LA COUR DE CASSATION, TROISIÈME CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :
Attendu, selon l'arrêt attaqué (Poitiers, 12 février 2009), que, le 10 mai 2005, M. X... et Mme Y... (consorts X...- Y...) ont signé avec la société Prosperimmo, assurée auprès de la société Sagena, un marché de travaux tous corps d'état pour l'extension d'une maison d'habitation ; que les consorts X...- Y... ayant invoqué des malfaçons et un retard dans la livraison, une expertise a été ordonnée ; qu'en cours d'expertise, la société Prosperimmo a été placée en liquidation judiciaire ; qu'après dépôt du rapport d'expertise, les consorts X...- Y... ont assigné la société Sagena en résiliation du marché, réception judiciaire et indemnisation de leurs préjudices ;
Sur le second moyen :
Vu l'article 455 du code de procédure civile ;
Attendu que pour débouter les consorts X...- Y... de leur demande en indemnisation de leur préjudice, l'arrêt retient que ceux-ci prétendent que la société Sagena serait tenue de les garantir sur le fondement du contrat d'assurance responsabilité civile professionnelle, que l'article 8. 1 des conditions générales du contrat d'assurance prévoit que sont garanties les conséquences pécuniaires de la responsabilité que l'assuré encourt en raison des dommages corporels, matériels, immatériels ou d'atteinte à l'environnement d'origine accidentelle causés par l'assuré ou ses préposés aux tiers dans le cadre de son activité déclarée et précisée aux conditions particulières du contrat, que l'article 8. 2 précise que sont exclus de la garantie, notamment les dommages matériels subis par les travaux, parties d'ouvrages que l'assuré exécute ou par les matériaux que l'assuré fournit et qu'il met en oeuvre ainsi que les frais et dépenses engagés pour la réparation de ces dommages et les conséquences pécuniaires de toute nature découlant d'un retard dans l'exécution des travaux et qu'ainsi, il résulte des dispositions contractuelles que la société Sagena ne garantit pas les dommages causés aux ouvrages objet du marché de travaux ni les conséquences du retard dans l'exécution des travaux ;
Qu'en statuant ainsi, sans répondre aux conclusions des consorts X...- Y... soutenant que la société Sagena devait sa garantie au titre des dommages causés par les travaux d'extension aux existants en application de l'article 8. 1 de la garantie couvrant la responsabilité civile professionnelle de l'assuré, la cour d'appel n'a pas satisfait aux exigences du texte susvisé ;
PAR CES MOTIFS et sans qu'il y ait lieu de statuer sur le premier moyen :
CASSE ET ANNULE, mais seulement en ce qu'il a débouté les consorts X...- Y... de l'ensemble de leurs demandes dirigées à l'encontre de la société Sagena, l'arrêt rendu le 12 février 2009, entre les parties, par la cour d'appel de Poitiers ; remet, en conséquence, sur ce point, la cause et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant ledit arrêt et, pour être fait droit, les renvoie devant la cour d'appel de Poitiers, autrement composée ;
Condamne la société Sagena aux dépens ;
Vu l'article 700 du code de procédure civile, condamne la société Sagena à payer à M. X... et Mme Y..., ensemble, la somme de 2 500 euros ; rejette la demande de la société Sagena ;
Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite de l'arrêt partiellement cassé ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, troisième chambre civile, et prononcé par le président en son audience publique du vingt-deux juin deux mille dix.
MOYENS ANNEXES au présent arrêt :
Moyens produits par la SCP Tiffreau et Corlay, avocat aux conseils, pour M. X... et Mme Y...
