LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l'arrêt suivant :
Sur le moyen unique :
Attendu, selon l'arrêt attaqué (Poitiers, 17 mars 2009), que M. X..., engagé le 23 janvier 1991 en qualité de chef d'entretien par l'association Entraide sociale poitevine (l'association), et affecté dans un centre d'hébergement et de réinsertion sociale, a été licencié pour faute grave le 2 mars 2006 ;
Attendu que l'association fait grief à l'arrêt de dire le licenciement du salarié dénué de cause réelle et sérieuse, alors, selon le moyen :
1°/ que l'autorité de la chose jugée au pénal s'impose au juge civil relativement aux faits constatés qui constituent le soutien nécessaire de la condamnation pénale ; qu'il résulte du jugement du tribunal correctionnel de Poitiers du 17 octobre 2006 que M. X... était «prévenu d'avoir à Poitiers, courant 2004 et 2005, en tout cas depuis temps non prescrit, harcelé Bibiche Y..., dans le but d'obtenir des faveurs de nature sexuelle, en l'espèce en lui passant la main sur les fesses, en cherchant à l'observer dans sa chambre et sa douche, en lui tenant des propos obscènes et en se masturbant devant elle» ; que l'autorité de la chose jugée au pénal portait donc uniquement sur ces faits limitativement énumérés ; que, dans la lettre de licenciement, l'association Entraide sociale poitevine reprochait à M. X..., non seulement les faits dont il était poursuivi devant le tribunal correctionnel, mais également d'avoir «recherché de façon répétée et régulière une promiscuité» avec Mme Y..., notamment en lui «proposant un string comme cadeau», de s'«être masturbé sur les lieux de travail» du fait de l'excitation provoquée par le côtoiement de Mme Y... et, enfin, de ne pas avoir fait part à son supérieur hiérarchique des troubles que lui causait la fréquentation de Mme Y..., dont, selon ses propres dires, le «physique séduisant» et le «comportement» l'excitaient «particulièrement» ; qu'en s'interdisant d'examiner les griefs mentionnés dans la lettre de licenciement qui n'étaient pas visés par la poursuite pénale, la cour d'appel a fait une fausse application du principe de l'autorité de chose jugée au pénal sur le civil, et a violé l'article 4 du code de procédure pénale ;
2°/ qu'au surplus, en s'abstenant de rechercher si les faits consistant à «rechercher de façon répétée et régulière une promiscuité» avec Mme Y..., notamment en lui «proposant un string comme cadeau», de s'«être masturbé sur les lieux de travail» du fait de l'excitation provoquée par le côtoiement de Mme Y... et, enfin, de ne pas avoir fait part à son supérieur hiérarchique des troubles que lui causait la fréquentation de Mme Y..., dont, selon ses propres dires, le «physique séduisant» et le «comportement» l'excitaient «particulièrement», ne justifiaient pas le licenciement, la cour d'appel a privé sa décision de motif au regard des articles L. 1232-6 et L. 1235-1 (anciens articles L. 122-14-2 et L. 122-14-3) du code du travail ;
Mais attendu que la cour d'appel, qui a relevé que les faits allégués par l'employeur à l'appui du licenciement étaient identiques à ceux portés à la connaissance du juge pénal, a exactement décidé, sans encourir les griefs du moyen, que la relaxe des chefs de harcèlement sexuel et d'exhibition sexuelle s'imposait à elle ; que le moyen n'est pas fondé ;
PAR CES MOTIFS :
REJETTE le pourvoi ;
Condamne l'association Entraide sociale poitevine aux dépens ;
Vu l'article 700 du code de procédure civile, rejette la demande ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre sociale, et prononcé par le président en son audience publique du vingt-trois novembre deux mille dix.
