LA COUR DE CASSATION, DEUXIÈME CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :
Sur la fin de non-recevoir opposée par la défense :
Attendu que la SCP Ménard et Scelle-Millet soutient que le pourvoi est irrecevable en raison de l'acquiescement exprès de M. et Mme X... qui, dans une lettre du 18 avril 2008, ont fait connaître leur intention de régler les causes de l'ordonnance attaquée, sans émettre la moindre réserve ;
Mais attendu que, le pourvoi en cassation n'étant pas suspensif, l'accord donné, même sans réserve, à l'exécution de la décision attaquée, ne vaut pas acquiescement ;
D'où il suit que le pourvoi est recevable ;
Sur le moyen unique, tel que reproduit en annexe :
Attendu, selon l'ordonnance attaquée, rendue par le premier président d'une cour d'appel, statuant en matière de taxe (Paris, 14 avril 2008) que, condamnés aux dépens par un arrêt rendu le 5 juillet 2007 par la cour d'appel de Paris, M. et Mme X... ont contesté le certificat de vérification des dépens établi à la demande de la SCP Ménard et Scelle-Millet, avoué qui avait représenté la partie adverse devant la cour d'appel ;
Attendu que M. et Mme X... font grief à l'ordonnance de rejeter leur contestation et de taxer les frais de la SCP conformément à son état de frais vérifié ;
Mais attendu qu'il ressort des productions que l'état de frais détaillé et vérifié fait ressortir les déboursés ainsi que les émoluments prévus au tarif des avoués, avec référence à l'article 9 et à la ligne 7 (arrêt tranchant tout ou partie du principal) du tableau A ;
Et attendu que le premier président a retenu, pour déterminer l'intérêt du litige, une somme comprenant les intérêts échus à la date de l'arrêt de la cour d'appel du 5 juillet 2007, conformément aux prescriptions de l'article 25 du décret n° 80-608 du 30 juillet 1980 ;
D'où il suit que le moyen, qui manque en fait en ses deux premières branches, n'est pas fondé pour le surplus ;
PAR CES MOTIFS :
DÉCLARE le pourvoi recevable ;
REJETTE le pourvoi ;
Condamne M. et Mme X... aux dépens ;
Vu l'article 700 du code de procédure civile, rejette la demande de M. et Mme X... ; ensemble l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991 ; rejette la demande de la SCP Vier-Barthélémy-Matuchansky ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, deuxième chambre civile, et prononcé par le président en son audience publique du vingt-quatre juin deux mille dix.
MOYEN ANNEXE au présent arrêt :
Moyen produit par la SCP Ghestin, avocat aux Conseils, pour M. et Mme X...
Le moyen reproche à l'ordonnance attaquée, rendue par le délégué du premier président de la cour d'appel de Paris, D'AVOIR rejeté la contestation formée par les époux X... contre l'état de frais établi par la SCP Menard et Scelle-Millet, avoué, et d'avoir taxé les frais dudit avoué conformément à cet état de frais ;
AUX MOTIFS QUE par arrêt du 5 juillet 2007 la cour d'appel de Paris, statuant dans un litige opposant madame Y... épouse Z... à monsieur X... et à madame A... épouse X..., avait condamné monsieur et madame X... aux dépens d'appel dont le montant pourrait être recouvré dans les conditions de l'article 699 du code de procédure civile ; que par lettre datée du 23 décembre 2007 reçue au greffe le 4 janvier 2008, monsieur et madame X... avaient formé un recours contre l'état de frais de la SCP Ménard et Scelle-Millet, avoué de la partie adverse, s'élevant à la somme de 727,95 euros, vérifié pour ce montant par le greffier en chef de la cour d'appel de Paris ; qu'ils avaient demandé que cet état de frais soit jugé irrégulier et non valide comme ne répondant pas aux conditions de forme imposées par l'article 5 du décret du 30 juillet 1980, et en tout cas la demande de vérification de cet état de frais irrecevable en l'absence de pièces justificatives et sans que l'article 5 ait été respecté ; qu'ils avaient soutenu notamment que les sommes réclamées ne faisaient pas référence aux articles et aux lignes du tarif applicables, ce qui leur faisait grief, et que le montant des provisions reçues par l'avoué n'était pas indiqué, réclamant la production et la communication du registre spécial prévue à l'article 4 du décret ; qu'ils avaient ajouté que l'avoué avait décompté des débours qu'il avait refusé de communiquer et de justifier et qui n'étaient pas fondés ; que par note en réponse datée du 10 mars 2008 reçue le 23 suivant, la SCP Menard et Scelle-Millet avait indiqué ne pas avoir d'observation à formuler et s'en remettait à la sagesse du magistrat taxateur ; que par ordonnance du 10 mars 2008, il avait été sursis à statuer sur la contestation de monsieur et madame X... jusqu'à communication par l'avoué du montant des provisions reçues de sa cliente ; par lettre du 17 mars 2008, la SCP Menard et Scelle-Millet avait indiqué avoir reçu la somme de 358,80 euros TTC de provision ; que l'article 2 du décret n°80-608 du 30 juillet 1980 fixant le tarif des avoués près les cours d'appel disposait que les émoluments alloués aux avoués «constitu aient la rémunération, due pour tous les actes de procédure, préparation, rédaction, établissement de l'original et des copies, vacations et démarches de toute nature, y compris tout ce qui concerne la mise en état, l'obtention des décisions, leur signification à avoué et à partie, ainsi que l'établissement du certificat de signification et l'obtention du certificat de non-pourvoi» ; que l'article 5 énonçait que les états de frais devaient faire ressortir séparément et distinctement les déboursés et les émoluments prévus au tarif, avec référence à l'article applicable de ce tarif et aux lignes du tableau A et éventuellement du tableau B, des lignes spéciales étant en outre, le cas échéant, réservées, d'une