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13/07/2010 | FRANCE | N°09-40943

France | France, Cour de cassation, Chambre sociale, 13 juillet 2010, 09-40943


LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l'arrêt suivant :

Attendu, selon l'arrêt attaqué, que M. X..., engagé à compter du 1er février 2001 par la société Bac Sécurité en qualité d'agent conducteur de chien de défense intervenant, a été licencié par lettre du 22 mars 2004 pour faute grave ;

Sur le premier moyen :

Attendu que le salarié fait grief à l'arrêt de dire son licenciement fondé sur une faute grave et de le débouter en conséquence
de ses demandes afférentes, alors, selon le moyen :

1°/ que la faute grave est celle qui,

par son importance, rend impossible le maintien du salarié dans l'entreprise pendant la durée mêm...

LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l'arrêt suivant :

Attendu, selon l'arrêt attaqué, que M. X..., engagé à compter du 1er février 2001 par la société Bac Sécurité en qualité d'agent conducteur de chien de défense intervenant, a été licencié par lettre du 22 mars 2004 pour faute grave ;

Sur le premier moyen :

Attendu que le salarié fait grief à l'arrêt de dire son licenciement fondé sur une faute grave et de le débouter en conséquence
de ses demandes afférentes, alors, selon le moyen :

1°/ que la faute grave est celle qui, par son importance, rend impossible le maintien du salarié dans l'entreprise pendant la durée même limitée du préavis ; que ne constituent pas une faute grave le fait pour un salarié, qui n'a jamais fait l'objet de reproche, d'utiliser, à une seule reprise, un poste informatique à des fins personnelles, et pas davantage le fait, à supposer même qu'il puisse être imputé au salarié, d'être à l'origine d'une panne de l'application "visiteur", ce qui n'a pu avoir pour conséquence de nuire à l'image de l'entreprise face à ce seul client ; qu'aussi en considérant que son licenciement pour faute grave était fondé, la cour d'appel a violé l'article L. 1234-1 du code du travail ;

2°/ que l'ancienneté du salarié et l'exécution sans reproche du contrat de travail pendant trois ans doit être prise en compte dans l'appréciation des faits qui lui sont reprochés au soutien de son licenciement ; qu'en s'attachant aux seuls griefs énoncés par l'employeur, sans prendre en considération son ancienneté tandis qu'il n'avait fait l'objet d'aucun reproche auparavant, ce qui ôtait aux faits reprochés leur caractère de gravité, la cour d'appel a violé les articles L. 1234-1 et L. 1234-9 du code du travail ;

3°/ qu'il soutenait dans ses conclusions que «depuis cinq ans (qu'il) travaillait pour son compte, et trois ans qu'il était affecté sur le site Thalès, la société Bac sécurité n'avait jamais eu à se plaindre du comportement et de la qualité de son travail» ; qu'en omettant de répondre à ce moyen de nature à ôter au comportement qui lui était reproché son caractère de gravité, la cour d'appel a violé l'article 455 du code de procédure civile ;

Mais attendu qu'ayant retenu que le salarié avait, pendant son service, utilisé à des fins personnelles le matériel informatique de l'établissement qu'il était chargé de surveiller, en provoquant une panne, la cour d'appel a pu en déduire que ce manquement à ses obligations professionnelles rendait impossible son maintien dans l'entreprise et constituait une faute grave ;

Que le moyen n'est pas fondé ;

Et sur le second moyen, pris en sa première branche :

Attendu que le salarié fait grief à l'arrêt de le débouter de sa demande en paiement d'heures supplémentaires, alors, selon le moyen, que la preuve des heures de travail effectuées n'incombe spécialement à aucune des parties et le juge ne peut, pour rejeter la demande d'heures supplémentaires, se fonder sur l'insuffisance des preuves apportées par le salarié, mais doit examiner les éléments de nature à justifier les horaires réalisés par celui-ci et que l'employeur est tenu de lui fournir ; qu'en se déterminant au vu des seuls éléments fournis par le salarié, la cour d'appel a inversé la charge de la preuve et a violé l'article L. 3171-4 du code du travail ;

Mais attendu que l'arrêt retient que le salarié ne fournit aucun élément pour étayer sa demande en paiement d'heures supplémentaires pour la période 1er février 2001-31 décembre 2003 ainsi que pour février 2004 ; que le moyen n'est pas fondé ;

