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05/01/2011 | FRANCE | N°09-69900

France | France, Cour de cassation, Chambre sociale, 05 janvier 2011, 09-69900


LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l'arrêt suivant :

Sur le moyen unique :

Attendu, selon l'arrêt attaqué (Versailles, 2 juillet 2009), qu'engagée le 2 mai 2001 en qualité d'agent de service par la société Prisma Francenet, aux droits de laquelle se trouve la société Carrad services, Mme X... a été licenciée le 21 décembre 2005 ;

Attendu que la société fait grief à l'arrêt de dire le licenciement dépourvu de cause réelle et sérieuse et de la condamner à diverses sommes, alors, selon le moyen :

1°/ qu'en matière prud'homale, la

preuve est libre et des déclarations de témoins ne peuvent être écartées au motif qu'elles n'o...

LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l'arrêt suivant :

Sur le moyen unique :

Attendu, selon l'arrêt attaqué (Versailles, 2 juillet 2009), qu'engagée le 2 mai 2001 en qualité d'agent de service par la société Prisma Francenet, aux droits de laquelle se trouve la société Carrad services, Mme X... a été licenciée le 21 décembre 2005 ;

Attendu que la société fait grief à l'arrêt de dire le licenciement dépourvu de cause réelle et sérieuse et de la condamner à diverses sommes, alors, selon le moyen :

1°/ qu'en matière prud'homale, la preuve est libre et des déclarations de témoins ne peuvent être écartées au motif qu'elles n'ont pas été recueillies par des attestations rédigées en les formes légales ; qu'en écartant par principe la lettre collective adressée à l'employeur et signé par des locataires mécontents de la prestation de nettoyage réalisée dans leur immeuble par la salariée, au seul motif que cette lettre n'était pas datée et ne présentait pas de garantie sur la qualité de ses auteurs, sans même examiner le contenu de cette lettre relatant des faits précis et circonstanciés de nature à établir la réalité des griefs reprochés à la salariée, la cour d'appel a violé les articles 1315 et 1341 du code civil, ensemble les articles 199, 202 et 203 du code de procédure civile ;

2°/ que les règles de forme auxquelles sont soumises les attestations produites en justice ne sont pas prescrites à peine de nullité ; qu'en refusant de prendre en considération l'attestation de Mme Y..., gardienne de l'immeuble dans lequel la salariée effectuait sa prestation de nettoyage et relatant de manière précise et circonstanciée la mauvaise qualité du travail exécuté par cette dernière, au seul motif de son irrégularité formelle tirée de son caractère non manuscrit, la cour d'appel a violé l'article 202 du code de procédure civile ;

3°/ qu'en matière prud'homale, la preuve est libre et peut être rapportée par voie d'attestation ; qu'en se bornant à relever, pour écarter l'attestation de Mme Y..., que le contenu de celle-ci n'était corroborée par aucun autre élément de preuve, après avoir cependant retenue qu'elle était " précise sur les faits reprochés à la salariée ", la cour d'appel a violé les articles 1315 et 1341 du code civil ;

4°/ que la preuve étant libre en matière prud'homale, l'employeur peut rapporter la preuve de la réalité des griefs invoqués à l'appui du licenciement par tous moyens, y compris par des présomptions du fait de l'homme, lesquelles doivent être examinés par les juges du fond peu important que ces indices n'aient pas été mentionnés dans la lettre de licenciement ; qu'en l'espèce, l'employeur faisait valoir que la preuve de ce que la salariée exécutait mal sa prestation de nettoyage était que le mari de cette dernière n ‘ avait pas hésité à insulter et menacer Mme Y..., à la suite du témoignage établi par cette dernière sur la mauvaise qualité de son travail, fait dont l'employeur avait justifié en versant aux débats la main courante en date du 19 décembre 2005 déposée par Mme Y... ; qu'en refusant d'examiner cet indice déterminant, motif pris de ce que ce qu'un tel fait, au demeurant non démenti par la salariée, ne figurait pas dans la lettre de licenciement, la cour d'appel a statué par un motif inopérant et a violé les articles 1315 et 1353 du code civil et L. 1235-1 du code du travail ;

