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23/11/2010 | FRANCE | N°09-70716

France | France, Cour de cassation, Chambre commerciale, 23 novembre 2010, 09-70716


LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE COMMERCIALE, a rendu l'arrêt suivant :

Sur le moyen unique, pris en ses deux premières branches :

Attendu, selon l'arrêt attaqué (Toulouse, 6 mai 2008), que M. X... a déposé le 4 juillet 2006 auprès de l'INPI une demande d'enregistrement n° 06438628 de la marque verbale "Equipe de France de Rugby" pour désigner des produits et services classes 12, 16, 25, 29, 30, 32, 33, 35, 38 et 39, et le 8 septembre 2006, une demande d'enregistrement n° 063449428 de la marque verbale éponyme pour désigner des produits et services des classes 3, 28 et

41 ; que le 22 septembre 2006, la Fédération française de rugby (la FFR...

LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE COMMERCIALE, a rendu l'arrêt suivant :

Sur le moyen unique, pris en ses deux premières branches :

Attendu, selon l'arrêt attaqué (Toulouse, 6 mai 2008), que M. X... a déposé le 4 juillet 2006 auprès de l'INPI une demande d'enregistrement n° 06438628 de la marque verbale "Equipe de France de Rugby" pour désigner des produits et services classes 12, 16, 25, 29, 30, 32, 33, 35, 38 et 39, et le 8 septembre 2006, une demande d'enregistrement n° 063449428 de la marque verbale éponyme pour désigner des produits et services des classes 3, 28 et 41 ; que le 22 septembre 2006, la Fédération française de rugby (la FFR) a déposé les termes Equipe de France de Rugby à titre de marque communautaire ; que M. X... ayant refusé de retirer ses marques, la FFR l'a assigné en revendication de marque au visa des articles L. 711-3 du code de la propriété intellectuelle, L. 131-17 du code des sports, en paiement de dommages-intérêts, et a demandé le transfert de la propriété des marques "Equipe de France de Rugby" à son bénéfice ;
Attendu que M. X... fait grief à l'arrêt de dire que ses dépôts de marques "Equipe de France de Rugby" violaient la prohibition de l'article L. 131-17 du code du sport, et les droits de la Fédération française de rugby au sens de l'article L. 712-6 du code de la propriété intellectuelle, d'ordonner le transfert de la propriété de ces marques à la Fédération française de rugby, et d' ordonner la publication de la décision dans trois journaux ou magazines à ses frais, alors, selon le moyen :
1°/ que si un enregistrement a été demandé soit en fraude des droits d'un tiers, soit en violation d'une obligation légale ou conventionnelle, la personne qui estime avoir un droit sur la marque peut revendiquer sa propriété en justice ; que selon l'article L. 131-17 du code du sport, à l'exception des fédérations sportives agréées à la date du 16 juillet 1992, seules les fédérations sportives délégataires peuvent décerner ou faire décerner l'appellation d'«Equipe de France», suivie du nom d'une ou plusieurs disciplines sportives et la faire figurer dans leurs statuts, contrats, documents ou publicités ; que ce texte ne prohibe pas le dépôt de la marque «Equipe de France de Rugby» par un tiers à la Fédération française de rugby ; qu'en estimant que le dépôt de la marque «Equipe de France de Rugby» avait été effectué en violation d'une obligation légale au motif que «l'article L. 131-17 du code des sports ne limite pas son interdiction à la seule appellation d'équipe sportive et édicte une prohibition générale comme l'indique le terme de décerner, qui n'est pas limitatif», la cour, en ajoutant à ce texte une disposition qu'il ne comporte pas, l'a appliqué à une situation qu'il ne régissait pas, le violant ainsi par fausse application, ensemble, l'article L. 712-6 du code de la propriété intellectuelle ;
2°/ que dès lors que l'article L. 131-17 du code du sport ne prohibe pas expressément le dépôt de la marque «Equipe de France Rugby» par un tiers aux fédérations sportives agréées et fédérations sportives délégataires, la cour, en considérant que tel était le cas, a violé le principe de sécurité juridique et l'article 6-1 de la Convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
Mais attendu que l'arrêt retient à bon droit que l'article L. 131-17 du code des sports a pour effet de restreindre les modalités d'utilisation de l'appellation Equipe de France et d'interdire son utilisation, fut-ce en l'utilisant à titre de marque ; que le moyen n'est pas fondé ;
Attendu que les autres griefs ne seraient pas de nature à permettre l'admission du pourvoi ;
PAR CES MOTIFS :
REJETTE le pourvoi ;
Condamne M. X... aux dépens ;
Vu l'article 700 du code de procédure civile, rejette sa demande ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre commerciale, financière et économique, et prononcé par le président en son audience publique du vingt-trois novembre deux mille dix.

