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23/06/2010 | FRANCE | N°09-84347

France | France, Cour de cassation, Chambre criminelle, 23 juin 2010, 09-84347


LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE CRIMINELLE, a rendu l'arrêt suivant :
Statuant sur le pourvoi formé par :

- X... Serge,

contre l'arrêt de la cour d'assises de la CÔTE-D'OR, en date du 30 mai 2009, qui, pour viols et tentatives de viols aggravés, agressions sexuelles aggravées et attentats à la pudeur aggravés, l'a condamné à huit ans d'emprisonnement, a décerné mandat de dépôt, ainsi que contre l'arrêt du même jour par lequel la cour a prononcé sur les intérêts civils ;

Vu les mémoires produits, en demande et en défense ;
Sur le premier moyen de c

assation, pris de la violation des articles 312, 331, 332, 335, 591 et 593 du code de procéd...

LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE CRIMINELLE, a rendu l'arrêt suivant :
Statuant sur le pourvoi formé par :

- X... Serge,

contre l'arrêt de la cour d'assises de la CÔTE-D'OR, en date du 30 mai 2009, qui, pour viols et tentatives de viols aggravés, agressions sexuelles aggravées et attentats à la pudeur aggravés, l'a condamné à huit ans d'emprisonnement, a décerné mandat de dépôt, ainsi que contre l'arrêt du même jour par lequel la cour a prononcé sur les intérêts civils ;

