LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE CRIMINELLE, a rendu l'arrêt suivant :
Statuant sur les pourvois formés par :
- Mme Christine X..., épouse Y...,- La société Groupama centre Atlantique, partie intervenante,
contre l'arrêt de la cour d'appel de POITIERS, chambre correctionnelle, en date du 26 novembre 2009, qui, dans la procédure suivie contre la première du chef de blessures involontaires, a prononcé sur les intérêts civils ;
Joignant les pourvois en raison de la connexité ;
Vu le mémoire, commun aux demandeurs, et le mémoire en dérfense produits ;
Sur le premier moyen de cassation, pris de la violation des articles 2 et 593 du code de procédure pénale, 31 de la loi n° 85-677 du 5 juillet 1985, 1382 du code civil, et du principe de la réparation intégrale du préjudice ;
"en ce que l'arrêt attaqué condamne in solidum Mme X..., épouse Y..., et Groupama Centre Atlantique à verser à Mme Z... la somme de 113 141,70 euros dont il conviendrait de déduire les diverses provisions perçues, dit que les sommes produiraient intérêts au taux légal à compter du 22 mars 2007 ;
"aux motifs que sur la liquidation des préjudices, la cour constate que Mme Y..., et la société Groupama Centre Atlantique font la même évaluation que Mme Z... des préjudices par elle subis ; que le seul point de désaccord concerne le préjudice évolutif des préjudices extra-patrimoniaux pour lequel la victime sollicite la somme de 3 500 euros, alors même que Mme Y..., et la société Groupama Centre Atlantique estiment cette demande infondée ; que sur ce dernier point, l'expert conclut, au terme de son expertise pratiquée le 23 février 2005, à une « évolution dont on ne peut exclure qu'elle se fasse vers l'aggravation sans qu'il soit possible de l'affirmer ni d'en préciser la date éventuelle de survenue » ; que compte tenu de cette appréciation de l'expert, le préjudice allégué n'est pas suffisamment certain pour ouvrir droit à réparation ; que Mme Z... sera déboutée de la demande de ce chef de préjudice ; que son préjudice sera évalué comme suit :- postes de préjudices patrimoniaux :préjudice patrimoniaux temporaires perte de gains avant consolidation : 19 778,85 euros ;préjudices patrimoniaux permanents : perte de gains professionnels futurs : 7 600,00 euros ;- postes de préjudices extra-patrimoniaux :préjudices extra-patrimoniaux temporaires :déficit fonctionnel temporaire : 13 976,76 euros ;préjudice esthétique temporaire : 3 000 euros ;pretium doloris : 12 000 euros ;préjudices extra-patrimoniaux permanents :déficit fonctionnel permanent : 75 900 euros ;préjudice esthétique permanent : 3 000 euros ;préjudice d'agrément : 12 500 euros ;préjudice permanent exceptionnel : 3 500 euros ;total (déduction faite de la créance de la CPAM 17 et du versement effectué par l'ASSEDIC Limousin-Poitou-Charente) 151 255,61 euros ;soit une indemnisation à hauteur de ¾ du préjudice à hauteur de 113 441,70 euros dont il conviendra de déduire les diverses provisions reçues par Mme Z... ; que cette somme produira intérêts au taux légal à compter du 22 mars 2007, date du jugement du tribunal correctionnel de La Rochelle déclaratif de droits en ce qu'il a statué sur intérêts civils et liquidé les préjudices ;
"alors que les recours subrogatoires des caisses contre les tiers s'exercent poste par poste sur les seules indemnités qui réparent des préjudices qu'elles ont pris en charge ; que la cour d'appel, qui a statué sur l'indemnisation revenant à Mme Z... sans procéder à l'évaluation préalable de l'ensemble des postes des préjudices patrimoniaux et extra-patrimoniaux subis par la victime avant et après la consolidation, ni préciser quels postes de préjudice ont été pris en charge par les prestations formant l'objet des créances subrogatoires des tiers payeurs, a méconnu les textes et le principe susvisés" ;
Vu l'article 31 de la loi du 5 juillet 1985 ;
Attendu qu'il résulte de ce texte que les prestations versées par la sécurité sociale doivent être déduites poste par poste des indemnités auxquelles le responsable est tenu envers la victime pour réparer les atteintes à son intégrité physique ;
Attendu que Mme Z..., constituée partie civile, a été blessée dans un accident de la circulation dont Mme Y..., reconnue coupable de blessures involontaires, a été déclarée tenue à réparation à proportion des trois-quarts ;
Attendu que, pour condamner Mme Y... à payer à Mme Z... la somme de 113 441,70 euros, sous déduction des provisions versées, l'arrêt énonce que cette somme représente, compte tenu du partage de responsabilité, l'indemnisation des postes de préjudice patrimoniaux et extra-patrimoniaux temporaires et permanents après imputation de la créance globale de la caisse primaire d'assurance maladie ;
