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08/12/2010 | FRANCE | N°09-41556

France | France, Cour de cassation, Chambre sociale, 08 décembre 2010, 09-41556


LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l'arrêt suivant :

Attendu, selon l'arrêt attaqué (Paris, 3 Février 2009) que M. X... a été engagé par la société Oce France (la société) le 31 mai 1998 en qualité d'ingénieur commercial, puis a été promu aux fonctions de responsable des ventes régionales le 1er décembre 2003 ; qu'il a été licencié pour faute grave le 23 février 2005 avec mise à pied conservatoire ;

Sur le premier moyen :

Attendu que la société fait grief à l'arrêt de dire le licenciement dépourvu de cause réelle et sérieuse, al

ors, selon le moyen :

1°/ que le licenciement de M. X... a été décidé non pour avoir demandé...

LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l'arrêt suivant :

Attendu, selon l'arrêt attaqué (Paris, 3 Février 2009) que M. X... a été engagé par la société Oce France (la société) le 31 mai 1998 en qualité d'ingénieur commercial, puis a été promu aux fonctions de responsable des ventes régionales le 1er décembre 2003 ; qu'il a été licencié pour faute grave le 23 février 2005 avec mise à pied conservatoire ;

Sur le premier moyen :

Attendu que la société fait grief à l'arrêt de dire le licenciement dépourvu de cause réelle et sérieuse, alors, selon le moyen :

1°/ que le licenciement de M. X... a été décidé non pour avoir demandé et obtenu le remboursement de frais de déplacement, mais pour avoir abusé de l'accord en vertu duquel la société Oce France avait accepté, au cours de l'année 2002, de prendre en charge un aller-retour hebdomadaire entre Paris et Lyon ; qu'il a ainsi été reproché au salarié, à compter du 1er décembre 2003, date à laquelle il avait été promu responsable des ventes régionales Ile-de-France, fonction nécessitant une plus grande disponibilité, d'avoir sollicité le remboursement d'un aller-retour quasi-quotidien ; qu'en estimant que ce motif n'était pas réel et sérieux par cela seul que, lors de la promotion du 1er décembre 2003, la société Oce France n'avait pas remis en cause l'accord relatif au remboursement des frais de déplacement, la cour d'appel a déduit un motif dépourvu de toute valeur et a privé sa décision de base légale au regard des articles L. 1233-2 et L. 1235-1 du code du travail ;

2°/ qu'impliquant l'encadrement d'une équipe de vendeurs pour la région Ile-de-France, le nouveau poste confié à M. X... à compter du 1er décembre 2003 supposait une disponibilité au moins aussi importante que celle exigée de lui à son poste précédent ; que ce nouveau poste ne nécessitait pas des déplacements professionnels entre Paris et Lyon, mais, bien au contraire, supposait de limiter les déplacements d'ordre privé entre ces deux villes ; qu'en considérant que l'arrangement verbal relatif au remboursement des frais de déplacement pouvait, suite à la promotion de M. X..., se modifier logiquement et implicitement en fonction du nouveau poste et des besoins qu'il faisait naître, la cour d'appel a de nouveau déduit un motif dépourvu de toute valeur dans l'appréciation du motif pris d'un abus du système de remboursement et a privé sa décision de base légale au regard des articles L. 1233-2 et L. 1235-1 du code du travail ;

3°/ qu'en tout état de cause, l'avantage attribué individuellement ne peut constituer un usage ; qu'en considérant que l'arrangement verbal entre la société Oce France et M. X... s'agissant de la prise en charge de ses frais de déplacement avait valeur d'usage, la cour d'appel a violé l'article 1134 du code civil ;

4°/ qu'en tout état de cause, fussent-elles verbales, les conventions légalement formées tiennent lieu de loi à ceux qui les ont faites et ne peuvent être révoquées que de leur consentement mutuel ; que, si l'acte révocatoire peut procéder d'une volonté tacite, cette volonté ne peut être déduite du seul silence conservé par celui auquel la révocation a été imposée ; qu'en l'espèce, en ne caractérisant pas l'acceptation expresse ou implicite de la société Oce France d'une modification de l'accord verbal relatif aux frais de déplacement afin d'assurer, à compter du 1er décembre 2003, la prise en charge non plus d'un aller-retour hebdomadaire mais d'un aller-retour quasi-quotidien, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard de l'article 1134, alinéa 1, et alinéa 2, du code civil ;