Mais sur le second moyen, pris en sa seconde branche :

Vu l'article L. 3171-4 du code du travail ;

Attendu que pour débouter le salarié de sa demande d'heures supplémentaires au titre du mois de janvier 2004 l'arrêt retient que le salarié verse un projet de planning et un relevé d'heures effectuées faisant apparaître 48 heures de travail au cours de la semaine du 29 décembre 2003-4 janvier 2004 ainsi que durant la semaine du 19 au 25 janvier et que les bulletins de salaire de janvier et février 2004 ne mentionnent pas de telles heures supplémentaires mais qu'il ne formule pas de demande chiffrée pour cette période ;

Qu'en statuant ainsi alors qu'il incombe à l'employeur de fournir au juge les éléments de nature à justifier les horaires effectivement réalisés par le salarié pour la période où il étayait sa demande, la cour d'appel n'a pas tiré les conséquences légales de ses constatations ;

PAR CES MOTIFS :

CASSE ET ANNULE, mais seulement en ce qu'il a débouté le salarié de sa demande en paiement d'heures supplémentaires pour le mois de janvier 2004, l'arrêt rendu le 26 novembre 2008, entre les parties, par la cour d'appel de Versailles ; remet, en conséquence, sur ce point, la cause et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant ledit arrêt et, pour être fait droit, les renvoie devant la cour d'appel de Versailles, autrement composée ;

Condamne la société Bac sécurité, la SCP Laureau et Jeannerot, ès qualités, et M. Y..., ès qualités, aux dépens ;

Vu l'article 700 du code de procédure civile, les condamne, ensemble, à payer à M. X..., la somme de 2 500 euros ;

Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite de l'arrêt partiellement cassé ;

Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre sociale, et prononcé par le président en son audience publique du treize juillet deux mille dix.

MOYENS ANNEXES au présent arrêt :

Moyens produits par la SCP Hémery et Thomas-Raquin, avocat aux Conseils, pour M. X...

PREMIER MOYEN DE CASSATION :

Il est fait grief à l'arrêt confirmatif attaqué d'AVOIR dit que le licenciement pour faute grave de Monsieur X... était fondé et de l'avoir en conséquence débouté de l'ensemble de ses demandes afférentes ;

AUX MOTIFS PROPRES QUE «Considérant que la lettre de licenciement est rédigée en ces termes : (…); Considérant qu'il résulte des pièces produites que M. X... a reconnu avoir installé, puis désinstallé sur le PC du poste d'accueil de la société Thalès dont il était chargé par son employeur d'assurer le gardiennage, un programme de port de communication à infrarouge pour dialoguer avec son téléphone portable ; Considérant qu'il fait valoir que son contrat de travail, qui lui prescrivait de n'utiliser le poste téléphonique mis à sa disposition que pour les besoins du service et en aucun cas pour des communications personnelles, ne formulait aucune interdiction d'utiliser le matériel informatique des clients ; Considérant que si certaines obligations sont rappelées au salarié dans son contrat de travail, celui -ci précise que leur énumération est indicative et non limitative ; que M. X... étant, aux termes de son contrat de travail, chargé de protéger la propriété du client, l'utilisation du matériel informatique de celui-ci à des fins personnelles constitue incontestablement un manquement grave à ses obligations contractuelles; Considérant qu' il est en outre établi par le courrier électronique adressé par la société Thalès à la société Proségur sécurité, désormais dénommée Bac sécurité, que le lundi 23 février au matin, l'application visiteur du PC du poste d'accueil ne fonctionnait pas et que les vérifications effectuées ont permis de découvrir que cette panne résultait de la désinstallation du logiciel du port de communication infrarouge effectuée par M. X..., ce qui a conduit la société Proségur sécurité à prendre en charge la facturation du dépannage ; Considérant que ces faits, commis sur un site sensible, constituent, tant en eux-mêmes que par leurs répercussions négatives sur l'image de la société, une faute d'une importance telle qu'elle rend impossible le maintien du salarié dans l'entreprise ; que la mise à pied conservatoire et le licenciement pour faute grave de M. X... sont dès lors fondés; qu'il convient en conséquence de confirmer le jugement entrepris déboutant l'intéressé de sa demande en paiement de rappel de salaire pour la période de mise à pied et de congés payés afférents, d'indemnité compensatrice de préavis et de congés payés afférents, d'indemnité de licenciement et d'indemnité pour licenciement sans cause réelle et sérieuse ;» (cf. arrêt attaqué p.4-5)