Mais attendu qu'en prononçant ainsi, sans préciser quels postes de préjudice avaient été pris en charge par les prestations formant l'objet des créances subrogatoires de la caisse et sans déduire des postes de préjudice qu'elles réparaient les prestations versées à ce titre par la sécurité sociale, la cour d'appel a méconnu le texte susvisé et le principe ci-dessus rappelé ;
D'où il suit que la cassation est encourue de ce chef ;
Et sur le second moyen de cassation, pris de la violation des articles 2, 388-3 et 593 du code de procédure pénale ;
"en ce que l'arrêt attaqué condamne la société d'assurance Groupama Centre Atlantique in solidum avec Mme X..., épouse Y..., et la société d'assurance Groupama Centre Atlantique à verser à Mme Z... la somme de 113 141,70 euros ;
"aux motifs que sur la liquidation des préjudices : la cour constate que Mme Y..., et la société Groupama Centre Atlantique font la même évaluation que Mme Z... des préjudices par elle subis ; que le seul point de désaccord concerne le préjudice évolutif des préjudices extra-patrimoniaux pour lequel la victime sollicite la somme de 3 500 euros, alors même que Mme Y..., et la société Groupama Centre Atlantique estiment cette demande infondée ; que sur ce dernier point, l'expert conclut, au terme de son expertise pratiquée le 23 février 2005, à une « évolution dont on ne peut exclure qu'elle se fasse vers l'aggravation sans qu'il soit possible de l'affirmer ni d'en préciser la date éventuelle de survenue » ; que compte tenu de cette appréciation de l'expert, le préjudice allégué n'est pas suffisamment certain pour ouvrir droit à réparation ; que Mme Z... sera déboutée de la demande de ce chef de préjudice ; que son préjudice sera évalué comme suit :- postes de préjudices patrimoniaux :préjudice patrimoniaux temporaires perte de gains avant consolidation : 19 778,85 euros ;préjudices patrimoniaux permanents : perte de gains professionnels futurs : 7 600,00 euros ;- postes de préjudices extra-patrimoniaux :préjudices extra-patrimoniaux temporaires :déficit fonctionnel temporaire : 13 976,76 euros ;préjudice esthétique temporaire : 3 000 euros ;pretium doloris : 12 000 euros ;préjudices extra-patrimoniaux permanents :déficit fonctionnel permanent : 75 900 euros ;préjudice esthétique permanent : 3 000 euros ;préjudice d'agrément : 12 500 euros ;préjudice permanent exceptionnel : 3 500 euros ;total (déduction faite de la créance de la CPAM 17 et du versement effectué par l'ASSEDIC Limousin-Poitou-Charente) 151 255,61 euros ;soit une indemnisation à hauteur de ¾ du préjudice à hauteur de 113 441,70 euros dont il conviendra de déduire les diverses provisions reçues par Mme Z... ; que cette somme produira intérêts au taux légal à compter du 22 mars 2007, date du jugement du tribunal correctionnel de La Rochelle déclaratif de droits en ce qu'il a statué sur intérêts civils et liquidé les préjudices ;
"alors que l'intervention volontaire ou forcée de l'assureur à l'instance pénale n'a d'autre effet que de lui rendre opposable la décision rendue sur les intérêts civils ; que la cour d'appel, qui a non seulement déclaré sa décision opposable au Groupama, mais l'a condamné in solidum avec Mme X... en paiement d'indemnité au profit de Mme Z..., a violé l'article 388-3 du code de procédure pénale" ;
Vu l'article 388-3 du code de procédure pénale ;
Attendu qu'il résulte de ce texte que l'intervention volontaire ou forcée de l'assureur à l'instance pénale n'a d'autre effet que de lui rendre opposable la décision rendue sur les intérêts civils ;
Attendu que la juridiction du second degré a condamné la société Groupama in solidum avec son assurée Mme Y... à payer une indemnité à la partie civile outre les frais d'expertise, tout en déclarant l'arrêt opposable à l'assureur ;
Mais attendu qu'en prononçant ainsi, alors qu'elle ne pouvait que déclarer sa décision opposable à l'assureur, la cour d'appel a méconnu la portée du texte susvisé ;
D'où il suit que la cassation est derechef encourue ;
Par ces motifs :
CASSE et ANNULE, en toutes ses dispositions, l'arrêt susvisé de la cour d'appel de Poitiers, en date du 26 novembre 2009, et pour qu'il soit à nouveau jugé, conformément à la loi,
RENVOIE la cause et les parties devant la cour d'appel d'Angers, à ce désignée par délibération spéciale prise en chambre du conseil ;
ORDONNE l'impression du présent arrêt, sa transcription sur les registres du greffe de la cour d'appel de Poitiers et sa mention en marge ou à la suite de l'arrêt annulé ;
Ainsi jugé et prononcé par la Cour de cassation, chambre criminelle, en son audience publique, les jour, mois et an que dessus ;
Etaient présents aux débats et au délibéré, dans la formation prévue à l'article 567-1-1 du code de procédure pénale : M. Louvel président, M. Arnould conseiller rapporteur, M. Palisse conseiller de la chambre ;
Greffier de chambre : Mme Randouin ;
En foi de quoi le présent arrêt a été signé par le président, le rapporteur et le greffier de chambre.