5°/ que le juge du fond ne peut exclure la qualification de faute grave en se bornant à prendre acte de l'absence de mises en garde antérieures et de l'absence d'une mise au point après découverte du fait fautif ; qu'il en va tout particulièrement ainsi s'agissant du manquement irréversible d'un cadre de haut niveau à l'exigence de loyauté ; qu'en évinçant la qualification de faute grave au prétexte qu'aucune mise au point n'avait été tentée avec M. X..., auquel il était reproché d'avoir abusé de l'accord relatif à ses frais de déplacement, la cour d'appel a déduit un motif dépourvu de valeur et a privé sa décision de base légale au regard des articles L. 1234-1 et L. 1234-9 du code du travail ;

6°) que la lettre de licenciement fixe les termes du litige ; qu'il appartient en conséquence aux juges du fond d'examiner l'ensemble des griefs qui y sont faits au salarié ; qu'en l'espèce, lors de la rupture, la société Oce France avait fait reproche à M. X... non seulement d'avoir porté à un rythme quasi-quotidien ses aller-retour Paris-Lyon, mais également de n'avoir pas respecté la procédure instituée en matière de déplacements et de remboursements de notes de frais, cette procédure impliquant que les demandes de billetterie passent nécessairement par la personne désignée de la division ou de l'agence, qu'elles soient directement facturées à Oce-France sans pouvoir en conséquence entrer dans la catégorie des frais remboursables sur fiche de frais ; qu'il était ainsi reproché à M. X... d'avoir procédé irrégulièrement à l'achat d'abonnements mensuels et de billets SNCF sans passer par la secrétaire chargée normalement de ces opérations ; qu'en se bornant à constater que la société Oce France n'apportait pas la preuve d'un achat direct par M. X... de certains abonnements auprès de l'agence de voyage sans rechercher si, en soi, l'achat direct des billets de train eux-mêmes, constaté et reconnu, n'était pas fautif, la cour d'appel a violé l'article L. 1232-6 du code du travail ;

7°/ que la lettre de licenciement fixe les termes du litige ; qu'il appartient en conséquence aux juges du fond d'examiner l'ensemble des griefs qui y sont faits au salarié ; qu'en l'espèce, la société Oce France faisait reproche à M. X... d'avoir quitté son travail à des heures incompatibles avec le niveau de ses fonctions (début et milieu d'après-midi) et de ses responsabilités, afin de rentrer à Lyon, avec pour conséquence une moindre motivation et la non-réalisation des objectifs annuels ; qu'en se bornant à apprécier si le taux de réalisation des objectifs (94,77 %), en soi, caractérisait une faute sans se prononcer sur les horaires de M. X... et son organisation entre Paris et Lyon et leur impact sur sa motivation et ses performances, la cour d'appel a violé l'article L. 1232-6 du code du travail ;

8°/ que la décision de licenciement prise avant l'entretien préalable et communiquée par note interne à d'autres salariés constitue une irrégularité de procédure, mais n'a pas pour effet de priver la rupture de cause réelle et sérieuse ; qu'en l'espèce, la cour d'appel, dans le cadre de son appréciation de la légitimité du licenciement, a pris en compte le fait que la direction de la société Oce France avait envoyé un courriel à l'ensemble du personnel annonçant le départ de M. X... le 31 janvier 2005, jour de sa mise à pied conservatoire tandis que son licenciement ne lui avait été notifié que le 23 février 2005 ; qu'ainsi, la cour a violé les articles L. 1233-2 et L. 1235-1 du code du travail ;

9°/ que le juge doit rechercher si les faits invoqués, à défaut de caractériser une faute grave, ne constituent pas à tout le moins une cause réelle et sérieuse de licenciement ; qu'en considérant que la non-réalisation des objectifs ne pouvait être considérée comme une faute grave sans rechercher si elle ne caractérisait pas une faute simple, la cour d'appel a violé les articles L. 1233-2 et L. 1235-1 du code du travail ;