MOYEN ANNEXE au présent arrêt :


Moyen produit par la SCP Nicolaÿ, de Lanouvelle et Hannotin, avocat aux Conseils, pour M. X...

IL EST FAIT GRIEF à l'arrêt confirmatif attaqué D'AVOIR dit que les dépôts par Monsieur X... de la marque «Equipe de France de Rugby» (n°063438628 et n°063449428) violaient la prohibition de l'article L.131-17 du Code du sport, violaient les droits de la Fédération Française de Rugby au sens de l'article L.712-6 du Code de la propriété intellectuelle, ordonné le transfert de la propriété de ces marques à la Fédération Française de Rugby, et ordonné la publication de la décision dans trois journaux ou magazines aux frais de Monsieur X... ;
AUX MOTIFS PROPRES QU'en application de l'article L 131-17 du Code des sports «à l'exception des fédérations sportives agréées à la date du 16 juillet 1992 seules les fédérations sportives délégataires peuvent décerner l'appellation d'équipe de France suivie du nom d'une ou plusieurs disciplines sportives et la faire figurer dans leurs statuts contrats document ou publicités» ; que l'article L. 131-17 du Code des sports ne limite pas son interdiction à la seule appellation d'équipe sportive et édicte une prohibition générale comme l'indique le terme de décerner, qui n'est pas limitatif ; que ce texte a donc effet de restreindre les modalités d'utilisation de l'appellation équipe de France et d'interdire son utilisation par tout autre que les fédérations agréées ou délégataires; que Monsieur X... n'est ni une fédération sportive agréée ni une fédération sportive délégataire ; il ne peut donc décerner l'appellation équipe de France par application du texte précédents, fut-ce en l'utilisant à titre de marque ; que les premiers juges ont donc considéré que les dépôts de marques «Equipe de France de rugby» qu'il a effectués les 4 juillet et 8 septembre 2006 méconnaissaient les droits de la Fédération Française de Rugby ; que la fraude fonde l'action en revendication prévue à l'article L 712-6 du Code de la propriété intellectuelle et permet à celui qui a été indûment privé de son droit d'en recouvrer la propriété ; que tel est bien le cas en l'espèce où Monsieur X... a cherché à se constituer un monopole d'exploitation sur une appellation que seule la Fédération Française de Rugby est habilitée à décerner ; que ce faisant, Monsieur X... a d'une part méconnu les droits antérieurs de la Fédération Française de Rugby et d'autre part engendré un risque de confusion, la marque étant susceptible de laisser croire qu'il s'agit de produits officiels de la Fédération Française de Rugby ; que les premiers juges ont retenu à juste titre que le dépôt frauduleux étaie caractérisé, et fait droit à l'action en revendication de la Fédération Française de Rugby sur la marque dont la validité n'est pas contestée ; que leur décision sera confirmée ; que Monsieur X... a négligé les avertissements amiables qui lui avaient été délivrés par la Fédération Française de Rugby ; que celle-ci justifie que Monsieur X... a procédé à diverses opérations de publicité pour promouvoir ses produits ; que la publication de la décision a été à juste titre ordonnée, mais le coût maximum de chaque insertion sera limité à 2.500 € HT; ET AUX MOTIFS ADOPTES QU'en demandant l'enregistrement des marques «Equipe de France de rugby», Gaël X... fait une utilisation de cette appellation directement prohibée par le texte ci-dessus, violant une interdiction légale générale, sanctionnable par elle-même indépendamment de toute législation sur la propriété des marques ; que cette utilisation prenant en outre la forme spécifique du dépôt d'une marque, elle tombe au surplus directement sous le coup des prohibitions de l'article L711 - 3 du Code de la propriété intellectuelle ; que dès lors, l'article L.712-6 du Code de la propriété habituelle doit s'appliquer qui dispose que «si un enregistrement a été demandé soit en fraude des droits des tiers, soit en violation d'une règle légale ou conventionnelle, la personne qui estime avoir un droit sur la marque peut revendiquer sa propriété en justice» ; que la F.F.R. est donc fondée à réclamer les marques déposées à l'enregistrement par Gaël X... ;
1°) ALORS QUE si un enregistrement a été demandé soit en fraude des droits d'un tiers, soit en violation d'une obligation légale ou conventionnelle, la personne qui estime avoir un droit sur la marque peut revendiquer sa propriété en justice ; que selon l'article L.131-17 du Code du sport, à l'exception des fédérations sportives agréées à la date du 16 juillet 1992, seules les fédérations sportives délégataires peuvent décerner ou faire décerner l'appellation d'«Equipe de France», suivie du nom d'une ou plusieurs disciplines sportives et la faire figurer dans leurs statuts, contrats, documents ou publicités ; que ce texte ne prohibe pas le dépôt de la marque «Equipe de France de Rugby» par un tiers à la Fédération Française de Rugby ; qu'en estimant que le dépôt de la marque «Equipe de France de Rugby» avait été effectué en violation d'une obligation légale au motif que «l'article L. 131-17 du Code des sports ne limite pas son interdiction à la seule appellation d'équipe sportive et édicte une prohibition générale comme l'indique le terme de décerner, qui n'est pas limitatif», la Cour, en ajoutant à ce texte une disposition qu'il ne comporte pas, l'a appliqué à une situation qu'il ne régissait pas, le violant ainsi par fausse application, ensemble l'article L.712-6 du Code de la propriété intellectuelle ;
2°) ALORS QUE dès lors que l'article L.131-17 du Code du sport ne prohibe pas expressément le dépôt de la marque «Equipe de France Rugby» par un tiers aux fédérations sportives agréées et fédérations sportives délégataires, la Cour, en considérant que tel était le cas, a violé le principe de sécurité juridique et l'article 6-1 de la Convention européenne de sauvegarde des Droits de l'Homme et des Libertés fondamentales ;
