LA COUR DE CASSATION, DEUXIÈME CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :
Sur le moyen unique :
Vu l'article 706-3 du code de procédure pénale ;
Attendu, selon l'arrêt attaqué et les productions, qu'à la suite de la disparition, au cours de l'année 1999, de Gérard
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et de Michel
Y...
, alors qu'ils naviguaient dans la mer des Caraïbes à bord de leurs voiliers, une information judiciaire a été ouverte des chefs de détournements de navires avec violences ou menaces de violence et homicides volontaires ; que M.
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a été condamné par une cour d'assises du chef de détournement de navires avec violences ou menaces de violences au préjudice des intéressés, mais acquitté du chef d'homicides volontaires ; que les ayants droit des victimes ont demandé l'indemnisation de leur préjudice au fonds de garantie des victimes d'infraction ;
Attendu que pour les débouter de leurs prétentions, l'arrêt énonce qu'il ressort des pièces versées aux débats, et notamment de l'arrêt de la cour d'assises que Joseph
Z...
, qui avait à répondre des infractions de meurtres, a été acquitté du chef d'homicide volontaire sur les personnes de Michel
Y...
et de Gérard
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; qu'aucun élément du dossier ne permet d'établir avec certitude que ces derniers ont péri par la main d'un tiers ; que les décisions sur lesquelles s'appuient les requérants ne font état que des présomptions de faits pouvant revêtir le caractère d'une infraction ; que ces présomptions à elles seules ne satisfont pas aux conditions posées par l'article 706-3 du code de procédure pénale ;
Qu'en se déterminant ainsi, sans rechercher si le crime de détournement de navires avec violences ou menaces de violence au préjudice de Michel
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et Gérard
X...
pouvait avoir un lien de causalité avec leur disparition, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard du texte susvisé ;
PAR CES MOTIFS :
CASSE ET ANNULE, dans toutes ses dispositions, l'arrêt rendu le 24 juin 2009, entre les parties, par la cour d'appel de Montpellier ; remet, en conséquence, la cause et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant ledit arrêt et, pour être fait droit, les renvoie devant la cour d'appel de Toulouse ;
Laisse les dépens à la charge du Trésor public ;
Vu l'article 700 du code de procédure civile, condamne le Fonds de garantie des victimes d'actes de terrorisme et d'autres infractions à payer à M. et Mme
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, Mme
B...
, ès qualités, M.
Y...
et à Mme
C...
la somme de 1 000 euros chacun ;
Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite de l'arrêt cassé ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, deuxième chambre civile, et prononcé par le président en son audience publique du huit juillet deux mille dix.
MOYEN ANNEXE au présent arrêt :
Moyen produit par Me Blanc, avocat aux Conseils, pour M. et Mme
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, Mme
B...
, ès qualités, M.
Y...
et Mme
C...
Il est reproché à l'arrêt attaqué d'avoir débouté les consorts
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et
Y...
de leur demande d'indemnisation des préjudices causés par les décès de MM. Gérard
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et Michel
Y...
consécutifs à leur disparition en mer des Caraïbes en septembre 1999 après le détournement de leurs voiliers avec violence ou menaces de violence par M.
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;
Aux motif que M.
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avait été acquitté du chef d'homicide volontaire sur les personnes de M. Gérard
X...
et Michel
Y...
; qu'aucun élément du dossier ne permettait d'établir avec certitude qu'ils avaient péri par la main d'un tiers ; que les décisions sur lesquelles s'appuyaient les intimés ne faisaient état que de présomptions de faits pouvant revêtir le caractère d'une infraction ; que ces présomptions à elles seules ne satisfaisaient pas aux conditions posées par l'article 706-3 du code de procédure pénale ;
Alors que, 1°) les exposants se sont principalement fondés sur l'arrêt de la cour d'assises ayant condamné M.
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du chef de détournement de navires avec violence ou menaces de violence, crime auquel ils imputaient la disparition brutale des victimes compte tenu de la concomitance des faits et de l'absence d'autres causes sérieusement envisageables ; qu'en énonçant que la cour d'assises avait acquitté l'accusé du chef d'homicide volontaire et que les décisions sur lesquelles ils s'étaient s'appuyés ne faisaient état que de présomptions de faits, comme s'ils s'étaient abstenus d'invoquer l'arrêt de la cour d'assises en tant qu'il avait retenu l'existence d'un crime, la cour d'appel a dénaturé les termes du litige (violation de l'article 4 du code de procédure civile) ;
Alors que, 2°) en affirmant qu'aucun élément du dossier ne permettait d'établir avec certitude que MM.
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et
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avaient péri par la main d'un tiers, c'est-à-dire en excluant l'existence d'un lien certain entre la disparition et l'élément matériel d'une infraction, sans rechercher concrètement et précisément, comme elle y était invitée, en quoi la disparition des victimes en septembre 1999 n'était pas nécessairement en lien avec le crime concomitant de détournement de navires avec violence ou menaces de violence commise par M.
Z...
et pour lequel il avait été condamné, la cour d'appel a privé son arrêt de base légale au regard de l'article 706-3 du code de procédure pénale.