Mais attendu, d'abord, qu'appréciant souverainement la valeur et la portée des pièces soumises à son examen, la cour d'appel qui a constaté d'une part que l'engagement de l'employeur de prendre en charge les frais de trajet entre le domicile du salarié et son lieu de travail n'avait pas été remis en cause lors de la nomination de ce dernier au poste de responsable des ventes et, d'autre part, que le salarié avait respecté la procédure de prise en charge de ces frais en les soumettant à son supérieur hiérarchique avec lequel aucune collusion frauduleuse n'était démontrée, a décidé à bon droit, abstraction faite du motif erroné mais surabondant critiqué par la troisième branche, qu'en sollicitant le remboursement de ces frais de trajet, le salarié n'avait commis aucune faute ;

Attendu, ensuite, d'une part, que la cour d'appel qui a relevé que les voyages effectués par le salarié entre son domicile et son lieu de travail n'avaient eu aucune incidence sur l'activité de l'intéressé, a examiné le grief contenu dans la lettre de licenciement qu'il lui est reproché d'avoir délaissé ; d'autre part, qu'en décidant que le licenciement ne procédait pas d'une cause réelle et sérieuse après avoir retenu, par des motifs propres et adoptés, que si le salarié n'avait pas réalisé l'objectif qui lui avait été fixé, il avait obtenu des résultats qui en étaient très proches alors qu'il débutait dans ses nouvelles fonctions, la cour d'appel, ne s'est pas bornée à écarter la faute grave ;

Attendu, enfin que la cour d'appel n'a pas pris en considération la révélation par l'employeur, avant la notification du licenciement, au personnel de l'entreprise du départ du salarié pour apprécier l'existence d'une cause réelle et sérieuse de licenciement ou d'une faute grave ;

D'où il suit que le moyen, qui manque en fait dans sa huitième branche, ne peut être accueilli pour le surplus ;

Sur le deuxième moyen :

Attendu que le rejet du premier moyen rend sans objet le deuxième moyen;

Sur le troisième moyen :

Attendu que la société reproche enfin à l'arrêt de la condamner à payer à M. X... une somme à titre de commission outre congés payés y afférents, alors, selon le moyen :

1°/ que nul ne peut se constituer un titre à soi-même ; qu'en permettant à M. X... de prouver l'existence de sa créance de commissions sur la société Oce France au moyen d'un tableau établi par ses seuls soins et mentionnant des données chiffrées ne provenant pas d'éléments objectifs, la cour d'appel a ignoré l'exigence d'impartialité de la preuve et a violé l'article 1315 du code civil ;

2°/ que le juge du fond doit respecter les termes clairs et précis des écritures des parties ; qu'en l'espèce, la cour d'appel a constaté que la société Oce France contestait la valeur probante du tableau établi par M. X... ; qu'en affirmant que ce tableau n'était contesté par la société Oce France dans aucun de ses éléments, la cour d'appel a violé l'article 1134 du Code civil.

Mais attendu que, dès lors que l'employeur doit produire, en vue d'une discussion contradictoire, les éléments nécessaires au calcul de la rémunération qu'il détient, la cour d'appel qui a constaté que pour contester devoir des commissions au salarié, l'employeur qui ne produisait aucun élément se bornait à dénier toute valeur probante au tableau récapitulatif des affaires que le salarié affirmait avoir réalisées, a décidé à bon droit, sans encourir les griefs du moyen, qu'il était débiteur des sommes dont le paiement lui était réclamé ; que le moyen n'est pas fondé ;

PAR CES MOTIFS :

REJETTE le pourvoi ;

Condamne la société Oce France aux dépens ;

Vu l'article 700 du code de procédure civile, condamne la société Oce France à payer à M. X... la somme de 2 500 euros ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre sociale, et prononcé par le président en son audience publique du huit décembre deux mille dix.

MOYENS ANNEXES au présent arrêt :

Moyens produits par la SCP Gatineau et Fattaccini, avocat aux Conseils, pour la société Oce France

PREMIER MOYEN DE CASSATION :

Il est fait grief à l'arrêt confirmatif attaqué d'AVOIR dit le licenciement de monsieur X... dépourvu de cause réelle et sérieuse et d'AVOIR condamné la société OCE France à lui payer la somme de 69.000 euros à titre d'indemnité pour licenciement sans cause réelle et sérieuse, 1 euro au titre du préjudice moral, 20.687,18 euros à titre d'indemnité de préavis, 2.068,72 euros au titre des congés payés y afférents, 3.814,94 euros au titre des salaires de la période de mise à pied, 381,49 euros au titre des congés payés y afférents, 3.241,60 euros à titre de commissions, 324,16 euros au titre des congés payés y afférents et 1.269,78 euros à titre de remboursement de frais ;