3°) ALORS QU'est frauduleux le dépôt d'une marque effectué en vue d'accaparer un marché au détriment des opérateurs qui l'animent ; qu'en se déterminant par des motifs impropres à établir que Monsieur X... avait procédé au dépôt litigieux avec l'intention de porter préjudice aux droits de la Fédération Française de Rugby, ce alors que Monsieur X... faisait valoir que le dépôt avait été effectué uniquement pour associer dans un but promotionnel les marques «Tous en Bleu» et «Equipe de France de Rugby», la Cour d'appel, qui n'a pas caractérisé une atteinte consciente de la part du déposant portant sur la faculté pour la Fédération Française de Rugby d'utiliser la dénomination «Equipe de France de Rugby», pas plus que son intention d'accaparer un marché au détriment d'un opérateur qui l'animerait, n'a pas donné de base légale à sa décision au regard de l'article L.712-6 du Code de la propriété intellectuelle ;
4°) ALORS QU'à cet égard, est inopérant le motif selon lequel Monsieur X... aurait cherché à se constituer un monopole d'exploitation sur une appellation que seule la Fédération Française de Rugby est habilitée à décerner, le fait pour Monsieur X... de déposer la marque «Equipe de France de Rugby» ne pouvant porter atteinte à une prérogative de la F.F.R. prévue par la Loi ; qu'en statuant ainsi, la Cour a violé l'article L.712-6 du Code de la propriété intellectuelle ;
5°) ALORS QU'à cet égard, est tout autant inopérant le motif selon lequel Monsieur X... aurait engendré un risque de confusion, la marque étant susceptible de laisser croire qu'il s'agit de produits officiels de la Fédération Française de Rugby, ce alors que ce motif, qui ne caractérise aucunement l'atteinte consciente de la part de Monsieur X..., en procédant au dépôt de ces termes à titre de marque, à la faculté de la F.F.R. d'utiliser cette dénomination, caractérise au contraire l'intention de Monsieur X... de conquérir un marché, vocation première de toute marque; qu'en statuant ainsi, la Cour a violé l'article L.712-6 du Code de la propriété intellectuelle ;
6°) ALORS, en tout cas, QUE Monsieur X... faisait valoir que selon l'article L.712-6 du Code de la propriété intellectuelle, si un enregistrement a été demandé soit en fraude des droits d'un tiers, soit en violation d'une obligation légale ou conventionnelle, la personne qui estime avoir un droit sur la marque peut revendiquer sa propriété en justice ; que Monsieur X... faisait valoir que les mots ayant un sens, il résulte des termes mêmes de ce texte que l'action qu'il prévoit a pour objet de revendiquer une propriété si bien que le revendiquant doit apporter la preuve d'un droit de propriété; qu'à cet égard, Monsieur X... faisait valoir que contrairement à l'article L.141-5 du Code du sport qui prévoit que le Comité national olympique et sportif français est «propriétaire des emblèmes olympiques nationaux et dépositaire de la devise, de l'hymne, du symbole olympique et des termes «jeux Olympiques» et «Olympiade»», l'article L.131-17 du Code du sport ne prévoit rien de tel au profit des fédérations sportives agréées et fédérations sportives délégataires si bien que la F.F.R. ne démontrait aucunement un quelconque droit de propriété sur la marque litigieuse qu'en faisant droit à l'action de la Fédération Française de Rugby sans répondre à ce moyen péremptoire, la Cour a violé l'article 455 du Code de procédure civile ;
7°) ALORS QU'à supposer que la Cour y ait répondu au motif que seule la Fédération Française de Rugby est habilitée à décerner l'appellation «Equipe de France de Rugby», elle aurait alors violé les articles L.712-6 du Code de la propriété intellectuelle et L.131-17 du Code du sport, la prérogative conférée aux Fédérations par le second de ces textes de décerner l'appellation «Equipe de France de (…)» ne conférant aucun droit sur une marque ;
8°) ALORS, en tous cas, QUE la déclaration à intervenir, de non conformité de l'article L.131-17 du Code du sport à la Constitution, aura pour conséquence de priver rétroactivement l'arrêt de toute base légale ;
9°) ALORS QUE la décision par laquelle le directeur de l'Institut national de la propriété industrielle statue sur un recours en opposition à l'enregistrement d'une marque revêt un caractère juridictionnel et est susceptible d'un recours dont les modalités sont prévues, à peine d'irrecevabilité devant être soulevée d'office, par les articles R.411-19 et R.411-21 du Code de la propriété intellectuelle ; que Monsieur X... avait fait état de l'opposition formée par la Fédération Française de Rugby auprès du directeur de l'Institut national de la propriété industrielle (pièce produite n°3), fondée sur une prétendue violation de l'article L.131-17 du Code du sport et une prétendue fraude, ainsi que de l'enregistrement de la marque litigieuse, le 9 février 2007, malgré ladite opposition (pièce produite n°33) ; qu'en accueillant la revendication de la marque «Equipe de France de Rugby» au visa de la violation de l'article L.131-17 du Code du sport et d'une prétendue fraude commise par Monsieur X..., sans rechercher, au besoin d'office, si la Fédération avait formé un recours dans les conditions prévues par l'article R411-21 du Code de la propriété intellectuelle contre le rejet de son opposition résultant de l'enregistrement des marques litigieuses, la Cour a privé sa décision de base légale au regard de l'article L.712-6 du Code de la propriété intellectuelle, ensemble les principes de sécurité juridique et de confiance légitime garantis par l'article 6-1 de la Convention européenne de sauvegarde des Droits de l'Homme et des Libertés fondamentales et au regard du droit à la protection des biens garanti par l'article 1er du Protocole n°1 additionnel à ladite Convention ;
10°) ALORS QU'en tout état de cause, en revenant sur un point en litige qui avait déjà été tranché par une décision juridictionnelle définitive, la Cour a enfreint le principe de la sécurité des rapports juridique garanti par l'article 6-1 de la Convention européenne de sauvegarde des Droits de l'Homme et des Libertés fondamentales, en violation de ce texte.


