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30/11/2010 | FRANCE | N°09-69257

France | France, Cour de cassation, Chambre commerciale, 30 novembre 2010, 09-69257


LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE COMMERCIALE, a rendu l'arrêt suivant :

Sur le moyen unique :

Vu l'article L. 622-24 du code de commerce, dans sa rédaction issue la loi du 26 juillet 2005 de sauvegarde des entreprises ;

Attendu, selon l'arrêt attaqué, que par jugement du 24 novembre 2006, publié au Bodacc le 29 décembre 2006, la société Dindes des Pays du Nord (la société Dpn) a été mise en redressement judiciaire, M. X... étant désigné mandataire judiciaire ; que, le 22 décembre 2006, l'Office national de l'élevage (l'Office) a déclaré une créance d'

un montant de 73 361 euros à titre chirographaire mentionnant que sa créance était « ...

LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE COMMERCIALE, a rendu l'arrêt suivant :

Sur le moyen unique :

Vu l'article L. 622-24 du code de commerce, dans sa rédaction issue la loi du 26 juillet 2005 de sauvegarde des entreprises ;

Attendu, selon l'arrêt attaqué, que par jugement du 24 novembre 2006, publié au Bodacc le 29 décembre 2006, la société Dindes des Pays du Nord (la société Dpn) a été mise en redressement judiciaire, M. X... étant désigné mandataire judiciaire ; que, le 22 décembre 2006, l'Office national de l'élevage (l'Office) a déclaré une créance d'un montant de 73 361 euros à titre chirographaire mentionnant que sa créance était « éventuelle » et « provisionnelle » ; que, par jugement du 23 mars 2007, la société Dpn a été mise en liquidation judiciaire, M. X... étant désigné liquidateur ; que, sur proposition de ce dernier, par ordonnance du 21 mars 2008, le juge-commissaire a rejeté la créance de l'Office, aux droits desquels vient FranceAgriMer, au motif qu'il ne justifiait pas avoir déclaré sa créance à titre définitif dans le délai légal qui expirait le 28 février 2007 ;

Attendu que pour confirmer l'ordonnance rejetant la créance déclarée au passif de la société Dpn, l'arrêt, après avoir relevé que l'Office ne saurait prétendre avoir commis un innocent abus de langage en déclarant expressément une créance provisionnelle, tandis qu'il avait la faculté de déclarer sa créance sur la base d'une évaluation s'il ne disposait pas de tous les éléments propres à lui permettre de la liquider avec certitude, retient que si une créance, dont le montant n'est pas encore fixé, doit être déclarée sur la base d'une évaluation effectuée au moment de la déclaration, cette possibilité est distincte d'une déclaration faite à titre provisionnel et que dès lors, les expressions n'étant pas équivalentes, l'une ne peut être d'autorité substituée à l'autre par interprétation de la volonté du créancier déclarant ;

Attendu qu'en se déterminant par de tels motifs, sans rechercher si la déclaration de créance, même à titre provisionnel, ne révélait pas la volonté non équivoque de l'Office de réclamer à titre définitif la somme indiquée, la cour d'appel n'a pas donné de base légale à sa décision ;

PAR CES MOTIFS :

CASSE ET ANNULE, dans toutes ses dispositions, l'arrêt rendu le 28 mai 2009, entre les parties, par la cour d'appel de Douai ; remet, en conséquence, la cause et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant ledit arrêt et, pour être fait droit, les renvoie devant la cour d'appel de Douai, autrement composée ;

Condamne M. X..., ès qualités, aux dépens ;

Vu l'article 700 du code de procédure civile, rejette les demandes ;

Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite de l'arrêt cassé ;

Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre commerciale, financière et économique, et prononcé par le président en son audience publique du trente novembre deux mille dix.

MOYEN ANNEXE au présent arrêt :

Moyen produit par la SCP Ancel et Couturier-Heller, avocat aux Conseils pour la société FranceAgriMer.

Le moyen reproche à l'arrêt attaqué d'avoir, confirmant l'ordonnance du juge commissaire, rejeté la créance déclarée au passif de la société Dinde des Pays du Nord, en liquidation judiciaire, par l'Office de l'Elevage, aux droits duquel vient l'Etablissement public FranceAgriMer ;