AUX MOTIFS PROPRES QUE, «dans la lettre de licenciement, la société OCE France invoque l'accord passé avec M. X... à titre exceptionnel consistant en la prise en charge par la société d'un voyage aller-retour Paris Lyon par semaine, à des fins familiales, et reproche à M. X... d'en avoir abusé en lui faisant supporter, à compter du mois de décembre 2003, date à laquelle il a été promu responsable des ventes régionales, ce qui exigeait une résidence permanente en région parisienne, des frais de voyage Paris-Lyon quasi quotidiens et en s'étant frauduleusement concerté avec son supérieur hiérarchique pour lui faire signer ces notes de frais ; avoir ainsi violé ses obligations contractuelles et professionnelles en faisant preuve de déloyauté, de mauvaise foi et en ne respectant pas les procédures instituées en matière de déplacement et de remboursement de frais ; enfin, d'avoir quitté son travail à différentes heures incompatibles avec le niveau de ses fonctions et de ses responsabilités, avec pour conséquence, une moindre motivation et la non-réalisation des objectifs annuels, ceux-ci ne représentant plus que 94,77 % des objectifs fixés ; c'est par une exacte appréciation des faits et de justes motifs que la Cour adopte que le Conseil de prud'hommes a jugé que la faute grave n'était pas établie, dans la mesure où, lors de la promotion de M. X..., la société OCE France lui a indiqué que les autres termes de son contrat demeuraient inchangés et n'a pas remis en cause l'accord conclu entre eux qui assurait à M. X... le remboursement de ses frais de déplacement ; il apparaît, au vu des pièces produites, que M. X... a respecté la procédure de prise en charge des frais en faisant signer toutes ses notes par son supérieur hiérarchique, la société OCE France ne démontrant pas la collusion frauduleuse qu'elle allègue entre M. X... et son supérieur ; c'est en outre, exactement que le Conseil de prud'hommes relève que la société OCE France n'apporte pas non plus la preuve que M. X... aurait, par un détournement de la procédure fixée, souscrit lui-même des abonnements mensuels auprès de l'agence de voyages ; en ce qui concerne le reproche fondé sur la non-réalisation des objectifs annuels, qui est avancée par la société OCE France comme une conséquence des voyages quasi quotidiens de M. X..., une réalisation par M. X..., un an après la prise de ses nouvelles fonctions, de 94,77 % de ses objectifs ne peut être considérée comme une faute grave» ;

ET AUX MOTIFS ADOPTES QUE «monsieur X... n'a reçu, avant sa convocation à l'entretien préalable de licenciement, ou sa lettre de licenciement, aucun courrier de la SA OCE France lui reprochant ou lui faisant part de remarques quelconques sur ses voyages entre Paris/Lyon ou sur ses achats d'abonnements SNCF qu'il effectuait régulièrement depuis fin 2003, date de son changement de poste en tant que responsable des ventes régionales ; aucune preuve ne vient mettre en exergue que c'est M. X... qui a souscrit les abonnements mensuels auprès de l'agence de voyages Trans Vincennes ; M. X... a reçu deux courriers en date du 11 février 2004 de la part de la Directrice des ressources humaines de la SA OCE France lui précisant l'annonce d'une prime exceptionnelle de 5.000 euros afin de favoriser sa transition de sa prise de fonction au poste de responsable des ventes régionales, sa nouvelle nomination en précisant que «les autres termes de votre contrat demeurent inchangés» ; depuis que monsieur X... habite Lyon, l'arrangement verbal existant a fait preuve d'usage entre la direction de la société OCE France ; pour le paiement de ses déplacements entre Lyon et Paris et suite à sa promotion en tant que responsable des ventes régionales, cet arrangement verbal pouvait se modifier fort logiquement et implicitement en fonction du nouveau poste qu'il assumait et donc de ses besoins ; M. X... avait, au sein de la société OCE France, des responsabilités importantes qu'il assumait avec talent puisque, un an après la prise de son nouveau poste, il avait atteint 94,77 % de ses objectifs, ce qui, malgré ce qu'écrit la SA OCE dans la lettre de licenciement, est considéré comme un reproche alors qu'il faut sans aucun doute relativiser les faits ; vu l'ancienneté et la fonction de M. X... dans la société OCE France, il est difficile de comprendre pourquoi une mise à pied conservatoire suivie d'un licenciement pour faute grave ont été prononcés envers ce collaborateur sans qu'aucune mise au point n'ait été tentée auparavant ; la différence payée par la SA OCE France pour les frais de déplacement de monsieur X... avec son mode de fonctionnement au départ de l'entreprise et le fonctionnement qu'il avait courant 2002 est d'un peu moins de 5.000 euros et cette somme correspond à environ 5 % annuel du salaire et une fois encore, l'entreprise n'a même pas essayé de recadrer la situation en discutant du sujet de litige avec monsieur X... avant de prendre une situation extrémiste et parfaitement inadaptée à la situation ; la Direction de la SA OCE France a envoyé un courriel à l'ensemble du personnel annonçant le départ de la société de monsieur
X...
le 31 janvier 2005 jour de sa mise à pied conservatoire, cette dernière ne voulant pourtant nullement signifier un licenciement, et monsieur X... n'a été licencié que le 23 février 2005, la procédure n'a pas été respectée et la société OCE France n'a pas fait preuve d'une grande loyauté ni correction envers un collaborateur dont elle reconnaissait pourtant les bienfaits de son travail» ;

