La jurisprudence francophone des Cours suprêmes


recherche avancée

22/09/2010 | FRANCE | N°09-84376

France | France, Cour de cassation, Chambre criminelle, 22 septembre 2010, 09-84376


LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE CRIMINELLE, a rendu l'arrêt suivant :
Statuant sur le pourvoi formé par :
M. Antonio X...,
contre l'arrêt de la cour d'appel de ROUEN, chambre correctionnelle, en date du 4 juin 2009, qui, pour fraude fiscale et omission de passation d'écritures en comptabilité, l'a condamné à huit mois d'emprisonnement avec sursis, 3 000 euros d'amende, a ordonné l'affichage et la publication de la décision et a prononcé sur les demandes de l'administration fiscale, partie civile ;
Vu les mémoires produits en demande et en défense ;
Sur le premier moye

n de cassation, pris de la violation des articles 6 §1 de la Convention eu...

LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE CRIMINELLE, a rendu l'arrêt suivant :
Statuant sur le pourvoi formé par :
M. Antonio X...,
contre l'arrêt de la cour d'appel de ROUEN, chambre correctionnelle, en date du 4 juin 2009, qui, pour fraude fiscale et omission de passation d'écritures en comptabilité, l'a condamné à huit mois d'emprisonnement avec sursis, 3 000 euros d'amende, a ordonné l'affichage et la publication de la décision et a prononcé sur les demandes de l'administration fiscale, partie civile ;
Vu les mémoires produits en demande et en défense ;
Sur le premier moyen de cassation, pris de la violation des articles 6 §1 de la Convention européenne des droits de l'homme, ensemble les articles 591 et 593 du code de procédure pénale ;
"en ce qu'il résulte des mentions de l'arrêt attaqué que le prévenu s'est trouvé confronté, en appel, à deux parties, le ministère public, qui a été entendu en ses réquisitions, et l'administration des impôts, qui a été entendue à la fois par un de ses représentants, M. Lorfeuvre, et par la voix de l'avocat l'assistant, Me Thomat Delphine ;
"1°) alors que la notion de procès équitable implique que les droits de la défense et le principe de l'égalité des armes soient garantis ; qu'en application desdits principes aucune parties au procès ne doit être placée dans une situation désavantageuse par rapport à une autre ; qu'au cas présent la confrontation du prévenu avec deux organes (le ministère public et l'administration fiscale) ayant des intérêts convergents et pouvant objectivement apparaître comme deux parties poursuivantes, créait une situation de net déséquilibre entre les parties ; que l'arrêt attaqué est donc entaché d'une violation des textes et principes susvisés ;
"2°) alors qu'il en va d'autant plus ainsi que les parties adverses ont finalement été entendues trois fois par la cour, l'administration fiscale ayant été entendue par la voix d'un de ses agents et par la voix de son avocat et le ministère public ayant été entendu en ses réquisitions ; qu'en statuant ainsi, la cour d'appel n'a pas légalement justifié sa décision au regard des textes et principes susvisés" ;
Attendu qu'il résulte des mentions de l'arrêt attaqué qu'ont été entendus, à l'audience de la cour d'appel, le représentant de l'administration des impôts, partie civile, l'avocat de celle-ci, le ministère public, l'avocat du prévenu et enfin le prévenu lui-même ;
Attendu qu'en cet état, le demandeur ne saurait prétendre que cette procédure, conforme aux dispositions des articles 460 et 513 du code de procédure pénale, a porté atteinte au principe du procès équitable ;
D'où il suit que le moyen n'est pas fondé ;
Sur le deuxième moyen de cassation, pris de la violation des articles 6 § 1, 3 b) de la Convention européenne des droits de l'homme, ensemble les articles 591 et 593 du code de procédure pénale ;
"en ce qu'il résulte des mentions de l'arrêt attaqué que les conclusions de l'avocat de l'administration fiscale ont été déposées à l'audience ;
"1°) alors que la notion de procès équitable implique que les droits de la défense et le principe du contradictoire soient garantis ; qu'en application desdits principes les parties au procès doivent recevoir la communication de l'ensemble des arguments et des documents de la parties adverses ; qu'elles doivent également disposer d'un temps suffisant pour préparer leur défense ; qu'au cas présent où le dépôt des conclusions à l'audience, sans que les juges ne vérifient si le prévenu et son avocat en ont eu connaissance préalablement et s'ils ont eu le temps nécessaire à la préparation de leur défense, constitue une violation des droits de la défense et du principe du contradictoire, l'arrêt attaqué est entaché d'une violation des textes et principes susvisés ;
"2°) alors qu'il en est d'autant plus ainsi que l'arrêt ne constate même pas que ces conclusions de dernière heure auraient été communiquées, fût-ce à l'audience, au prévenu ou à l'avocat l'assistant ; que, de sorte qu'en statuant comme elle l'a fait, la cour d'appel n'a pas légalement justifié sa décision au regard des textes et principes susvisés" ;
Attendu que l'arrêt constate que l'avocat de la partie civile appelante a déposé, à l'appel de la cause, des conclusions datées et signées par le greffier, mentionnées aux notes d'audience, visées par le président et jointes au dossier ;
Attendu qu'en cet état, et dès lors qu'aucune disposition légale n'exige que la partie, qui dépose des conclusions, les communique préalablement aux autres parties, la cour d'appel a justifié sa décision au regard de l'article 459 du code de procédure pénale ;
D'où il suit que le moyen doit être écarté ;
Sur le troisième moyen de cassation, pris de la violation des articles 1741, 1743 du code général des impôts, 591, 593 du code de procédure pénale, L. 111-3, L. 111-4, L. 121-3 du code pénal et 7 de la Convention européenne des droits de l'homme ;
"en ce que l'arrêt attaqué a déclaré M. X... coupable du délit de fraude fiscale et de celui d'omission de passation d'écritures comptables ;
