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30/06/2010 | FRANCE | N°09-15476

France | France, Cour de cassation, Chambre civile 3, 30 juin 2010, 09-15476


LA COUR DE CASSATION, TROISIÈME CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :
Sur le premier moyen :
Vu l'article 1147 du code civil ;
Attendu, selon l'arrêt attaqué (Poitiers, 3 septembre 2008) rendu sur renvoi après cassation (3e Civ., 29 mars 2006, pourvoi n° 04-15. 253), que le 4 juin 1999, les époux X... ont signé une promesse unilatérale de vente de parcelles au profit de la société d'aménagement foncier et d'établissement rural Marche Limousin (la SAFER) ; que le 17 novembre 1999, M. Y... a signé une promesse d'achat portant sur partie de ces parcelles ; qu'en rais

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LA COUR DE CASSATION, TROISIÈME CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :
Sur le premier moyen :
Vu l'article 1147 du code civil ;
Attendu, selon l'arrêt attaqué (Poitiers, 3 septembre 2008) rendu sur renvoi après cassation (3e Civ., 29 mars 2006, pourvoi n° 04-15. 253), que le 4 juin 1999, les époux X... ont signé une promesse unilatérale de vente de parcelles au profit de la société d'aménagement foncier et d'établissement rural Marche Limousin (la SAFER) ; que le 17 novembre 1999, M. Y... a signé une promesse d'achat portant sur partie de ces parcelles ; qu'en raison d'une clause d'inaliénabilité affectant ces terrains, la SAFER a offert à M. Y... de lui rétrocéder une surface inférieure ; que celui-ci a refusé cette offre et a assigné la SAFER en paiement de dommages-intérêts ; que l'arrêt l'ayant débouté de cette demande a été cassé au motif qu'en sa qualité de professionnel de la vente de biens fonciers, la SAFER, bénéficiaire d'une promesse unilatérale de vente, était tenue de se renseigner sur la disponibilité du bien avant d'accepter une promesse unilatérale d'achat de ce bien ; que devant la cour d'appel de renvoi, M. Y... a réitéré sa demande d'indemnisation de ses différents chefs de préjudice ;
Attendu que pour rejeter cette demande dans son intégralité, l'arrêt retient que le préjudice allégué par M. Y... est la conséquence directe de ses choix, antérieurs à la promesse d'achat, ou imprudents, compte tenu de la nature de l'engagement conclu, et non d'un comportement fautif de la SAFER dans son obligation contractuelle ;
Qu'en statuant ainsi, alors que la SAFER, qui s'était abstenue de se renseigner sur la disponibilité du bien avant d'accepter la promesse unilatérale d'achat de M. Y..., avait directement causé à ce dernier certains des chefs de préjudice dont celui-ci demandait réparation, la cour d'appel a violé le texte susvisé ;
Et attendu qu'il n'y a pas lieu de statuer sur le second moyen qui ne serait pas de nature à permettre l'admission du pourvoi ;
PAR CES MOTIFS :
CASSE ET ANNULE, mais seulement en ce qu'il a débouté M. Y... de sa demande en dommages-intérêts, l'arrêt rendu le 3 septembre 2008, entre les parties, par la cour d'appel de Poitiers ; remet, en conséquence, sur ce point, la cause et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant ledit arrêt et, pour être fait droit, les renvoie devant la cour d'appel de Poitiers, autrement composée ;
Condamne la SAFER Marche Limousin aux dépens ;
Vu l'article 700 du code de procédure civile, condamne la SAFER Marche Limousin à payer à M. Y... la somme de 2 500 euros ; rejette sa propre demande ;
Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite de l'arrêt partiellement cassé ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, troisième chambre civile, et prononcé par le président en son audience publique du trente juin deux mille dix.

MOYENS ANNEXES au présent arrêt :


Moyens produits par la SCP Nicolaÿ, de Lanouvelle et Hannotin, avocat aux Conseils pour M. Y...

PREMIER MOYEN DE CASSATION :

