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23/06/2010 | FRANCE | N°09-40936

France | France, Cour de cassation, Chambre sociale, 23 juin 2010, 09-40936


LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l'arrêt suivant :

Sur le moyen unique :

Attendu selon l'arrêt attaqué (Versailles, 28 octobre 2008), que M. X...
Y...
A..., engagé le 18 avril 2002 en qualité de directeur administratif et financier par la société Mapotel a été licencié pour faute grave le 29 septembre 2003 ;

Attendu que la société fait grief à l'arrêt de dire le licenciement sans cause réelle et sérieuse et vexatoire et de la condamner à payer à ces titres diverses sommes, alors, selon le moyen :

1° / que le directeur admi

nistratif et financier d'une société, qui, après avoir vu son attention attirée, en septembre 20...

LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l'arrêt suivant :

Sur le moyen unique :

Attendu selon l'arrêt attaqué (Versailles, 28 octobre 2008), que M. X...
Y...
A..., engagé le 18 avril 2002 en qualité de directeur administratif et financier par la société Mapotel a été licencié pour faute grave le 29 septembre 2003 ;

Attendu que la société fait grief à l'arrêt de dire le licenciement sans cause réelle et sérieuse et vexatoire et de la condamner à payer à ces titres diverses sommes, alors, selon le moyen :

1° / que le directeur administratif et financier d'une société, qui, après avoir vu son attention attirée, en septembre 2002, sur la nécessité de produire au conseil d'administration des situations financières régulières, d'établir le budget annuel dans le strict respect d'un calendrier et d'arrêter le bilan aux fins de validation par le commissaire aux comptes avant le 28 février de chaque année, ne remplit pas sa mission de telle sorte qu'il est constaté par le commissaire aux comptes, d'une part, de nombreux dysfonctionnements dans le service dont il a la responsabilité, en mars 2003, puis, d'autre part, en mai 2003, des carences et insuffisances révélant un manque manifeste de rigueur, de compétences insuffisantes au sein du service comptable et une certaine légèreté dans l'appréciation des problèmes, et, enfin, dans un rapport du 4 septembre 2003 dressé par un expert-comptable chargé d'effectuer un audit, des insuffisances comptables d'organisation, d'exigence, de formation et de résultat (justification de soldes) de l'ensemble du service, insuffisances qui trouvent leur source dans un manque de formation déléguée et de supervision de la part de la direction financière (délais, précision, méthodologie), ce dont il s'évince que ce directeur administratif et financier a poursuivi dans ses errements et son manque manifeste de rigueur, commet un manquement à ses obligations professionnelles et une faute ne permettant pas le maintien de l'intéressé dans l'entreprise pendant l'exécution du préavis ; et que la cour d'appel qui a constaté la réalité des griefs invoqués dans la lettre de licenciement, a, en exigeant de l'employeur qu'il démontre que le manque manifeste de rigueur du salarié dans l'exercice de ses responsabilités administratives et financières procède d'une mauvaise volonté délibérée, violé les articles L. 1234-1, L. 1234-5, L. 1234-9, L. 1235-1, L. 1235-3 du code du travail ;

2° / qu'il résulte de la lettre de licenciement, dont les termes fixent les limites du litige, que la société Mapotel reprochait au salarié la poursuite des errements dont elle se plaignait depuis de nombreux moix et auxquels il n'avait pas remédié malgré ses mises en garde et ses engagements, telle que révélée par le rapport de l'expert comptable du 4 septembre 2003, qui relevait des irrégularités dans les comptes clients et fournisseurs et dans le poste Banque et Trésorerie, déjà constatées par le commissaire aux comptes dans son message du 7 mars 2003, et à propos desquelles l'expert avait le 28 avril 2003, formulé des recommandations ; et qu'en relevant qu'il n'était pas reproché au salarié de n'avoir pas mis en oeuvre une des recommandations, alors que cela s'évinçait nécessairement de la poursuite de ses errements par le salarié, la cour d'appel a violé les articles L. 1232-6 et L. 1235-1 du code du travail ;

