LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE CRIMINELLE, a rendu l'arrêt suivant :
Statuant sur le pourvoi formé par :
M. Christian X...,
contre l'arrêt de la cour d'assises du VAR, en date du 26 juin 2009, qui, pour viols et agressions sexuelles aggravés, l'a condamné à quatorze ans de réclusion criminelle et a décerné mandat de dépôt à son encontre ainsi que contre l'arrêt du même jour par lequel la cour a prononcé sur les intérêts civils ;
Vu les mémoires ampliatif et additionnel en demande et les mémoires en défense produits ;
Sur le premier moyen de cassation, pris de la violation des articles 706-71, R. 53-36, R. 53-37, 591 et 593 du code de procédure pénale, violation des droits de la défense ;
"en ce qu'il ressort du procès-verbal des débats et du procès-verbal dressé en application de l'article 706-71 du code de procédure pénale, joint au procès-verbal des débats, que le témoin Jérôme Y..., cité par la défense de l'accusé, a été entendu au moyen de la visioconférence depuis le tribunal de grande instance de Saint-Denis de la Réunion ;
"alors que l'article 706-71 impose que lorsqu'un témoin acquis aux débats se trouve dans l'impossibilité, en raison de l'éloignement de sa résidence, de comparaître devant la cour d'assises, il puisse être entendu à partir d'un local du tribunal du lieu de sa résidence, en usant d'un moyen de télécommunication garantissant la confidentialité de la transmission ; qu'il ne résulte, en l'espèce, ni du procès-verbal des débats, ni du procès-verbal dressé sur le lieu de l'audition, que ce procédé utilisé garantissait la confidentialité de la transmission, comme l'exigent les textes susvisés dont il n'est donc pas justifié de l'application correcte ni du respect des droits de la défense" ;
Attendu que le procès-verbal des débats et le procès-verbal des opérations techniques dressé au lieu de l'audition du témoin mettent la Cour de cassation en mesure de s'assurer que les conditions légales de déroulement de l'audience ont été respectées ;
D'où il suit que le moyen ne saurait être accueilli ;
Sur le deuxième moyen de cassation, pris de la violation des articles 168, 324, 326, 347, alinéa 3, 427, 593 du code de procédure pénale, des principes de l'oralité des débats et du contradictoire, de l'article 6 de la Convention européenne des droits de l'homme, de l'exigence d'un procès équitable ;
"en ce qu'il a été passe outre aux débats quant à l'audition du témoin Jean-Luc Z..., de l'expert Rémi A..., des experts Jean-Marie B..., Marie-Hélène C..., Louis D... et du témoin Christine E..., tous acquis aux débats ;
"alors que le principe de l'oralité des débats devant la cour d'assises et celui du contradictoire, exigent que sauf impossibilité expressément constatée et justifiée, un accusé ne puisse être condamné sans que tous les témoins et experts cités et acquis aux débats aient été entendus et que l'accusé ait pu ainsi exercer son droit à les interroger ou faire interroger ; que la règle du débat oral étant d'ordre public et ne pouvant être couverte par le consentement de l'accusé, c'est à tort et en violation des textes et principes susvisés qu'il a été passé outre, bien avant la fin de l'instruction à l'audience, à l'audition de deux témoins et de quatre experts cités sans qu'il ne soit justifié d'une impossibilité de comparution, privant ainsi l'accusé de son droit à ce que ces éléments de preuve soient soumis à la libre discussion au cours de l'instruction orale devant la cour d'assises, en violation des textes et principes susvisés" ;
Attendu que, dès lors que les parties avaient renoncé , d'un commun accord, à l'audition des témoins et experts visés au moyen , comme cela résulte des énonciations du procès-verbal des débats , le président, qui n'avait pas le devoir de s'assurer de l'impossibilité de les faire comparaître, a régulièrement procédé , sans méconnaître les dispositions tant légales que conventionnelles invoquées ;
D'où il suit que le moyen doit être écarté ;
Sur le troisième moyen de cassation, pris de la violation des articles 222-22, 222-27, 222-29 du code pénal, de l'article 348, 349 du code de procédure pénale, 6 alinéa 3 de la Convention européenne des droits de l'homme ;
"en ce que la question n° 7 interroge la cour et le jury sur le point de savoir si à la date des faits, Karine F... était mineure de 15 ans, comme étant née le 1er février 1983 ;
"alors que la circonstance de minorité de quinze ans de Karine F..., n'était pas visée par l'arrêt de renvoi ; que cependant la question dont il n'a pas été donné lecture, porte sur la circonstance de minorité de 15 ans de Karine F... et il a été répondu affirmativement à cette question, non lue, qui modifiait la substance de l'accusation, en violation des textes susvisés" ;
Attendu qu'il résulte des énonciations de l'arrêt de renvoi que Christian X... a été mis en accusation, notamment, pour des agressions sexuelles commises par personne ayant autorité sur la personne de Karine F..., mineure de 15 ans ;
