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08/07/2010 | FRANCE | N°09-40965

France | France, Cour de cassation, Chambre sociale, 08 juillet 2010, 09-40965


LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l'arrêt suivant :

Attendu, selon l'arrêt attaqué (Aix-en-Provence, 16 décembre 2008), que Mme X... a été engagée le 18 septembre 2001 en qualité d'aide-ménagère par l'association ADMR de Z... selon un contrat de travail à durée indéterminée à temps partiel ; qu'elle a saisi la juridiction prud'homale aux fins de voir requalifier son contrat de travail à temps partiel en contrat de travail à temps complet et condamner son employeur à lui verser diverses sommes ; que le 9 juin 2007, elle a pris acte de la rupture de son con

trat de travail aux torts de l'employeur ;

Sur le premier moyen :

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LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l'arrêt suivant :

Attendu, selon l'arrêt attaqué (Aix-en-Provence, 16 décembre 2008), que Mme X... a été engagée le 18 septembre 2001 en qualité d'aide-ménagère par l'association ADMR de Z... selon un contrat de travail à durée indéterminée à temps partiel ; qu'elle a saisi la juridiction prud'homale aux fins de voir requalifier son contrat de travail à temps partiel en contrat de travail à temps complet et condamner son employeur à lui verser diverses sommes ; que le 9 juin 2007, elle a pris acte de la rupture de son contrat de travail aux torts de l'employeur ;

Sur le premier moyen :

Attendu que l'employeur fait grief à l ‘ arrêt de requalifier le contrat de travail à temps partiel de la salariée en un contrat à durée indéterminée à temps complet avec prise d'effet le 19 septembre 2001 et de dire que la rupture du contrat est imputable à l'employeur, alors, selon le moyen, que l'obligation de communiquer chaque mois au salarié d'aide à domicile ses horaires de travail a, comme le précise la cour d'appel, été instituée par la loi n° 2005-841 du 26 juillet 2005 ; qu'en faisant grief à l'association de n'avoir pas communiqué ses plannings à Mme X... avant le mois de mars 2005 pour en conclure qu'elle devait se tenir en permanence à la disposition de l'association exposante, la cour d'appel a violé par fausse application l'article 5 de la loi susvisée ;

Mais attendu que la cour d'appel, qui a relevé que, dès les premiers mois d'exécution du contrat, la salariée était soumise à des variations d'amplitude de la durée du travail pouvant aller jusqu'à un temps complet, que la répartition de son temps de travail était aléatoire et que ses horaires, constatés sur les fiches de présence, étaient irréguliers, en a déduit que la salariée ne pouvait prévoir son rythme de travail et qu'elle devait se tenir en permanence à la disposition de son employeur ; qu'elle a, par ces seuls motifs, légalement justifié sa décision ;

Sur le second moyen :

Attendu que l'employeur fait grief à l'arrêt de dire que la rupture du contrat de travail intervenue le 11 juin 2007 lui est imputable et produit les effets d'un licenciement sans cause réelle et sérieuse, alors, selon le moyen :

1° / que lorsqu'un salarié prend acte de la rupture de son contrat de travail en raison de faits qu'il reproche à son employeur, cette rupture produit les effets soit d'un licenciement sans cause réelle et sérieuse si les faits invoqués la justifiaient, soit, dans le cas contraire, d'une démission ; que la cour d'appel qui a reproché à l'association de ne pas lui avoir communiqué la répartition hebdomadaire de son travail a statué par des motifs inopérants au regard de l'article L. 212-4-3 du code du travail qui dispense de cette obligation les associations d'aide à domicile et a violé l'article L. 122-4-3 recodifié L. 3123-14 du code du travail ;

2° / que la cour d'appel ne pouvait tout à la fois considérer que l'association ADMR de Z... avait commis un manquement à l'égard de Mme X... en ne lui communiquant pas ses plannings mensuels avant le mois de mars 2005 et reconnaître que cette obligation n'existait que depuis la loi du 26 juillet 2005 ; que la cour d'appel qui a statué par des motifs contradictoires et inopérants a violé l'article L. 212-4-3 recodifié L. 3123-14 du code du travail et l'article 455 du code de procédure civile ;

3° / que le respect des lois et règlements s'impose à tous et ne peut être imputé à faute à celui qui s'y astreint ; que la cour d'appel qui a reconnu que l'association ADMR de Z... s'était employée à respecter les stipulations du contrat de travail de Mme Z..., ce que cette dernière reconnaissait dans ses écritures d'appel, n'a pu estimer que ce respect constituait un manquement de l'employeur à ses obligations contractuelles et a violé l'article 3 du code civil ;

