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06/01/2011 | FRANCE | N°09-66532

France | France, Cour de cassation, Chambre sociale, 06 janvier 2011, 09-66532


LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l'arrêt suivant :

Sur le moyen unique :
Attendu, selon l'arrêt attaqué (Nancy, 18 mars 2009), que M. X..., engagé le 31 mai 1999 par l'Association départementale des amis et parents d'enfants inadaptés des Vosges (ADAPEI) en qualité de cuisinier, a été licencié pour faute grave le 23 août 2005 ;
Attendu que M. X... fait grief à l'arrêt de juger son licenciement fondé sur une faute grave, alors, selon le moyen :
1°/ que la lettre notifiant un licenciement pour motif disciplinaire doit être envoyée dans le délai d'

un mois à compter de la date de l'entretien préalable ; qu'à défaut, le licencie...

LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l'arrêt suivant :

Sur le moyen unique :
Attendu, selon l'arrêt attaqué (Nancy, 18 mars 2009), que M. X..., engagé le 31 mai 1999 par l'Association départementale des amis et parents d'enfants inadaptés des Vosges (ADAPEI) en qualité de cuisinier, a été licencié pour faute grave le 23 août 2005 ;
Attendu que M. X... fait grief à l'arrêt de juger son licenciement fondé sur une faute grave, alors, selon le moyen :
1°/ que la lettre notifiant un licenciement pour motif disciplinaire doit être envoyée dans le délai d'un mois à compter de la date de l'entretien préalable ; qu'à défaut, le licenciement est dépourvu de cause réelle et sérieuse ; qu'en l'espèce, la lettre prononçant le licenciement disciplinaire de M. X..., si elle est datée du 23 août 2005, n'a été postée que le 29 août 2005, soit plus d'un mois après le 27 juillet 2005, date de l'entretien préalable ; qu'en considérant néanmoins que le licenciement de M. X... pour faute grave était fondé, la cour d'appel a violé les articles L. 1232-6 et L. 1332-2 du code du travail ;
2°/ que la faute grave est caractérisée par un comportement rendant impossible le maintien du salarié dans l'entreprise pendant la durée du préavis ; qu'en se bornant à retenir, pour dire le licenciement de M. Michel X... fondé sur une faute grave, que les griefs tirés de l'absence de conservation de plats témoins depuis le 6 juillet et la présence de viandes non emballées dans la chambre froide le 13 juillet 2005 étaient établis, sans rechercher, ainsi qu'elle y était pourtant invitée (conclusions p. 5), si ces faits uniques n'étaient pas exclusivement dus à la surcharge de travail temporaire résultant du départ en congé du cuisinier qui avait eu lieu, selon ses propres constatations, au plus tard le 4 juillet 2005, et dont M. Michel X... avait vainement demandé le remplacement à son employeur, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard de l'article L. 122-6, devenu l'article L. 1234-1 du code du travail ;
3°/ que la faute grave est caractérisée par un comportement rendant impossible tout maintien du salarié dans l'entreprise pendant la durée du préavis ; qu'en conséquence, ne saurait constituer une faute grave le comportement que l'employeur a précédemment toléré de la part du salarié sans le sanctionner ; qu'en l'espèce, en constatant que l'insubordination et l'indiscipline imputées à M. X... par l'employeur, duraient depuis déjà plusieurs mois au moment où elles avaient été sanctionnées, tout en estimant que ces faits pouvaient justifier le licenciement pour faute grave, quand il ressortait de ses propres constatations que l'employeur avait toléré les faits en cause durant plusieurs mois sans les sanctionner, la cour d'appel a violé l'article L. 122-6, devenu l'article L. 1234-1 du code du travail ;
4°/ que la faute grave est caractérisée par un comportement rendant impossible tout maintien du salarié dans l'entreprise pendant la durée du préavis ; qu'en conséquence, ne saurait constituer une faute grave le comportement que l'employeur ne sanctionne pas dans un délai restreint à compter de la connaissance qu'il en a eu ; qu'en l'espèce, en constatant que l'insubordination et l'indiscipline imputées à M. X... par l'employeur durait depuis déjà plusieurs mois au moment où elles avaient été sanctionnées, tout en estimant que ces faits pouvaient justifier le licenciement pour faute grave, quand il ressortait de ses propres constatations que l'employeur n'avait pas sanctionné les faits en cause dans un délai retreint à compter de leur connaissance, la cour d'appel a derechef violé l'article L. 122-6, devenu l'article L. 1234-1 du code du travail ;
Mais attendu, d'abord, que ne s'étant pas prononcée sur la date de la rupture, la cour d'appel n'a pas constaté que la lettre de licenciement avait été envoyée le 29 août 2005 ;
Et attendu ensuite qu'ayant constaté d'une part que les griefs relatifs à l'absence de conservation de plats témoins et à la présence de viandes non emballées dans la chambre froide étaient établis et imputables au salarié qui avait ainsi méconnu des exigences de sécurité sanitaire, et d'autre part que ce dernier avait, au cours des deux mois précédant la lettre de convocation à l'entretien préalable, fait preuve d'insubordination et d'indiscipline, la cour d'appel a pu en déduire que ces faits rendaient impossible son maintien dans l'entreprise et qu'ils constituaient une faute grave ;
Que le moyen, irrecevable comme nouveau et mélangé de fait dans ses deux dernières branches, n'est pas fondé pour le surplus ;
PAR CES MOTIFS :
REJETTE le pourvoi ;
Condamne M. X... aux dépens ;
Vu l'article 700 du code de procédure civile, rejette les demandes ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre sociale, et prononcé par le président en son audience publique du six janvier deux mille onze.

