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28/09/2010 | FRANCE | N°09-42348;09-42349;09-42350;09-42351;09-42352

France | France, Cour de cassation, Chambre sociale, 28 septembre 2010, 09-42348 et suivants


LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l'arrêt suivant :

Vu leur connexité, joint les pourvois n° S 09-42.348 à W 09-42.352 ;
Attendu, selon les arrêts attaqués (Aix-en-Provence, 10 mars 2009), que la société Les Oubliettes, qui exploitait un fonds de commerce de restauration donné en location gérance par Mme X..., a été placée le 18 décembre 2006 en liquidation judiciaire ; que le 20 décembre suivant, le liquidateur judiciaire a informé Mme X... de la restitution du fonds, en lui demandant d'appliquer l'article L. 122-12, alinéa 2 du code du travail, au bé

néfice des cinq salariés qui y étaient rattachés ; que, ne percevant plus ...

LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l'arrêt suivant :

Vu leur connexité, joint les pourvois n° S 09-42.348 à W 09-42.352 ;
Attendu, selon les arrêts attaqués (Aix-en-Provence, 10 mars 2009), que la société Les Oubliettes, qui exploitait un fonds de commerce de restauration donné en location gérance par Mme X..., a été placée le 18 décembre 2006 en liquidation judiciaire ; que le 20 décembre suivant, le liquidateur judiciaire a informé Mme X... de la restitution du fonds, en lui demandant d'appliquer l'article L. 122-12, alinéa 2 du code du travail, au bénéfice des cinq salariés qui y étaient rattachés ; que, ne percevant plus de rémunération, les salariés ont saisi la juridiction prud'homale d'une demande en résiliation de leurs contrats de travail et en paiement de salaires, dirigée contre le liquidateur judiciaire et contre Mme X... ; que celle-ci les a licenciés le 24 octobre 2007 "pour le compte de qui il appartiendra" ;
Sur le premier moyen :
Attendu que Mme X... fait grief aux arrêts de constater le retour du fonds sous sa direction et le transfert des contrats de travail alors, selon le moyen :
1°/ que, faute pour le législateur de l'avoir prévu expressément, la loi du 26 juillet 2005 de sauvegarde des entreprises n'autorise pas le liquidateur judiciaire, quand bien même l'entreprise a cessé toute activité, à notifier au bailleur la résiliation unilatérale du contrat de location-gérance, sans mise en demeure préalable ; qu'en déclarant néanmoins régulière la notification faite par le liquidateur judiciaire à l'exposante sans mise en demeure préalable, la cour d'appel a violé les articles L. 641-10 du code de commerce et 1184 du code civil ;
2°/ que si, en vertu de l'article L. 1224-1 du code du travail, les contrats de travail en cours à l'expiration de la location-gérance continuent avec le propriétaire du fonds de commerce qui reprend, en principe, possession de celui-ci, c'est à la condition que l'entreprise subsiste et que le fonds ne soit pas inexploitable ou en ruine ; qu'il ressort des constatations de l'arrêt que par jugement du 18 décembre 2006, le tribunal de commerce a prononcé la liquidation judiciaire sans maintien provisoire d'activité et que le même jour la salariée n'a pu accéder à son poste de travail en raison de la fermeture du restaurant ; qu'il était ainsi établi qu'au jour de la résiliation du contrat de location gérance, le 20 décembre 2006, le fonds avait cessé toute activité ; qu'en refusant néanmoins d'en déduire qu'il était inexploitable à cette date, la cour d'appel a omis de tirer les conséquences qui s'évinçaient de ses propres constatations et partant violé le texte susvisé ;
3°/ que l'état de ruine du fonds de commerce est suffisamment établi par la mise en liquidation judiciaire du locataire-gérant sans maintien provisoire d'activité ; qu'en refusant néanmoins de constater la ruine du fonds de commerce, la cour d'appel a omis de tirer les conséquences qui s'évinçaient de ses propres constatations et partant violé le texte susvisé ;
Mais attendu d'abord que la cour d'appel a exactement retenu que, lorsque le jugement d'ouverture de la procédure de liquidation judiciaire n'autorise pas le maintien de l'activité de l'entreprise, le liquidateur judiciaire a le pouvoir de mettre fin au contrat de location gérance en cours et de restituer le fonds loué au bailleur ;
Attendu ensuite qu'ayant souverainement constaté que le fonds loué était encore exploitable au jour de sa restitution, la cour d'appel en a déduit, à bon droit, que son propriétaire était tenu de poursuivre les contrats de travail des salariés qui y étaient attachés ;
Que le moyen n'est pas fondé ;
Sur le second moyen :
Attendu que le rejet du pourvoi, sur le premier moyen, rend le second moyen inopérant, en ce qu'il invoque une cassation par voie de conséquence ;
PAR CES MOTIFS :
REJETTE les pourvois ;
Condamne Mme X... aux dépens ;
Vu les articles 700 du code de procédure civile et 37 de la loi du 10 juillet 1991, condamne Mme X... à payer la somme globale de 2 500 euros à la SCP Vier, Barthélemy et Matuchansky, avocats aux conseils ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre sociale, et prononcé par le président en son audience publique du vingt-huit septembre deux mille dix.