"aux motifs qu'il est de principe jurisprudentiel que le gérant d'une SARL doit être tenu pour responsable des obligations fiscales et comptables de cette société vis à vis de l'administration et, en l'espèce la SARL SGB n'ayant pas satisfait à ses obligations fiscales et comptables pendant les périodes visées à la prévention, M. X..., qui était parfaitement averti desdites obligations pour avoir exercé une activité individuelle d'entreprise du bâtiment avant la création de la société SGB, doit être tenu pour responsable des carences constatées, l'intention de fraude étant établie par le caractère volontaire de la minoration de la base d'imposition déclarée en matière d'impôt sur les sociétés, la non comptabilisation délibérée d'un certain nombre de factures, la non déclaration, non moins délibérée, de TVA collectée ou encore l'application à tort du taux réduit de TVA, le vérificateur ayant constaté que les travaux avaient été initialement comptabilisés au taux normal avant que ces écritures soient annulées au profit de nouvelles factures à taux réduit ;
"1°) alors qu'il n'y a point de crime ou de délit sans intention de le commettre ; qu'un jugement de condamnation doit caractériser les infractions en tous leurs éléments et notamment intentionnel ; qu'au cas présent, pour caractériser l'élément intentionnel des délits susmentionnés les juges se sont référés à l'expérience professionnelle antérieure du prévenu en tant qu'entrepreneur individuel cependant qu'il existe des différences sensibles entre les obligations comptables et fiscales d'un entrepreneur individuel et celles d'une SARL du type de celle en cause en l'espèce ; de sorte qu'en statuant ainsi, la cour d'appel s'est prononcée par un motif inopérant, violant ainsi les textes susvisés ;
"2°) alors qu'il n'y a point de crime ou de délit sans intention de le commettre ; qu'un jugement de condamnation doit caractériser les infractions en tous leurs éléments et notamment intentionnel ; qu'au cas présent, pour caractériser l'élément intentionnel des délits susmentionnés les juges se sont référés au caractère délibéré et volontaire des minorations d'imposition cependant qu'il ressortait de leurs propres constatations, que les règles d'imposition concernées étaient extrêmement techniques de sorte qu'en statuant comme elle l'a fait la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard des textes susvisés ;
"3°) alors qu'il n'y a point de crime ou de délit sans intention de le commettre ; qu'un jugement de condamnation doit caractériser les infractions en tous leurs éléments et notamment intentionnel ; qu'au cas présent, pour caractériser l'élément intentionnel des délits susmentionnés les juges se sont référés à la non comptabilisation prétendument délibérée d'un certain nombre de factures ; que le contribuable a pourtant démontré le caractère partiellement justifié de cette non comptabilisation ; que le caractère litigieux des factures restantes atteste de la bonne foi du prévenu ; qu'en statuant ainsi comme elle l'a fait, la cour d'appel s'est prononcée par un motif inopérant, violant ainsi les textes susvisés ;
"4°) alors que il n'y a point de crime ou de délit sans intention de le commettre ; qu'un jugement de condamnation doit caractériser les infractions en tous leurs éléments et notamment intentionnel ; qu'au cas présent, pour caractériser l'élément intentionnel des délits susmentionnés les juges se sont encore référés au caractère volontaire, selon eux, de la minoration d'imposition déclarée en matière d'impôt sur les sociétés, cependant que les seuls montants non déclarés, contestés par l'administration, résultent des factures non comptabilisés ; que compte tenu du caractère partiellement justifié et partiellement seulement erroné de leur non comptabilisation, lesdites minorations d'impositions ne peuvent être qualifiées de volontaires ; qu'en statuant comme elle l'a fait, la cour d'appel s'est prononcée par un motif inopérant, violant ainsi les textes susvisés ;
"5°) alors qu'il n'y a point de crime ou de délit sans intention de le commettre ; qu'un jugement de condamnation doit caractériser les infractions en tous leurs éléments et notamment intentionnel ; qu'au cas présent, pour caractériser l'élément intentionnel des délits susmentionnés l'arrêt attaqué relève la non déclaration, prétendument délibérée, de TVA collectée, cependant qu'il ressort de la procédure administrative engagée par le contribuable, ainsi que de l'attestation de l'expert-comptable produite, que les règles d'imposition concernées étaient extrêmement techniques ; que, de sorte qu'en statuant comme elle l'a fait, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard des textes susvisés ;
"6°) alors qu'il n'y a point de crime ou de délit sans intention de le commettre ; qu'un jugement de condamnation doit caractériser les infractions en tous leurs éléments et notamment intentionnel ; qu'au cas présent, pour caractériser l'élément intentionnel des délits susmentionnés l'arrêt attaqué relève encore l'application à tort du taux réduit de TVA, le vérificateur ayant constaté que les travaux avaient été initialement comptabilisés au taux normal avant que ces écritures soient annulées au profit de nouvelles factures à taux réduit ; que toutefois les débats engagés sur ce point devant le tribunal administratif de Rouen quant à l'application dudit taux aux opérations en litige attestent du caractère technique de la question et donc de l'absence de caractère intentionnel de l'erreur éventuellement commise sur ce point ; qu'en statuant comme elle l'a fait, la cour d'appel s'est prononcée par un motif inopérant, violant ainsi les textes susvisés ;
"7°) alors qu'il n'y a point de crime ou de délit sans intention de le commettre ; qu'un jugement de condamnation doit caractériser les infractions en tous leurs éléments et notamment intentionnel ; qu'en jugeant que l'élément intentionnel aurait ici été caractérisé, cependant que le prévenu n'était pas dans la situation habituelle des fraudeurs ayant omis toute tenue de comptabilité, fait disparaître les traces de leurs agissements, ou ayant pris la fuite, mais qu'il s'agissait au contraire d'une personne qui s'était montrée loyale et réceptive pendant toute la procédure ; qu'en statuant comme elle l'a fait, la cour d'appel n'a pas légalement justifié sa décision au regard des textes susvisés ;
"8°) alors que les éléments d'infractions sont déterminés par la loi, que cette loi est d'interprétation stricte ; qu'en s'en référant, au cas d'espèce, à un « principe jurisprudentiel » pour définir l'élément intentionnel de l'infraction, la cour d'appel a violé les textes susvisés" ;