MOYEN ANNEXE au présent arrêt :


Moyen produit par la SCP Rocheteau et Uzan-Sarano, avocat aux Conseils pour M. X....
Il est fait grief à l'arrêt infirmatif attaqué D'AVOIR dit que le licenciement de Monsieur Michel X... pour faute grave était fondé, et d'AVOIR débouté celui-ci de toutes ses demandes afférentes à son licenciement ;
AUX MOTIFS QUE « la réglementation impose de conserver pendant six jours des échantillons de plats servis ; lors du constat effectué le 13 juillet 2005, l'huissier de justice mandaté par l'Adapei des Vosges a constaté que les derniers plats témoins conservés en chambre froide dataient du 5 juillet 2005, ils n'étaient donc plus réalisés depuis une semaine ; Monsieur Michel X... fait valoir qu'il n'était plus cuisinier, mais moniteur d'atelier, et que le cuisinier était en congé depuis le 4 juillet (depuis le 2 juillet selon l'employeur) ; toutefois, Monsieur Michel X... ne conteste pas que « l'atelier » dont il avait la charge était la cuisine du CAT ; or, selon l'annexe 10 de la convention collective applicable, le moniteur d'atelier de 2ème classe est « responsable de l'encadrement des travailleurs handicapées. Il participe aux actions de soutien des personnes handicapées. Il est responsable de la production à réaliser, de ses délais et de son contrôle. » ; il lui appartenait donc, en tant que responsable de la production et de son contrôle, de veiller au respect de la réglementation et notamment à la réalisation et à la conservation des plats témoins ; d'ailleurs, postérieurement au départ en vacances du cuisinier, Monsieur Michel X... a réalisé ou fait réaliser des plats témoins puisque le dernier plat témoin datait du 5 juillet, alors que le cuisinier était parti en vacances depuis le 2 ou le 4 juillet ; par conséquent, ce grief est constitué et sa gravité est avérée car l'obligation de réaliser et conserver des plats témoins répond à une exigence de sécurité sanitaire » (…) ; « Sur la présence de viandes non emballées dans la chambre froide : l'huissier de justice a constaté, dans la chambre froide, que du porc salé pendait, dans un état défraîchi, et que deux morceaux de viande fraîche, non emballés, étaient également suspendus ; suivant les normes sanitaires applicables, la viande doit être conservée sous film plastique ou dans un bac avec couvercle et elle doit être étiquetée ; aucune de ces règles n'était respectée ; Monsieur Michel X... réplique qu'il avait laissé la viande à l'air libre afin de la ventiler car il avait prévu de l'utiliser pour faire de la goulache ; outre que cette explication de vaut pas pour le porc salé, elle est contradictoire avec les explications que Monsieur Michel X... donner par ailleurs, à savoir que la fermeture du restaurant était prévue pour cause de vacances le 12 juillet (vieille du contrôle) ; il ressort en fait, au vu des documents produits, que la cuisine a fonctionné encore le 13 juillet 2005 puisque 68 repas de midi ont été préparés ce jour là ; ensuite, plus aucun repas n'a été préparé jusqu'au 22 août 2005 ; le constat d'huissier ayant été réalisé le 13 juillet 2005 à 12h50, les viandes suspendues ne pouvaient être destinées à cuisiner une goulache le jour même (les repas du jour étaient déjà préparés et servis), ni le lendemain car l'activité de la cuisine était suspendue pour une