en ce qui concerne le dépassement allégué ou le non respect du mandat par les organisations syndicales, force est de constater que l'assignation contient des demandes plus réduites que celles contenues au mandat donné, sur un ordre du jour à l'énoncé plus précis, dès lors qu 'il est énoncé au mandat une action « pour parvenir à la fermeture de différentes sociétés qui ouvrent leurs magasins le dimanche sans disposer des autorisations », et que l'action telle que précisée au dispositif de l'assignation tend seulement à ce qu'il soit fait « interdiction d'employer des salariés le dimanche » et non pas à ce que la fermeture des établissements employant des salariés le dimanche, soit ordonnée »,
ET AUX MOTIFS, ADOPTES DES PREMIERS JUGES, QUE
«Attendu que l'examen des griefs d'irrecevabilité de l'action à l'égard de chacune des demanderesses, tels que formulés par la SOCIETE MEDIA SATURN FRANCE doit conduire à leur rejet.
Attendu qu'en effet, de première part, il doit être constaté qu 'aux termes des statuts de l'UD CGT-FO 95 sa commission exécutive est l'organe de représentation de l'Union, en charge de l'application des décisions de son congrès et de sa bonne administration, observation étant faite que le congrès est l'instance convoquée par la commission exécutive pour réunir les membres de l'Union en vue d'entendre ses rapports sur la période antérieure depuis le précédent congrès et définir les orientations de son action pour la période à venir, dans le cadre de son but statutaire (article 2, a, b, c, d, e) , qu 'ainsi la présente action, qui a pour objet de réclamer l'application d'une disposition générale et d'ordre public du droit du travail des salariés en vigueur à ce jour, dans le contexte d'un débat social actuel sur la nécessité et/ou l'opportunité de la perpétuation d'une telle législation ne saurait être considérée comme étrangère au but de cette Union de syndicats, ni donc être soumise à l'expression d'une décision formelle préalable d'un congrès.
Attendu que, de deuxième part, la production d'un procès-verbal du 23 avri12007 en forme d'extrait de cette commission exécutive est suffisant à la vérification de la régularité et de la validité de cette réunion de cette date à objet notamment de mandater son secrétaire général en vue de la présente instance, dès lors que dans ce document est explicitement mentionné le nombre des présents, absents et excusés, avec au surplus leur identité, correspondant à la totalité statutaire des membres (article 14), sans qu'une production intégrale du procès-verbal eût été de nature à renseigner davantage de ce chef.
Attendu que, de troisième part, l'appréciation de l'exacte adéquation du mandat ainsi donné avec l'action ici engagée doit se faire au regard de tout l'extrait communiqué, sans se limiter à un seul de ses divers paragraphes, pour en retenir que le point d'ordre du jour s ÿ rapportant est précisément « mandat à donner pour faire respecter sur le département la règle relative au repos dominical », de sorte qu'une demande tendant à voir faire interdiction à une société d'employer des salariés le dimanche entre bien dans le but énoncé de parvenir à la fermeture des magasins le dimanche dans la perspective de faire respecter le repos dominical.