PREMIER MOYEN DE CASSATION :
M. X... et Mme Y... reprochent à la Cour d'appel de POITIERS de les AVOIR, par infirmation du jugement entrepris, déboutés de leur demande tendant à voir condamner la Société SAGENA, en sa qualité d'assureur de l'entrepreneur général de travaux SARL PROSPERIMMO, au titre de la garantie de dommages en cours de travaux ;
AUX MOTIFS QUE « en ce qui concerne la garantie relative aux dommages en cours de travaux, il convient de rappeler qu'aux termes de l'article 1 des conditions générales du contrat d'assurance liant la société PROSPERIMMO à la société SAGENA, sont garantis le paiement des dommages matériels affectant, avant réception, les ouvrages, objet du marché de travaux et qui résultent notamment d'un effondrement ; en l'espèce, il convient de relever que l'expert judiciaire a clairement indiqué dans son rapport qu'il n'existait pas de risque imminent d'effondrement total ou partiel de l'ouvrage. Il indique simplement qu'à défaut d'intervention, il n'était pas exclu alors des risques en l'état sur la solidité des ouvrages ; ainsi, il n'est pas démontré qu'un effondrement se soit produit, ni même que cet effondrement soit inévitable à bref délai. En conséquence, il y a lieu de réformer le jugement déféré en ce qu'il a retenu l'application de cette garantie à la charge de la société SAGENA. Il convient de débouter M. Olivier X... et Mme Jésabelle Y... de leurs demandes sur le fondement de cette garantie relative aux dommages en cours de travaux »,
ALORS QUE, en ne déduisant pas la conséquence légale de sa propre constatation, selon laquelle il résultait du rapport de l'expert judiciaire « qu'à défaut d'intervention, il n'était pas exclu alors des risques en l'état sur la solidité des ouvrages », ce qui caractérisait l'existence d'une menace d'effondrement, la Cour d'appel a violé les articles 1134 et 1147 du Code civil.
SECOND MOYEN DE CASSATION :
M. X... et Mme Y... reprochent à la Cour d'appel de POITIERS de les AVOIR, par infirmation du jugement entrepris, déboutés de leur demande tendant à voir condamner la Société SAGENA, en sa qualité d'assureur de l'entrepreneur général de travaux SARL PROSPERIMMO, au titre de la garantie de responsabilité civile professionnelle,
AUX MOTIFS QUE « l'article 8-1 des conditions générales du contrat d'assurance prévoit que sont garanties les conséquences pécuniaires de la responsabilité que l'assuré encourt en raison des dommages corporels, matériels, immatériels ou d'atteinte à l'environnement d'origine accidentelle causés par l'assuré ou ses préposés aux tiers dans le cadre de son activité déclarée et précisée aux conditions particulières du contrat ; l'article 8-2 précise que sont exclus de la garantie, notamment : les dommages matériels subis par les travaux, parties d'ouvrages que l'assuré exécute ou par les matériaux que l'assuré fournit et qu'il met en oeuvre ainsi que les frais et dépenses engagés pour la réparation de ces dommages ; les conséquences pécuniaires de toute nature découlant d'un retard dans l'exécution des travaux ; ainsi, il résulte des dispositions contractuelles que la société SAGENA ne garantit pas les dommages causés aux ouvrages objet du marché de travaux ni les conséquences du retard dans l'exécution des travaux ; il y a lieu de débouter Monsieur Olivier X... et Madame Jésabelle Y... de leurs demandes sur ce fondement »,
ALORS QUE, dans leurs conclusions d'appel (signifiées le 17 avril 2008, pp. 11 et suiv.), les maîtres de l'ouvrage faisaient valoir que, « conformément au rappel des garanties de la page 5 des conditions générales, il est expressément rappelé que la SAGENA doit garantie pour les dommages matériels aux parties anciennes d'un ouvrage qui existe avant l'intervention de l'assuré, sans qu'il n'y ait besoin de faire de distinction entre l'effondrement ou la menace d'effondrement (…) » ; que les maîtres de l'ouvrage s'en expliquaient ensuite longuement, en montrant que les travaux d'extension réalisés par l'entrepreneur avaient causé aux existants des dommages relevant des stipulations des articles 8. 1 et 8. 2 de la garantie couvrant la responsabilité civile professionnelle de l'entrepreneur ; que le moyen était donc pertinent, en ce qu'il tendait à voir engager ladite garantie, non pas au titre des dommages causés par les travaux d'extension aux ouvrages réalisés, effectivement non couverts par cette garantie, mais au titre des dommages causés par les travaux aux ouvrages existants ; que dès lors, en omettant de s'en expliquer, la Cour d'appel a violé les articles 455 et 458 du Code de procédure civile.