durée de plus d'un mois ; la négligence de Monsieur Michel X... dans la conservation des viandes est ainsi établie ; sur l'insubordination et l'indiscipline du salarié : Monsieur Yannick Y..., moniteur d'atelier dans le même CAT, atteste avoir personnellement constaté que « depuis de nombreux mois, Monsieur Michel X... ; / - refus obstinément d'appliquer les consignes de la direction, / - manque de respect envers sa hiérarchie, / - harcelle moralement Monsieur Z... (directeur du Cat) par la recherche perpétuelle de conflits » ; cette attestation est datée du 16 juillet 2005 ; par conséquence, lors son auteur précise que ses constatations sont faites « depuis de nombreux mois », cela signifie clairement que le comportement décrit fut celui de Monsieur Michel X... au cours, au minimum, des deux derniers mois ; ces constatations sont confortées par celles de Madame Fabienne A..., également monitrice d'atelier dans ce Cat, qui atteste le 5 août 2005 que Monsieur Michel X... se montrait agressif lorsque des explications lui étaient demandées sur les écarts de caisse du restaurant ; « enfin l'Adapei des Vosges produits aux débats un courrier que le directeur de Cat, Monsieur Z... a adressé à sa direction générale le 23 mars 2005 pour signaler que « lors de réunions du personnel, Monsieur Michel X... n'hésite pas à m'agresser verbalement, cherchant à me déstabiliser et à me discréditer auprès de l'ensemble du personnel » ; ce grief apparaît donc fondé ; sur l'opposition à ses collègues de travail : Monsieur Yannick Y... atteste que Monsieur Michel X... faisait « preuve d'agressivité envers certains de ses collègues » ; Madame Fabienne A... ajoute qu'il accusait les moniteurs de ne pas faire leur travail correctement et était capable « d'agression verbal très soutenue lors de la commande des chocolats » ; à cet égard, Madame Aline B..., une autre monitrice d'atelier du Cat, préciser qu'il « s'emportait très facilement lorsqu'on parlait de ses chocolats » ; il est donc avéré que Monsieur Michel X... entretenait des relations conflictuelles avec ses collègues de travail ; certes, il produit une pétition de vingt-quatre personnes le soutenant, mais rien n'indique que ces personnes étaient des salariées du Cat ; ce grief est constitué ; si certains griefs retenus par l'Adapei des Vosges pour motiver le licenciement pour faute grave ne sont pas constituées, plusieurs des griefs allégués s'avèrent réels et leur gravité (notamment pour les négligences commises en matière de sécurité sanitaire) est suffisante pour justifier sa décision » (arrêt p.3 dernier alinéa, p.4, alinéas 1 à 4 et 9 et suivants, p.5, alinéas 1 à 4 et 10 et suivants, p.6, alinéas 1 à 7, et p.7, alinéa5 ) ;
1) ALORS QUE la lettre notifiant un licenciement pour motif disciplinaire doit être envoyée dans le délai d'un mois à compter de la date de l'entretien préalable ; qu'à défaut, le licenciement est dépourvu de cause réelle et sérieuse ; qu'en l'espèce, la lettre prononçant le licenciement disciplinaire de M. X..., si elle est datée du 23 août 2005, n'a été postée que le 29 août 2005, soit plus d'un mois après le 27 juillet 2005, date de l'entretien préalable ; qu'en considérant néanmoins que le licenciement de M. X... pour faute grave était fondé, la cour d'appel a violé les articles L. 1232-6 et L.1332-2 du Code du travail ;
