LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE CRIMINELLE, a rendu l'arrêt suivant :
Statuant sur le pourvoi formé par :
- X... Claude,
contre l'arrêt de la chambre de l'instruction de la cour d'appel d'AIX-EN-PROVENCE, en date du 17 mars 2010, qui l'a renvoyé devant le tribunal correctionnel sous la prévention de tentative d'importation de stupéfiants et association de malfaiteurs en vue de commettre des délits, en récidive, et a ordonné son maintien en détention ;
Vu le mémoire produit ;
Sur le moyen unique de cassation, pris de la violation des articles 186-3, alinéa 2, 213, 591 et 593 du code de procédure pénale ;
" en ce que la chambre de l'instruction a ordonné le renvoi de Claude X... devant le tribunal correctionnel et ordonné son maintien en détention jusqu'à sa comparution devant le tribunal correctionnel ;
" aux motifs que, aux termes de son mémoire régulièrement déposé, le conseil de Claude X... sollicite l'infirmation de l'ordonnance déférée et de dire qu'il n'y a lieu à suivre à l'encontre de ce dernier ; qu'à titre " infiniment subsidiaire ", si la chambre de l'instruction " entendait réformer l'ordonnance et modifier la qualification des faits reprochés ", il sollicite le renvoi à une audience ultérieure ; qu'il est conclu à l'absence de toute charge à l'encontre de Claude X... ; que l'on croit pouvoir discerner au détour des 4e et 5e paragraphes du mémoire que l'ordonnance déférée serait nulle en l'absence de signature du second juge saisi ; qu'il est énoncé que Claude X... n'entend pas s'expliquer au travers du mémoire sur les poursuites pour tentative de complicité d'importation de cocaïne tout en suggérant que ces faits ne pouvaient être poursuivis en France aux termes de l'article 113-8 du code pénal ; que les poursuites pour infractions à la législation sur les stupéfiants doivent être annulées " pour violation de l'article du code de procédure pénale et 6 de la Convention européenne des droits de l'homme, les poursuites telles qu'énoncées dans l'ordonnance étant indéterminées " ; qu'enfin aucun des moyens du délit d'association de malfaiteurs n'est imputable à Claude X... ; 1) Sur la régularité de l'ordonnance de renvoi : qu'aucun texte n'exige que l'ordonnance de règlement doit être signée par tous les juges cosaisis ; qu'au contraire, l'article 83-2 du code de procédure pénale dispose qu'il ne s'agit que d'une possibilité ; que ce moyen n'est donc pas sérieux ; 2) Sur la compétence des juridictions françaises : qu'il est vain d'invoquer l'article 113-8 du code pénal prévoyant notamment les modalités de poursuite des infractions commises par des français hors du territoire de la République ; qu'en effet, l'alinéa 1er de l'article 113-2 du code pénal pose le principe de la territorialité de la loi pénale française par rapport au lieu de la commission des faits et l'alinéa 2 de ce texte, considérant la complexité de certaines infractions ou du moins des circonstances, notamment de temps et d'espace qui ont entouré leur commission, a prévu la situation, illustrée dans la présente affaire, où les différents éléments constitutifs d'une même infraction font l'objet d'une dispersion géographique en de ça et au delà des frontières nationales, en réputant commise sur le territoire de la République l'infraction dont un fait constitutif s'y produit ; qu'est donc réputée commise sur le territoire de la République, toute infraction dont un des éléments constitutifs est caractérisé par un acte accompli en France ; que l'examen de la procédure révèle que certains faits constitutifs, au sens de l'article 113-2 du code pénal, imputés à Claude X..., ont bien été commis sur le territoire français ; qu'il suffit de rappeler que l'intéressé, s'il demeure en Espagne, se rend régulièrement en France, ainsi que cela résulte notamment des écoutes téléphoniques et du rendez-vous du 8 janvier 2007 à Lyon avec Dominique Y..., quelques jours avant la saisie de la cocaïne à Rotterdam ; que, dès lors, les faits sont réputés avoir été commis sur le territoire de la République ; qu'en conséquence, la compétence des juridictions françaises est indiscutable ; que le moyen sera rejeté ; 3) Sur les faits : que les charges pesant sur Claude X... et résultant des faits ci-dessus exposés sont sérieuses ; qu'en effet, les écoutes téléphoniques ont révélé des contacts fréquents avec Dominique Y..., les conversations portant manifestement sur la logitique d'acheminement de marchandises à destination de la (fausse) société Godart et, en particulier, du container de bois qui devait être saisi le 13 janvier 2008 à Rotterdam ; que, s'il a contesté être l'homme à l'accent dauphinois conversant avec Dominique Y..., une expertise vocale a conclu à la similitude des voix ; que les policiers l'ont reconnu alors qu'il rencontrait Dominique Y... à Lyon, le 8 janvier 2008, peu après une communication téléphonique passée d'une cabine située à Rives, à 6, 5 kilomètres du domicile de la mère de son enfant ; que, par ailleurs, lorsque le conteneur recelant les 176 kilos de cocaïne avait fait escale aux Pays-Bas et que le transitaire du port de Rotterdam avait pris des renseignements auprès de la vraie société Godart, provoquant la vive réaction du responsable de celle-ci, Dominique Y..., alerté le 12 janvier 2008 par B... aux abois, avait envisagé immédiatement de faire récupérer le conteneur, au prétexte d'une erreur, par les sud américains, et avait dans la foulée téléphoné, le 13 janvier 2008, au présumé Claude X... pour qu'il mette en oeuvre cette solution, avertissant également un autre individu se trouvant à Phuket, en Thaïlande, que les enquêteurs identifiait formellement comme étant Stéphan Z... ; que ce