Vu les mémoires produits, en demande et en défense ;
Sur le premier moyen de cassation, pris de la violation des articles 312, 331, 332, 335, 591 et 593 du code de procédure pénale :
"en ce que le procès-verbal des débats énonce qu'à l'audience des débats du 28 mai 2009, « la partie civile Franck Y... a été entendue sans prestation de serment, et à titre de renseignements, ce dont les membres de la cour et les jurés ont été avisés, la partie civile Mathieu Y... a été entendue sans prestation de serment, et à titre de renseignements, ce dont les membres de la cour et les jurés ont été avisés, la partie civile Joël Y... a été entendue sans prestation de serment, et à titre de renseignements, ce dont les membres de la cour et les jurés ont été avisés » ;
"alors que, conformément aux exigences de l'article 331 du code de procédure pénale, applicables aux témoins reprochables visés à l'article 335 du même code, au nombre desquels figure la partie civile lorsqu'elle est citée en qualité de témoin, les témoins doivent déposer séparément l'un de l'autre, le président ne pouvant entendre ensemble deux ou plusieurs témoins ; que loin de ne caractériser qu'une formalité préalable à l'audition des témoins, l'obligation d'entendre séparément les témoins attrait aux modalités de la déposition proprement dite et constitue une condition de fond de sa validité ; qu'ainsi, ne satisfait pas en la forme aux conditions essentielles de son existence légale le procès-verbal des débats des constatations duquel il ne résulte pas que les témoins précités aient été entendus séparément l'un de l'autre" ;
Attendu que les dispositions de l'article 331 du code de procédure pénale prévoyant que les témoins sont entendus séparément l'un de l'autre ne sont pas applicables à l'audition des parties civiles ;
D'où il suit que le moyen n'est pas fondé ;
Sur le deuxième moyen de cassation, pris de la violation des articles 309, 310, 325 et 591 du code de procédure pénale :
"en ce que la cour d'assises, par arrêt incident du 29 mai 2009, a ordonné que dans la mesure où la défense remettra le téléphone portable, il soit procédé au visionnage d'une scène enregistrée par cet appareil ;
"aux motifs qu'au moment du contre-interrogatoire du témoin Vanessa Z..., épouse A..., par la défense, Me B... a indiqué avoir appris que les témoins Vanessa Z..., épouse A..., et Philippe C... avaient conversé avant leur audition par la cour avec le témoin Jean-Pierre D... ; qu'un ami de l'accusé avait d'ailleurs enregistré la vidéo de cette conversation sur son téléphone portable ; que le ministère public a alors requis oralement que soit visionné cet enregistrement ; que la cour, après avoir entendu le ministère public, les avocats des parties civiles, l'avocat de l'accusé, l'accusé lui-même ayant la parole en dernier, s'est retirée pour délibérer sans le concours des jurés ; que le délibéré achevé, la cour a repris sa place dans l'auditoire et l'audience étant toujours à huis clos, en présence du ministère public et du greffier, le président a prononcé à haute vois l'arrêt suivant : la cour, ouï les réquisitions de M. l'avocat général tendant au visionnage d'un enregistrement sur téléphone portable ; ouï les conseils des parties civiles, l'avocat de l'accusé et l'accusé lui-même qui a eu la parole en dernier ; statuant seule, sans l'assistance du jury, à huis clos, contradictoirement, après en avoir délibéré conformément à la loi ; que le président de la cour d'assises a estimé devoir saisir la cour de ces réquisitions qui tendent à ordonner une mesure relevant de son pouvoir discrétionnaire ; que la mesure sollicitée apparaît utile à la manifestation de la vérité ; qu'il y a lieu, en conséquence, de faire droit à la demande ;
"alors que, si le président de la cour d'assises peut, en vertu de l'article 310 du code de procédure pénale, renoncer, par une délégation spéciale, à l'exclusivité de son pouvoir discrétionnaire, et ainsi saisir la cour d'une mesure relevant d'un tel pouvoir, aucune disposition légale ne lui permet de procéder ainsi à l'égard de mesures relevant de son pouvoir de direction des débats, au nombre desquelles figurent celles de l'article 325 du code de procédure pénale en vertu duquel le président de la cour d'assises prend toutes mesures aux fins notamment d'empêcher les témoins de conférer entre eux avant leur déposition ; qu'en l'espèce, loin de contribuer à la manifestation de la vérité et ainsi de relever du pouvoir discrétionnaire du président de la cour d'assises, la mesure de visionnage ordonnée par l'arrêt incident susvisé ne tendait qu'à vérifier si les obligations pesant sur les témoins en vertu de l'article 325 du code de procédure pénale avaient été respectées ; que, dès lors, en retenant sa compétence pour statuer sur une telle mesure, la cour d'assises a excédé ses pouvoirs et violé les textes susvisés" ;