5°/ que, subsidiairement, qu'il appartient au juge d'examiner tous les éléments de preuve produits l'appui de l'affirmation d'un fait et de rechercher si, pris ensemble, infraction à la législation sur les stupéfiants sont de nature à constituer des indices concordants de la réalité dudit fait ; qu'en l'espèce, pour établir la mauvaise qualité du travail effectuée par la salariée, la société Carrard services avait produit aux débats deux lettres recommandées en date des adressées à la salariée pour la mettre en garde contre la mauvaise exécution des tâches qui lui étaient confiées, une lettre collective signée par des locataires mécontents de sa prestation de nettoyage, une plainte adressée également à ce sujet à la société Carrard services par la gardienne de la résidence concernée ; qu'en se bornant, pour juger que les griefs reprochés à la salariée n'étaient pas établis avec précision, à examiner isolément chacun de ces éléments de preuve produits par l'employeur, sans rechercher si l'ensemble de ces éléments particulièrement concordants, joints aux menaces proférées par le mari de la salariée à l'encontre de la principale témoin de la mauvaise qualité du travail effectué par cette dernière, n ‘ étaient pas de nature à établir de manière précise la réalité des griefs reprochés à la salariée, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard de l'article 1235-1 du code du travail ;

Mais attendu que le moyen, sous couvert de violation des articles 202 et 203 du code de procédure civile et 1315 et 1341 du code civil, ne fait que remettre en discussion devant la Cour de cassation l'appréciation souveraine par la cour d'appel de la valeur probante et de la portée des éléments soumis à son examen ;

Que le moyen n'est pas fondé ;

PAR CES MOTIFS :

REJETTE le pourvoi ;

Condamne la société Carrard services aux dépens ;

Vu l'article 700 du code de procédure civile, rejette la demande ;

Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre sociale, et prononcé par le président en son audience publique du cinq janvier deux mille onze.

MOYEN ANNEXE au présent arrêt :

Moyen produit par la SCP Gatineau et Fattaccini, avocat aux Conseils pour la société Carrard services.

Il est fait grief à l'arrêt infirmatif attaqué d'AVOIR dit que le licenciement de Madame X... était intervenu sans cause réelle et sérieuse et d'AVOIR, en conséquence, condamné la société CARRARD SERVICES à payer à Madame X... la somme de 6. 337 € au titre de l'indemnité pour licenciement sans cause réelle et sérieuse, outre 1. 500 euros par application de l'article 700 du Code de procédure civile ;

