LA COUR DE CASSATION, DEUXIÈME CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :
Sur le moyen unique du pourvoi en ce qu'il est formé par Mme X... :
Attendu que Mme X... n'a pas qualité pour critiquer le chef du dispositif de l'arrêt qui a déclaré irrecevable l'inscription de faux incidente formée par sa mère ;
D'où il suit que le moyen n'est pas recevable ;
Sur le moyen unique du pourvoi en ce qu'il est formé par Mme Y... :
Attendu, selon l'arrêt attaqué (Nîmes, 4 mai 2009), que par jugement définitif du 11 décembre 1987, un tribunal de grande instance a condamné Mme Y... à payer à la Société générale (la banque) une certaine somme en qualité de caution de M. X... son époux ; que Mme Y..., alors divorcée, est intervenue volontairement dans l'instance introduite par M. X... devant le tribunal de commerce qui avait ouvert une procédure collective à son encontre et qui par jugement du 25 septembre 2003 a fixé à une certaine somme la créance de la banque au passif de M.
X...
; que par acte du 14 avril 2004, Mme Y... a procédé, au visa de l'article 306 du code de procédure civile, à une inscription de faux incidente contre l'acte authentique du 24 juin 1982 constatant l'engagement de caution sur le fondement duquel elle avait été condamnée ;
Attendu que Mme Y... fait grief à l'arrêt de déclarer l'inscription de faux incidente contre l'acte authentique du 24 juin 1982 irrecevable, alors, selon le moyen :
1°/ que l'aveu judiciaire peut être révoqué dès lors que l'on prouve qu'il a été la suite d'une erreur de fait ; qu'en se bornant à affirmer que la preuve d'une erreur de fait n'est pas rapportée sans rechercher si à la date des conclusions devant le tribunal de grande instance de Nîmes ayant donné lieu au jugement en date du 11 décembre 1987 un aveu avait été effectué à la suite d'une erreur et que ce n'est qu'à la suite de la communication de l'acte du 24 juin 1982 que cette erreur avait été révélée et précisée dans les conclusions ayant donné lieu à l'arrêt en date du 25 octobre 1989 ainsi que dans les autres procédures, notamment dans la plainte déposée le 3 mars 2003, les juges du fond n'ont pas donné de base légale à leur décision au regard de l'article 1356 du code civil ;
2°/ que l'autorité de la chose jugée n'a lieu qu'à l'égard de ce qui fait l'objet d'un jugement et a été tranché dans son dispositif ; que, dans la présente procédure, l'objet de la demande portant sur le droit à inscription de faux est différent de l'objet de la demande ayant donné lieu à l'arrêt rendu par la cour d'appel de Nîmes en date du 25 octobre 1989 portant sur la nullité de l'acte de cautionnement en date du 24 juin 1982 ; qu'en énonçant que la présente procédure est irrecevable du fait de l'aveu judiciaire bien que la décision du 25 octobre 1989 n'ait pas tranché sur cette demande, les juges du fond ont violé l'article 1351 du code civil et l'article 480 du code de procédure civile ;
Mais attendu qu'ayant relevé que pour confirmer le jugement la condamnant au paiement d'une certaine somme au profit de la banque, la cour d'appel avait retenu, dans son arrêt du 25 octobre 1989, que Mme Y... avait indiqué dans ses écritures de première instance qu'elle ne déniait pas ses engagements et ne contestait pas avoir signé les actes, qu'il résultait de ces énonciations un aveu judiciaire qui ne pourrait être révoqué que par une erreur de fait dont la preuve n'était pas rapportée, et que l'assertion nouvelle selon laquelle elle n'aurait pas signé l'acte litigieux était dénué de tout fondement en l'absence d'une procédure pour faux, la cour d'appel en a exactement déduit qu'il avait été jugé de manière irrévocable que Mme Y... avait pour des raisons qui lui appartenaient judiciairement et spontanément reconnu avoir signé l'acte litigieux, et qu'en vertu de l'autorité de la chose jugée attachée à cet arrêt se fondant sur l'aveu judiciaire qu'elle n'était plus recevable à révoquer, la demande d'inscription de faux incidente, formée à l'appui d'une demande de nullité d'un acte de cautionnement, identique à celle déjà rejetée, était irrecevable ;
D'où il suit que le moyen n'est pas fondé ;
PAR CES MOTIFS :
REJETTE le pourvoi ;
Condamne Mme X... et Mme Y... aux dépens ;
Vu l'article 700 du code de procédure civile, rejette l'ensemble des demandes présentées de ce chef ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, deuxième chambre civile, et prononcé par le président en son audience publique du quatorze octobre deux mille dix.