1°) ALORS QUE le licenciement de monsieur X... a été décidé non pour avoir demandé et obtenu le remboursement de frais de déplacement, mais pour avoir abusé de l'accord en vertu duquel la société OCE France avait accepté, au cours de l'année 2002, de prendre en charge un aller-retour hebdomadaire entre Paris et Lyon ; qu'il a ainsi été reproché au salarié, à compter du 1er décembre 2003, date à laquelle il avait été promu responsable des ventes régionales Ile-de-France, fonction nécessitant une plus grande disponibilité, d'avoir sollicité le remboursement d'un aller-retour quasi-quotidien ; qu'en estimant que ce motif n'était pas réel et sérieux par cela seul que, lors de la promotion du 1er décembre 2003, la société OCE France n'avait pas remis en cause l'accord relatif au remboursement des frais de déplacement, la Cour d'appel a déduit un motif dépourvu de toute valeur et a privé sa décision de base légale au regard des articles L. 1233-2 et L. 1235-1 du Code du travail ;

2°) ALORS QU'impliquant l'encadrement d'une équipe de vendeurs pour la région Ile-de-France, le nouveau poste confié à monsieur X... à compter du 1er décembre 2003 supposait une disponibilité au moins aussi importante que celle exigée de lui à son poste précédent ; que ce nouveau poste ne nécessitait pas des déplacements professionnels entre Paris et Lyon, mais, bien au contraire, supposait de limiter les déplacements d'ordre privé entre ces deux villes ; qu'en considérant que l'arrangement verbal relatif au remboursement des frais de déplacement pouvait, suite à la promotion de monsieur X..., se modifier logiquement et implicitement en fonction du nouveau poste et des besoins qu'il faisait naître (sic !), la Cour d'appel a de nouveau déduit un motif dépourvu de toute valeur dans l'appréciation du motif pris d'un abus du système de remboursement et a privé sa décision de base légale au regard des articles L. 1233-2 et L. 1235-1 du Code du travail ;

3°) ALORS en tout état de cause QUE l'avantage attribué individuellement ne peut constituer un usage ; qu'en considérant que l'arrangement verbal entre la société OCE France et monsieur X... s'agissant de la prise en charge de ses frais de déplacement avait valeur d'usage, la Cour d'appel a violé l'article 1134 du Code civil ;

4°) ALORS en tout état de cause QUE, fussent-elles verbales, les conventions légalement formées tiennent lieu de loi à ceux qui les ont faites et ne peuvent être révoquées que de leur consentement mutuel ; que, si l'acte révocatoire peut procéder d'une volonté tacite, cette volonté ne peut être déduite du seul silence conservé par celui auquel la révocation a été imposée ; qu'en l'espèce, en ne caractérisant pas l'acceptation expresse ou implicite de la société OCE France d'une modification de l'accord verbal relatif aux frais de déplacement afin d'assurer, à compter du 1er décembre 2003, la prise en charge non plus d'un aller-retour hebdomadaire mais d'un aller-retour quasi-quotidien, la Cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard de l'article 1134 alinéa 1 et alinéa 2 du Code civil ;