2) ALORS QUE la faute grave est caractérisée par un comportement rendant impossible le maintien du salarié dans l'entreprise pendant la durée du préavis ; qu'en se bornant à retenir, pour dire le licenciement de Monsieur Michel X... fondé sur une faute grave, que les griefs tirés de l'absence de conservation de plats témoins depuis le 6 juillet et la présence de viandes non emballées dans la chambre froide le 13 juillet 2005 étaient établis, sans rechercher, ainsi qu'elle y était pourtant invitée (conclusions p.5), si ces faits uniques n'étaient pas exclusivement dus à la surcharge de travail temporaire résultant du départ en congé du cuisinier qui avait eu lieu, selon ses propres constatations, au plus tard le 4 juillet 2005, et dont Monsieur Michel X... avait vainement demandé le remplacement à son employeur, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard de l'article L. 122-6, devenu l'article L. 1234-1 du code du travail ;
3) ALORS QUE la faute grave est caractérisée par un comportement rendant impossible tout maintien du salarié dans l'entreprise pendant la durée du préavis ; qu'en conséquence, ne saurait constituer une faute grave le comportement que l'employeur a précédemment toléré de la part du salarié sans le sanctionner ; qu'en l'espèce, en constatant que l'insubordination et l'indiscipline imputées à M. X... par l'employeur, duraient depuis déjà plusieurs mois au moment où elles avaient été sanctionnées, tout en estimant que ces faits pouvaient justifier le licenciement pour faute grave, quand il ressortait de ses propres constatations que l'employeur avait toléré les faits en cause durant plusieurs mois sans les sanctionner, la cour d'appel a violé l'article L.122-6, devenu l'article L.1234-1 du code du travail ;
4) ALORS QUE la faute grave est caractérisée par un comportement rendant impossible tout maintien du salarié dans l'entreprise pendant la durée du préavis ; qu'en conséquence, ne saurait constituer une faute grave le comportement que l'employeur ne sanctionne pas dans un délai restreint à compter de la connaissance qu'il en a eu ; qu'en l'espèce, en constatant que l'insubordination et l'indiscipline imputées à M. X... par l'employeur durait depuis déjà plusieurs mois au moment où elles avaient été sanctionnées, tout en estimant que ces faits pouvaient justifier le licenciement pour faute grave, quand il ressortait de ses propres constatations que l'employeur n'avait pas sanctionné les faits en cause dans un délai retreint à compter de leur connaissance, la cour d'appel a derechef violé l'article L.122-6, devenu l'article L.1234-1 du code du travail.


Synthèse
Formation : Chambre sociale
Numéro d'arrêt : 09-66532
Date de la décision : 06/01/2011
Sens de l'arrêt : Rejet
Type d'affaire : Sociale

Références :

Décision attaquée : Cour d'appel de Nancy, 18 mars 2009


Publications
Proposition de citation : Cass. Soc., 06 jan. 2011, pourvoi n°09-66532


Composition du Tribunal
Président : M. Béraud (conseiller le plus ancien faisant fonction de président)
Avocat(s) : SCP Lyon-Caen, Fabiani et Thiriez, SCP Rocheteau et Uzan-Sarano

Origine de la décision
Date de l'import : 15/09/2022
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CCASS:2011:09.66532
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