MOYEN ANNEXE au présent arrêt :
.Moyen produit par la SCP Lyon-Caen, Fabiani et Thiriez, avocat aux Conseils, pour Mme X... et Mme Y....
Le moyen reproche à l'arrêt attaqué d'AVOIR déclaré l'inscription de faux incidente contre l'acte authentique du 24 juin 1982 irrecevable ;
AUX MOTIFS QUE « pour justifier de son inscription de faux incidente, Josiane Y... expose que lors des procédures antérieures, une copie exécutoire de l'acte authentique (grosse) comportant uniquement la signature du notaire a été versée aux débats et qu'elle n'a eu connaissance de la copie de l'acte original comportant des signatures (minute) que par sa communication récemment effectuée devant la Cour par la SCP Philippe PERICCHI, avoué de René X... ; que toutefois, la Cour observe que cette assertion est inexacte dans la mesure où d'une part, dans sa plainte déposée le 3 mars 2003 devant le doyen des juges d'instruction du Tribunal de grande Instance de NIMES, Josiane Y... a indiqué avoir reçu en mai 1994 la copie de l'acte authentique comportant les signatures (l'acte litigieux), d'autre part, dans ses conclusions récapitulatives déposées dans la présente procédure, page 3, elle indique s'être rapprochée des notaires en 1994 pour obtenir « une minute », enfin elle fait état d'une étude graphologique effectuée le 14 avril 1998 par le cabinet VILLARET, expert près la Cour d'appel de NIMES et portant sur la signature qui lui est attribuée sur l'acte litigieux ; que la Cour observe encore qu'en 1984 Josiane Y... alors épouse X... a consenti à une transaction hypothécaire au profit de la Société Générale sans arguer de faux l'acte notarié du 24 juin 1982 ;
Qu'alors en possession uniquement de la grosse, Josiane X... née Y..., assignée devant le Tribunal de Grande Instance de NIMES en paiement de sommes sur le fondement de l'acte litigieux, a fondé sa défense sur les dispositions de l'article 2037 du Code civil et a indiqué dans les motifs des conclusions :
« Attendu que Madame X... ne conteste pas avoir signé les actes susmentionnés (4 mars 1982 et 24 juin 1982). Attendu que sa bonne foi a été abusée par son époux mais que Madame X... n'entend pas se soustraire à ses engagements »,
- Dans le dispositif de ses conclusions :
« Vu la bonne foi de la défenderesse,
Constatant qu'elle ne conteste pas avoir signé les actes de caution dont se prévaut la Société Générale, Accorder les plus larges délais de paiement à Madame Y... épouse X... » (mots soulignés dans les écritures déposées devant le premier juge par Josiane X... née Y...) ;
Que dans les motifs de son jugement en date du 11 décembre 1987, le Tribunal de Grande Instance de NIMES a indiqué :
« Par conclusions en date du 7 mars 1986, Madame X... a sollicité les plus larges délais de paiement, ne contestant pas avoir signé les actes dont se prévaut la Société Générale »
Etant précisé que l'exception de subrogation a été rejetée au motif que les hypothèques consenties étaient dépourvues d'intérêt pour la banque ;
Que devant la Cour, Josiane Y... épouse X... a notamment fait valoir « que l'acte de cautionnement du 24 juin 1982 est nul et inopposable pour défaut de mention manuscrite de la nature et de l'étendue de ses engagements alors qu'elle n'a même pas signé cet acte » ; Que toutefois, elle n'a pas estimé utile de s'inscrire en faux contre l'acte authentique et d'invoquer une erreur de fait de nature à révoquer ses déclarations initiales ;