5°) ALORS QUE le juge du fond ne peut exclure la qualification de faute grave en se bornant à prendre acte de l'absence de mises en garde antérieures et de l'absence d'une mise au point après découverte du fait fautif ; qu'il en va tout particulièrement ainsi s'agissant du manquement irréversible d'un cadre de haut niveau à l'exigence de loyauté ; qu'en évinçant la qualification de faute grave au prétexte qu'aucune mise au point n'avait été tentée avec monsieur X..., auquel il était reproché d'avoir abusé de l'accord relatif à ses frais de déplacement, la Cour d'appel a déduit un motif dépourvu de valeur et a privé sa décision de base légale au regard des articles L. 1234-1 et L. 1234-9 du Code du travail ;

6°) ALORS QUE la lettre de licenciement fixe les termes du litige ; qu'il appartient en conséquence aux juges du fond d'examiner l'ensemble des griefs qui y sont faits au salarié ; qu'en l'espèce, lors de la rupture, la société OCE France avait fait reproche à monsieur X... non seulement d'avoir porté à un rythme quasi-quotidien ses aller-retour Paris/Lyon, mais également de n'avoir pas respecté la procédure instituée en matière de déplacements et de remboursements de notes de frais, cette procédure impliquant que les demandes de billetterie passent nécessairement par la personne désignée de la division ou de l'agence, qu'elles soient directement facturées à OCE-France sans pouvoir en conséquence entrer dans la catégorie des frais remboursables sur fiche de frais ; qu'il était ainsi reproché à monsieur X... d'avoir procédé irrégulièrement à l'achat d'abonnements mensuels et de billets SNCF sans passer par la secrétaire chargée normalement de ces opérations ; qu'en se bornant à constater que la société OCE France n'apportait pas la preuve d'un achat direct par monsieur X... de certains abonnements auprès de l'agence de voyage sans rechercher si, en soi, l'achat direct des billets de train eux-mêmes, constaté et reconnu, n'était pas fautif, la Cour d'appel a violé l'article L. 1232-6 du code du travail ;

7°) ALORS QUE la lettre de licenciement fixe les termes du litige ; qu'il appartient en conséquence aux juges du fond d'examiner l'ensemble des griefs qui y sont faits au salarié ; qu'en l'espèce, la société OCE France faisait reproche à monsieur X... d'avoir quitté son travail à des heures incompatibles avec le niveau de ses fonctions (début et milieu d'après-midi) et de ses responsabilités, afin de rentrer à Lyon, avec pour conséquence une moindre motivation et la non-réalisation des objectifs annuels ; qu'en se bornant à apprécier si le taux de réalisation des objectifs (94,77 %), en soi, caractérisait une faute sans se prononcer sur les horaires de monsieur X... et son organisation entre Paris et Lyon et leur impact sur sa motivation et ses performances, la Cour d'appel a violé l'article L. 1232-6 du code du travail ;

8°) ALORS QUE la décision de licenciement prise avant l'entretien préalable et communiquée par note interne à d'autres salariés constitue une irrégularité de procédure, mais n'a pas pour effet de priver la rupture de cause réelle et sérieuse ; qu'en l'espèce, la Cour d'appel, dans le cadre de son appréciation de la légitimité du licenciement, a pris en compte le fait que la direction de la société OCE France avait envoyé un courriel à l'ensemble du personnel annonçant le départ de monsieur X... le 31 janvier 2005, jour de sa mise à pied conservatoire tandis que son licenciement ne lui avait été notifié que le 23 février 2005 ; qu'ainsi, la Cour a violé les articles L. 1233-2 et L. 1235-1 du Code du travail ;

9°) ALORS QUE le juge doit rechercher si les faits invoqués, à défaut de caractériser une faute grave, ne constituent pas à tout le moins une cause réelle et sérieuse de licenciement ; qu'en considérant que la non-réalisation des objectifs ne pouvait être considérée comme une faute grave sans rechercher si elle ne caractérisait pas une faute simple, la Cour d'appel a violé les articles L. 1233-2 et L. 1235-1 du Code du travail.