Attendu que la décision de visionner l'enregistrement vidéo visé au moyen entrait dans le pouvoir discrétionnaire que le président de la cour d'assises tient de l'article 310 du code de procédure pénale ;
D'où il suit que le moyen n'est pas fondé ;
Sur le troisième moyen de cassation, pris de la violation de l'article 6 de la Convention européenne des droits de l'homme, des articles 168, 429, 706-71, R. 53-33 et suivants, D. 47-12-6 du code de procédure pénale :
"en ce que la cour d'assises a, au cours des débats, procédé par visioconférence à l'audition d'Agnès E..., expert psychologue ;
"aux énonciations que à 14 heures 45, le président a annoncé que l'audience était suspendue pour permettre à la cour, aux jurés et aux deux jurés supplémentaires, aux parties et leurs conseils, au ministère public et au greffier de se rendre dans la salle 7 de la cour d'appel de Dijon, salle équipée d'un matériel de visioconférence où doit avoir lieu l'audition de l'expert Agnès E..., psychologue ; que le même jour à 14 heures 50, la cour, étant composée comme il a été dit au commencement et les jugés ainsi que les jurés supplémentaires, les mêmes qui ont siégé précédemment, ont repris séance en présence du ministère public et du greffier dans la salle 7 de la cour d'appel de Dijon équipée d'un matériel de visioconférence, où étaient présents les parties civiles et leurs conseils, l'avocat de l'accusé et l'accusé toujours libre ; que les jurés de jugement et les deux jurés supplémentaires ont repris les places qu'ils occupaient auparavant ; que l'audience étant toujours à huis clos et les portes de l'auditoire fermées, le président a annoncé la reprise des débats ; qu'Agnès E..., psychologue, qui avait été chargée de trois missions d'expertise au cours de l'instruction, a exposé depuis une salle du tribunal de grande instance de Strasbourg, par visioconférence, conformément aux dispositions de l'article 706-71 du code de procédure pénale, les résultats des opérations techniques auxquelles elle avait procédé, après avoir prêté le serment prévue à l'article 168 du code de procédure pénale dont toutes les prescriptions ont par ailleurs été observées ; qu'après son audition, les parties n'ayant formé aucune opposition, le président a autorisé la fin de la connexion avec le tribunal de grande instance de Strasbourg ; que les procès-verbaux des opérations de visioconférence effectuées sont annexés au présent procès-verbal ;
"1) alors qu'un délai suffisant doit être ménagé entre la décision de recourir à la visioconférence et sa mise en oeuvre pour permettre à l'accusé d'organiser sa défense ; qu'en l'espèce, la liste des experts qui a été dénoncée à l'accusé le 22 avril 2009, n'indiquait pas qu'Agnès E..., psychologue, serait entendue par visioconférence ; qu'il ressort des énonciations de l'arrêt que l'accusé a été informé de l'audition d'Agnès E... par visioconférence cinq minutes seulement avant son audition ; qu'ainsi, les droits de la défense ont été méconnus ;
"2) alors que, pour garantir la validité et l'intégrité des opérations techniques, les mentions des différents procès-verbaux établis, conformément à l'article D. 47-12-6 du code de procédure pénale, dans chacun des lieux de la visioconférence, doivent être concordantes entre elles, en ce qui concerne, notamment, les heures du début et de la fin de la connexion ; qu'en l'espèce, est entachée de nullité l'audition, par visioconférence, de l'expert E..., dès lors que le procès-verbal établi au tribunal de grande instance de Strabourg indique que la connexion a débuté le 29 mai 2009 à 14 h 45 pour s'achever le même jour à 15 h 55, tandis que le procès-verbal établi, à la cour d'appel de Dijon, pour la même audition, indique que la connexion a été établie à 14 h 50 pour s'achever à 16 h 00 ; qu'en cet état, la décision attaquée ne satisfait pas, en la forme, aux conditions essentielles de son existence légale" ;
Sur le quatrième moyen de cassation, pris de la violation de l'article 6 de la Convention européenne des droits de l'homme, des articles 168, 429, 706-71, R. 53-33 et suivants, D. 47-12-6 du code de procédure pénale ;
"en ce que la cour d'assises a, au cours des débats, procédé par visioconférence à l'audition d'Armande F..., expert psychiatre ;
"1) alors que tout procès-verbal n'a de valeur probante que s'il est régulier en la forme et si son auteur a agi dans l'exercice de ses fonctions ; qu'il résulte de l'article D. 47-12-6 du code de procédure pénale que le procès-verbal dressé en chacun des lieux en application de l'article 706-71 du même code doit être établi et signé par un agent ou un fonctionnaire de la juridiction désigné par le greffier en chef ou par un fonctionnaire pénitentiaire désigné par le chef d'établissement ; qu'ainsi, ne satisfait pas, en la forme, aux conditions essentielles de son existence légale et, partant, ne permet pas de s'assurer de l'intégrité de l'enregistrement qu'il constate, le procès-verbal des opérations techniques qui, se bornant en l'espèce à énoncer qu'il a été établi et signé le 29 mai 2009 par Jean G..., en qualité « d'assistant des bibliothèques » à la cour d'appel de Besançon, ne précise pas que l'intéressé, à supposer qu'il ait la qualité de fonctionnaire de cette juridiction, ait été régulièrement désigné à cette fin par le greffier en chef de ladite juridiction ;