Que l'arrêt rendu le 25 octobre 1989 par la Cour d'appel de NIMES est ainsi motivé :
« Attendu que la Cour observe que Madame Y... dans ses premières écritures devant le premier juge n'avait pas dénié ses engagements puisqu'elle indiquait de plano qu'elle ne contestait pas avoir signé les actes sus mentionnés (sic) » ;
Attendu qu'il résulte de ces énonciations un aveu judiciaire qui ne pourrait être révoqué que par une erreur de fait dont la preuve n'est pas rapportée ; (…) Que l'assertion selon laquelle elle n'aurait pas signé l'acte est dénué de tout fondement en l'absence d'une procédure pour faux et de l'aveu judiciaire contenu dans ses précédentes conclusions » ;
Que Josiane Y... n'a pas formé de pourvoi à l'encontre de cet arrêt ;
Attendu qu'il a ainsi été jugé de manière irrévocable que Josiane Y... alors épouse X... a, pour des raisons qui lui appartiennent judiciairement et spontanément reconnu avoir signé l'acte litigieux ; Que dès lors, toute la discussion sur le fait qu'elle a reçu, postérieurement au prononcé de cet arrêt, la minute comportant les signatures est sans intérêt ;
Que certes il ressort de la procédure pénale que la signature attribuée à Josiane Y... alors épouse X... sur l'acte du 24 mai 1982 pourrait être un faux ;
Toutefois, qu'en vertu du principe de l'autorité de la chose jugée, il y a lieu de constater que son aveu judiciaire contenant reconnaissance de la signature dudit acte rend la procédure irrecevable ;
Que Josiane Y... ne succombe pas en son inscription de faux au sens de l'article 305 du Code de procédure civile ; qu'il n'y a donc pas lieu au prononcé d'une amende ».
ALORS, D'UNE PART QUE l'aveu judiciaire peut être révoqué dès lors que l'on prouve qu'il a été la suite d'une erreur de fait ; qu'en se bornant à affirmer que la preuve d'une erreur de fait n'est pas rapportée sans rechercher si à la date des conclusions devant le tribunal de Grande instance de NIMES ayant donné lieu au jugement en date du 11 décembre 1987 un aveu avait été effectué à la suite d'une erreur et que ce n'est qu'à la suite de la communication de l'acte du 24 juin 1982 que cette erreur avait été révélée et précisée dans les conclusions ayant donné lieu à l'arrêt en date du 25 octobre 1989 ainsi que dans les autres procédures, notamment dans la plainte déposée le 3 mars 2003, les juges du fond n'ont pas donné de base légale à leur décision au regard de l'article 1356 du Code civil ;
ALORS, D'AUTRE PART, QUE l'autorité de la chose jugée n'a lieu qu'à l'égard de ce qui fait l'objet d'un jugement et a été tranché dans son dispositif ; que, dans la présente procédure, l'objet de la demande portant sur le droit à inscription de faux est différente de l'objet de la demande ayant donné lieu à l'arrêt rendu par la Cour d'appel de NIMES en date du 25 octobre 1989 portant sur la nullité de l'acte de cautionnement en date du 24 juin 1982 ; qu'en énonçant que la présente procédure est irrecevable du fait de l'aveu judiciaire bien que la décision du 25 octobre 1989 n'ait pas tranché sur cette demande, les juges du fond ont violé l'article 1351 du Code civil et l'article 480 du Code de procédure civile.