Attendu que les mêmes motifs de rejet doivent s'appliquer mutatis mutandis en ce qui concerne la Fédération Employés et Cadres C.G.T. Force Ouvrière.
Qu'en effet il résulte bien de la combinaison des articles 23 et 28 des statuts de la Fédération, avec les applications des articles 29 (dernier alinéa), 31 (dernier alinéa) ou 36 (3 derniers alinéas) que le bureau fédéral est son organe exécutif au quotidien, en observant de première part, de façon particulière, pour ce qui est de l'extrait de délibération produit qu 'il se rapporte manifestement à la réunion convoquée pour le 6 septembre 2007, dont au demeurant la feuille de présence est aussi communiquée, et de deuxième part que la présente action, pour être en exacte conformité avec les buts de la Fédération, revêt naturellement le caractère d'un acte d'administration.
Que, par ailleurs, l'affirmation par la SOCIETE MEDIA SATURN FRANCE de ne pouvoir vérifier les conditions de quorum du vote émis lors du Bureau Fédéral du 6 septembre 2007 n'est pas pertinente, le procès-verbal mentionnant à suffisance le nombre des votes pour et des votes contre, ainsi que des abstentions.
Qu'enfin le mandat donné de parvenir à la fermeture des magasins de la défenderesse le dimanche induit bien la demande de faire interdiction d'y employer des salariés le dimanche, la SOCIETE MEDIA SATURN FRANCE ne prétendant pas, et ne démontrant pas en tout cas, avoir jamais ouvert ses magasins le dimanche autrement qu 'en y employant des salariés »,
ALORS, D'UNE PART QUE
Aux termes de l'article 17 des statuts de l'Union Départementale Force Ouvrière du Val d'Oise : « La CE (Commission Exécutive) représente officiellement l'Union. Elle veille à l'application des décisions des congrès et prend toutes les mesures pour assurer la bonne administration de l'Union » ; qu'il ne résulte, ni de cet article, ni d'aucune autre disposition desdits statuts, que la Commission Exécutive a le pouvoir d'intenter une action en justice ; que l'action ne pouvait donc être régulièrement décidée que par le congrès ; qu'ainsi, en déclarant recevable l'action engagée par la Commission Exécutive à l'encontre de la SOCIETE MEDIA SATURN FRANCE, la Cour d'Appel a violé l'article 117 du Code de Procédure Civile,
ALORS, D'AUTRE PART, QUE
Aux termes de l'article 28 des statuts de la Fédération des Employés et Cadres CGT Force Ouvrière : « La commission administrative a pour rôle de veiller à l'application des décisions du congrès et, le cas échéant, de celles du Conseil National» ; que, selon l'article 27, la commission administrative comprend les membres du Bureau Fédéral, le secrétaire désigné par chacune des sections fédérales ou un membre de leur bureau, les membres de la commission de contrôle ; qu'il ne résulte, ni de ces articles, ni d'aucune autre disposition desdits statuts, que la commission administrative, et encore moins le Bureau Fédéral qui n'est qu'un de ses composants, ait le pouvoir d'intenter une action en justice ; que l'action ne pouvait donc être régulièrement décidée que par le congrès ou le Conseil National ; qu'ainsi, en déclarant recevable l'action engagée par le Bureau Fédéral, la Cour d'Appel a encore violé l'article 117 du Code de Procédure Civile,
ALORS, ENFIN, QUE