AUX MOTIFS QUE une déclaration de créance équivaut à une demande en Justice, ce qui a pour conséquence qu'elle est soumise à un stricte formalisme ; que l'Office de l'élevage ne saurait prétendre avoir commis un innocent abus de langage en déclarant expressément une créance provisionnelle, alors qu'il avait la faculté de déclarer sa créance sur la base d'une évaluation s'il ne disposait pas de tous les éléments propres à lui permettre de la liquider avec certitude ; qu'il invoque une jurisprudence de la Cour de cassation Chambre Commerciale, issue d'un arrêt du 27 mai 2003 (Bull. IV n° 87) relative précisément à la faculté donnée à un créancier par l'article 67 du décret 27 décembre 1985 de déclarer "une évaluation de la créance si son montant n'a pas encore été fixé" ; que, cependant, si une créance dont le montant n'est pas encore fixé doit être déclarée sur la base d'une évaluation effectuée au moment de la déclaration, il a été jugé que cette possibilité "est distinct(e) d'une déclaration faite à titre ‘provisionnel'‘" (Cass. Com. 15 février 2000, pourvoi n° 97-14.406) ; qu'il s'en déduit que les expressions n'étant pas équivalentes, l'une ne peut être d'autorité substituée à l'autre par interprétation de la volonté du créancier déclarant ;

ALORS D'UNE PART QUE en présence d'une créance déclarée à titre éventuel et provisionnel cependant qu'elle correspondait au montant total de la subvention accordée par l'Office de l'Elevage à la société Dinde des Pays du Nord, créance dont ni l'existence ni le montant n'étaient contestés, la Cour d'appel ne pouvait refuser de rechercher « l'interprétation de la volonté du créancier déclarant » au motif inopérant qu'une déclaration de créance équivaut à une demande en justice ; qu'elle a ainsi entaché son arrêt d'un manque de base légale au regard de l'article L 622-24 du Code de commerce ;

ALORS, D'AUTRE PART, QUE la déclaration des créances doit être faite alors même qu'elles ne sont pas établies par un titre et que celles dont le montant n'est pas encore définitivement fixé sont déclarées sur la base d'une évaluation ; qu'en l'espèce, FranceAgriMer rappelait que la créance déclarée, qui n'était pas contestée, représentait le montant d'une subvention dont la restitution varierait en fonction de l'issue de la procédure collective et plus particulièrement du sort des biens acquis grâce aux subventions ; qu'elle faisait valoir qu'elle n'avait donc pas entendu bénéficier de la procédure particulière propre au Trésor Public et aux organismes sociaux et de prévoyance mais avait bien déclaré à titre définitif sa créance, l'emploi maladroit des termes "éventuel" et "provisionnel" dans la déclaration signifiant seulement que le montant déclaré correspondait à une évaluation qui pouvait être revue à la baisse ; qu'en s'abstenant dès lors de rechercher si la déclaration de créance ne révélait pas la volonté non équivoque du créancier de réclamer à titre définitif le paiement de sa créance envers la société Dinde du Pays du Nord, la Cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard des dispositions de l'article L. 622-24 du Code de commerce.


Synthèse
Formation : Chambre commerciale
Numéro d'arrêt : 09-69257
Date de la décision : 30/11/2010
Sens de l'arrêt : Cassation
Type d'affaire : Commerciale

Analyses

ENTREPRISE EN DIFFICULTE (loi du 26 juillet 2005) - Sauvegarde - Période d'observation - Déclaration de créances - Procédure - Montant non encore définitivement fixé - Déclaration à titre provisionnel - Volonté du créancier - Recherche nécessaire

Prive sa décision de base légale une cour d'appel qui, pour confirmer l'ordonnance rejetant la créance déclarée à titre provisionnel, retient qu'en application de l'article L. 622-24 du code de commerce, dans sa rédaction issue la loi du 26 juillet 2005 de sauvegarde des entreprises, si une créance, dont le montant n'est pas encore fixé, doit être déclarée sur la base d'une évaluation effectuée au moment de la déclaration, cette possibilité est distincte d'une déclaration faite à titre provisionnel et que dès lors, les expressions n'étant pas équivalentes, l'une ne peut être d'autorité substituée à l'autre par interprétation de la volonté du créancier déclarant sans rechercher si la déclaration de créance, effectuée même à titre provisionnel, ne révélait pas la volonté non équivoque du créancier de réclamer à titre définitif la somme indiquée


Références :

article L. 622-24 du code de commerce

Décision attaquée : Cour d'appel de Douai, 28 mai 2009

A rapprocher : Com., 28 juin 2005, pourvoi n° 04-14578, Bull. 2005, IV, n° 142 (cassation)


Publications
Proposition de citation : Cass. Com., 30 nov. 2010, pourvoi n°09-69257, Bull. civ. 2010, IV, n° 187
Publié au bulletin des arrêts des chambres civiles 2010, IV, n° 187

Composition du Tribunal
Président : Mme Favre
Avocat général : M. Le Mesle (premier avocat général)
Rapporteur ?: M. Arbellot
Avocat(s) : SCP Ancel et Couturier-Heller, SCP Baraduc et Duhamel

Origine de la décision
Date de l'import : 14/10/2011
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CCASS:2010:09.69257
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