La jurisprudence francophone des Cours suprêmes


recherche avancée

18/08/2010 | FRANCE | N°10-85717

France | France, Cour de cassation, Chambre criminelle, 18 août 2010, 10-85717


LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE CRIMINELLE, a rendu l'arrêt suivant :
Statuant sur le pourvoi formé par :
- X... Oihana,
contre l'arrêt de la chambre de l'instruction de la cour d'appel de PARIS, 5e section, en date du 13 juillet 2010, qui a autorisé sa remise différée aux autorités judiciaires espagnoles en exécution d'un mandat d'arrêt européen ;
Vu le mémoire produit ;
Sur le moyen unique de cassation, pris de la violation des articles 695-11 à 695-13, 695-29 à 695-33 du code de procédure pénale, ensemble la Décision-cadre du Conseil de l'Union européenne d

u 13 juin 2002, article 3 de la Convention européenne des droits de l'homme et ...

LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE CRIMINELLE, a rendu l'arrêt suivant :
Statuant sur le pourvoi formé par :
- X... Oihana,
contre l'arrêt de la chambre de l'instruction de la cour d'appel de PARIS, 5e section, en date du 13 juillet 2010, qui a autorisé sa remise différée aux autorités judiciaires espagnoles en exécution d'un mandat d'arrêt européen ;
Vu le mémoire produit ;
Sur le moyen unique de cassation, pris de la violation des articles 695-11 à 695-13, 695-29 à 695-33 du code de procédure pénale, ensemble la Décision-cadre du Conseil de l'Union européenne du 13 juin 2002, article 3 de la Convention européenne des droits de l'homme et 15 de la Convention de New-York du 10 décembre 1984 ;
" en ce que la chambre de l'instruction a ordonné la remise de la demanderesse à l'autorité judiciaire espagnole ;
" aux motifs que les faits en droit de l'Etat espagnol sont susceptibles de recevoir les qualifications suivantes : délit de terrorisme, délit d'appartenance à une organisation terroriste ; qu'ils sont prévus et réprimés par les articles 515, 516, 573 du code pénal espagnol ; que, s'il n'appartient pas aux autorités judiciaires françaises, en exécution d'un mandat d'arrêt européen, de connaître de la réalité des charges pesant sur Oihana X..., il incombe cependant à la cour de considérer les faits exposés par l'autorité judiciaire de l'Etat espagnol pour veiller au respect des conditions édictées par les articles 695-18 à 695-20 et 695-22 à 695-24 du code de procédure pénale ; que les faits tels que ci-dessus exposés et qualifiés par les autorités judiciaires de l'Etat espagnol entrent dans deux des catégories d'incriminations visées à l'article 695-23, alinéa 2, du code de procédure pénale, en l'espèce « participation à une organisation criminelle » et « terrorisme » ; que la peine encourue à ce titre est au moins égale à trois ans d'emprisonnement, en l'espèce de six ans à dix ans, et de six ans à douze ans d'emprisonnement ; que, contrairement à l'argumentation développée dans son mémoire par la défense, la cour dispose d'éléments suffisants quant aux circonstances des infractions reprochées à Oihana X..., alors qualifications juridiques et aux éléments caractérisés de façon non équivoque, permettant de lui imputer les faits reprochés ; qu'en conséquence, les éléments contenus dans le présent mandat européen satisfont aux exigences des dispositions de l'article 695-13 du code de procédure pénale ; qu'enfin, les éléments d'implication d'Oihana X... dans les faits pour lesquels sa remise est sollicitée par l'autorité judiciaire espagnole résultent d'un faisceau d'indices parmi lesquels les déclarations du dénommé Y..., prétendument obtenues sous la torture, ne constituent que l'un de ces éléments ; qu'au surplus, il n'appartient pas à la cour de céans de contrôler dans quelles conditions la procédure étrangère a été diligentée et notamment, dans le cadre d'une procédure de mandat d'arrêt européen, d'apprécier si ces déclarations ont été obtenues sous la torture comme il est soutenu par le mémoire en défense ; qu'il s'ensuit qu'Oihana X... n'est pas fondée à soutenir que la procédure du mandat d'arrêt européen dont elle fait l'objet contrevient aux stipulations de l'article 15 de la Convention de New-York du 10 