Le moyen fait grief à l'arrêt confirmatif attaqué d'avoir débouté Monsieur Jean-Pierre Y..., jeune agriculteur, auteur d'une promesse d'achat, de sa demande de dommages et intérêts à l'encontre de la SAFER Limousin Marche, bénéficiaire de la promesse ayant levé l'option, qui n'avait pas au préalable vérifié la disponibilité du bien ;
AUX MOTIFS QUE Monsieur Jean-Pierre Y... évalue à 50. 000 € le préjudice résultant de l'impossibilité d'acheter les 20 ha de parcelles situées à Saint-Cyprien (Corrèze) ; qu'il expose qu'il envisageait, grâce à cette acquisition, de s'installer comme jeune agriculteur, de créer et d'exploiter une ferme auberge et qu'il avait en ce sens accompli de nombreuses démarches administratives et fait réaliser des devis, qu'il estime à 15. 000 € le préjudice lié à la perte de temps, d'énergie et d'argent et à 5. 000 € la perte de chance et à 30. 000 € le préjudice économique et moral résultant de la ruine du projet ; qu'il précise avoir dû reprendre et poursuivre son activité salariée de boulanger de 1999 à 2002, date à laquelle il a pu seulement s'immatriculer à la Mutualité Sociale Agricole, ne pas pouvoir disposer d'une exploitation, entraînant un éparpillement et des conditions d'exploitation définitivement mauvaises ; qu'il résulte des pièces produites aux débats, et plus particulièrement d'une expertise réalisée le 27 avril 2001 par Monsieur Z..., expert agricole et foncier requis par Monsieur Y... que ce dernier, salarié dans une boulangerie de Brive, a conçu le projet de créer une ferme auberge ; il a profité du moment où ses parents, chez lesquels il se trouvait domicilié à Saint-Cyprien, proposaient de lui céder leur exploitation agricole d'une superficie de 14 ha 71 ca de SAU dont il était déjà nupropriétaire, les principaux devis d'aménagement de la ferme et le permis de construire ont été obtenus courant 1999, avant la signature de la promesse d'achat litigieuse au profit de la SAFER, Monsieur Y..., en congé formation depuis le 18 janvier 1999 a sollicité la reprise de son activité salariée auprès de son employeur à compter du 24 octobre 1999, à l'issue de ce congé, donc antérieurement à la signature de la promesse d'achat, dès août 1999, Monsieur Y... s'est déclaré intéressé par l'acquisition de la propriété X..., attenante à la sienne et d'une superficie de plus de 24 ha, le choix de la propriété des X... a présenté un intérêt évident compte tenu de son voisinage immédiat, et la promesse d'achat effectuée auprès de la SAFER s'est inscrite dans ce contexte et non dans la simple réponse à une publicité parue dans les annonces légales de journaux locaux en juin 1999 ; en septembre 1999, le comité technique départemental SAFER a proposé la répartition des 24 ha de la propriété X... entre Monsieur A..., déjà titulaire d'une convention de mise à disposition depuis avril 1995 pour 10 ha et Monsieur Y... pour ha, le comité de direction, sur recours de Monsieur Y..., et en raison de contraintes du terrain, lui a proposé l'attribution de 20 ha compte tenu de sa première installation comme jeune agriculteur et a réduit la part de Monsieur A... ; que l'opposition de Madame veuve X..., par application de la clause d'inaliénabilité à la vente de l'intégralité de la propriété n'empêchait pas la cession de 14 ha que Monsieur Y... a refusée le 12 mars 2001 la proposition faite en ce sens par la SAFER, selon lettre recommandée avec accusé de réception du 5 mars 2001, en soutenant que la vente était parfaite sur la totalité de la propriété et qu'il bénéficiait d'une priorité de rétrocession par sa qualité de jeune agriculteur ; qu'il ne démontre pas que la rétrocession de seulement 14 ha compromettait son projet de ferme auberge, le rapport de Monsieur Z... discutant de la qualité des terres, de la viabilité d'un projet de « production de veaux sous la mère » permettant la poursuite de l'activité des parents de Monsieur Y... et évoquant les intérêts d'une vocation polyculturale sans citer l'activité de ferme auberge telle que décrite dans le descriptif publicitaire établi par Monsieur Y... le 21 juin 1999 (prestation de restauration avec dégustation de spécialités régionales et traditionnelles dans un cadre rustique) ; que la publicité parue dans les annonces légales des journaux locaux le 11 juin 1999 indiquait que la SAFER se proposait d'acquérir certains biens et ne la présentait pas comme propriétaire définitif des terres ; que le 17 novembre 1999, Monsieur Y... a signé une promesse d'achat, engagement unilatéral de sa part, au profit de la SAFER, l'article F de la convention ayant prévu une condition suspensive, aux termes de laquelle la promesse d'achat serait caduque, même après levée d'option par le bénéficiaire, si la SAFER ne pouvait devenir définitivement propriétaire de l'immeuble ; que Monsieur Y... était donc informé que sa promesse d'achat ne suffisait pas à lui garantir l'acquisition des parcelles et que son droit restait précaire ; qu'il s'évince de ces motifs que le préjudice allégué par Monsieur Y... est la conséquence directe de ses choix, antérieurs à la promesse d'achat, ou imprudents, compte tenu de la nature de l'engagement conclu, et non d'un comportement fautif de la SAFER dans son obligation contractuelle ; qu'en outre, à supposer que la SAFER ait vérifié la disponibilité des terres avant d'en promettre la cession à Monsieur Y..., la vente par rétrocession se serait révélée impossible, de sorte que son projet n'aurait pas pu être mené à bien ; qu'il ne peut donc être retenu la perte d'une chance sérieuse à raison du manquement de la SAFER à ses obligations ; qu'en conséquence, Monsieur Y... sera débouté de sa demande de dommages et intérêts et la décision déférée sera confirmée de ce chef ;
1°) ALORS QUE le débiteur est condamné au paiement de dommages et intérêts à raison de l'inexécution de l'obligation ; que la cour d'appel jugeant que c'était par imprudence ou à contretemps que le jeune agriculteur, victime de la faute d'une SAFER qui avait promis de vendre un terrain sans en vérifier la disponibilité avait engagé des frais pour la réalisation de son projet d'exploitation agricole, n'a pas tiré les conséquences de ses propres constatations et violé, par refus d'application, l'article 1147 du Code civil ;
2°) ALORS QUE le débiteur est condamné au paiement de dommages et intérêts à raison de l'inexécution de l'obligation ; que le jeune agriculteur, victime de l'imprudence d'une SAFER qui avait promis de vendre un terrain sans en vérifier la disponibilité, a nécessairement subi une perte de chance de réaliser plus rapidement et dans de meilleures conditions son projet d'installation ; qu'en jugeant pour écarter cette prétention que son projet n'aurait de toute façon pas pu être mené à bien du fait de l'inaliénabilité du terrain promis, la cour d'appel, se fondant sur des motifs inopérants, a violé l'article 1147 du Code civil.
SECOND MOYEN DE CASSATION :