Le mandat d'engager une action en justice, qui doit être exprès et spécial, est d'interprétation stricte ; qu'ainsi, en décidant que le mandat d'engager une action «pour parvenir à la fermeture des différentes sociétés qui ouvrent leur magasin le dimanche sans disposer des autorisations » permettait aux organisations syndicales demanderesses de former une demande tendant à ce qu'il soit fait interdiction à la SOCIETE MEDIA SATURN FRANCE « d'employer des salariés le dimanche », la Cour d'Appel a violé les articles 1989 du Code Civil et 416 du Code de Procédure Civile.

DEUXIEME MOYEN DE CASSATION :

Le moyen reproche à l'arrêt attaqué d'avoir fait interdiction, sous astreinte, à la SOCIETE MEDIA SATURN FRANCE d'employer des salariés le dimanche dans son magasin d'ERAGNY (95) sans avoir obtenu au préalable à cet effet une dérogation administrative effective,
AUX MOTIFS QUE
« Considérant que la SOCIETE MEDIA SATURN FRANCE soutient qu 'elle bénéficie depuis le 4 janvier 2008 de la dérogation introduite par la loi du 3 janvier 2008, en tant qu'établissement commercialisant, au détail, des meubles dès lors qu'elle vend également des meubles de cuisine et de télévision.
Considérant que l'article 11 de la loi n° 2008-3 du 3 janvier 2008 pour le développement de la concurrence au service des consommateurs a modifié les dispositions de l'article L 221-9 du Code du Travail en insérant après le 14° un 15° ainsi rédigé: « 15° Etablissements de commerce de détail d'ameublement ».
Considérant que la règle édictée à l'article L 221-5 du Code du Travail a été reprise par l'article L 3132-3 résultant de la nouvelle codification du Code du Travail qui stipule « le repos hebdomadaire est donné le dimanche ».
Que l'article L 3132-12 du Code du Travail introduit une dérogation de plein droit à la règle du repos dominical en attribuant le repos hebdomadaire par roulement selon décret en Conseil d'Etat dans certains établissements.
Que l'ameublement (commerce de détail) figure au tableau de l'article R 3132-12 issu du décret n° 2008-244 du 7 mars 2008.
Considérant que, comme l'a justement relevé le premier juge, les dispositions dérogatoires sont d'interprétation et d'application strictes.
Considérant qu'il est de jurisprudence constante que les dérogations légales au repos dominical sont appréciées au regard de l'activité principale de l'entreprise, et non au regard du produit de ces activités ou des activités connexes et accessoires, et que la réglementation en matière d'urbanisme commercial ne peut avoir d'incidence sur les obligations légales incombant à l'employeur à l'égard de ses salariés.
Que, dès lors, la définition communément admise telle que figurant dans le dictionnaire « le ROBERT » des termes « ameublement » et « meuble », voire encore dans « le Littré » ou la qualification retenue pour le calcul d'une taxe par l'arrêt non publié rendu le 5 juin 1998 par la chambre sociale de la Cour de Cassation ne permettent pas à la SOCIETE MEDIA SATURN FRANCE d'établir l'existence d'une dérogation de plein droit, sous le prétexte que les appareils électro-ménagers ou de radio télévision seraient des meubles meublants au sens de l'article 534 du Code Civil ;
Considérant que la SOCIETE MEDIA SATURN FRANCE, à défaut d'apporter l'évidente démonstration de ce qu'elle entre dans la catégorie des établissements de commerce de détail d'ameublement appartenant à la liste limitative de l'article R 3132-5 du Code du Travail, alors que la classification INSEE et la convention collective appliquée le démentent, ne peut exciper du bénéfice de plein droit de la dérogation.
Qu'il y a lieu de constater que, faute d'avoir obtenu une autorisation préfectorale lui permettant d'ouvrir le dimanche, l'emploi de salariés le jour de repos hebdomadaire caractérise une violation des dispositions de l'article L 3132-3 du Code du Travail et, comme telle, constitue un trouble manifestement illicite auquel il y a lieu de mettre fin »,
ALORS, D'UNE PART, QUE
La charge de la preuve de l'illicéité manifeste du trouble incombe au demandeur ; qu'ainsi, en se fondant, pour faire droit à la demande des organisations syndicales, sur ce que la SOCIETE MEDIA SATURN FRANCE n'apportait pas « l'évidente démonstration de ce qu'elle entre dans la catégorie des établissements de commerce de détail d'ameublement appartenant à la liste limitative de l'article R 3132-5 du Code du Travail », la Cour d'Appel a renversé le fardeau de la preuve et violé les articles 1315 du Code Civil et 809 du Code de Procédure Civile.
ALORS, D'AUTRE PART, QUE
En énonçant que la SOCIETE MEDIA SATURN FRANCE n'apportait pas « l'évidente démonstration » de ce qu'elle entrait dans la catégorie des établissements de commerce de détail d'ameublement appartenant à la liste limitative de l'article R 3132-5 du Code du Travail, la Cour d'Appel constatait par là-même que le point de savoir si ladite société pouvait ou non se prévaloir de la dérogation de plein droit à la règle du repos dominical posait une difficulté sérieuse dont la solution restait incertaine ; qu'il en résultait que l'emploi de salariés le jour de repos hebdomadaire ne constituait pas un trouble manifestement illicite ; qu'en décidant le contraire, la Cour d'Appel a violé l'article 809 du Code de Procédure Civile.

Moyens communs produits au pourvoi n° F 08-19.702 par Me Jacoupy, avocat aux Conseils pour les sociétés Media Saturn France et Boulanger

PREMIER MOYEN DE CASSATION :