décembre 1984 contre la torture et autres peines ou traitements cruels, inhumains ou dégradants et à l'article 3 de la Convention européenne des droits de l'homme et des libertés fondamentales ; que, pour ce même motif, l'intéressée n'est pas davantage fondée à demander à la cour que celle-ci ordonne un sursis à statuer jusqu'à ce qu'une éventuelle décision définitive intervienne dans la procédure ouverte suite à la plainte pour torture déposée entre autre par Y... ; que l'exécution du mandat d'arrêt européen ne se heurte pas à l'un des cas visés à l'article 695-22 et 695-23, alinéa 1er, du code de procédure pénale ; qu'en outre, il n'est pas fait droit à la demande de remise à raison de l'un des cas visés à l'article 695-24 du code de procédure pénale ; que les conditions requises pour l'exécution du mandat d'arrêt européen sont réunies ; qu'il convient en conséquence d'ordonner la remise sollicitée ; que, toutefois, cette remise sera différée, compte tenu des poursuites pénales exercées à l'encontre de l'intéressée en France ;
" 1) alors que la demanderesse faisait valoir qu'en ce qui concerne les circonstances de commission de l'infraction et le degré de sa participation à celle-ci, l'autorité judiciaire espagnole n'apporte aucune précision supplémentaire en se contentant de formuler autrement ce qui apparaît déjà dans l'exposé des faits ; que, dans le courrier du 26 avril 2010, il est précisé que le mandat d'arrêt européen concerne deux infractions, que la mention selon laquelle la demanderesse ferait partie du commando Basakatu, lequel aurait commis les faits de la procédure, ne renseigne pas sur son degré de participation aux faits de dépôt d'engins explosifs sur les plages de Laredo, de Ris et sur le terrain de golf de Noja, faits retenus par l'autorité judiciaire espagnole comme constituant la seconde infraction ; qu'en l'état, aucune information ne permet de relier directement la personne recherchée aux faits visés ; qu'en décidant que, contrairement à l'argumentation développée par la demanderesse, la cour dispose d'éléments suffisants quant aux circonstances des infractions qui lui sont reprochées, à leur qualification juridique et aux éléments caractérisés de façon non équivoque permettant de lui imputer les faits reprochés, sans autre précision, la chambre de l'instruction a violé les articles 695-13 et suivants du code de procédure pénale ;
" 2) alors que la demanderesse faisait valoir, produisant des éléments de preuve, que les déclarations faites par Y... ont été obtenues sous la torture, une instruction ayant été ouverte en Espagne, la demanderesse demandant qu'il soit sursis à statuer sur le fond jusqu'à ce qu'une décision définitive intervienne dans le cadre de cette instruction relative aux faits de torture ; qu'ayant relevé qu'il apparaîtrait de l'enquête de police et des déclarations de Y..., qui était à la tête du commando Basakatu et auteur de l'attentat, qu'Oihana X..., alias Z..., ferait partie de ce commando, puis retenu que les éléments d'implication de la demanderesse dans les faits pour lesquels sa remise est sollicitée par l'autorité judiciaire espagnole résultent d'un faisceau d'indices, parmi lesquels les déclarations du dénommé Y... prétendument obtenues sous la torture, ne constitue que l'un de ces éléments quand il ne résulte de l'arrêt aucun autre élément que ce témoignage obtenu sous la torture faisant l'objet d'une instruction en Espagne, la chambre de l'instruction a violé les textes susvisés " ;
" 3) alors enfin qu'en retenant qu'il n'appartient pas à la cour de contrôler dans quelles conditions la procédure étrangère a été diligentée, et notamment dans le cadre d'une procédure de mandat d'arrêt européen, d'apprécier si ces déclarations ont été obtenues sous la torture comme il est soutenu par le mémoire en défense ; qu'il s'ensuit que la demanderesse n'est pas fondée à soutenir que la procédure de mandat d'arrêt européen dont elle fait l'objet contrevient aux stipulations de l'article 15 de la Convention de New-York du 10 décembre 1984 contre la torture et autres peines ou traitements cruels, inhumains ou dégradants et à l'article 3 de la Convention européenne des droits de l'homme, et qu'elle n'est pas fondée à demander un sursis à statuer jusqu'à ce qu'une éventuelle décision définitive intervienne dans la procédure ouverte suite à la plainte pour torture déposée entre autre par Y..., la chambre de l'instruction a violé les textes susvisés ; cependant qu'il ne lui a pas été demandé d'apprécier les conditions dans lesquelles la procédure étrangère a été diligentée " ;
