LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE CRIMINELLE, a rendu l'arrêt suivant :
Statuant sur le pourvoi formé par :
- M. le procureur général près la cour d'appel de Caen,
contre l'arrêt de ladite cour d'appel, chambre correctionnelle, en date du 15 mars 2010, qui, dans la procédure suivie contre M. Pierre X... du chef d'infraction à la police de la pêche maritime, a prononcé la nullité des poursuites ;
Vu les mémoires produits, en demande et en défense ;
Sur le moyen unique de cassation, pris de la violation de l'article 6 § 3 de la Convention européenne des droits de l'homme, ensemble les articles L. 945-4 du code rural et de la pêche maritime et 593 du code de procédure pénale ;
Vu les dits articles ;
Attendu que tout jugement ou arrêt doit comporter les motifs propres à justifier la décision ; que l'insuffisance ou la contradiction de motifs équivaut à leur absence ;
Attendu qu'il résulte de l'arrêt attaqué et des pièces de procédure que la direction générale de la concurrence, de la consommation et de la répression des fraudes a programmé au niveau national des contrôles afin de s'assurer du respect de la réglementation européenne exigeant une taille minimale pour la commercialisation de divers produits de la mer ; que plusieurs procès-verbaux, dans des points de vente disséminés sur tout le territoire national, ont été dressés, entre octobre 2005 et février 2006, à l'encontre de la société X... qui avait écoulé de tels produits, puis transmis au plus tard en juillet 2006 au parquet de Coutances, territorialement compétent en raison du siège de l'entreprise mise en cause ; que son gérant, M. X..., informé de l'existence des procédures le 1er févier 2008, a fait l'objet, par voie de citation directe délivrée le 3 avril 2009, de poursuites pour exposition ou vente de produits de la pêche et de l'aquaculture marine de taille, calibre ou poids prohibés, délit prévu et réprimé par l'article 6 du décret-loi du 9 janvier 1852, devenu l'article L. 945-4 15° du code rural ; qu'il a soulevé, avant toute défense au fond, une exception de nullité tirée de l'article 6 § 3 de la Convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme en faisant valoir qu'il avait subi un retard injustifié de nature à nuire à l'organisation de sa défense ;
Attendu que, pour infirmer le jugement entrepris qui a rejeté cette exception, l'arrêt énonce que M. X... s'est trouvé dans l'impossibilité de rapporter, plus de deux ans après leur établissement, la preuve contraire des faits énoncés dans les procès-verbaux, par suite d'une rupture dans la continuité de la traçabilité des produits de la mer qu'il avait achetés à la criée de Granville puis vendus à une centrale d'achat de Rungis, puisque la traçabilité n'est que d'une année ;
Mais attendu qu'en statuant ainsi, alors que le contrôle de la conformité des produits issus de la pêche maritime, dont la taille ou le poids sont réglementés, doit s'exercer à tous les stades de la commercialisation de ces produits et incombe notamment au grossiste qui en a fait l'achat à la criée pour les revendre à une centrale d'achat sur un marché d'intérêt national, la cour d'appel, qui s'est déterminée par des motifs inopérants à justifier la nullité de la procédure, en omettant de rechercher si le prévenu avait effectué le contrôle qui lui incombait, n'a pas donné de base légale à sa décision ;
D'où il suit que la cassation est encourue ;
Par ces motifs :
CASSE et ANNULE, en toutes ses dispositions, l'arrêt susvisé de la cour d'appel de Caen, en date du 15 mars 2010, et pour qu'il soit à nouveau jugé, conformément à la loi,
RENVOIE la cause et les parties devant la cour d'appel de Rouen, à ce désignée par délibération spéciale prise en chambre du conseil ;
ORDONNE l'impression du présent arrêt, sa transcription sur les registres du greffe de la cour d'appel de Caen et sa mention en marge ou à la suite de l'arrêt annulé ;
Ainsi jugé et prononcé par la Cour de cassation, chambre criminelle, en son audience publique, les jour, mois et an que dessus ;
Etaient présents aux débats et au délibéré : M. Louvel président, M. Le Corroller conseiller rapporteur, MM. Palisse, Arnould, Nunez, Mme Radenne conseillers de la chambre, Mme Harel-Dutirou, M. Roth conseillers référendaires ;
Avocat général : M. Salvat ;
Greffier de chambre : Mme Daudé ;
En foi de quoi le présent arrêt a été signé par le président, le rapporteur et le greffier de chambre ;