part aux provisions versées, d'autre part, aux honoraires demandés en vertu de l'article 3 ; que toutefois le respect de ce formalisme n'était sanctionné ni par l'irrecevabilité de la demande de vérification des dépens, ni par la nullité de l'état de frais, et qu'il n'en résultait aucun grief pour les époux X... qui disposaient d'un recours, qu'ils avaient effectivement exercé, leur permettant de soumettre le compte des dépens au magistrat taxateur, auquel il appartenait d'effectuer toutes vérifications utiles et de procéder, même d'office, à tous les redressements nécessaires afin de rendre le compte conforme au tarif ; que, sur l'émolument, selon les articles 9, 24 et 25 du décret, la rémunération prévue à l'article 2 était constituée par un émolument proportionnel à l'importance de l'affaire, calculé sur l'intérêt du litige apprécié pour chacune des parties et constitué par le total de la valeur des droits réels et personnels, objet de la saisine de la cour ; que lorsqu'il s'agirait de paiement d'une somme d'argent, cet intérêt était déterminé par le total le plus élevé du montant de chacune des créances ou préjudices, en capital et intérêts, reconnu ou apprécié soit par le tribunal, soit par la cour et ayant servi de base au montant des condamnations prononcées par l'une ou l'autre de ces juridictions ; qu'aux termes de l'article 11, lorsque l'intérêt du litige était évaluable en argent, l'émolument proportionnel était fixé en pourcentage, selon dix tranches dégressives déterminées en unités de base, entre 5% et 0,10% de la somme représentant l'intérêt du litige ; qu'en l'espèce l'intérêt du litige était évaluable en argent, la cour d'appel ayant dans son arrêt du 5 juillet 2007, infirmant le jugement entrepris qui avait ordonné la mainlevée de la saisie-attribution pratiquée le 6 décembre 2005, cantonné cette saisie-attribution à la somme en principal de 12.000 euros outre les intérêts au taux légal à compter du 11 mai 2005 majorés de cinq points à compter du 16 novembre 2005, ce qui représentait une somme totale de 12.591,97 euros, ouvrant droit à un émolument proportionnel de 523,56 HT et 626,70 euros TTC ; que le montant de l'émolument ayant été ainsi calculé conformément aux règles du tarif des avoués, et le compte des dépens n'appelant aucune autre observation, dès lors qu'il était conforme aux textes régissant ledit tarif, il convenait de rejeter le recours comme mal fondé et de taxer les frais de l'avoué conformément au certificat de vérification contesté (ordonnance, pp. 2 et 3) ;
ALORS QUE l'état de frais d'un avoué doit faire ressortir séparément et distinctement les déboursés et les émoluments prévus au tarif avec référence à l'article applicable dudit tarif et aux lignes des tableaux que ce dernier prévoit ; que les formalités ainsi exigées sont substantielles ; qu'en retenant que le formalisme du tarif des avoués n'était sanctionné ni par l'irrecevabilité de la demande de vérification des dépens, ni par la nullité de l'état de frais, le délégué du premier président de la cour d'appel de Paris a violé l'article 114 du code de procédure civile et l'article 5 du décret n° 80-608 du 30 juillet 1980 fixant le tarif des avoués près les cours d'appel ;
ALORS, DE SURCROIT, QUE l'absence d'indication, dans l'état de frais établi par un avoué et vérifié par le greffier, des articles du tarif dont il est fait application cause nécessairement un grief à la partie débitrice des émoluments concernés, et ce, nonobstant l'existence d'un recours devant le juge taxateur, puisque la partie débitrice est privée d'un débat contradictoire effectif devant ce juge, sauf si l'avoué, par des observations complémentaires déposées et communiquées en temps utile, fournit le détail des articles appliqués du tarif ; que les époux X... avaient expressément fait valoir, au soutien de leur contestation formée devant le juge taxateur, que le caractère incomplet de l'état de frais de l'avoué, qui ne faisait pas référence aux articles applicables du tarif, leur avait causé un grief, en les privant de toute possibilité de contrôle des sommes réclamées ; qu'en retenant néanmoins que la seule existence d'un recours devant le magistrat taxateur était de nature à exclure tout grief pour la partie débitrice des émoluments, quand il était de surcroît constaté que, dans sa note déposée devant ce magistrat, l'avoué s'était borné à indiquer ne pas avoir d'observations à formuler et s'en remettre à la sagesse du magistrat, ce dont il résultait qu'à aucun moment de la procédure, la partie débitrice n'avait été mise en mesure de connaître utilement les articles du tarif dont il était fait application et qu'elle avait été privée d'un débat contradictoire effectif, le délégué du premier président de la cour d'appel de Paris a violé les articles 16 et 709 du code de procédure civile et l'article 5 du décret susvisé du 30 juillet 1980, ensemble l'article 6 paragraphe 1 de la Convention de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
ALORS, ENFIN, QUE l'intérêt du litige servant de base au calcul des émoluments est déterminé par le montant de la créance reconnu par décision judiciaire en capital et intérêts, à l'exclusion des intérêts moratoires alloués par ladite décision judiciaire et, comme tels, étrangers à la créance elle-même ; qu'en retenant que l'intérêt du litige, base de calcul de l'émolument de l'avoué, était constitué non seulement de la somme arrêtée en principal par la décision rendue au fond par la cour d'appel, mais aussi des intérêts au taux légal alloués sur cette somme par la même décision, le délégué du premier président de la cour d'appel de Paris a violé l'article 25 du décret susvisé du 30 juillet 1980.