MOYENS ANNEXES au présent arrêt :


Moyens produits par la SCP Masse-Dessen et Thouvenin, avocat aux conseils pour Mme X... ;

PREMIER MOYEN DE CASSATION :

Le moyen fait grief à l'arrêt attaqué d'AVOIR constaté le retour à sa propriétaire, Madame X..., du fonds de commerce exploité jusqu'au 18 décembre 2006 par la SARL LES OUBLIETTES et le transfert du contrat de travail de la salariée ;
AUX MOTIFS QUE qu'il s'évince de la loi n°2005-845 du 26 juillet 2005 de sauvegarde des entreprises qu'en cas de liquidation judiciaire sans période d'observation, qui plus est sans aucun maintien de l'activité dans les conditions de l'article L. 641-10 du code de commerce dans sa rédaction issue de cette loi, le liquidateur est fondé à notifier d'initiative la résiliation d'un contrat de location gérance au bailleur, sans nécessité de devoir être sommé par ce dernier d'exercer préalablement un droit d'option ; qu'en effet, si la liquidation judiciaire n'est pas de nature à entraîner ipso facto la résiliation de droit du contrat de location gérance, d'évidence l'absence de maintien, même provisoire de l'activité suite au prononcé de la liquidation judiciaire, autorise le liquidateur à procéder à la notification de cette résiliation, rendant inopérante toute mise en demeure préalable du liquidateur ainsi que la nécessité de faire constater cette résiliation, dûment notifiée, par le juge commissaire, comme le laisse entendre Madame X... ; que de même, si la résiliation du contrat de location gérance d'un fonds de commerce entraîne le retour de ce fonds à son propriétaire, le transfert de l'entité économique dans les conditions de l'ancien article L. 122-12, devenu L. 1224-1, du code du travail implique que le fonds ne soit pas devenu inexploitable ou en ruine de sorte que dans cette seule hypothèse, le propriétaire du fonds serait fondé à s'exonérer des obligations mises à sa charge par l'article précité ; qu'au cas d'espèce, il est constant que la SARL LES OUBLIETTES a fait l'objet, le 18 décembre 2006, d'un jugement d'ouverture d'une procédure de liquidation judiciaire sans période d'observation, ni maintien provisoire de l'activité ; que Me Y..., es qualités de liquidateur de cette société, a expressément notifié à Mme X..., propriétaire du fonds, par lettre du 20 décembre 2006 reproduite ci avant, la cessation immédiate du contrat de location gérance, l'informant qu'il lui appartenait de prendre toutes dispositions utiles relatives au fonds de commerce ainsi restitué et toutes mesures conformément aux dispositions de l'ancien article L. 122-12 du code du travail relatives aux contrats de travail en cours ; qu'une telle notification est régulière quand bien même le liquidateur n'aurait pas été sommé au préalable par la propriétaire du fonds sauf pour cette dernière a démontré que ce fonds avait été rendu, au jour de la résiliation du contrat de location gérance, inexploitable ou se trouvait dans un état de ruines, empêchant toute poursuite de l'activité de restauration qui y était attachée ; que précisément, alors même que par la voix de son conseil dans un courrier en date du 5 janvier 2007, elle considérait que le contrat de location gérance se poursuivait et déclarait qu'elle assisterait aux opérations d'inventaire prescrites par le jugement de liquidation judiciaire, comme l'y autorisent au demeurant les clauses de ce contrat, Mme X... ne démontre, par quelque document que ce soit, ni le caractère inexploitable, ni l'état de ruines du fonds de commerce, ne possédant sur ce point que par simple allégation ; que d'ailleurs, sauf à avoir considéré que le fonds n'était jamais revenu dans son patrimoine et que seul le liquidateur, es qualités, devait faire diligence, Mme X... n'a jamais contesté sérieusement le courrier du 19 décembre 2006 que la salariée lui avait adressé et aux termes duquel cette salariée déclarait : «Ce lundi 18 décembre 2006, je me suis rendue, accompagnée de mes collègues de travail, sur mon lieu de travail à 18 h 00 et nous avons pu constater que le restaurant était fermé ; nous n'avons pu accéder à notre emploi. De ce fait, nous vous avons téléphoné afin de trouver une solution ; il apparaît que vous ne souhaitez pas réouvrir (sic) le restaurant. Nous continuerons à nous présenter chaque soir à notre travail en attendant un licenciement de votre part. Dans le cas contraire, nous serons dans l'obligation de faire constater que nous ne pouvons accéder à notre poste de travail et devrons en référer au conseil des prud'hommes » ; que de même, sans qu'il y ait lieu de discuter les contraintes, telles que son âge ou son état de santé, mis en avant par Mme X... pour justifier ne pas devoir ou pouvoir poursuivre l'exploitation de son fonds de commerce, directement voire par le biais d'un nouveau contrat de location gérance, force est de reconnaître qu'il s'agit là de raisons qui lui sont propres et qui ne peuvent en aucune manière influer sur les obligations mises à sa charge par l'ancien article L. 1224-1 du Code du travail ; que faute pour Mme X... d'établir que le fonds lui a été rendu « en ruine», les contrats de travail en cours, dont celui de la salariée se sont donc poursuivis de plein droit avec la propriétaire du fonds de sorte que cette dernière doit supporter les conséquences de la rupture des relations de travail ;
ALORS QUE faute pour le législateur de l'avoir prévu expressément, la loi du 26 juillet 2005 de sauvegarde des entreprises n'autorise pas le liquidateur judiciaire, quand bien même l'entreprise a cessé toute activité, à notifier au bailleur la résiliation unilatérale du contrat de location-gérance, sans mise en demeure préalable ; qu'en déclarant néanmoins régulière la notification faite par le liquidateur judiciaire à l'exposante sans mise en demeure préalable, la Cour d'appel a violé les articles L. 641-10 du Code de commerce et 1184 du Code civil ;
ALORS en tout état de cause QUE si, en vertu de l'article L. 1224-1 du Code du travail, les contrats de travail en cours à l'expiration de la location-gérance continuent avec le propriétaire du fonds de commerce qui reprend, en principe, possession de celui-ci, c'est à la condition que l'entreprise subsiste et que le fonds ne soit pas inexploitable ou en ruine ; qu'il ressort des constatations de l'arrêt que par jugement du 18 décembre 2006, le tribunal de commerce a prononcé la liquidation judiciaire sans maintien provisoire d'activité et que le même jour la salariée n'a pu accéder à son poste de travail en raison de la fermeture du restaurant ; qu'il était ainsi établi qu'au jour de la résiliation du contrat de location gérance, le 20 décembre 2006, le fonds avait cessé toute activité ; qu'en refusant néanmoins d'en déduire qu'il était inexploitable à cette date , la Cour d'appel a omis de tirer les conséquences qui s'évinçaient de ses propres constatations et partant violé le texte susvisé ;
ALORS de surcroît QUE l'état de ruine du fonds de commerce est suffisamment établi par la mise en liquidation judiciaire du locataire-gérant sans maintien provisoire d'activité ; qu'en refusant néanmoins de constater la ruine du fonds de commerce, la Cour d'appel a omis de tirer les conséquences qui s'évinçaient de ses propres constatations et partant violé le texte susvisé.