Le premier reproche à l'arrêt attaqué d'avoir déclaré l'Union Départementale des Syndicats de la Confédération Générale du Travail Force Ouvrière du Val d'Oise et la Fédération des Employés et Cadres de la C.G.T. F.O. recevables en leur action,
AUX MOTIFS PROPRES QUE,
«Considérant que les deux organisations syndicales en cause produisent leurs statuts et les extraits des procès-verbaux de réunion, tant de la commission exécutive s'agissant de l'UNION DEPARTEMENTALE CGT-FO 95 que du bureau fédéral s'agissant de la FEDERATION EMPLOYES ET CADRES CGT-FO, relatifs à l'action intentée, extraits seuls nécessaires à l'examen de la contestation soulevée par la SOCIETE BOULANGER qui ne justifie pas d'un intérêt à avoir communication intégrale du procès-verbal de réunions dont l'ordre du jour abordait d'autres points.
Qu'il est établi que l'organe de décision de l'UNION DEPARTEMENTALE CGT-FO 95 a été réuni sur la question d'un « mandat à donner pour faire respecter la règle relative au repos dominical» et au vu des éléments produits, attestant des conditions de déroulement du vote, tels qu'analysés par le premier juge dont il convient d'adopter les motifs, la délibération a été régulière.
Qu'en ce qui concerne le dépassement allégué ou le non respect du mandat par les organisations syndicales, force est de constater que l'assignation contient des demandes plus réduites que celles contenues au mandat donné, sur un ordre du jour à l'énoncé plus précis, dès lors qu'il est énoncé au mandat une action «pour parvenir à la fermeture de différentes sociétés qui ouvrent leurs magasins le dimanche sans disposer des autorisations », et que l'action telle que précisée au dispositif de l'assignation tend seulement à ce qu'il soit fait a interdiction d'employer des salariés le dimanche» et non pas à ce que la fermeture des établissements employant des salariés le dimanche, soit ordonnée »,
ET AUX MOTIFS, ADOPTES DES PREMIERS JUGES, QUE
«Attendu que l'examen des griefs d'irrecevabilité de l'action à l'égard de chacune des demanderesses, tels que formulés par la SOCIETE BOULANGER doit conduire à leur rejet.
Attendu qu 'en effet, de première part, il doit être constaté qu'aux termes des statuts de l'UD CGT-FO 95 sa commission exécutive est l'organe de représentation de l'Union, en charge de l'application des décisions de son congrès et de sa bonne administration, observation étant faite que le congrès est l'instance convoquée par la commission exécutive pour réunir les membres de l'Union en vue d'entendre ses rapports sur la période antérieure depuis le précédent congrès et définir les orientations de son action pour la période à venir, dans le cadre de son but statutaire (article 2, a, b, c, d, e) ; qu 'ainsi la présente action, qui a pour objet de réclamer l'application d'une disposition générale et d'ordre public du droit du travail des salariés en vigueur à ce jour, dans le contexte d'un débat social actuel sur la nécessité et/ou l'opportunité de la perpétuation d'une telle législation ne saurait être considérée comme étrangère au but de cette Union de syndicats, ni donc être soumise à l'expression d'une décision formelle préalable d'un congrès.
Attendu que, de deuxième part, la production d'un procès-verbal du 23 avril 2007 en forme d'extrait de cette commission exécutive est suffisant à la vérification de la régularité et de la validité de cette réunion de cette date à objet notamment de mandater son secrétaire général en vue de la présente instance, dès lors que dans ce document est explicitement mentionné le nombre des présents, absents et excusés, avec au surplus leur identité, correspondant à la totalité statutaire des membres (article 14), sans qu'une production intégrale du procès-verbal eût été de nature à renseigner davantage de ce chef.
Attendu que, de troisième part, l'appréciation de l'exacte adéquation du mandat ainsi donné avec l'action ici engagée doit se faire au regard de tout l'extrait communiqué, sans se limiter à un seul de ses divers paragraphes, pour en retenir que le point d'ordre du jour s'y rapportant est précisément « mandat à donner pour faire respecter sur le département la règle relative au repos dominical», de sorte qu'une demande tendant à voir faire interdiction à une société d'employer des salariés le dimanche entre bien dans le but énoncé de parvenir à la fermeture des magasins le dimanche dans la perspective de faire respecter le repos dominical.