ET AUX MOTIFS ADOPTES QUE «la faute grave est une faute telle que le maintien du salarié dans ses fonctions est impossible. Le contrat de travail de M. X... lui interdit d'utiliser le matériel du client. Par ailleurs, le site du client est un site classé secret défense. Le Conseil constate que M. X... a pu «entrer» dans le système pour y installer un logiciel et cela sur un poste qui devait être verrouillé par les administrateurs en amont. Il n'y a pas de doute possible sur la faute de M. X..., celui-ci étant seul sur le site au moment où l'ordinateur enregistre sa panne. Par ailleurs, M. X... a reconnu avoir utilisé le micro.» (cf. jugement p.3)

1°/ ALORS QUE, d'une part, la faute grave est celle qui, par son importance, rend impossible le maintien du salarié dans l'entreprise pendant la durée même limitée du préavis ; que ne constituent pas une faute grave le fait pour un salarié, qui n'a jamais fait l'objet de reproche, d'avoir utilisé, à une seule reprise, un poste informatique à des fins personnelles, et pas davantage le fait, à supposer même qu'il puisse être imputé au salarié, d'être à l'origine d'une panne de l'application "visiteur", ce qui n'a pu avoir pour conséquence de nuire à l'image de l'entreprise face à ce seul client ; qu'aussi en considérant que le licenciement pour faute grave de Monsieur X... était fondé, la Cour d'appel a violé l'article L.1234-1 du Code du Travail ;

2°/ ALORS QUE, d'autre part, l'ancienneté du salarié et l'exécution sans reproche du contrat de travail pendant trois ans doit être prise en compte dans l'appréciation des faits qui lui sont reprochés au soutien de son licenciement ; qu'en s'attachant aux seuls griefs énoncés par l'employeur, sans prendre en considération l'ancienneté de Monsieur Stéphane X..., qui n'avait fait l'objet d'aucun reproche auparavant, ce qui ôtait aux faits reprochés leur caractère de gravité, la Cour d'appel a violé les articles L.1234-1 et L.1234-9 du Code du Travail ;

3°/ ALORS QUE, enfin, Monsieur Stéphane X... soutenait dans ses conclusions que «depuis cinq ans (qu'il) travaillait pour son compte, et 3 ans qu'il était affecté sur le site THALES, la société BAC SECURITE n'avait jamais eu à se plaindre du comportement et de la qualité de son travail» (cf. conclusions p.8 § 2) ; qu'en omettant de répondre à ce moyen de nature à ôter au comportement qui lui était reproché son caractère de gravité, la Cour d'appel a violé l'article 455 du Code de Procédure Civile.

SECOND MOYEN DE CASSATION :

Il est fait grief à l'arrêt confirmatif attaqué d'AVOIR débouté Monsieur X... de ses demandes au titre des heures supplémentaires qu'il a effectuées au profit de la société BAC SECURITE ;

