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03/11/2010 | FRANCE | N°09-15546

France | France, Cour de cassation, Chambre commerciale, 03 novembre 2010, 09-15546


LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE COMMERCIALE, a rendu l'arrêt suivant :
Attendu, selon l'arrêt déféré, qu'après la mise en liquidation judiciaire de M. X..., le 10 décembre 1999, la SELARL Z..., devenue SELAS Z..., agissant en sa qualité de liquidateur judiciaire de celui-ci, a assigné Mme Y... en remboursement de diverses sommes en soutenant qu'elles avaient été remises à cette dernière, en mars et novembre 2002, janvier et novembre 2003, par chèques ou virements bancaires ou en espèces, par M. X... ; qu'il réclamait en outre, une certaine somme à titre d'indemnité pour ré

sistance abusive ; qu'un jugement du 4 mai 2007, a fait droit partiel...

LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE COMMERCIALE, a rendu l'arrêt suivant :
Attendu, selon l'arrêt déféré, qu'après la mise en liquidation judiciaire de M. X..., le 10 décembre 1999, la SELARL Z..., devenue SELAS Z..., agissant en sa qualité de liquidateur judiciaire de celui-ci, a assigné Mme Y... en remboursement de diverses sommes en soutenant qu'elles avaient été remises à cette dernière, en mars et novembre 2002, janvier et novembre 2003, par chèques ou virements bancaires ou en espèces, par M. X... ; qu'il réclamait en outre, une certaine somme à titre d'indemnité pour résistance abusive ; qu'un jugement du 4 mai 2007, a fait droit partiellement à cette demande et condamné Mme Y... à payer à la SELAS Z..., ès qualités, la somme de 18 539 euros ;
Sur le moyen unique, pris en ses deuxième et troisième branches, en ce qu'il fait grief à l'arrêt d'avoir rejeté la demande de la SELAS Z..., ès qualités, tendant à la condamnation de Mme Y... au paiement des sommes de 4878, 37 euros, 230 euros, 30 490 euros et celle de 5 000 euros pour résistance abusive ;
Mais attendu que ce moyen ne serait pas de nature à permettre l'admission du pourvoi ;
Mais sur le moyen, pris en sa première branche :
Vu l'article 4 du code de procédure civile ;
Attendu que pour infirmer le jugement et rejeter la demande de la SELAS Z..., ès qualités, tendant à la condamnation de Mme Y... au paiement de la somme de 18 539 euros, l'arrêt retient que la remise de cette somme trouve sa cause dans l'intention libérale de M. X... et que cette demande était exclusivement fondée sur l'enrichissement sans cause ; Attendu qu'en statuant ainsi, alors que M. X... avait aussi invoqué la règle de l'inopposabilité à la procédure collective des actes accomplis par un débiteur mis en liquidation judiciaire, la cour d'appel a modifié l'objet du litige et violé le texte susvisé ;

Et sur le moyen, pris en sa deuxième branche, en ce qu'il fait grief à l'arrêt d'avoir rejeté la demande de la SELAS Z..., ès qualités, tendant à la condamnation de Mme Y... au paiement de la somme de 18539, 2000 et 1000 euros ;
Vu, l'article L. 622-9 du code de commerce, dans sa rédaction antérieure à la loi du 26 juillet 2005 de sauvegarde des entreprises ;
Attendu que sont inopposables à la procédure collective d'un débiteur, dessaisi du droit de disposer de ses biens en raison de sa mise en liquidation judiciaire, les émissions de chèques ainsi que les virements effectués à partir d'un compte bancaire personnel ou joint ;
Attendu que pour rejeter les demandes de la SELAS Z..., ès qualités, l'arrêt retient que la remise de la somme de 18 539 euros, correspondant au règlement partiel, le 22 janvier 2003, du prix d'acquisition de l'entrepôt, par un chèque émis sur le compte bancaire personnel de M. X..., trouve sa cause dans l'intention libérale de celui-ci, tandis que la demande se fonde exclusivement sur l'enrichissement sans cause ; qu'il retient encore, en ce qui concerne les sommes de 2 000 et 1 000 euros, virées sur le compte de Mme Y..., en mars 2002 et juin 2003, que le compte débité est un compte-joint et qu'aucun élément de la cause ne permet d'exclure l'intention libérale de M. X... quant à la remise des fonds ;
Attendu qu'en statuant ainsi, quand elle avait constaté que la somme de 18 539 euros avait été perçue par Mme Y..., sous la forme d'un chèque émis par M. X... le 22 janvier 2003 et que celles de 2 000 et 1 000 euros provenaient de virements ordonnés par celui-ci, en mars 2002 et novembre 2003, après sa mise en liquidation judiciaire, la cour d'appel a violé le texte susvisé ;
PAR CES MOTIFS, sans qu'il y ait lieu de statuer sur l'autre grief :
CASSE ET ANNULE, mais seulement en ce qu'il rejette la demande de la SELAS Z..., ès qualités, tendant à la condamnation de Mme Y... au paiement des sommes de 18 539, 2 000 et 1 000 euros, l'arrêt rendu le 6 avril 2009, entre les parties, par la cour d'appel de Douai ; remet, en conséquence, sur ce point, la cause et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant ledit arrêt et, pour être fait droit, les renvoie devant la cour d'appel de Douai, autrement composée ;
Condamne Mme Y... aux dépens ;
Vu l'article 700 du code de procédure civile, rejette la demande ;
Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite de l'arrêt partiellement cassé ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre commerciale, financière et économique, et prononcé par le président en son audience publique du trois novembre deux mille dix.