Mais attendu que la cour d'appel qui a constaté que les retards dans les travaux comptables, la reddition tardive des comptes, le défaut d'ajustement de l'état de rapprochement bancaire, l'absence de justification des comptes de bilan, des déclarations de TVA non maîtrisées, le défaut de prise en compte de décisions prises par la commission financière reprochés au salarié relevaient non d'une mauvaise volonté délibérée mais d'une insuffisance professionnelle, ce dont il résultait qu'il n'était caractérisé aucune faute à la charge du salarié, a décidé à bon droit que le licenciement, prononcé pour faute grave, était sans cause réelle et sérieuse ; que le moyen n'est pas fondé ;

PAR CES MOTIFS :

REJETTE le pourvoi ;

Condamne la société Mapotel aux dépens ;

Vu l'article 700 du code de procédure civile, condamne la société Mapotel à payer à M. X...
Y...
A... la somme de 2 500 euros ;

Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre sociale, et prononcé par le président en son audience publique du vingt-trois juin deux mille dix.

MOYEN ANNEXE au présent arrêt :

Moyen produit par la SCP Delvolvé, avocat aux Conseils pour la société Mapotel.

IL EST FAIT GRIEF à l'arrêt attaqué d'avoir dit le licenciement de Monsieur Y...
A... dépourvu de cause réelle et sérieuse et d'avoir en conséquence condamné la société MAPOTEL à lui payer une indemnité de préavis et les congés payés afférents, de dommages et intérêts pour licenciement sans cause, à raison des circonstances vexatoires de la rupture, et pour non respect de la procédure de licenciement

