LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l'arrêt suivant :
Sur le moyen unique :
Vu les articles L. 1232-6, L. 1234-1, L. 1234-5 et L. 1235-1 du code du travail ;
Attendu, selon l'arrêt attaqué, que M. X..., engagé le 25 août 1972 par la société Sodifroid, devenue la société Fournier Guignard, en qualité d'aide-monteur, puis en dernier lieu, le 28 septembre 2000, au titre d'un nouveau contrat de travail, en qualité de directeur commercial, a été licencié pour faute grave le 27 décembre 2004 ; que par jugement du 30 août 2006, le tribunal de commerce de Bobigny a désigné M. Y... en qualité de liquidateur de la société ;
Attendu que pour dire que le licenciement repose sur une cause réelle et sérieuse et non sur une faute grave, l'arrêt retient que les griefs relatifs à l'installation de quatre climatiseurs étaient établis et qu'il n'était pas utile d'examiner les autres griefs qui, à les supposer établis, ne sauraient eux non plus recevoir une qualification de faute grave ;
Qu'en statuant ainsi, sans rechercher si l'ensemble des faits reprochés dans la lettre de licenciement au salarié n'était pas de nature à rendre impossible le maintien du salarié dans l'entreprise et caractérisait ainsi une faute grave, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard des textes susvisés ;
PAR CES MOTIFS :
CASSE ET ANNULE, sauf en ce qu'il a confirmé le jugement sur la prime d'ancienneté et la garantie de l'AGS, l'arrêt rendu le 22 janvier 2009, entre les parties, par la cour d'appel de Paris ; remet, en conséquence, sur les autres points, la cause et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant ledit arrêt et, pour être fait droit, les renvoie devant la cour d'appel de Paris, autrement composée ;
Condamne M. X... aux dépens ;
Vu l'article 700 du code de procédure civile, rejette sa demande ;
Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite de l'arrêt partiellement cassé ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre sociale, et prononcé par le président en son audience publique du vingt-huit septembre deux mille dix.
MOYEN ANNEXE au présent arrêt :
Moyen produit par la SCP Delaporte, Briard et Trichet, avocat aux Conseils, pour M. Y..., ès qualités
Il est fait grief à l'arrêt confirmatif attaqué d'avoir dit que le licenciement de M. X... reposait sur une cause réelle et sérieuse mais non sur une faute grave et fixé, en conséquence, la créance de M. X... sur la liquidation judiciaire de la société Fournier Guignard / Frigo Station par Me Y..., ès qualités de mandataire liquidateur, aux sommes de 22.867,35 euros à titre d'indemnité de préavis, 2.286,73 euros à titre de congés payés y afférents et 137.204,10 euros à titre d'indemnité de licenciement ;
Aux motifs propres que les pièces produites aux débats établissent que M. Bruno X... a géré de manière très défectueuse les dossiers invoqués par l'employeur, à savoir la fourniture et la pose de systèmes de climatisation dans trois pharmacies clientes de la société ; que compte tenu de l'importance de ses responsabilités au sein de l'entreprise, de son expérience dans le domaine du froid et de ses fonctions en contact direct avec la clientèle tout au long de la gestion d'un dossier, M. Bruno X... ne peut utilement invoquer pour s'exonérer des fautes commises par d'autres préposés, dont il aurait dû de toute façon informer sa hiérarchie, ou des circonstances malencontreuses ; qu'en revanche, les allégations de l'employeur sur le caractère volontaire des manquements constatés ne sont pas suffisamment établies dans les trois dossiers cités ; qu'il en est de même pour l'installation sans facturation d'un climatiseur au domicile personnel d'une personne par ailleurs cliente à titre professionnel, la thèse de M. Bruno X... quant à ce geste commercial consenti par le dirigeant n'étant pas sérieusement démentie par ce dernier ; que c'est donc de manière très pertinente que les premiers juges ont constaté l'existence d'une cause réelle et sérieuse de licenciement tout en rejetant la qualification de faute grave pour les quatre dossiers évoqués ci-dessus et cette analyse sera confirmée ; qu'il n'est pas utile d'examiner plus avant les autres griefs qui, à les supposer établis, ne sauraient eux non plus recevoir une qualification de faute grave, ni des faits non précisés dans la lettre de licenciement ;
Et, aux motifs éventuellement adoptés, qu'il est constaté que les griefs prononcés à l'encontre de M. X... n'ont été invoqués qu'à la suite de la saisine du conseil de prud'hommes ; qu'antérieurement à cette date, M. X... n'avait fait l'objet du moindre reproche sur la qualité de son travail ; qu'il convient, pour apprécier le licenciement de M. X..., de s'en tenir aux différents griefs invoqués en fonction de son rôle dans l'entreprise ; qu'en l'occurrence, il résulte des pièces et des débats que les motifs invoqués ne constituent pas une faute grave, le conseil retiendra une cause réelle et sérieuse ;
Alors, d'une part, que la lettre de licenciement fixe les limites du litige et que le juge doit examiner chacun des griefs qui y sont mentionnés ; qu'en l'espèce, la lettre de licenciement du 27 décembre 2004 reprochait au salarié, en plus du détournement de marchandises et des malversations, une dégradation constante de ses résultats commerciaux en raison de son inactivité volontaire, un refus délibéré d'exécuter les directives et un refus délibéré d'exercer la plénitude de ses fonctions de directeur commercial ; qu'en se bornant à statuer sur le premier grief invoqué au soutien de la rupture du contrat de travail, concernant la fourniture et la pose de systèmes de climatisation dans trois pharmacies clientes de la société et chez une autre cliente de l'entreprise, dont elle a jugé qu'il ne justifiait pas un licenciement pour faute grave, et en s'abstenant de se prononcer sur les trois autres manquements professionnels visés par l'employeur, motifs pris qu'il «n'était pas utile d'examiner plus avant les autres griefs qui, à les supposer établis, ne sauraient eux non plus recevoir une qualification de faute grave», la cour d'appel a violé les articles L.1232-6, L.1235-1, L.1234-1, L.1234-5 et L.1234-9 du Code du travail ;
Alors, de seconde part, que les juges ne peuvent statuer par voie de simple affirmation ; qu'en jugeant que le licenciement de M. X... était fondé sur une cause réelle et sérieuse et non sur une faute grave, motifs pris qu'«il résulte des pièces et des débats que les motifs invoqués ne constituent pas une faute grave», la cour d'appel, qui s'est déterminée par voie de simple affirmation, n'a pas satisfait aux exigences de motivation de l'article 455 du Code de procédure civile