MOYEN ANNEXE au présent arrêt :


Moyen produit par la SCP Baraduc et Duhamel, avocat aux Conseils pour M. X...

IL EST FAIT GRIEF à l'arrêt infirmatif attaqué d'avoir débouté la SELAS Z..., ès qualités de liquidateur judiciaire de monsieur Patrick X..., de ses demandes tendant à ce que madame Y... soit condamnée à lui payer les sommes de 53. 957, 37 € pour l'acquisition de l'entrepôt et de 3. 000 € pour les sommes virées à son bénéfice, outre intérêts au taux légal à compter de la mise en demeure du 1er avril 2005, et la somme de 5. 000 € pour résistance abusive ;
AUX MOTIFS QUE, sur la somme de 18. 539 €, il ressort des pièces versées aux débats que l'entrepôt a été acquis par madame Y... le 22 janvier 2003 au prix de 52. 883, 69 €, qui a été réglé à hauteur de 18. 359 € par un chèque de monsieur X..., tiré sur un compte bancaire au Crédit mutuel ; que madame Y... ne conteste ni avoir reçu ce chèque ni l'avoir utilisé pour régler une partie du prix de l'entrepôt mais invoque l'existence d'un don manuel de monsieur X... ; que madame Y... était le possesseur du chèque ayant servi au paiement et qu'elle prétend l'avoir reçu en don manuel, elle bénéficie d'une présomption en ce sens ; qu'il appartient donc à monsieur X... de rapporter la preuve de l'absence d'un tel don ou de prouver que la possession dont se prévaut madame Y... ne réunit pas les conditions légales pour être efficace ; qu'aucun élément de la cause ne permet d'écarter, en l'espèce, l'absence de don manuel, étant relevé que les parties vivaient, lors de la remise du chèque, en concubinage et que la volonté de monsieur X... d'aider sa compagne à acquérir l'entrepôt en lui donnant une partie du prix ne peut être exclue, et ce d'autant plus qu'il devait bénéficier de sa jouissance et qu'il y a déposé différents objets lui appartenant ; que les termes de la sommation interpellative du 24 avril 2006 ne permettent pas de caractériser la reconnaissance par madame Y... de l'absence de don manuel, alors qu'elle indique que monsieur X... l'a aidé financièrement pour l'acquisition de l'entrepôt, ce qui peut correspondre au don invoqué ; que le fait qu'il soit indiqué dans un courrier du 14 avril 2005 émanant de l'avocat de madame Y... que madame Y... conteste devoir à monsieur X... la somme de 53. 957, 37 €, ou toute autre somme, est conforme aux prétentions de première instance et d'appel de madame Y... ; que dans ces conditions, la remise de la somme de 18. 539 € trouvant sa cause dans l'intention libérale de monsieur X..., la demande exclusivement formée sur le fondement de l'enrichissement sans cause doit être rejetée ; que, sur les autres sommes, en ce qui concerne l'acquisition de l'entrepôt, il apparaît que la remise des sommes de 4. 878, 37 € au titre du dépôt de garantie et de 230 € au titre des frais de compromis a été faite le 4 novembre 2002 lors de la signature de l'avant contrat de vente de l'entrepôt, auquel madame Y... n'était pas partie ; que l'acte authentique de vente, réalisée, en définitive, au profit de madame Y..., mentionne que l'intégralité du prix a été réglé le jour même (22 janvier 2003) à l'ancien propriétaire qui en a donné quittance à madame Y..., « sous réserve de l'encaissement du chèque » ; que la remise des sommes de 4. 878, 37 € et 230 € à madame Y... par monsieur X... n'est donc pas établie ; que de plus, les chèques ont été tirés sur le compte joint des parties ; qu'aucun élément du dossier ne vient accréditer que les versements en espèce faits sur le compte de madame Y... proviennent de monsieur X... ; qu'en ce qui concerne les sommes de 2. 000 € et 1. 000 €, virées sur le compte de madame Y..., en mars 2002 et juin 2003, il apparaît que le compte débité est un compte joint, comme l'avait indiqué madame Y... lors de la sommation interpellative du 24 avril 2006 et qu'aucun élément de la cause ne permet d'exclure l'intention libérale de monsieur X... quant à la remise de fonds à madame Y... ; que monsieur X... doit donc être débouté de sa demande fondée sur l'enrichissement sans cause ;
1° / ALORS QUE l'objet du litige est déterminé par les prétentions respectives des parties ; qu'il incombe au juge de statuer selon ces prétentions ; qu'en l'espèce, la cour d'appel a affirmé que la remise de sommes d'argent par monsieur X... à madame Y... pour l'acquisition d'un entrepôt n'était pas constitutive d'un enrichissement sans cause, de sorte qu'il y avait lieu de rejeter « la demande exclusivement formée sur ce fondement » ; qu'en statuant ainsi, tandis que la SELAS Z..., ès qualités de liquidateur judiciaire de monsieur X..., faisait également valoir l'inopposabilité de la remise de ces sommes par le débiteur en liquidation judiciaire (conclusions, p. 3, § 9 et 10), la cour d'appel a dénaturé les conclusions de la SELAS Z..., ès qualités, et a violé l'article 4 du Code de procédure civile ;
2° / ALORS, subsidiairement, QUE le jugement qui ouvre ou prononce la liquidation judiciaire emporte de plein droit, à partir de sa date, dessaisissement pour le débiteur de l'administration et de la disposition de ses biens ; que les actes de disposition accomplis par le débiteur sont inopposables à la procédure collective ; qu'en se contentant de retenir l'absence d'enrichissement sans cause de madame Y... du fait de remises de fonds par monsieur X..., débiteur en liquidation judiciaire, sans rechercher, comme elle y était pourtant invitée (conclusions, p. 3, § 9 et 10), si ces remises étaient inopposables à la liquidation judiciaire, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard de l'article L 622-9 du Code de commerce, en sa rédaction applicable en l'espèce ;
3° / ALORS, en tout état de cause, QUE la convention de compte joint fait présumer que les fonds qui se trouvent portés au crédit du compte sont la propriété indivise de ses titulaires ; qu'il incombe au juge de rechercher si ce compte a été exclusivement alimenté par l'un de ses titulaires ; qu'en l'espèce, la cour d'appel a affirmé que les sommes de 4. 878, 37 € et de 230 € nécessaires à l'acquisition d'un entrepôt au nom de madame Y..., comme les sommes de 2. 000 € et 1. 000 € versées à madame Y... en mars 2002 et juin 2003, n'appartenaient pas à monsieur X..., au seul motif qu'elles provenaient du compte joint de monsieur X... et de madame Y... ; qu'en statuant ainsi, sans constater que ce compte joint avait été alimenté exclusivement par madame Y..., de sorte que le solde du compte ne pouvait être la propriété de monsieur X..., ni la propriété indivise des co-titulaires, la cour d'appel a violé l'article 455 du Code de procédure civile.