AUX MOTIFS QUE « la lettre de licenciement est ainsi motivée : « nous faisons suite par la présente à l'entretien préalable pour lequel vous étiez convoquée le vendredi 16 décembre 2005 à 11 H00. Pour le bon ordre, nous vous rappelons les griefs que nous avons à votre encontre. Votre responsable, Monsieur Z..., a, par plusieurs mises en garde verbales, attiré votre attention sur la qualité très insuffisante de vos prestations. Or, à ce jour, nous n'avons pas noté d'amélioration dans l'exécution de vos tâches puisque la qualité de votre travail reste très insuffisante. Cette mauvaise exécution porte atteinte aux relations contractuelles avec nos clients. Ce comportement est aggravé par votre désinvolture quant à votre mission. En effet, vous ne respectez pas l'ensemble des directives données par votre responsable. D'une part, ceci se répercute par de graves dysfonctionnements dans la mise en oeuvre des prestations de nettoyage. Vous n'avez pas justifié votre comportement quant aux faits reprochés et n'avez pas montré de volonté à faire perdurer notre collaboration. Nous vous notifions donc votre licenciement pour cause réelle et sérieuse aux motifs suivants : mauvaise exécution du travail et comportement désinvolte entraînant un non-respect des consignes données par vos responsables hiérarchiques ; ces faits rendent impossible la poursuite de notre collaboration car ils induisent de graves dysfonctionnement dans l'exploitation et l'organisation de votre site d'affectation et affectent de ce fait nos relations contractuelles avec nos clients. Compte – tenu des faits reprochés, nous ne souhaitons pas que vous effectuiez votre préavis suite à cette procédure, vous percevrez la somme équivalente à ce préavis (soit un mois) sur votre solde de tout compte. Votre solde de tout compte sera disponible en nos bureaux le 12 janvier 2006. A toutes fins utiles, nous vous indiquons que vous êtes susceptibles de disposer, à la date de la rupture de votre contrat, d'un crédit d'heures au titre du droit individuel à la formation. En cas de droits acquis, vous pourriez financer par ce biais un bilan de compétences, une action de validation des acquis de l'expérience ou une formation, à condition d'en faire la demande auprès de l'assistante d'agence. Si vous êtes intéressée par ce dispositif, contacter l'assistante d'agence qui vous précisera le montant de vos droits éventuellement acquis au titre du Droit à la Formation » ; le contrat de travail de Madame X... stipule que ses horaires pourront être modifiés, précisant qu'elle en sera avertie 7 jours à l'avance ; il prévoit également une clause de mobilité « dans la zone géographique de Paris ou de la région parisienne » ; dans ses écritures soutenues oralement devant la Cour, Madame X... n'a pas invoqué une modification par son employeur de son contrat de travail du fait de la modification de ses horaires fixés également sur la journée de samedi à compter d'octobre 2005 ; dans la lettre de licenciement qui fixe les limites du litige, la société CARRARD SERVICES reproche à Madame X... de ne pas avoir tenu compte des mises en garde verbales quant à la qualité du travail ; il lui est également reproché une « désinvolture » quant à sa mission, une absence de respect des consignes données par ses responsables hiérarchiques ; il appartient à l'employeur d'établir les griefs qu'il invoque à l'appui du licenciement de sa salariée. La désinvolture tant à l'égard des reproches qui lui ont été adressés, qu'à l'égard des consignes données doit en effet être considérée comme une attitude délibérée et non comme une insuffisance professionnelle ; le licenciement a donc un caractère disciplinaire ; pour établir les griefs reprochés à Madame X..., la SAS CARRARD SERVICES fait valoir les deux lettres recommandées qui ont été adressées à la salariée, mais également une lettre collective de locataires mécontents ; cette lettre non datée ne présente pas de garantie sur la qualité de ses auteurs ; quant à l'attestation de Madame Y..., qui fait état de la mauvaise qualité du travail de Madame X..., elle est certes précise sur les griefs reprochés à la salariée, mais outre le fait qu'elle n'est pas manuscrite, les affirmations qu'elle contient ne sont assorties d'aucun document photographique ou attestation précise d'occupants venant les corroborer ; Madame X... aurait proféré des insultes et menaces à l'encontre de Madame Y... en raison de cette attestation ; une main courante a été déposé par Madame Y... le 19 décembre 2005 en ce sens ; cependant ce fait qui ne figure pas dans la lettre de licenciement ne peut être invoqué contre la salariée ; ainsi, la réalité des faits qui lui sont reprochés ne sont pas établis avec précision, et à plus forte raison leur gravité ; dès lors, il convient de constater que le licenciement de Madame X... est intervenu sans cause réelle et sérieuse »,

1) ALORS QU'en matière prud'homale, la preuve est libre et des déclarations de témoins ne peuvent être écartées au motif qu'elles n'ont pas été recueillies par des attestations rédigées en les formes légales ; qu'en écartant par principe la lettre collective adressée à l'employeur et signé par des locataires mécontents de la prestation de nettoyage réalisée dans leur immeuble par la salariée, au seul motif que cette lettre n'était pas datée et ne présentait pas de garantie sur la qualité de ses auteurs, sans même examiner le contenu de cette lettre relatant des faits précis et circonstanciés de nature à établir la réalité des griefs reprochés à la salariée, la Cour d'appel a violé les articles 1315 et 1341 du Code civil, ensemble les articles 199, 202 et 203 du Code de procédure civile ;