AUX MOTIFS QUE l'insuffisance professionnelle ne constitue une faute que si elle procède d'une volonté délibérée du salarié, la prescription de deux mois prévue par l'article L. 122-44, devenu L. 1332-4 du Code du travail, n'étant applicable qu'en matière disciplinaire ; qu'en l'espèce le manque de compétences du service comptable et le manque de rigueur du salarié, directeur administratif et financier, dont la lettre de licenciement faisait état, ne traduisait pas une volonté délibérée du salarié d'une mauvaise exécution de ses tâches ; que le message de l'employeur du 29 septembre 2002, ayant eu pour objet de rappeler au salarié les dates pour la production des situations financières pour les réunions du conseil d'administration, de l'établissement du budget annuel et, de la validation bilan par le commissaire aux comptes le 28 février de chaque année, les dysfonctionnements constatés par le commissaire aux comptes dans un message, concernant le " suivi de clôture 2002 ", adressé à l'employeur le 7 mars 2003, tels que reproduits dans la lettre de licenciement relevaient d'une insuffisance professionnelle ; que la reconnaissance par le salarié, le 17 mars 2003, de son entière responsabilité dans la reddition tardive des comptes 2002 et les dysfonctionnements importants de son service, ne modifiait pas la nature des faits ; que par la lettre du 7 mai 2003, le commissaire aux comptes en complément des observations déjà exprimées, attirait l'attention de l'employeur sur d'autres carences ou insuffisances (informations concernant BW Voyages annoncées dans le rapport du Conseil d'administration non fournies à l'assemblée, déclarations de TVA non maîtrisées, manque de maîtrise des conditions de mise en oeuvre de l'intégration fiscales avec BW Voyages révélant une ignorance des limites de compétences), ajoutant que du fait " d'un manque manifeste de rigueur, de compétences insuffisantes au sein du service comptable, et d'une certaine légèreté dans l'appréciation des problèmes " sa mission pour 2002 ne s'était pas déroulée d'une manière satisfaisante dans les domaines juridique et comptable ; qu'il ne résultait pas des faits énoncés dans cette lettre une abstention volontaire ou mauvaise volonté délibérée dans l'exécution du travail ; qu'il en allait de même de la lettre du 16 mai 2003 par laquelle le commissaire aux comptes demandait à l'employeur de porter à la connaissance du conseil d'administration que les observations suivantes : "- les remarques formulées dans mon courrier du 7 mai 2003 concernant les contrôles internes et la maîtrise de la TVA n'ont pas été suivies d'effet,- le contrôle des débours entrepris doit être accentué,- mes demandes de confirmation directes des comptes clients et fournisseurs n'ont pas été prises en considération,- le suivi général et la qualité de la comptabilité doivent être impérativement et immédiatement améliorés ", ajoutant qu'il " conviendrait de faire appel à un expert comptable " ; qu'en réponse, l'employeur, par lettre du 24 mai avait informé le commissaire aux comptes notamment qu'il avait contacté un expert comptable pour qu'il effectue un audit, la première phrase avait été réalisée et un compte rendu lui avait été transmis par l'expert comptable et qu'il poursuivait avec cet expert sa réflexion sur la réorganisation du service ; qu'il résultait du rapport du 28 avril 2003 que M. Z..., expert comptable, avait été chargé de-prendre connaissance de l'organisation actuelle de votre société en matière comptable, administrative et financière,- entendre les personnes responsables de ladite organisation et, si nécessaire, se voir présenter toute observation ou tout document susceptible d'améliorer les procédures actuellement existantes, et,- formuler diverses recommandations ou avis de nature générale spécifique ou technique afin d'envisager certaines mesures qui incombent à l'employeur ; que ce rapport, après un rappel du message du commissaire aux comptes " mettant en évidence des lacunes dans l'organisation devant nécessairement (ou obligatoirement) être comblées par l'arrêté des comptes du prochain exercice (31 décembre 2003) ", formulait des recommandations portant sur la forme juridique de la société et particularités de fonctionnements liés à celle-ci, les outils informatiques et assimilés, les procédures diverses, cycles comptables ; qu'indiquant avoir été sollicité en vue de participer à l'élaboration des comptes intermédiaires au 30 juin 2003 et être intervenu les 30 et 31 juillet et 1er août 2003, dans un rapport du 4 septembre 2003, formulant des observations relatives à " l'état " de la comptabilité au 30 juin 2003, l'expert indiquait préalablement à une présentation de différents points par cycle comptable que son intervention lui avait permis de prendre connaissance de l'ensemble de la comptabilité et des insuffisances de mise à jour, de justification de soldes, de travaux de rapprochement ou de traitement des données ; qu'il concluait que le résultat de son intervention n'était pas satisfaisant " car elle n'a pas abouti à l'assurance que les compte de bilan au 30 juin 2003 étaient justifiés pour le 11 septembre 2003 " (cf. conseil d'administration) ; que toutefois, son intervention avait permis de mettre en évidence les insuffisances comptables d'organisation, d'exigence, de formation et de résultat justification de soldes) de l'ensemble du service ; que ces insuffisances reposaient " sur un manque de formation déléguée et de supervision de la part de la direction financière : délais, précisions, méthodologie " ; que dans son message du b7 mars 2003, adressé à l'employeur, le commissaire au comptes, après l'énoncé de difficultés rencontrées entre le 6 et 20 février 2003, constatait qu'au 24 février il n'avait toujours pas pu oeuvrer de manière efficace : "- les éditions comptables n'avaient pas été réalisées (elles n'ont été mises à notre disposition qu'en fin de matinée) ;- contrairement à ce qui avait été annoncé, l'état de rapprochement bancaire n'était pas ajusté. Après examen, nous avons attiré l'attention du service comptable sur 23 écritures étalées de juin à décembre 2002 qui, issues des journaux d'achats, de la banque en devises, ou d'opérations diverses, n'avaient manifestement pas leur place dans le compte de la banque HERVET. Le solde comptable de celui-ci en était majoré de 121 740, 10 € ;- le rapprochement bancaire de la banque en devises n'était toujours pas disponible ;- les comptes clients n'avaient pas été révisés et les décisions prises par la commission financière du 5 février 2003 n'avaient pas été suivies d'effet ;- les soldes fournisseurs n'avaient pas été vérifiées ;- ni les comptes 460 qui avaient été annoncés maîtrisés, sur les mails des 29 novembre et 22 décembre, ni les autres comptes de bilan n'étaient justifiés " ; qu'il exprimait en outre son désaccord sur une option décidée concernant la déclaration de TVA ; que les comptes de l'exercice 2002 avaient été certifiés par le commissaire aux comptes le 13 mars 2003 ; que n'étant pas reproché au salarié de n'avoir pas mis en oeuvre une des recommandations, dont nombre d'entre elles n'apparaissent pas liées directement à l'établissement des comptes, les insuffisances constatées le 1er août 2003 par le rapport du 4 septembre 2003, alors que la situation financière devait être présentée le 11 septembre 2003 au conseil d'administration, ne pouvaient être considérées comme un réitération, qui conférerait un caractère fautif à l'insuffisance professionnelle, des faits constatés par le commissaire aux comptes le 7 mars 2003 ; qu'une mauvaise volonté délibérée propre à caractériser une faute disciplinaire n'étant donc pas démontrée, le licenciement prononcé pour faute grave était dépourvu de cause réelle et sérieuse.