Synthèse
Formation : Chambre commerciale
Numéro d'arrêt : 09-15546
Date de la décision : 03/11/2010
Sens de l'arrêt : Cassation partielle
Type d'affaire : Commerciale

Analyses

ENTREPRISE EN DIFFICULTE (loi du 25 janvier 1985) - Liquidation judiciaire - Effets - Dessaisissement du débiteur - Portée - Chèques et virements postérieurs - Inopposabilité à la procédure collective

Sont inopposables à la procédure collective d'un débiteur, dessaisi du droit de disposer de ses biens en raison de sa mise en liquidation judiciaire, les émissions de chèques ainsi que les virements effectués à partir d'un compte bancaire personnel ou joint


Références :

article L. 622-9 du code de commerce, dans sa rédaction antérieure à la loi du 26 juillet 2005

Décision attaquée : Cour d'appel de Douai, 06 avril 2009


Publications
Proposition de citation : Cass. Com., 03 nov. 2010, pourvoi n°09-15546, Bull. civ. 2010, IV, n° 163
Publié au bulletin des arrêts des chambres civiles 2010, IV, n° 163

Composition du Tribunal
Président : Mme Favre
Avocat général : Mme Bonhomme
Rapporteur ?: M. Albertini
Avocat(s) : SCP Baraduc et Duhamel

Origine de la décision
Date de l'import : 14/10/2011
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CCASS:2010:09.15546
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