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26/10/2010 | FRANCE | N°09-42634

France | France, Cour de cassation, Chambre sociale, 26 octobre 2010, 09-42634


LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l'arrêt suivant :

Sur le premier moyen :
Vu les articles R. 4624-17, R. 4624-19 et R. 4624-20 du code du travail ;
Attendu, selon l'arrêt attaqué, que M. X..., travailleur handicapé, a été engagé en octobre 2003 par l'association Résidence Sainte-Claire en qualité d'agent des services logistiques dans le cadre d'un contrat initiative emploi à durée indéterminée à temps partiel ; qu'invoquant un manquement de l'employeur à l'exécution de bonne foi du contrat de travail et une qualification inférieure à celle correspo

ndant à ses fonctions, il a saisi la juridiction prud'homale, le 16 janvier 2...

LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l'arrêt suivant :

Sur le premier moyen :
Vu les articles R. 4624-17, R. 4624-19 et R. 4624-20 du code du travail ;
Attendu, selon l'arrêt attaqué, que M. X..., travailleur handicapé, a été engagé en octobre 2003 par l'association Résidence Sainte-Claire en qualité d'agent des services logistiques dans le cadre d'un contrat initiative emploi à durée indéterminée à temps partiel ; qu'invoquant un manquement de l'employeur à l'exécution de bonne foi du contrat de travail et une qualification inférieure à celle correspondant à ses fonctions, il a saisi la juridiction prud'homale, le 16 janvier 2007, pour demander la résiliation judiciaire du contrat de travail aux torts de l'employeur et le paiement de diverses sommes ; qu'il a été licencié pour faute grave, le 22 janvier 2007 ;
Attendu que pour constater l'exécution de bonne foi du contrat de travail par l'employeur et en conséquence débouter le salarié de sa demande de dommages et intérêts pour exécution du contrat de travail de mauvaise foi ainsi que de ses demandes de résiliation du contrat de travail aux torts de l'employeur et de condamnation à des dommages et intérêts y afférente, l'arrêt retient que M. X... rappelle que, travailleur handicapé, il disait faire l'objet d'un suivi renforcé de la part de la médecine du travail, dont l'employeur ne s'est pas inquiété, que le salarié a bénéficié d'une visite d'embauche le 27 octobre 2003, qu'il a été déclaré apte au poste d'agent d'entretien sans réserve ni restriction, qu'il a été revu le 27 septembre 2005, qu'il a été convoqué à plusieurs reprises en 2006 et a fait l'objet d'une dernière visite en décembre 2006, après plusieurs reports, que le salarié doit faire l'objet d'un examen médical dans les 24 mois qui suivent l'examen d'embauche, examen renouvelé une fois tous les 2 ans, que cette périodicité peut être écourtée par le médecin du travail pour les salariés handicapés, à l'initiative de ce praticien, que dans le cas d'espèce le délai maximum de 2 ans a été respecté et qu'il n'y a pas d'indication que le suivi médical a été éludé ;
Attendu, cependant, qu'aux termes de l'article R. 4624-19 du code du travail, bénéficient d'une surveillance médicale renforcée, notamment, les travailleurs handicapés ; qu'en vertu de l'article R. 4624-17 du même code les examens périodiques pratiqués dans le cadre de la surveillance médicale renforcée définie à l'article R. 4624-19 sont renouvelés au moins une fois par an ; que, selon l'article R. 4624-20, le médecin du travail est juge de la fréquence et de la nature des examens que comporte la surveillance médicale renforcée mais que ces dispositions ne font pas obstacle aux examens périodiques pratiqués en application des dispositions de l'article R. 4624-17 ;
Qu'en statuant comme elle a fait, alors que la circonstance que le médecin du travail est juge de la fréquence des examens que comporte la surveillance médicale renforcée ne permet pas d'éluder le renouvellement annuel des examens périodiques pratiqués dans le cadre de la surveillance médicale renforcée, la cour d'appel, qui a constaté que le premier examen périodique du salarié avait été effectué près de deux ans après la visite médicale d'embauche, n'a pas tiré les conséquences légales de ses constatations et a violé les textes susvisés ;
Et attendu que la cassation sur le premier moyen entraîne la cassation sur le second moyen qui s'y rattache par un lien de dépendance nécessaire dès lors qu'elle remet en discussion devant la juridiction de renvoi le bien-fondé de la demande de résiliation judiciaire du salarié et qu'il ne peut être statué sur le bien-fondé du licenciement pour faute grave du salarié que pour autant que la demande de résiliation judiciaire n'est pas fondée ;
PAR CES MOTIFS :
CASSE ET ANNULE, sauf en ce qu'il déboute M. X... de sa demande de reclassification et de rappel de salaire correspondant, l'arrêt rendu le 2 septembre 2008, entre les parties, par la cour d'appel d'Angers ; remet, en conséquence, sur les autres points, la cause et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant ledit arrêt et, pour être fait droit, les renvoie devant la cour d'appel de Rennes ;
Condamne l'association Résidence Sainte-Claire aux dépens ;
Vu l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991, condamne l'association Résidence Sainte-Claire à payer à la SCP Peignot etGarreau la somme de 2 500 euros ;
Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite de l'arrêt partiellement cassé ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre sociale, et prononcé par le président en son audience publique du vingt-six octobre deux mille dix.