AUX MOTIFS PROPRES QUE «Considérant que M. X... ne chiffre pas sa demande en paiement d'heures supplémentaires et ne produit aucun décompte des heures supplémentaires qu'il affirme avoir effectuées ; qu'il résulte des bulletins de salaire produits que des heures supplémentaires lui ont été payées ; que s'il soutient ne pas avoir été rémunéré pour toutes les heures supplémentaires qu'il a effectuées, dont il ne précise pas au demeurant le nombre, il ne verse aux débats, à l'appui de ses allégations, que le projet de planning et le relevé des heures effectuées pour le mois de janvier 2004, faisant apparaître qu'il a effectué 48 heures de travail au cours de la semaine du 29 décembre 2003 au 4 janvier 2004 ainsi que durant la semaine du 19 au 25 janvier 2004 ; que s'il n'est effectivement pas mentionné d'heures supplémentaires sur ses bulletins de salaire de janvier et février 2004, il ne formule cependant pas de demande chiffrée en paiement d'heures supplémentaires pour cette période; Considérant que M. X... ne fournissant aucun élément pour étayer sa demande en paiement d'heures supplémentaires pour la période du 1er février 2001 au 31 décembre 2003 ainsi que pour le mois de février 2004 et ayant lui-même fourni son planning de travail du mois de janvier 2004, il n'y a pas lieu de surseoir à statuer et d'ordonner à la société Bac sécurité de produire ses plannings de travail pour les années 2001, 2002, 2003 et 2004 ; qu'il convient en conséquence de confirmer le jugement entrepris ayant débouté le salarié de cette demande ; Considérant que M . X..., qui a vainement sollicité la production de ces pièces par courrier adressé à la société Bac sécurité le 23 mai et le 4 août 2006, demande à la Cour de tirer toutes conséquences du refus de celle-ci en la condamnant à lui payer la somme de 10 000 euros à titre de dommages-intérêts en réparation du préjudice causé par la dissimulation de la réalité et du volume des heures supplémentaires qu'il a effectuées ; Considérant cependant qu'il n'incombe pas à la société Bac sécurité de suppléer la carence de M. X... dans la présentation des éléments de nature à étayer sa demande relative aux heures supplémentaires; qu'il convient en conséquence de débouter M. X... de sa demande de dommages-intérêts de ce chef ; Considérant que la dissimulation d'emploi salarié n'est caractérisée que s'il est établi que l'employeur a, de manière intentionnelle, mentionné sur le bulletin de salaire un nombre d'heures de travail inférieur à celui réellement effectué ; que le caractère intentionnel ne peut se déduire de la seule absence de mention des heures supplémentaires sur les bulletins de salaire ; que si des heures supplémentaires ont été effectuées par M. X... en janvier 2004 sans être mentionnées sur son bulletin de salaire, il n'est pas établi que la société Bac sécurité ait eu l'intention de les dissimuler ; que M. X... sera en conséquence débouté de sa demande de dommages-intérêts de ce chef ;» (cf. arrêt attaqué p.5-6)

ET AUX MOTIFS ADOPTES QUE «Aucun élément ne vient étayer la demande de M. X... en paiement d'heures supplémentaires, ni aucun chiffrage n'est présenté» (cf. jugement p.4)

1°/ ALORS QUE, d'une part, la preuve des heures de travail effectuées n'incombe spécialement à aucune des parties et le juge ne peut, pour rejeter la demande d'heures supplémentaires, se fonder sur l'insuffisance des preuves apportées par le salarié, mais doit examiner les éléments de nature à justifier les horaires réalisés par celui-ci et que l'employeur est tenu de lui fournir ; qu'en se déterminant au vu des seuls éléments fournis par le salarié, la cour d'appel a inversé la charge de la preuve et a violé l'article L.3171-4 du Code du travail ;

2°/ ALORS QUE, d'autre part, et à titre subsidiaire, la preuve des heures de travail effectuées n'incombe spécialement à aucune des parties et le juge ne peut, pour rejeter la demande d'heures supplémentaires, se fonder sur l'insuffisance des preuves apportées par le salarié, mais doit examiner les éléments de nature à justifier les horaires réalisés par celui-ci et que l'employeur est tenu de lui fournir ; qu'en relevant que si Monsieur X... rapportait des éléments de preuve démontrant qu'il avait effectué 48 heures de travail au cours de différentes semaines et que ces heures n'étaient «effectivement pas mentionnées» sur ses bulletins de salaire, la Cour d'appel qui a pourtant débouté le salarié de ses demandes au titre des heures supplémentaires, n'a pas tiré les conséquences légales de ses propres constatations et ainsi violé l'article L.3171-4 du Code du travail.


Synthèse
Formation : Chambre sociale
Numéro d'arrêt : 09-40943
Date de la décision : 13/07/2010
Sens de l'arrêt : Cassation partielle
Type d'affaire : Sociale

Références :

Décision attaquée : Cour d'appel de Versailles, 26 novembre 2008


Publications
Proposition de citation : Cass. Soc., 13 jui. 2010, pourvoi n°09-40943


Composition du Tribunal
Président : M. Bailly (conseiller le plus ancien faisant fonction de président)
Avocat(s) : SCP Gatineau et Fattaccini, SCP Hémery et Thomas-Raquin

Origine de la décision
Date de l'import : 15/09/2022
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CCASS:2010:09.40943
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