2) ALORS QUE les règles de forme auxquelles sont soumises les attestations produites en justice ne sont pas prescrites à peine de nullité ; qu'en refusant de prendre en considération l'attestation de Madame Y..., gardienne de l'immeuble dans lequel la salariée effectuait sa prestation de nettoyage et relatant de manière précise et circonstanciée la mauvaise qualité du travail exécuté par cette dernière, au seul motif de son irrégularité formelle tirée de son caractère non manuscrit, la Cour d'appel a violé l'article 202 du Code de procédure civile ;

3) ALORS QU'en matière prud'homale, la preuve est libre et peut être rapportée par voie d'attestation ; qu'en se bornant à relever, pour écarter l'attestation de Madame X... – Y..., que le contenu de celle-ci n'était corroborée par aucun autre élément de preuve, après avoir cependant retenue qu'elle était " précise sur les faits reprochés à la salariée ", la Cour d'appel a violé les articles 1315 et 1341 du Code civil ;

4) ALORS QUE la preuve étant libre en matière prud'homale, l'employeur peut rapporter la preuve de la réalité des griefs invoqués à l'appui du licenciement par tous moyens, y compris par des présomptions du fait de l'homme, lesquelles doivent être examinés par les juges du fond peu important que ces indices n'aient pas été mentionnés dans la lettre de licenciement ; qu'en l'espèce, l'employeur faisait valoir que la preuve de ce que la salariée exécutait mal sa prestation de nettoyage était que le mari de cette dernière n ‘ avait pas hésité à insulter et menacer Madame X... – Y..., à la suite du témoignage établi par cette dernière sur la mauvaise qualité de son travail, fait dont l'employeur avait justifié en versant aux débats la main courante en date du 19 décembre 2005 déposée par Madame Y... ; qu'en refusant d'examiner cet indice déterminant, motif pris de ce que ce qu'un tel fait, au demeurant non démenti par la salariée, ne figurait pas dans la lettre de licenciement, la Cour d'appel a statué par un motif inopérant et a violé les articles 1315 et 1353 du Code civil et L. 1235-1 du Code du travail ;

5) ALORS, subsidiairement, QU'il appartient au juge d'examiner tous les éléments de preuve produits l'appui de l'affirmation d'un fait et de rechercher si, pris ensemble, ils sont de nature à constituer des indices concordants de la réalité dudit fait ; qu'en l'espèce, pour établir la mauvaise qualité du travail effectuée par la salariée, la société CARRARD SERVICES avait produit aux débats deux lettres recommandées en date des adressées à la salariée pour la mettre en garde contre la mauvaise exécution des tâches qui lui étaient confiées, une lettre collective signée par des locataires mécontents de sa prestation de nettoyage, une plainte adressée également à ce sujet à la société CARRARD SERVICES par la gardienne de la résidence concernée ; qu'en se bornant, pour juger que les griefs reprochés à la salariée n'étaient pas établis avec précision, à examiner isolément chacun de ces éléments de preuve produits par l'employeur, sans rechercher si l'ensemble de ces éléments particulièrement concordants, joints aux menaces proférées par le mari de la salariée à l'encontre de la principale témoin de la mauvaise qualité du travail effectué par cette dernière, n ‘ étaient pas de nature à établir de manière précise la réalité des griefs reprochés à la salariée, la Cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard de l'article 1235-1 du Code du travail.


Synthèse
Formation : Chambre sociale
Numéro d'arrêt : 09-69900
Date de la décision : 05/01/2011
Sens de l'arrêt : Rejet
Type d'affaire : Sociale

Références :

Décision attaquée : Cour d'appel de Versailles, 02 juillet 2009


Publications
Proposition de citation : Cass. Soc., 05 jan. 2011, pourvoi n°09-69900


Composition du Tribunal
Président : Mme Perony (conseiller le plus ancien faisant fonction de président)
Avocat(s) : SCP Gatineau et Fattaccini

Origine de la décision
Date de l'import : 15/09/2022
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CCASS:2011:09.69900
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