ALORS QUE, D'UNE PART, que le directeur administratif et financier d'une société, qui, après avoir vu son attention attirée, en septembre 2002, sur la nécessité de produire au conseil d'administration des situations financières régulières, d'établir le budget annuel dans le strict respect d'un calendrier et d'arrêter le bilan aux fins de validation par le commissaire aux comptes avant le 28 février de chaque année, ne remplit pas sa mission de telle sorte qu'il est constaté par le commissaire aux comptes, d'une part, de nombreux dysfonctionnements dans le service dont il a la responsabilité, en mars 2003, puis, d'autre part, en mai 2003, des carences et insuffisances révélant un manque manifeste de rigueur, de compétences insuffisantes au sein du service comptable et une certaine légèreté dans l'appréciation des problèmes, et, enfin, dans un rapport du 4 septembre 2003 dressé par un expert-comptable chargé d'effectuer un audit, des insuffisances comptables d'organisation, d'exigence, de formation et de résultat (justification de soldes) de l'ensemble du service, insuffisances qui trouvent leur source dans un manque de formation déléguée et de supervision de la part de la direction financière (délais, précision, méthodologie), ce dont il s'évince que ce directeur administratif et financier a poursuivi dans ses errements et son manque manifeste de rigueur, commet un manquement à ses obligations professionnelles et une faute ne permettant pas le maintien de l'intéressé dans l'entreprise pendant l'exécution du préavis ; et que la cour d'appel qui a constaté la réalité des griefs invoqués dans la lettre de licenciement, a, en exigeant de l'employeur qu'il démontre que le manque manifeste de rigueur du salarié dans l'exercice de ses responsabilités administratives et financières procède d'une mauvaise volonté délibérée, violé les articles L. 1234-1, L. 1234-5, L. 1234-9, L. 1235-1, L. 1235-3 du code du travail ;

ALORS QUE, D'AUTRE PART, qu'il résulte de la lettre de licenciement, dont les termes fixent les limites du litige, que la société Mapotel reprochait au salarié la poursuite des errements dont elle se plaignait depuis de nombreux moix et auxquels il n'avait pas remédié malgré ses mises en garde et ses engagements, telle que révélée par le rapport de l'expert comptable du 4 septembre 2003, qui relevait des irrégularités dans les comptes clients et fournisseurs et dans le poste Banque et Trésorerie, déjà constatées par le commissaire aux comptes dans son message du 7 mars 2003, et à propos desquelles l'expert avait le 28 avril 2003, formulé des recommandations ; et qu'en relevant qu'il n'était pas reproché au salarié de n'avoir pas mis en oeuvre une des recommandations, alors que cela s'évinçait nécessairement de la poursuite de ses errements par le salarié, la cour d'appel a violé les articles L. 1232-6 et L. 1235-1 du code du travail ;


Synthèse
Formation : Chambre sociale
Numéro d'arrêt : 09-40936
Date de la décision : 23/06/2010
Sens de l'arrêt : Rejet
Type d'affaire : Sociale

Références :

Décision attaquée : Cour d'appel de Versailles, 28 octobre 2008


Publications
Proposition de citation : Cass. Soc., 23 jui. 2010, pourvoi n°09-40936


Composition du Tribunal
Président : M. Chauviré (conseiller le plus ancien faisant fonction de président)
Avocat(s) : SCP Delvolvé, SCP Ortscheidt

Origine de la décision
Date de l'import : 15/09/2022
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CCASS:2010:09.40936
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