DEUXIEME MOYEN DE CASSATION :

Il est fait grief à l'arrêt confirmatif attaqué d'AVOIR débouté la société OCE France de sa demande reconventionnelle en remboursement de frais de déplacement et d'AVOIR accueilli la demande de monsieur X... en paiement de la somme de 1.269,78 euros au titre des frais de déplacement entre le 14 décembre 2004 et le 19 janvier 2005 ;

AUX MOTIFS PROPRES QUE «la demande reconventionnelle de la société OCE France en remboursement des frais de déplacement Paris-Lyon hormis un aller-retour par semaine n'est pas justifiée ; la société OCE France soutient que la demande de remboursement de frais professionnels par M. X..., s'agissant pour l'essentiel des frais de déplacement du 14 décembre 2004 au 19 janvier 2005 qui n'ont pas été validés par le service comptable en raison des faits reprochés, n'est pas fondée ; c'est cependant exactement que le Conseil de prud'hommes a considéré que, le licenciement étant dépourvu de cause réelle et sérieuse, les frais de transport engagés par M. X... durant cette période lui sont dus » ;

ET AUX MOTIFS ADOPTES QUE, «monsieur ayant été licencié à tort, les frais de transport qu'il aurait dû percevoir pendant toute la période de sa mise à pied et de son préavis lui sont dus» ;

ALORS QU'en application de l'article 624 du Code de procédure civile, la censure qui sera prononcée en vertu du premier moyen entraînera par voie de conséquence la cassation de l'arrêt du chef de son dispositif se rapportant à la condamnation de la société OCE France au paiement de la somme de 1.269,78 euros au titre des frais de déplacement entre le 14 décembre 2004 et le 19 janvier 2005 et au débouté de la société OCE France en sa demande reconventionnelle en remboursement de frais de déplacement déjà pris en charge.

TROISIEME MOYEN DE CASSATION :

Il est fait grief à l'arrêt confirmatif attaqué d'AVOIR condamné la société OCE France à payer à monsieur X... la somme de 3.241,60 euros à titre de commissions outre congés payés afférents ;

AUX MOTIFS PROPRES QUE, «si la société OCE France soutient qu'est injustifié l'octroi à M. X... d'un rappel de commissions alors que celui-ci, qui se serait uniquement basé sur des «éléments recueillis auprès des commerciaux de l'entreprise», n'a pas produit le moindre commencement de preuve de la réalisation des affaires pour lesquelles il est demandé une commission, elle ne procède à aucune analyse critique du tableau établi par M. X... récapitulant, pour les mois de décembre 2004, janvier et février 2005, les noms des clients, les solutions vendues et les chiffres d'affaires en résultant ; ce tableau détaillé au terme duquel M. X... conclut à un rappel de commissions dû d'un montant de 3.241,60 euros n'est contesté par la société OCE France dans aucun de ses éléments» ;

ET AUX MOTIFS ADOPTES QUE, «monsieur X... a été licencié à tort, les commissions qu'il aurait dû percevoir pendant toute la période de sa mise à pied et de son préavis lui sont dus» ;

1°) ALORS QUE nul ne peut se constituer un titre à soi-même ; qu'en permettant à monsieur X... de prouver l'existence de sa créance de commissions sur la société OCE France au moyen d'un tableau établi par ses seuls soins et mentionnant des données chiffrées ne provenant pas d'éléments objectifs, la Cour d'appel a ignoré l'exigence d'impartialité de la preuve et a violé l'article 1315 du Code civil ;

2°) ALORS QUE le juge du fond doit respecter les termes clairs et précis des écritures des parties ; qu'en l'espèce, la Cour d'appel a constaté que la société OCE France contestait la valeur probante du tableau établi par monsieur X... ; qu'en affirmant que ce tableau n'était contesté par la société OCE France dans aucun de ses éléments, la Cour d'appel a violé l'article 1134 du Code civil.


Synthèse
Formation : Chambre sociale
Numéro d'arrêt : 09-41556
Date de la décision : 08/12/2010
Sens de l'arrêt : Rejet
Type d'affaire : Sociale

Références :

Décision attaquée : Cour d'appel de Paris, 03 février 2009


Publications
Proposition de citation : Cass. Soc., 08 déc. 2010, pourvoi n°09-41556


Composition du Tribunal
Président : M. Chauviré (conseiller le plus ancien faisant fonction de président)
Avocat(s) : SCP Gatineau et Fattaccini, SCP Masse-Dessen et Thouvenin

Origine de la décision
Date de l'import : 15/09/2022
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CCASS:2010:09.41556
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