MOYENS ANNEXES au présent arrêt :

.
Moyens produits par la SCP Peignot et Garreau, avocat aux Conseils, pour M. X....
PREMIER MOYEN DE CASSATION :

Le moyen reproche à l'arrêt attaqué d'avoir constaté l'exécution de bonne foi du contrat de travail par l'employeur, et en conséquence, débouté Monsieur X... de sa demande de 3.000 € de dommages-intérêts pour exécution du contrat de travail de mauvaise foi ainsi que de ses demandes de résiliation du contrat de travail aux torts de l'employeur, de condamnation à 46.000 € de dommages-intérêts y afférents, à 2.314,66 € au titre de rappel de salaires pour changement de classification et à 231,47 € au titre des congés payés y afférents,
AUX MOTIFS PROPRES QUE
"Monsieur X... invoque une exécution de mauvaise foi du contrat par son employeur.
Il rappelle que travailleur handicapé, il disait faire l'objet d'un suivi renforcé de la part de la médecine du travail, dont l'employeur ne s'est pas inquiété.
Le salarié a bénéficié d'une visite d'embauche le 27 octobre 2003. Il a été déclaré apte au poste d'agent d'entretien sans réserves, ni restriction.
Il a été revu le 27 septembre 2005. Il a été convoqué à plusieurs reprises en 2006 et a fait l'objet d'une dernière visite en décembre 2006, après plusieurs reports.
Le salarié doit faire l'objet d'un examen médical dans les 24 mois qui suivent l'examen d'embauche, examen renouvelé une fois tous les 2 ans. Cette périodicité peut être écourtée par le médecin du travail (pour) les salariés handicapés, à l'initiative de ce praticien.
Dans le cas d'espèce, le délai maximum de 2 ans a été respecté et il n'y a pas d'indication que le suivi médical a été éludé.
Il n'apparaît pas que les griefs formés à ce sujet soient fondés.
En revanche, c'est à juste titre que la Conseil de prud'hommes a jugé que la demande de résiliation formée par le salarié n'était pas fondée" (arrêt attaqué, p. 3 et 4)
ET AUX MOTIFS ADOPTES QUE
"Relativement à l'exécution de mauvaise foi du contrat de travail par l'employeur et aux 3.000 € de dommages-intérêts y afférents,
Monsieur Patrick X... a bénéficié d'une visite médicale d'embauche conformément aux dispositions de l'article R. 241-48 du Code du travail. Il a été déclaré apte sans restriction ni réserve. Conformément aux articles R. 241-49 et R. 241-50, le médecin du travail est juge de la fréquence et de la nature des examens que comporte la surveillance médicale renforcée. Le médecin du travail n'a pas estimé utile de convoquer Monsieur Patrick X... avant la visite périodique de septembre 2005. Le Conseil relève qu'en mai 2006, Monsieur Patrick X... n'a pu se rendre à la visite, que le 21 juillet 2006 il ne s'est pas présenté, que le 28 novembre 2006 il était en arrêt (de) travail et que finalement il ne s'est pas rendu à la visite prévue le 9 décembre 2006. sur ce constat, le Conseil dit que l'employeur n'a pas failli à ses obligations (…).
Relativement à la résiliation du contrat de travail aux torts de l'employeur et aux 46.000 € de dommages-intérêts y afférents,
Le contrat de travail ayant été exécuté de bonne foi, autant sur le suivi médical renforcé que sur le classement de Monsieur Patrick X..., il n'y a pas lieu à résiliation judiciaire du contrat de travail, ni à une quelconque indemnisation" (jugement, p. 6, dernier al. et p. 7, al. 1er à 3),
ALORS QUE le médecin du travail exerce une surveillance médicale renforcée, à un rythme au moins annuel, notamment pour les travailleurs handicapés et est seul juge de la fréquence et de la nature des examens que comporte cette obligation de sorte qu'en jugeant, pour rejeter les demandes de Monsieur X... tendant à la constatation de l'exécution de mauvaise foi du contrat de travail par l'ASSOCIATION RESIDENCE SAINTE CLAIRE, pour méconnaissance de l'obligation de contrôle médical renforcé qui lui incombait, et à la condamnation en conséquence de celle-ci au paiement de dommages-intérêts, que le délai maximum de deux ans avait été respecté et qu'il n'y avait pas d'indication que le suivi médical avait été éludé, tout en constatant que cette périodicité pouvait être écourtée par le médecin du travail pour les salariés handicapés, statut dont relevait Monsieur X..., la Cour d'appel n'a pas tiré les conséquences légales de ses propres constatations et a violé les articles R. 241-49 et R. 241-50 anciens du Code du travail.