Vu l'article 593 du code de procédure pénale ;
Attendu que tout arrêt de la chambre de l'instruction doit comporter les motifs propres à justifier la décision et répondre aux articulations essentielles des mémoires des parties ; que l'insuffisance ou la contradiction des motifs équivaut à leur absence ;
Attendu que, pour s'opposer à sa remise aux autorités judiciaires espagnoles, Oihana X... a fait valoir qu'une information aurait été ouverte au tribunal de Madrid à raison de violences illégitimes dont auraient été victimes des personnes entendues dans la procédure suivie à son encontre et que de telles poursuites laissaient présumer que les déclarations de Y... fondant les charges retenues à son encontre auraient été obtenues sous la torture ;
Attendu que, pour écarter cette argumentation, l'arrêt énonce que les éléments d'implication d'Oihana X... dans les faits qui lui sont reprochés résultent d'un faisceau d'indices, parmi lesquels les déclarations de Y... prétendument obtenues sous la torture ne constituent que l'un de ces éléments ; que les juges ajoutent qu'ils ne leur appartient pas d'apprécier les conditions dans lesquelles auraient été recueillies les charges retenues à l'encontre de la personne réclamée ;
Mais attendu qu'en statuant ainsi, sans mieux s'expliquer sur les autres éléments fondant la mise en cause d'Oihana X... et alors que le grief tiré de la violation de l'article 15 de la Convention contre la torture et autres peines ou traitements cruels, inhumains ou dégradants signée à New-York le 10 décembre 1984, n'était pas inopérant, la chambre de l'instruction n'a pas justifié sa décision ;
D'où il suit que la cassation est encourue ;
Par ces motifs :
CASSE et ANNULE, en toutes ses dispositions, l'arrêt susvisé de la chambre de l'instruction de la cour d'appel de Paris, en date du 13 juillet 2010, et pour qu'il soit à nouveau jugé, conformément à la loi ;
RENVOIE la cause et les parties devant la chambre de l'instruction de la cour d'appel de Versailles, à ce désignée par délibération spéciale prise en chambre du conseil ;
ORDONNE l'impression du présent arrêt, sa transcription sur les registres du greffe de la chambre de l'instruction de la cour d'appel de Paris et sa mention en marge ou à la suite de l'arrêt annulé ;
Ainsi jugé et prononcé par la Cour de cassation, chambre criminelle, en son audience publique, les jour, mois et an que dessus ;
Etaient présents aux débats et au délibéré, dans la formation prévue à l'article 567-1-1 du code de procédure pénale : M. Blondet conseiller le plus ancien faisant fonction de président en remplacement du président empêché, Mme Ponroy conseiller rapporteur, M. Le Corroller conseiller de la chambre ;
Greffier de chambre : Mme Krawiec ;
En foi de quoi le présent arrêt a été signé par le président, le rapporteur et le greffier de chambre.


Synthèse
Formation : Chambre criminelle
Numéro d'arrêt : 10-85717
Date de la décision : 18/08/2010
Sens de l'arrêt : Cassation
Type d'affaire : Criminelle

Références :

Décision attaquée : Chambre de l'instruction de la cour d'appel de Paris, 13 juillet 2010


Publications
Proposition de citation : Cass. Crim., 18 aoû. 2010, pourvoi n°10-85717


Composition du Tribunal
Président : M. Blondet (conseiller le plus ancien faisant fonction de président)
Avocat(s) : SCP Bouzidi et Bouhanna

Origine de la décision
Date de l'import : 15/09/2022
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CCASS:2010:10.85717
Association des cours judiciaires suprmes francophones
Organisation internationale de la francophonie
Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie. Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie.
Logo iall 2012 website award