Mais attendu que la cour d'appel a constaté, d'une part, que le grief invoqué par la salariée, tiré de la baisse de ses horaires à l'origine d'une rémunération moindre, était objectivement vérifié, et d'autre part qu'en faisant varier la durée du travail de la salariée selon ses propres besoins, en méconnaissance des stipulations contractuelles et des dispositions légales, et en laissant celle-ci dans l'incertitude quant à la répartition hebdomadaire de son horaire de travail, l'employeur a empêché la salariée de prévoir son rythme de travail, l'a maintenue en permanence à sa disposition et l'a ainsi privée d'une chance d'exercer un autre emploi ; qu'elle a estimé que ces manquements étaient d'une gravité suffisante pour justifier la prise d'acte par la salariée de la rupture de son contrat de travail aux torts de l'employeur et lui faire produire les effets d'un licenciement sans cause réelle et sérieuse ; que le moyen n'est pas fondé ;

PAR CES MOTIFS :

REJETTE le pourvoi ;

Condamne l'association ADMR de Z... aux dépens ;

Vu l'article 700 du code de procédure civile, condamne l'association ADMR de Z... à payer à Mme X... la somme de 2 500 euros ;

Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre sociale, et prononcé par le président en son audience publique du huit juillet deux mille dix.

MOYENS ANNEXES au présent arrêt :

Moyens produits par la SCP Lyon-Caen, Fabiani et Thiriez, avocat aux Conseils pour l'association ADMR de Z....

PREMIER MOYEN DE CASSATION :

LE PREMIER MOYEN fait grief à l ‘ arrêt infirmatif attaqué d'avoir requalifié le contrat de travail à temps partiel de Madame X... en contrat à durée indéterminée à temps complet avec prise d'effet le 19 septembre 2001 et d'avoir dit que la rupture du contrat était imputable à l'employeur.

AUX MOTIFS QUE selon les dispositions de l'ancien article L 212-4-3 du Code du travail à temps partiel est un contrat écrit. Il mentionne la qualification du salarié, les éléments de la rémunération, la durée hebdomadaire ou, le cas échéant, mensuelle prévue et, sauf pour les salariés des Associations à domicile, la répartition de la durée du travail entre les jours de la semaine ou les semaines du mois. Depuis la loi du 26 juillet 2005, dans les Associations et entreprises d'aide à domicile, les Associations et entreprises d'aide à domicile, les horaires de travail sont communiqués par écrit chaque mois au salarié. Par ailleurs, les heures complémentaires ne peuvent pas dépasser certaines limites. En l'espèce, le contrat de travail à durée indéterminée à temps partiel, signé par les parties le 18 septembre 2001 et prenant effet le 19 septembre, prévoyait un horaire hebdomadaire de 5 heures, l'Association se réservant la possibilité, en cas de besoin, de faire effectuer à Madame X... des heures complémentaires dans la limite du tiers de l'horaire fixé. Il était stipulé » que la répartition de l'horaire serait précisée par le responsable. Or les bulletins de salaire et les fiches de présence versées aux débats révèlent, ainsi que l'inspecteur du travail en a fait le constat dans une correspondance datée du 8 septembre 2005, que dès les premiers mois d'exécution du contrat, l'horaire de travail de Madame X..., très variable, a systématiquement et très largement dépassé la durée mensuelle de 30 h 33 correspondant à un horaire hebdomadaire de 7 heures, et