SECOND MOYEN DE CASSATION :

Le moyen reproche à l'arrêt confirmatif attaqué d'avoir dit que le licenciement pour faute grave était fondé et d'avoir en conséquence débouté Monsieur X... de l'ensemble de ses demandes afférentes au rejet de cette prétention,
AUX MOTIFS PROPRES QUE
"Sur le licenciement,
Par lettre recommandée avec accusé de réception en date du 20 janvier 2007, Monsieur X... a été licencié pour faute grave "pour son refus aussi soudain qu'obstiné de continuer à exécuter les tâches d'entretien et de maintenance que vous exécutiez depuis votre engagement en novembre 2003 et qui font partie de vos attributions. Malgré nos explications et la mise à pied disciplinaire qui vous a été notifiée le 14 novembre 2006, vous avez persisté dans votre refus".
Monsieur X..., qui exécutait les tâches de tonte des pelouses de la résidence depuis l'origine a refusé à compter du 18 octobre 2006 de réaliser cette tâche en indiquant qu'elle ne relevait pas de son emploi.
Son refus a été sanctionné, dans un premier temps, par une mise à pied disciplinaire de deux jours, puis par un licenciement, sur son refus réitéré, après une mise à pied conservatoire.
Il résulte des pièces versées qu'au titre de ses interventions, en extérieur, le salarié effectuait le nettoyage et la tonte de la pelouse.
Contrairement à ce que soutient le salarié, cette tâche est parfaitement compatible avec la qualification d'agent des services logistiques qui assure les travaux d'hygiène et d'entretien selon son affectation.
Le salarié soutient que son refus était justifié par le fait que l'employeur refusait obstinément de faire droit à sa demande de requalification.
Le refus du salarié n'est pas justifié, de même que sa demande de requalification ne l'est pas.
Le refus obstiné du salarié d'effectuer des tâches nécessaires dans la résidence, alors qu'il était le seul homme d'entretien, constitue une cause réelle et sérieuse du licenciement.
Cette faute s'analyse en une faute grave, puisque le salarié a persisté dans son comportement bien qu'ayant été solennellement mis en garde sur les conséquences de son attitude.
Il convient de confirmer le jugement sur ce point.
La faute grave étant validée, la mise à pied conservatoire qui a précédé le licenciement ne doit pas donner lieu à paiement des salaires afférents. Il convient de réformer le jugement sur ce point" (arrêt attaqué, p. 4, dernier al., à p. 5, al 1er à 10),
ET AUX MOTIFS ADOPTES QUE
"Relativement aux 2.286,66 € d'indemnité compensatrice de préavis et aux 228,67 € de congés payés y afférents,
Le licenciement pour faute grave étant établi, le Conseil rappelle qu'il est exclusif de préavis, en conséquence le Conseil ne saurait faire droit à ces demandes.
Relativement à 1.220,42 € d'indemnité de licenciement,
Le licenciement pour faute grave étant établi, le Conseil rappelle qu'il est exclusif de l'indemnité de licenciement, en conséquence le Conseil ne saurait faire droit à cette demande" (jugement, p. 7, al. 8 et 9),
ALORS QUE D'UNE PART, aucun fait fautif ne peut donner lieu à double sanction, en vertu du principe "non bis in idem" ; que l'employeur qui a épuisé son pouvoir disciplinaire en prononçant immédiatement une sanction ne peut prononcer ultérieurement une autre sanction, et notamment un licenciement, pour ce même fait de sorte qu'en constatant que le refus de Monsieur X... de tondre la pelouse avait été sanctionné, dans un premier temps, par une mise à pied disciplinaire de deux jours, puis par un licenciement, sur son refus réitéré, après une mise à pied conservatoire, la Cour d'appel a violé le principe susvisé,
ALORS QUE D'AUTRE PART ET SUBSIDIAIREMENT, un licenciement pour faute grave doit, en tout état de cause, être fondé sur une cause réelle et sérieuse, ce qui n'est pas le cas lorsque le refus du salarié devait s'interpréter comme l'exigence par ce dernier du respect de ses droits de sorte qu'en jugeant que le refus de tondre la pelouse lié à sa demande de requalification n'était pas justifié et que constituait une cause réelle et sérieuse de licenciement le refus obstiné de Monsieur X... d'effectuer des tâches nécessaires dans la résidence, cependant que Monsieur X... ne cherchait qu'à faire valoir ses droits, à savoir son changement de classification et la prise en compte de son handicap, sans aucune intention de nuire à son employeur, la Cour d'appel a violé l'article L. 122-14-3 ancien du Code du travail.
ALORS QUE ENFIN, un licenciement pour faute grave doit, en tout état de cause, être fondé sur une cause réelle et sérieuse, ce qui n'est pas le cas lorsque la tâche confiée au salarié n'entrait pas dans ses attributions si bien qu'en jugeant que Monsieur X... tondait les pelouses depuis l'origine et que cette tâche était compatible avec la qualification d'agent des services logistiques qui assure les travaux d'hygiène et d'entretien selon son affectation, sans rechercher si son contrat de travail prévoyait une telle attribution et si elle était compatible avec son état de santé, la Cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard de l'article L. 122-14-3 ancien du Code du travail et de l'article 1134 du Code civil.