Attendu que les énonciations de l'arrêt attaqué mettent la Cour de cassation en mesure de s'assurer que la cour d'appel a, sans insuffisance ni contradiction, caractérisé en tous leurs éléments, tant matériels qu'intentionnel, les délits dont elle a déclaré le prévenu coupable ;
D'où il suit que le moyen, qui se borne à remettre en question l'appréciation souveraine, par les juges du fond, des faits et circonstances de la cause, ainsi que des éléments de preuve contradictoirement débattus, ne saurait être admis ;
Et attendu que l'arrêt est régulier en la forme ;
REJETTE le pourvoi ;
Ainsi jugé et prononcé par la Cour de cassation, chambre criminelle, en son audience publique, les jour, mois et an que dessus ;
Etaient présents aux débats et au délibéré, dans la formation prévue à l'article 567-1-1 du code de procédure pénale : M. Louvel président, M. Bloch conseiller rapporteur, M. Dulin conseiller de la chambre ;
Greffier de chambre : Mme Villar ;
En foi de quoi le présent arrêt a été signé par le président, le rapporteur et le greffier de chambre.


Synthèse
Formation : Chambre criminelle
Numéro d'arrêt : 09-84376
Date de la décision : 22/09/2010
Sens de l'arrêt : Rejet
Type d'affaire : Criminelle

Références :

Décision attaquée : Cour d'appel de Rouen, 04 juin 2009


Publications
Proposition de citation : Cass. Crim., 22 sep. 2010, pourvoi n°09-84376


Composition du Tribunal
Président : M. Louvel (président)
Avocat(s) : Me Foussard, SCP Nicolaý, de Lanouvelle et Hannotin

Origine de la décision
Date de l'import : 15/09/2022
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CCASS:2010:09.84376
Association des cours judiciaires suprmes francophones
Organisation internationale de la francophonie
Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie. Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie.
Logo iall 2012 website award