"2) alors que, pour garantir la validité et l'intégrité des opérations techniques, les mentions des différents procès-verbaux établis, conformément à l'article D. 47-12-6 du code de procédure pénale, dans chacun des lieux de la visioconférence, doivent être concordantes entre elles, en ce qui concerne, notamment, les heures du début et de la fin de la connexion ; qu'en l'espèce, est entachée de nullité l'audition, par visioconférence, de l'expert F..., dès lors que le procès-verbal établi à la cour d'appel de Besançon indique que la connexion a débuté le 29 mai 2009 à 11 h 20 pour s'achever le même jour à 12 h 29, tandis que le procès-verbal établi, à la cour d'appel de Dijon, pour la même audition, indique que la connexion a été établie à 11 h 25 pour s'achever à 12 h 37 ; qu'en cet état, la décision attaquée ne satisfait pas, en la forme, aux conditions essentielles de son existence légale" ;
Les moyens étant réunis ;
Attendu que, d'une part, le procès-verbal des débats mentionne que, dans la matinée du 28 mai 2009, premier jour des débats, le président a annoncé que l'expert E... serait entendu par visioconférence, aucune observation n'ayant été faite par les parties ; que l'audition de l'expert s'est déroulée le lendemain, 29 mai 2009 ;
Attendu que, d'autre part, les procès-verbaux des opérations techniques et le procès-verbal des débats mettent la Cour de cassation en mesure de s'assurer que les conditions légales de déroulement de l'audience ont été respectées ;
D'où il suit que les moyens, dont le troisième, pris en sa première branche, manque en fait, ne sauraient être admis ;
Sur le cinquième moyen de cassation, pris de la violation de l'article 6 de la Convention européenne des droits de l'homme, ensemble violation des droits de la défense, et des articles 376, 377 et 593 du code de procédure pénale ;
"en ce que l'arrêt de la cour d'assises de la Côte-d'Or du 30 mai 2009 ne comporte aucun motif ;
"alors que l'exigence d'un procès équitable suppose une motivation permettant le contrôle du juge de légalité ; que cette exigence est d'autant plus nécessaire quand les faits ont été constamment niés par l'accusé ; qu'ainsi, le principe de non-motivation de l'arrêt de la cour d'assises est contraire aux dispositions impératives et supérieures de la Convention européenne des droits de l'homme" ;
Attendu que sont reprises dans l'arrêt de condamnation les réponses qu'en leur intime conviction, magistrats et jurés composant la cour d'assises d'appel, statuant dans la continuité des débats, à vote secret et à la majorité qualifiée des deux tiers, ont donné aux questions sur la culpabilité posées conformément au dispositif de la décision de renvoi ;
Attendu qu'en cet état, et dès lors qu'ont été assurés l'information préalable sur les charges fondant la mise en accusation, le libre exercice des droits de la défense ainsi que le caractère public et contradictoire des débats, l'arrêt satisfait aux exigences légales et conventionnelles invoquées ;
D'où il suit que le moyen ne saurait être accueilli ;
Et attendu qu'aucun moyen n'est produit contre l'arrêt civil, que la procédure est régulière et que la peine a été légalement appliquée aux faits déclarés constants par la cour et le jury ;
REJETTE le pourvoi ;
FIXE à 2 500 euros la somme globale que Serge X... devra payer à Franck Y..., Joël Y... et Mathieu Y... au titre de l'article 618-1 du code de procédure pénale ;
Ainsi jugé et prononcé par la Cour de cassation, chambre criminelle, en son audience publique, les jour, mois et an que dessus ;
Etaient présents aux débats et au délibéré, dans la formation prévue à l'article 567-1-1 du code de procédure pénale : M. Louvel président, Mme Leprieur conseiller rapporteur, Mme Chanet conseiller de la chambre ;
Greffier de chambre : Mme Randouin ;
En foi de quoi le présent arrêt a été signé par le président, le rapporteur et le greffier de chambre ;


Synthèse
Formation : Chambre criminelle
Numéro d'arrêt : 09-84347
Date de la décision : 23/06/2010
Sens de l'arrêt : Rejet
Type d'affaire : Criminelle

Références :

Décision attaquée : Cour d'assises de la Côte-d'Or, 30 mai 2009


Publications
Proposition de citation : Cass. Crim., 23 jui. 2010, pourvoi n°09-84347


Composition du Tribunal
Président : M. Louvel (président)
Avocat(s) : Me Blanc, SCP Rocheteau et Uzan-Sarano

Origine de la décision
Date de l'import : 15/09/2022
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CCASS:2010:09.84347
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