Le moyen fait grief à l'arrêt attaqué d'avoir débouté Monsieur Jean-Pierre Y... de sa demande de remboursement des intérêts courus sur la somme consignée en vain à la SAFER ;
AUX MOTIFS QUE les parties sont convenues, lors de la signature de la promesse d'achat, du versement par le promettant d'une somme de 160. 000 Frs à titre de cautionnement et garantie de candidature ; qu'il a été expressément mentionné que, si la candidature du promettant n'était pas retenue, la somme consignée lui serait restituée sans qu'il ait droit à une autre somme à quelque titre que ce soit ; qu'aucune disposition contractuelle n'a donc prévu le versement d'intérêts entre la date de versement du cautionnement et celle de sa restitution ; qu'en outre, la SAFER a, dès le 9 février 2000, proposé la restitution de cautionnement à Monsieur Y... ; qu'il a refusé en soutenant que la vente était parfaite ; qu'en conséquence, Monsieur Y... sera débouté de sa demande de paiement des intérêts sur le cautionnement et la décision déférée sera complétée en ce sens ;
1°) ALORS QUE le débiteur est condamné au paiement de dommages et intérêts à raison de l'inexécution de l'obligation ; que la SAFER Marche Limousin avait été condamnée par arrêt du 24 février 2004 à restituer à Monsieur Y... la somme de 24. 391, 84 € qu'il avait remise le 17 novembre 1999 en garantie d'une promesse d'achat, cependant que la SAFER n'avait pas pris la précaution de vérifier la disponibilité du bien promis ; que dans la mesure où une faute se trouvait à l'origine de la condamnation à restitution, la cour d'appel, qui a refusé d'assortir ce remboursement d'intérêts de retard au taux légal à défaut de stipulations contractuelles le prévoyant, s'est fondée sur des motifs inopérants et a violé, par refus d'application, les articles 1147, 1149 et 1150 du Code civil ;
2°) ALORS QUE le débiteur qui ne s'est pas libéré par une offre réelle est condamné au paiement de dommages et intérêts à raison de l'inexécution de l'obligation ; que la SAFER Marche Limousin avait été condamnée par arrêt du 24 février 2004 à restituer à Monsieur Y... la somme de 24. 391, 84 € qu'il avait remise le 17 novembre 1999 en garantie d'une promesse d'achat, la SAFER n'ayant pas pris la précaution de vérifier la disponibilité du bien vendu qui s'était révélé inaliénable ; que la cour d'appel qui a refusé d'assortir d'intérêts de retard la restitution du dépôt de garantie en considération d'une offre simple de restitution de la SAFER en date du 9 février 2000 s'est fondée sur des motifs inopérants et a violé, par refus d'application, les articles 1147 et 1148 du Code civil, ensemble l'article 1257 du même code.


Synthèse
Formation : Chambre civile 3
Numéro d'arrêt : 09-15476
Date de la décision : 30/06/2010
Sens de l'arrêt : Cassation partielle
Type d'affaire : Civile

Références :

Décision attaquée : Cour d'appel de Poitiers, 03 septembre 2008


Publications
Proposition de citation : Cass. Civ. 3e, 30 jui. 2010, pourvoi n°09-15476


Composition du Tribunal
Président : M. Lacabarats (président)
Avocat(s) : SCP Nicolaý, de Lanouvelle et Hannotin, SCP Rocheteau et Uzan-Sarano

Origine de la décision
Date de l'import : 15/09/2022
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CCASS:2010:09.15476
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