que dès lors il y avait lieu d'appliquer les dispositions de l'ancien article L212-4-3 dernier alinéa selon lesquelles, lorsque, pendant une période de douze semaines consécutives ou pendant douze semaines au cours d'une période de quinze semaines, l'horaire moyen effectué par un salarié a dépassé de deux heures au moins par semaine, ou de l'équivalent mensuel de cette durée, l'horaire prévu dans son contrat, celui-ci est modifié, sous réserve d'un préavis de sept jours et sauf opposition du salarié, en ajoutant à l'horaire antérieurement fixé la différence entre cet horaire et l'horaire moyen réellement effectué. Bien plus, les bulletins de paie de Madame X... font apparaître qu'elle a effectué en août 2002, outre les heures de trajet, un horaire mensuel de 178 heures, en septembre 2002 de 174 heures et en octobre 2002 de 171 heures, alors que l'ancien article L212-4-3 alinéa 3 du Code du travail dispose que les heures complémentaires ne peuvent avoir pour effet de porter la durée du travail effectuée par un salarié à temps partiel au niveau de la durée légale du travail ou à la durée fixée conventionnellement. S'agissant de la répartition de la durée du travail entre les jours de la semaine ou les semaines du mois, si les dispositions légales n'obligent pas les Associations d'aide à domicile à mentionner cette répartition au contrat de travail, tout salarié à temps partiel doit néanmoins avoir la possibilité de prévoir son rythme de travail et ne doit pas se trouver dans l'obligation de se tenir constamment à la disposition de l'employeur. En l'espèce, les variations d'amplitude de la durée du travail pouvant aller jusqu'à un temps complet, la répartition aléatoire du temps de travail et les horaires irréguliers constatés sur les fiches de présence, l'absence de tout planning établi par l'Association de 2001 à 2004, ceux versés aux débats étant postérieurs à mars 2005, conduisent à constater que Madame X... ne pouvait pas prévoir son rythme de travail et qu'elle devait se tenir en permanence à la disposition de son employeur. Les explications de l'Association, qui rappelle la spécificité de son activité dans laquelle des changements importants de dernière minute, sont inopérantes au regard des exigences légales, la seule dérogation autorisée étant la dispense de faire figurer au contrat la répartition de la durée du travail. De même ne sont pas prouvées, au vu des pièces communiquées et des précisions apportées par la salariée, les allégations faites par l'Association ADMR DE Z..., concernant l'exercice par Madame X... d'autres emplois simultanément à celui qu'elle exerçait pour son compte. Enfin le refus de Madame X..., argué par l'Association mais contesté par la salariée, de signer un avenant daté du 3 janvier 2005, portant son horaire de travail hebdomadaire à 25 heures outre 9 heures complémentaires, est également sans effet au regarde des éléments ci-dessus exposés. En conséquence, le contrat à durée indéterminée à temps partiel conclu entre l'Association ADMR DE Z... DE Z... et Madame X... sera requalifié en contrat à durée indéterminée à temps complet à compter du 19 septembre 2001, date de sa prise d'effet. Le jugement, qui a débouté Madame X... de ce chef de demande, tout en stigmatisant « un défaut d'information au sein de cette Association sur les droits et devoirs des parties » sera réformé.

