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20/09/2010 | FRANCE | N°9C-RD069

France | France, Cour de cassation, Commission reparation detention, 20 septembre 2010, 9C-RD069


COUR DE CASSATION 09 CRD 069Prononcé au 20 septembre 2010

La commission nationale de réparation des détentions instituée par l'article 149-3 du code de procédure pénale, composée lors des débats de M. Breillat, président, M. Straehli, conseiller, Mme Leroy-Gissinger, conseiller référendaire, en présence de M. Charpenel, avocat général et avec l'assistance de Mme Bureau, greffier, a rendu la décision suivante :
INFIRMATION PARTIELLE sur le recours formé par Claude X..., contre la décision du premier président de la cour d'appel d'Aix-en-Provence en date du 2 octobre

2009 qui lui a alloué une indemnité de 80 000 euros en réparation de son p...

COUR DE CASSATION 09 CRD 069Prononcé au 20 septembre 2010

La commission nationale de réparation des détentions instituée par l'article 149-3 du code de procédure pénale, composée lors des débats de M. Breillat, président, M. Straehli, conseiller, Mme Leroy-Gissinger, conseiller référendaire, en présence de M. Charpenel, avocat général et avec l'assistance de Mme Bureau, greffier, a rendu la décision suivante :
INFIRMATION PARTIELLE sur le recours formé par Claude X..., contre la décision du premier président de la cour d'appel d'Aix-en-Provence en date du 2 octobre 2009 qui lui a alloué une indemnité de 80 000 euros en réparation de son préjudice moral sur le fondement de l'article 149 du code précité ainsi qu'une somme de 1 000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile.
Les débats ayant eu lieu en audience publique le 14 juin 2010 le demandeur et son avocat ne s'y étant pas opposé ;
Vu les dossiers de la procédure de réparation et de la procédure pénale ;
Vu les conclusions de Me Dubois, avocat au barreau de Grasse, représentant M. X... ;
Vu les conclusions de l'agent judiciaire du Trésor ;
Vu les conclusions de M. le procureur général près la Cour de cassation ;
Vu les conclusions en réponse de Me Dubois ;
Vu la notification de la date de l'audience, par lettre recommandée avec demande d'avis de réception, au demandeur, à son avocat, à l'agent judiciaire du Trésor et à son avocat, un mois avant l'audience ;
Sur le rapport de M. le conseiller Straehli, les observations de Me Dubois, avocat assistant M. X..., celles de M. X..., comparant et de Me Couturier-Heller, avocat représentant l'agent judiciaire du Trésor, les conclusions de M. l'avocat général Charpenel, le demandeur ayant eu la parole en dernier ;
Après en avoir délibéré conformément à la loi, la décision étant rendue en audience publique ;
LA COMMISSION NATIONALE DE REPARATION DES DETENTIONS,
Attendu que, par décision du 2 octobre 2009, le premier président de la cour d'appel d'Aix-en-Provence a alloué à Claude X... la somme de 80 000 euros en réparation du préjudice moral ainsi qu'une somme de 1 000 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile, à raison d'une détention provisoire effectuée du 17 janvier 2003 au 29 novembre 2005, puis du 16 novembre 2007 au 15 octobre 2008, pour des faits ayant donné lieu à un arrêt d'acquittement devenu définitif ; que le premier président a rejeté la demande présentée au titre du préjudice matériel, l'estimant injustifiée ;
Attendu que M. X... a formé, le 9 octobre 2009, un recours contre cette décision pour obtenir, au titre du préjudice matériel, les sommes de 20 700 euros représentant une perte de chance de percevoir un salaire, et de 23 920 euros correspondant à des frais d'avocat exposés pour le seul contentieux de la détention provisoire ; qu'il sollicite, pour la réparation du préjudice moral, une somme de 300 000 euros, et, sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile, une somme de 5 000 euros ;
Attendu que l'agent judiciaire du Trésor soulève l'irrecevabilité du recours, au motif qu'il a été formé par un avocat, substituant l'avocat désigné par M. X..., sans que l'avocat déclarant ne justifie du pouvoir que lui aurait donné son confrère ; qu'à titre subsidiaire, il conclut au rejet du recours ;
Attendu que le procureur général conclut au rejet du recours ;
Vu les articles 149 à 150 du code de procédure pénale ;
Attendu qu'une indemnité est accordée, à sa demande, à la personne ayant fait l'objet d'une détention provisoire terminée à son égard par une décision de non-lieu, de relaxe ou d'acquittement devenue définitive ; que cette indemnité est allouée en vue de réparer intégralement le préjudice personnel, matériel et moral, directement causé par la privation de liberté ;
Sur la recevabilité du recours :
Attendu que, d'une part, lorsqu'un avocat déclare substituer un confrère pour exercer le recours, c'est l'avocat déclarant, qui effectue la remise au greffe, qui doit signer le recours et que, d'autre part, l'article R. 40-4 du code de procédure pénale ne prévoit pas que l'avocat déclarant exercer le recours justifie, par un pouvoir spécial, qu'il est habilité à représenter le requérant ;
Que le recours formé par Me Gomez, avocat substituant Me Dubois, avocat de M. X..., est recevable ;
Sur la période de détention ouvrant droit à réparation :
Attendu que, pour fixer la période indemnisable, le premier président a déduit de celles indiquées ci-dessus neuf mois d'emprisonnement subis par M. X... en exécution d'une condamnation prononcée pour une infraction commise durant sa détention ;
Attendu que, pour critiquer cette décision, M. X... fait valoir le caractère spécifique de l'infraction ayant conduit à sa condamnation, s'agissant de faits commis par lui en détention et trouvant leur cause génératrice dans cette situation qu'il ne supportait pas, alors qu'il était innocent ;
Attendu que l'article 149 du code de procédure pénale, aux termes duquel aucune réparation n'est due lorsque la personne était dans le même temps détenue pour autre cause, ne distingue pas selon que l'infraction a été commise en dehors de la période de détention provisoire considérée ou durant celle-ci ; que c'est à bon droit que le premier président a déduit de la détention provisoire subie par M. X... la période durant laquelle il exécutait une condamnation, laquelle doit être fixée exactement, du 2 mai 2005, date de la mise à exécution de la peine, au 29 novembre 2005, date de l'arrêt de mise en liberté rendu par la chambre de l'instruction ;
Sur le préjudice matériel :
Attendu que M. X... fait valoir qu'au moment de son incarcération, il venait d'être employé par une société en qualité d'ouvrier plaquiste peintre et qu'il avait exercé une activité professionnelle depuis 1975, pour un revenu moyen de 500 euros par mois ;
Que, cependant, il ressort du certificat produit par le demandeur qu'à la date de son incarcération, le 17 janvier 2003, l'emploi dont il bénéficiait avait pris fin depuis une dizaine de jours ; que le relevé de droits pour la retraite qu'il a versé au dossier de la procédure ne fait état d'emplois réguliers que de 1975 à 1996 ; que M. X... ne justifie, même à l'occasion de son recours, d'aucune autre activité professionnelle ;
Attendu que le remboursement des frais de défense dus à un avocat ne peut concerner que les prestations directement liées à la détention ; que celles-ci doivent faire l'objet de factures d'honoraires détaillées ; que M. X... ne fournit pas de telles factures ;
Attendu, en conséquence, qu'il y a lieu de rejeter le recours de ce chef ;
Sur le préjudice moral :
Attendu que le premier président a retenu l'âge du demandeur au moment de son incarcération, la durée de celle-ci, les antécédents judiciaires de l'intéressé, la nature de l'incrimination et la fragilité psychologique de M. X..., puisque ce dernier souffrait de troubles psychiatriques avant son incarcération, qui avaient rendu plus pénibles les conditions de sa détention ;
Que s'ajoutent à ces éléments retenus à bon droit l'aggravation du choc carcéral due à la succession de deux incarcérations dans la même procédure, l'incidence importante des troubles psychiatriques relevés puisqu'ils ont conduit M. X... à des tentatives de suicide et à des hospitalisations d'office au cours de sa détention ; que le préjudice moral du demandeur sera plus justement réparé par l'allocation d'une somme de 85 000 euros ;
Sur l'application de l'article 700 du code de procédure civile :
Attendu qu'il y a lieu d'allouer, à ce titre, à M. X... la somme de 1 500 euros ;
PAR CES MOTIFS :
DECLARE recevable le recours de M. Claude X... ;
ACCUEILLE partiellement le recours ;
ALLOUE à M. Claude X... la somme de 85 000 euros (quatre vingt cinq mille euros) au titre du préjudice moral ;
REJETTE le recours pour le surplus ;
ALLOUE à M. Claude X... la somme de 1 500 EUROS (MILLE CINQ CENTS EUROS) au titre de l'article 700 du code de procédure civile ;
LAISSE les dépens à la charge du Trésor public ;
Ainsi fait, jugé et prononcé en audience publique le 20 septembre 2010 par le président de la commission nationale de réparation des détentions ;
En foi de quoi la présente décision a été signée par le président, le rapporteur et le greffier présent lors des débats et du prononcé.