SECOND MOYEN DE CASSATION :

Le moyen fait grief à l'arrêt attaqué d'AVOIR prononcé la résiliation judiciaire de ce contrat de travail aux torts de Madame X... avec effet au 24 octobre 2007, mis hors de cause Maître Y..., es qualités de liquidateur de la SARL LES OUBLIETTES ainsi que l'AGS, d'AVOIR condamné l'exposante à payer à la salariée, en deniers ou quittances, des sommes à titre de rappels de salaire du 19 décembre 2006 au 24 octobre 2007, de congés payés y afférents, d'indemnité compensatrice de préavis, de congés payés y afférents et de dommages-intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse ;
AUX MOTIFS QU'en ne fournissant pas de travail à la salariée et en ne lui versant aucun salaire depuis le transfert du contrat de travail, Madame X... a nécessairement manqué aux obligations les plus essentielles lui incombant en sa qualité d'employeur ; que la résiliation judiciaire du contrat de travail sera en conséquence prononcée avec effet à la date d'envoi de la lettre de licenciement soit le 24 octobre 2007 ;
ALORS QUE la cassation à intervenir sur le premier moyen s'étendra au chef du dispositif relatif à l'imputabilité de la rupture du contrat de travail, en application de l'article 624 du Code de procédure civile.


Synthèse
Formation : Chambre sociale
Numéro d'arrêt : 09-42348;09-42349;09-42350;09-42351;09-42352
Date de la décision : 28/09/2010
Sens de l'arrêt : Rejet
Type d'affaire : Sociale

Références :

Décision attaquée : Cour d'appel d'Aix-en-Provence, 10 mars 2009


Publications
Proposition de citation : Cass. Soc., 28 sep. 2010, pourvoi n°09-42348;09-42349;09-42350;09-42351;09-42352


Composition du Tribunal
Président : M. Bailly (conseiller le plus ancien faisant fonction de président)
Avocat(s) : SCP Masse-Dessen et Thouvenin, SCP Vier, Barthélemy et Matuchansky

Origine de la décision
Date de l'import : 15/09/2022
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CCASS:2010:09.42348
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