Attendu que les mêmes motifs de rejet doivent s'appliquer mutatis mutandis en ce qui concerne la Fédération Employés et Cadres C.G.T. Force Ouvrière.
Qu'en effet il résulte bien de la combinaison des articles 23 et 28 des statuts de la Fédération, avec les applications des articles 29 (dernier alinéa), 31 (dernier alinéa) ou 36 (3 derniers alinéas) que le bureau fédéral est son organe exécutif au quotidien, en observant de première part, de façon particulière, pour ce qui est de l'extrait de délibération produit qu'il se rapporte manifestement à la réunion convoquée pour le 6 septembre 2007, dont au demeurant la feuille de présence est aussi communiquée, et de deuxième part que la présente action, pour être en exacte conformité avec les buts de la Fédération, revêt naturellement le caractère d'un acte d'administration.
Que, par ailleurs, l'affirmation par la SOCIETE BOULANGER de ne pouvoir vérifier les conditions de quorum du vote émis lors du Bureau Fédéral du 6 septembre 2007 n'est pas pertinente, le procès-verbal mentionnant à suffisance le nombre des votes pour et des votes contre, ainsi que des abstentions.
Qu 'enfin le mandat donné de parvenir à la fermeture des magasins de la défenderesse le dimanche induit bien la demande de faire interdiction d'y employer des salariés le dimanche, la SOCIETE BOULANGER ne prétendant pas, et ne démontrant pas en tout cas, avoir jamais ouvert ses magasins le dimanche autrement qu 'en y employant des salariés »,
ALORS, D'UNE PART QUE
Aux termes de l'article 17 des statuts de l'Union Départementale Force Ouvrière du Val d'Oise : « La CE (Commission Exécutive) représente officiellement l'Union. Elle veille à l'application des décisions des congrès et prend toutes les mesures pour assurer la bonne administration de l'Union » ; qu'il ne résulte, ni de cet article, ni d'aucune autre disposition desdits statuts, que la Commission Exécutive a le pouvoir d'intenter une action en justice ; que l'action ne pouvait donc être régulièrement décidée que par le congrès ; qu'ainsi, en déclarant recevable l'action engagée par la Commission Exécutive à l'encontre de la SOCIETE BOULANGER, la Cour d'Appel a violé l'article 117 du Code de Procédure Civile,
ALORS, D'AUTRE PART, QUE
Aux termes de l'article 28 des statuts de la Fédération des Employés et Cadres CGT Force Ouvrière : « La commission administrative a pour rôle de veiller à l'application des décisions du congrès et, le cas échéant, de celles du Conseil National» ; que, selon l'article 27, la commission administrative comprend les membres du Bureau Fédéral, le secrétaire désigné par chacune des sections fédérales ou un membre de leur bureau, les membres de la commission de contrôle ; qu'il ne résulte, ni de ces articles, ni d'aucune autre disposition desdits statuts, que la commission administrative, et encore moins le Bureau Fédéral qui n'est qu'un de ses composants, ait le pouvoir d'intenter une action en justice ; que l'action ne pouvait donc être régulièrement décidée que par le congrès ou le Conseil National ; qu'ainsi, en déclarant recevable l'action engagée par le Bureau Fédéral, la Cour d'Appel a encore violé l'article 117 du Code de Procédure Civile,
ALORS, ENFIN, QUE
Le mandat d'engager une action en justice, qui doit être exprès et spécial, est d'interprétation stricte ; qu'ainsi, en décidant que le mandat d'engager une action « pour parvenir à la fermeture des différentes sociétés qui ouvrent leur magasin le dimanche sans disposer des autorisations» permettait aux organisations syndicales demanderesses de former une demande tendant à ce qu'il soit fait interdiction à la SOCIETE BOULANGER «d'employer des salariés le dimanche », la Cour d'Appel a violé les articles 1989 du Code Civil et 416 du Code de Procédure Civile.
DEUXIEME MOYEN DE CASSATION :