Synthèse
Formation : Chambre sociale
Numéro d'arrêt : 09-42634
Date de la décision : 26/10/2010
Sens de l'arrêt : Cassation partielle
Type d'affaire : Sociale

Analyses

TRAVAIL REGLEMENTATION, SANTE ET SECURITE - Services de santé au travail - Examens médicaux - Surveillance médicale renforcée - Fréquence des examens - Renouvellement au moins une fois par an - Nécessité - Portée

TRAVAIL REGLEMENTATION, SANTE ET SECURITE - Services de santé au travail - Examens médicaux - Surveillance médicale renforcée - Fréquence des examens - Libre appréciation par le médecin du travail - Portée

En vertu de l'article R. 4624-17 du code du travail, les examens périodiques pratiqués dans le cadre de la surveillance médicale renforcée définie à l'article R. 4624-19 sont renouvelés au moins une fois par an ; selon l'article R. 4624-20 du même code, le médecin du travail est juge de la fréquence et de la nature des examens que comporte la surveillance médicale renforcée, mais ces dispositions ne font pas obstacle aux examens périodiques pratiqués en application des dispositions de l'article R. 4624-17. Il en découle que la circonstance que le médecin du travail est juge de la fréquence des examens que comporte la surveillance médicale renforcée ne permet pas d'éluder le renouvellement annuel des examens périodiques pratiqués dans le cadre de la surveillance médicale renforcée


Références :

articles R. 4624-17, R. 4624-19 et R. 4624-20 du code du travail

Décision attaquée : Cour d'appel d'Angers, 02 septembre 2008


Publications
Proposition de citation : Cass. Soc., 26 oct. 2010, pourvoi n°09-42634, Bull. civ. 2010, V, n° 249
Publié au bulletin des arrêts des chambres civiles 2010, V, n° 249

Composition du Tribunal
Président : M. Trédez (conseiller le plus ancien faisant fonction de président)
Avocat général : M. Foerst
Rapporteur ?: M. Frouin
Avocat(s) : SCP Ortscheidt, SCP Peignot et Garreau

Origine de la décision
Date de l'import : 14/10/2011
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CCASS:2010:09.42634
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