Synthèse
Formation : Chambre commerciale
Numéro d'arrêt : 09-70716
Date de la décision : 23/11/2010
Sens de l'arrêt : Rejet
Type d'affaire : Commerciale

Analyses

SPORTS - Organisation des activités physiques et sportives - Fédérations sportives - Appellation "Equipe de France" - Restrictions et interdictions d'utilisation - Portée

L'article L. 131-17 du code des sports a pour effet de restreindre les modalités d'utilisation de l'appellation "Equipe de France" et d'interdire son utilisation en dehors des conditions qu'il prévoit, y compris à titre de marque


Références :

article L. 131-17 du code du sport

Décision attaquée : Cour d'appel de Toulouse, 06 mai 2008


Publications
Proposition de citation : Cass. Com., 23 nov. 2010, pourvoi n°09-70716, Bull. civ. 2010, IV, n° 184
Publié au bulletin des arrêts des chambres civiles 2010, IV, n° 184

Composition du Tribunal
Président : Mme Favre
Avocat général : M. Bonnet
Rapporteur ?: Mme Pezard
Avocat(s) : SCP Nicolaÿ, de Lanouvelle et Hannotin, SCP Potier de La Varde et Buk-Lament

Origine de la décision
Date de l'import : 14/10/2011
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CCASS:2010:09.70716
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