MOYEN ANNEXE au présent arrêt :
Moyen produit par la SCP Célice, Blancpain et Soltner, avocat aux Conseils pour l'association Entraide sociale poitevine
Il est fait grief à l'arrêt infirmatif attaqué d'AVOIR dit le licenciement de Monsieur X... dénué de cause réelle et sérieuse, d'AVOIR condamné l'association ENTRAIDE SOCIALE POITEVINE à verser à Monsieur X... diverses sommes à titre d'indemnité de préavis, de congés payés y afférents, d'indemnité de licenciement, de dommages et intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse et de frais irrépétibles et d'AVOIR ordonné à l'association ENTRAIDE SOCIALE POITEVINE de rembourser à l'organisme concerné les indemnités de chômage versées à Monsieur X... dans la limite de six mois d'indemnités ;
AUX MOTIFS QU' « il est de règle que, en vertu du principe de l'autorité de la chose jugée au pénal, le juge civil ne peut pas retenir pour caractériser la faute grave motivant un licenciement des faits que le juge pénal a tenu pour non établis ; qu'en l'espèce, M. X... a été renvoyé devant le tribunal correctionnel pour : « avoir à Poitiers, courant 2004 et 2005, en tout cas depuis temps non prescrit, harcelé Bibiche Y..., dans le but d'obtenir des faveurs de nature sexuelle, en l'espèce en lui passant la main sur les fesses, en cherchant à l'observer dans sa chambre et dans sa douche, en lui tenant des propos obscènes et en se masturbant devant elle » ; que par jugement du 17 octobre 2006 rectifié par jugement du 27 décembre 2007, le tribunal correctionnel de Poitiers l'a relaxé de l'ensemble des faits reprochés sous la qualification de harcèlement sexuel et d'exhibition sexuelle ; que la lettre de licenciement pour faute grave vise les mêmes faits puisqu'elle reproche à M. X... d'avoir commis des « agissements » à l'encontre de Melle Y... « dont le but était d'obtenir ses faveurs de nature sexuelle », de lui avoir « touché les fesses », de « l'avoir observée lorsqu'elle prenait sa douche », de lui avoir « tenu des propos choquants, déplacés et à connotation sexuelle », d'avoir également commis des faits d'«exhibitionnisme » sur les lieux du travail en se mettant « nu devant elle» ou en se « masturbant devant elle » ; que si la lettre de rupture replace les faits dans leur contexte en les détaillant et rappelle qu'ils sont contraires à la charte des droits et libertés de la personne accueillie applicable dans l'établissement, il demeure que la rupture est fondée sur les mêmes faits que ceux examinés par la juridiction pénale, dont M. X... a été jugé innocent ; qu'il y a lieu d'infirmer le jugement entrepris et de dire que le licenciement est sans cause réelle et sérieuse » ;
ALORS QUE l'autorité de la chose jugée au pénal s'impose au juge civil relativement aux faits constatés qui constituent le soutien nécessaire de la condamnation pénale ; qu'il résulte du jugement du Tribunal Correctionnel de POITIERS du 17 octobre 2006 que Monsieur X... était « prévenu d'avoir à POITIERS, courant 2004 et 2005, en tout cas depuis temps non prescrit, harcelé Bibiche Y..., dans le but d'obtenir des faveurs de nature sexuelle, en l'espèce en lui passant la main sur les fesses, en cherchant à l'observer dans sa chambre et sa douche, en lui tenant des propos obscènes et en se masturbant devant elle » ; que l'autorité de la chose jugée au pénal portait donc uniquement sur ces faits limitativement énumérés ; que, dans la lettre de licenciement, l'association ENTRAIDE SOCIALE POITEVINE reprochait à Monsieur X..., non seulement les faits dont il était poursuivi devant le Tribunal Correctionnel, mais également d'avoir «recherché de façon répétée et régulière une promiscuité » avec Mademoiselle Y..., notamment en lui « proposant un string comme cadeau », de s' « être masturbé sur les lieux de travail » du fait de l'excitation provoquée par le côtoiement de Mademoiselle Y... et, enfin, de ne pas avoir fait part à son supérieur hiérarchique des troubles que lui causait la fréquentation de Mademoiselle Y..., dont, selon ses propres dires, le « physique séduisant » et le « comportement » l'excitaient «particulièrement » ; qu'en s'interdisant d'examiner les griefs mentionnés dans la lettre de licenciement qui n'étaient pas visés par la poursuite pénale, la cour d'appel a fait une fausse application du principe de l'autorité de chose jugée au pénal sur le civil, et a violé l'article 4 du Code de Procédure Pénale ;
QU'au surplus, en s'abstenant de rechercher si les faits consistant à «rechercher de façon répétée et régulière une promiscuité» avec Mademoiselle Y..., notamment en lui «proposant un string comme cadeau », de s'« être masturbé sur les lieux de travail » du fait de l'excitation provoquée par le côtoiement de Mademoiselle Y... et, enfin, de ne pas avoir fait part à son supérieur hiérarchique des troubles que lui causait la fréquentation de Mademoiselle Y..., dont, selon ses propres dires, le «physique séduisant» et le «comportement» l'excitaient « particulièrement», ne justifiaient pas le licenciement, la cour d'appel a privé sa décision de motif au regard des articles L. 1232-6 et L. 1235-1 (anciens articles L.122-14-2 et L. 122-14-3) du Code du travail.