Le moyen reproche à l'arrêt attaqué d'avoir fait interdiction, sous astreinte, à la SOCIETE BOULANGER d'employer des salariés le dimanche dans ses magasins d'Osny, de Montigny Les Corneilles et de Groslay sans avoir obtenu au préalable à cet effet une dérogation administrative effective,
AUX MOTIFS QUE
« Considérant que la SOCIETE BOULANGER soutient qu 'elle bénéficie depuis le 4 janvier 2008 de la dérogation introduite par la loi du 3 janvier 2008, en tant qu'établissement commercialisant, au détail, des meubles dès lors qu'elle vend également des meubles de cuisine et de télévision.
Considérant que l'article 11 de la loi n° 2008-3 du 3 janvier 2008 pour le développement de la concurrence au service des consommateurs a modifié les dispositions de l'article L 221-9 du Code du Travail en insérant après le 14° un 15° ainsi rédigé : « 15° Etablissements de commerce de détail d'ameublement ».
Considérant que la règle édictée à l'article L 221-5 du Code du Travail a été reprise par l'article L 3132-3 résultant de la nouvelle codification du Code du Travail qui stipule : « le repos hebdomadaire est donné le dimanche ».
Que l'article L 3132-12 du Code du Travail introduit une dérogation de plein droit à la règle du repos dominical en attribuant le repos hebdomadaire par roulement selon décret en Conseil d 'Etat dans certains établissements.
Que l'ameublement (commerce de détail) figure au tableau de l'article R 3132-12 issu du décret n° 2008-244 du 7 mars 2008.
Considérant que, comme l'a justement relevé le premier juge, les dispositions dérogatoires sont d'interprétation et d'application strictes.
Considérant qu 'il est de jurisprudence constante que les dérogations légales au repos dominical sont appréciées au regard de l'activité principale de l'entreprise, et non pas au regard du produit de ces activités ou des activités connexes et accessoires, et que la réglementation en matière d'urbanisme n'a aucune incidence sur les obligations légales incombant à l'employeur.
Que, dès lors, la définition communément admise telle que figurant dans le dictionnaire « le ROBERT» des termes « ameublement » et « meuble », voire encore dans « le Littré » ou la qualification retenue pour le calcul d'une taxe par l'arrêt non publié rendu le 5 juin 1998 par la chambre sociale de la Cour de Cassation ne permettent pas à la SOCIETE BOULANGER d'établir l'existence d'une dérogation de plein droit, sous le prétexte que les appareils électro-ménagers ou de radio télévision seraient des meubles meublants au sens de l'article 534 du Code Civil ;
Considérant que la SOCIETE BOULANGER, à défaut d'apporter l'évidente démonstration de ce qu'elle entre dans la catégorie des établissements de commerce de détail d'ameublements appartenant à la liste limitative de l'article R 3132-5 du Code du Travail, alors que la classification INSEE et la convention collective appliquée le démentent, ne peut exciper du bénéfice de plein droit de la dérogation.
Qu'il y a lieu de constater que, faute d'avoir obtenu une autorisation préfectorale lui permettant d'ouvrir le dimanche, l'emploi de salariés le jour de repos hebdomadaire caractérise une violation des dispositions de l'article L 3132-3 du Code du Travail et, comme telle, constitue un trouble manifestement illicite auquel il y a lieu de mettre fin »,
ALORS, D'UNE PART, QUE
La charge de la preuve de l'illicéité manifeste du trouble incombe au demandeur ; qu'ainsi, en se fondant, pour faire droit à la demande des organisations syndicales, sur ce que la SOCIETE BOULANGER n'apportait pas « l'évidente démonstration de ce qu'elle entre dans la catégorie des établissements de commerce de détail d'ameublement appartenant à la liste limitative de l'article R 3132-5 du Code du Travail», la Cour d'Appel a renversé le fardeau de la preuve et violé les articles 1315 du Code Civil et 809 du Code de Procédure Civile.
ALORS, D'AUTRE PART, QUE
En énonçant que la SOCIETE BOULANGER n'apportait pas « l'évidente démonstration » de ce qu'elle entrait dans la catégorie des établissements de commerce de détail d'ameublement appartenant à la liste limitative de l'article R 3132-5 du Code du Travail, la Cour d'Appel constatait par là-même que le point de savoir si ladite société pouvait ou non se prévaloir de la dérogation de plein droit à la règle du repos dominical posait une difficulté sérieuse dont la solution restait incertaine ; qu'il en résultait que l'emploi de salariés le jour de repos hebdomadaire ne constituait pas un trouble manifestement illicite ; qu'en décidant le contraire, la Cour d'Appel a violé l'article 809 du Code de Procédure Civile.


Synthèse
Formation : Chambre sociale
Numéro d'arrêt : 08-19701;08-19702
Date de la décision : 18/01/2011
Sens de l'arrêt : Rejet
Type d'affaire : Sociale

Références :

Décision attaquée : Cour d'appel de Versailles, 25 juin 2008


Publications
Proposition de citation : Cass. Soc., 18 jan. 2011, pourvoi n°08-19701;08-19702


Composition du Tribunal
Président : Mme Mazars (conseiller doyen faisant fonction de président)
Avocat(s) : Me Jacoupy, SCP Rocheteau et Uzan-Sarano

Origine de la décision
Date de l'import : 15/09/2022
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CCASS:2011:08.19701
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