dernier connaissait " l'homme à l'accent du Dauphiné " puisque, dans le cadre d'une affaire de stupéfiants distincte, les enquêteurs, différents de ceux de la présente affaire, mais ayant relevé la même particularité phonétique, apprenaient par les écoutes téléphoniques que Stéphan Z... avait fait obtenir à l'inconnu qu'il surnommait " le Grand ", un rendez-vous rapide chez le docteur A..., ophtalmologue à Colombiers (Hérault) ; qu'au jour prévu pour cette consultation, soit le 3 juin 2008, Stéphan Z... avait appelé le cabinet médical pour demander à parler à ce patient, présenté comme son ami à la secrétaire qui l'accueillait au téléphone et qui lui répondait : " M. X... ? Oui, X..., oui, oui, il est arrivé, il attend dans le petit salon, A... va le prendre " ; qu'enfin, il est inopérant de soulever qu'aucun moyen de l'association de malfaiteurs n'est imputable à Claude X... ; que, précisément ce délit suppose une réunion, par plusieurs individus, de moyens, l'ensemble caractérisant les faits matériels exigés par l'article 450-1 du code pénal sans que ce texte n'exige d'individualiser la part de chacun ; qu'en l'espèce, pourtant, il n'apparaît pas discutable que Claude X... avait connaissance de la fictivité de la société Godart, a réglé un certain nombre de détails au téléphone avec Y..., qu'il a de plus rencontré à Lyon quelques jours avant l'arrivée prévue à Anvers du container de bois renfermant les 176 kilos de cocaïne ; qu'en conséquence, Claude X... doit répondre de ces faits devant la juridiction de jugement, les faits étant parfaitement " étayés ", au contraire des affirmations lapidaires du mémoire en défense ; qu'en revanche, il ne résulte pas de l'information que Claude X... ait illicitement acquis, détenu, transporté, offert ou cédé du cannabis, non-lieu doit être prononcé de ce chef ; que la requalification, par abandon de la circonstance aggravante de la bande organisée, s'agissant de l'importation de cocaïne, est justifiée au regard des circonstances évoquées et, de surcroît, n'est pas contestée par l'appelant ; qu'en ce qui concerne la cocaïne saisie par les autorités hollandaises, les faits visés sous la qualification initiale d'importation de stupéfiants en bande organisée, acquisition, transport, détention, offre ou cession de stupéfiants, s'analysent donc en un délit de tentative d'importation de stupéfiants, mais aussi de tentative d'acquisition de transport et de détention de cette cocaïne ; qu'en ce qui concerne les faits qualifiables après requalification de tentative d'offre et de cession, toujours s'agissant de la cocaïne saisie en Hollande, le délit n'apparaît pas constitué et Claude X... doit bénéficier également d'un non-lieu de ce chef ; que l'ordonnance déférée sera réformée en ce sens ; 4) Sur le maintien en détention : qu'il résulte des charges sérieuses et suffisantes rendant vraisemblable que le mis en examen ait pu participer comme auteur ou complice à la commission des infractions dont le tribunal correctionnel va être saisi ; qu'il importe de prévenir le renouvellement de l'infraction ; qu'en effet, Claude X... a été condamné entre 1982 et 2007 à onze reprises essentiellement à des peines d'emprisonnement ferme, parfois lourdes (six ans, quatre ans, trois ans, deux ans) pour des faits graves et de nature diverse, et notamment proxénétisme aggravé, recel, escroquerie, faux documents administratifs, association de malfaiteurs, cette dernière condamnation, du 2 juin 2005, le constituant de fait en état de récidive légale ; qu'il est donc durablement et profondément ancré dans la grande délinquance ; que, par ailleurs, il importe de garantir sa représentation en justice ; qu'en effet, Claude X... ne dispose pas d'un domicile fiable et fixe en France, ayant des attaches en Espagne, pays où il a été arrêté sur mandat d'arrêt européen ; qu'il apparaît, au regard de ces éléments, que les obligations d'un contrôle judiciaire, aussi strictes soient-elles, ne sauraient être suffisantes pour éviter le renouvellement des infractions et garantir la représentation en justice de Claude X... ; que la détention provisoire est l'unique moyen de répondre à ces objectifs à titre de mesure de sûreté ; qu'en conséquence, il y a lieu d'ordonner son maintien en détention jusqu'à sa comparution devant le tribunal ;
" alors que l'article 186-3 du code de procédure pénale, qui permet, lorsque l'information a fait l'objet d'une cosaisine, au mis en examen d'interjeter appel des ordonnances de règlement en l'absence de signature par les juges d'instruction cosaisis, a pour objet de permettre à la chambre de l'instruction de vérifier que l'ordonnance a été signée par le magistrat compétent chargé de l'information ; qu'ainsi, saisie de cette question, la chambre de l'instruction ne pouvait, pour juger régulière l'ordonnance de renvoi, se borner à relever que la cosignature n'est qu'une possibilité, sans vérifier que l'ordonnance litigieuse avait bien été signée par le magistrat compétent chargé de l'information " ;
Attendu que, faute d'avoir été proposé devant les juges du fond, le moyen, mélangé de fait, est nouveau et, comme tel, irrecevable ;
Et attendu que l'arrêt est régulier en la forme ;
REJETTE le pourvoi ;
Ainsi jugé et prononcé par la Cour de cassation, chambre criminelle, en son audience publique, les jour, mois et an que dessus ;
Etaient présents aux débats et au délibéré, dans la formation prévue à l'article 567-1-1 du code de procédure pénale : M. Louvel président, M. Straehli conseiller rapporteur, Mme Anzani conseiller de la chambre ;
Greffier de chambre : Mme Krawiec ;
En foi de quoi le présent arrêt a été signé par le président, le rapporteur et le greffier de chambre ;