Synthèse
Formation : Commission reparation detention
Numéro d'arrêt : 9C-RD069
Date de la décision : 20/09/2010
Sens de l'arrêt : Infirmation partielle

Analyses

REPARATION A RAISON D'UNE DETENTION - Bénéfice - Exclusion - Personne détenue dans le même temps pour autre cause - Définition - Infraction commise en dehors de la période de détention provisoire considérée ou durant celle-ci - Absence d'influence

L'article 149 du code de procédure pénale, aux termes duquel aucune réparation n'est due lorsque la personne était dans le même temps détenue pour autre cause, ne distingue pas selon que l'infraction a été commise en dehors de la période de détention provisoire considérée ou durant celle-ci. C'est dès lors à bon droit que le premier président, pour calculer la période indemnisable, a déduit la durée de la peine d'emprisonnement subie en exécution d'une condamnation prononcée pour une infraction commise durant la détention


Références :

article 149 du code de procédure pénale

Décision attaquée : Cour d'appel d'Aix-en-Provence, 02 octobre 2009

Sur la définition de la détention pour autre cause, au sens de l'article 149 du code de procédure pénale, à rapprocher :Com. nat. de réparation des détentions, 20 septembre 2010, Bull. crim. 2010, n° 7 (infirmation) 09CRD070


Publications
Proposition de citation : Cass. Commission reparation detention, 20 sep. 2010, pourvoi n°9C-RD069, Bull. civ. criminel 2010, Commission nationale de réparation des détentions, n° 8
Publié au bulletin des arrêts des chambres civiles criminel 2010, Commission nationale de réparation des détentions, n° 8

Composition du Tribunal
Président : M. Breillat
Avocat général : M. Charpenel
Rapporteur ?: M. Straehli
Avocat(s) : Me Dubois, Me Couturier-Heller

Origine de la décision
Date de l'import : 14/10/2011
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CCASS:2010:9C.RD069
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