Que c'est donc à bon droit que le président de la cour d' assises a complété la question posée à la cour et au jury, dès lors qu'il n'a modifié ni la substance ni la nature des faits imputés à l'accusé ;
D'où il suit que le moyen n'est pas fondé ;
Sur le quatrième moyen de cassation, pris de la violation des articles 222-27, 222-28, 222-29, 222-30 du code de procédure pénale, 593 du même code, défaut de motifs, manque de base légale ;
"en ce que la question n° 8 interroge la cour et le jury sur le point de savoir si Christian X... avait autorité sur Karine F..., comme étant son oncle, et comme en ayant la garde momentanée ;
"alors qu'il a été répondu par l'affirmative à cette question qui ne spécifiait pas les circonstances dans lesquelles Christian X... aurait été amené à exercer sur la jeune fille, un pouvoir dont il aurait abusé, à l'occasion d'une simple garde momentanée ; qu'en retenant, néanmoins, cette circonstance aggravante, la cour d'assises n'a pas justifié sa décision" ;
Attendu que, posée dans les termes de la loi, la question n° 8 relative à la circonstance aggravante d' autorité , circonstance de pur fait qui n'a pas à être autrement caractérisée, est régulière ;
D'où il suit que le moyen ne peut être admis ;
Sur le cinquième moyen de cassation , pris de la violation des articles 349 et 593 du code de procédure pénale, 6 de la Convention européenne des droits de l'homme, défaut de motif ;
"en ce qu'il ressort de la feuille des questions que la cour et le jury n'ont pas été interrogés, précisément, sur les circonstances de chacun des chefs d'accusation principaux reprochés à Christian X..., et déniés par lui (questions n° 1, n° 4, n° 6, n° 7 et n° 8) ;
"alors qu'ainsi la rédaction des questions ne permet pas à l'accusé, qui contestait les faits, de déterminer par quels motifs la cour a jugé qu'il avait commis les viols et agressions sexuelles reprochés, et retenu sa culpabilité ; qu'ainsi, l'arrêt est dépourvu de motifs" ;
Sur le sixième moyen de cassation, pris de la violation des articles 7, 8, 9 et 16 de la Déclaration des droits de l'homme et du citoyen, 6 de la Cour européenne des droits de l'homme, 349, 353, 357, 591 à 593 du code de procédure pénale, défaut de motif, manque e base légale ;
"en ce que la cour d'assises a condamné l'accusé après avoir répondu affirmativement aux questions sur la culpabilité ;
"alors que les dispositions des articles 349, 353 et 357 du code de procédure pénale sont contraires aux articles 7, 8, 9 et 16 de la Déclaration des droits de l'Homme et du citoyen, ainsi qu'aux principes constitutionnels du droit à une procédure juste et équitable, d'égalité devant la loi et d'égalité devant la justice, en ce qu'elles ne permettent pas de motiver et d'expliquer les raisons de la décision de la déclaration de culpabilité d'un accusé et le quantum de sa condamnation, autrement que par des réponses affirmatives à des questions posées de façon abstraite, ne faisant aucune référence à un quelconque comportement précis de l'accusé, et se bornant à rappeler chacune des infractions, objet de l'accusation et ses éléments constitutifs légaux ; qu'en conséquence, la déclaration d'inconstitutionnalité des textes précités qui sera prononcée après renvoi de la question prioritaire de constitutionnalité au Conseil constitutionnel, privera l'arrêt attaqué de tout fondement juridique ;
Les moyens étant réunis ;
Attendu que, d'une part, le sixième moyen est devenu inopérant par suite de l'arrêt rendu le 4 juin 2010 par la Cour de cassation et ayant dit n'y avoir lieu à renvoyer au Conseil constitutionnel la question prioritaire de constitutionnalité ;
Attendu que, d'autre part, sont reprises dans l'arrêt de condamnation les réponses qu'en leur intime conviction, magistrats et jurés composant la cour d'assises d'appel, statuant dans la continuité des débats, à vote secret et à la majorité qualifiée des deux tiers, ont donné aux questions sur la culpabilité posées conformément au dispositif de la décision de renvoi ;
Attendu qu'en cet état, et dès lors qu'ont été assurés l'information préalable sur les charges fondant la mise en accusation, le libre exercice des droits de la défense ainsi que le caractère public et contradictoire des débats, l'arrêt satisfait aux exigences légales et conventionnelles invoquées ;
D'où il suit que les moyens ne sauraient être accueilli ;
Et attendu qu'aucun moyen n'est produit contre l'arrêt civil, que la procédure est régulière et que la peine a été légalement appliquée aux faits déclarés constants par la Cour et le jury ;
REJETTE le pourvoi ;
Ainsi jugé et prononcé par la Cour de cassation, chambre criminelle, en son audience publique, les jour, mois et an que dessus ;
Etaient présents aux débats et au délibéré, dans la formation prévue à l'article 567-1-1 du code de procédure pénale : M. Louvel président, Mme Leprieur conseiller rapporteur, Mme Chanet conseiller de la chambre ;
Greffier de chambre : Mme Daudé ;
En foi de quoi le présent arrêt a été signé par le président, le rapporteur et le greffier de chambre.