ALORS QUE l'obligation de communiquer chaque mois au salarié d'aide à domicile ses horaires de travail a, comme le précise la cour d'appel, été instituée par la loi n° 2005-841 du 26 juillet 2005 ; qu'en faisant grief à l'Association de n'avoir pas communiqué ses plannings à Madame X... avant le mois de mars 2005 pour en conclure qu'elle devait se tenir en permanence à la disposition de l'Association exposante, la cour d'appel a violé par fausse application l'article 5 de la loi susvisée ;

DEUXIEME MOYEN DE CASSATION :

LE

SECOND MOYEN DE CASSATION :
fait grief à l'arrêt attaqué d'avoir dit que la rupture du contrat de travail intervenue le 11 juin 2007 était imputable à l'employeur et produisait les effets d'un licenciement sans cause réelle et sérieuse

AUX MOTIFS QUE la démission est la manifestation d'une volonté claire et non équivoque du salarié de mettre fin au contrat de travail. Un salarié qui se voit contraint de rompre son contrat à raison de l'inexécution par l'employeur de ses obligations ne peut pas être considéré comme ayant donné sa démission. Une telle rupture s'analyse en une prise d'acte qui produit, soit les effets d'un licenciement, si les griefs invoqués la justifiaient, soit à défaut, ceux d'une démission. Par lettre datée du 9 juin 2007, Madame X... a notifié à son employeur la rupture de son contrat de travail dans les termes suivants ; » Vous voudrez prendre acte de la rupture de mon contrat de travail à vos torts et griefs exclusifs à compter du 11 juin 2007 pour les motifs suivants :- baisse importante et unilatérale de mes horaires qui entraîne une baisse importante de mes rémunérations,- des horaires effectués de 162 heures, 117 heures, 97 heures, et à ce jour 57 heures avec une réponse de dédain de la part de Mme Caroline Y...,- impossible d'obtenir le planning dans un délai suffisant,- harcèlement à date du conseil de prud'hommes,- à ce jour 9 juin 2007, je n'ai toujours pas reçu le salaire de mai 2007 ; tous les mois nos salaires sont remis irrégulièrement et on ne peut avoir des explications responsables, En conséquence par retour, je vous demande de bien vouloir me faire parvenir à mon domicile le solde de tout compte et les documents qui l'accompagnent ». L'employeur a pris acte de la rupture par lettre du 13 juin 2007 en considérant celle-ci comme une démission. Il résulte des bulletins de salaire qu'après la saisine par Madame X... du conseil de prud'hommes, enregistrée le 14 décembre 2005, sa durée de travail, qui avait souvent dépassé cent heures par mois en 2005, a été ramenée à environ 60 à 65 heures courant 2006, à 57h50 en janvier 2007, 43h50 en février 2007, 61 heures en mars 2007, 17 heures en avril 2007 et 55h50 en mai 2007 (outre temps de trajet). Le grief invoqué par Madame X..., tiré de la baisse de ses horaires à l'origine d'une moindre rémunération par rapport à la période antérieure, est objectivement vérifié. Si l'Association ADMR DE Z... a voulu revenir à une application plus conforme du contrat de travail à temps partiel conclu le 18 septembre 2001, sans respecter pour autant les règles édictées par l'ancien article L 212-4-3 du Code du travail, il n'en demeure pas moins que la situation subie par la salariée est la conséquence des manquements de l'employeur. En effet, en faisant varier la durée du travail de la salariée selon ses propres besoins, en méconnaissance des stipulations contractuelles et des dispositions légales, et en laissant celle-ci dans l'incertitude quant à la répartition hebdomadaire de son horaire de travail, l'employeur a empêché la salariée de prévoir son rythme de travail, l'a maintenue en permanence à sa disposition et l'a ainsi privée d'une chance d'exercer un autre emploi. Ces manquements, qui sont établis, sont d'une gravité suffisante pour justifier la rupture par la salariée de son contrat de travail aux torts de l'employeur, laquelle produit les effets d'un licenciement sans cause réelle et sérieuse.

ALORS QUE D'UNE PART lorsqu'un salarié prend acte de la rupture de son contrat de travail en raison de faits qu'il reproche à son employeur, cette rupture produit les effets soit d'un licenciement sans cause réelle et sérieuse si les faits invoqués la justifiaient, soit, dans le cas contraire, d'une démission ; que la Cour d'appel qui a reproché à l'Association de ne pas lui avoir communiqué la répartition hebdomadaire de son travail a statué par des motifs inopérants au regard de l'article L 212-4-3 du Code du travail qui dispense de cette obligation les Associations d'aide à domicile et a violé l'article L 122-4-3 recodifié L 3123-14 du Code du travail ;

ALORS QUE D'AUTRE PART, la Cour d'appel ne pouvait tout à la fois considérer que l'Association ADMR DE Z... avait commis un manquement à l'égard de Madame Z... en ne lui communiquant pas ses plannings mensuels avant le mois de mars 2005 et reconnaître que cette obligation n'existait que depuis la loi du 26 juillet 2005 ; que la Cour d'appel qui a statué par des motifs contradictoires et inopérants a violé l'article L 212-4-3 recodifié L 3123-14 du Code du travail et l'article 455 du Code de procédure civile

ET ALORS ENFIN QUE le respect des lois et règlements s'impose à tous et ne peut être imputé à faute à celui qui s'y astreint ; que la Cour d'appel qui a reconnu que l'Association ADMR DE Z... s'était employée à respecter les stipulations du contrat de travail de Madame Z..., ce que cette dernière reconnaissait dans ses écritures d'appel, n'a pu estimer que ce respect constituait un manquement de l'employeur à ses obligations contractuelles et a violé l'article 3 du Code civil ;


Synthèse
Formation : Chambre sociale
Numéro d'arrêt : 09-40965
Date de la décision : 08/07/2010
Sens de l'arrêt : Rejet
Type d'affaire : Sociale

Références :

Décision attaquée : Cour d'appel d'Aix-en-Provence, 16 décembre 2008


Publications
Proposition de citation : Cass. Soc., 08 jui. 2010, pourvoi n°09-40965


Composition du Tribunal
Président : M. Gosselin (conseiller le plus ancien faisant fonction de président)
Avocat(s) : SCP Lyon-Caen, Fabiani et Thiriez, SCP Masse-Dessen et Thouvenin

Origine de la décision
Date de l'import : 15/09/2022
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CCASS:2010:09.40965
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