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17/06/2010 | FRANCE | N°07-13447

France | France, Cour de cassation, Chambre civile 2, 17 juin 2010, 07-13447


LA COUR DE CASSATION, DEUXIÈME CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :

Donne acte à l'URSSAF de la Seine-Maritime du désistement de son pourvoi dirigé contre le directeur régional des affaires sanitaires et sociales de Rouen ;
Sur le moyen unique, pris en sa troisième branche :
Vu l'article L. 243-6, alinéa 2, du code de la sécurité sociale ;
Attendu, selon ce texte, que lorsque l'obligation au remboursement des cotisations de sécurité sociale naît d'une décision juridictionnelle qui révèle la non-conformité de la règle de droit dont il a été fait applica

tion à une règle de droit supérieure, la demande de remboursement ne peut porter q...

LA COUR DE CASSATION, DEUXIÈME CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :

Donne acte à l'URSSAF de la Seine-Maritime du désistement de son pourvoi dirigé contre le directeur régional des affaires sanitaires et sociales de Rouen ;
Sur le moyen unique, pris en sa troisième branche :
Vu l'article L. 243-6, alinéa 2, du code de la sécurité sociale ;
Attendu, selon ce texte, que lorsque l'obligation au remboursement des cotisations de sécurité sociale naît d'une décision juridictionnelle qui révèle la non-conformité de la règle de droit dont il a été fait application à une règle de droit supérieure, la demande de remboursement ne peut porter que sur la période postérieure au 1er janvier de la troisième année précédant celle où la décision révélant la non-conformité est intervenue ;
Attendu, selon l'arrêt attaqué, que la société Metra verre a demandé, le 19 mai 2005, à l'URSSAF de la Seine-Maritime (l'URSSAF) le remboursement des cotisations afférentes aux indemnités versées aux salariés en compensation de la perte de rémunération consécutive à la réduction de la durée du travail en application d'un accord conclu, le 2 mars 1998, dans le cadre de l'article 39-1 de la loi n° 93-1313 du 20 décembre 1993 ; que l'URSSAF n'ayant fait droit à sa demande que pour la période postérieure au 1er mai 2002, la société a saisi d'un recours une juridiction de la sécurité sociale ;
Attendu que, pour fixer au 1er janvier 2001 le point de départ de la période de répétition des cotisations litigieuses et condamner l'URSSAF au remboursement des cotisations versées par la société entre cette date et le 1er mai 2002, l'arrêt, après avoir rappelé que la Cour de cassation a qualifié, dans un arrêt de la deuxième chambre civile du 20 janvier 2004, de dommages-intérêts les sommes versées à titre de compensation salariale en application d'un accord conclu dans le cadre de l'article 39-1 de la loi du 20 décembre 1993, retient qu'en se prononçant ainsi en faisant explicitement référence à la loi et en réponse au moyen de cassation soulevé, la Cour de cassation a considéré que la disposition de la loi du 20 décembre 1993 affirmant le caractère salarial des sommes en cause devait être écartée, et qu'elle n'était pas conforme à une norme supérieure constitutionnelle dès lors que toute cotisation doit être assise sur un texte législatif, de sorte qu'il existe ainsi une décision juridictionnelle qui a révélé le caractère indemnitaire des compensations salariales et qu'il convient de faire application de l'article L. 243-6, alinéas 1 et 2, du code de la sécurité sociale ;
Qu'en statuant ainsi, alors que, dans son arrêt du 20 janvier 2004, la Cour de cassation n'avait fait que procéder à l'interprétation de l'article 39-1 de la loi du 20 décembre 1993, la cour d'appel a violé le texte susvisé ;
PAR CES MOTIFS, et sans qu'il y ait lieu de statuer sur les autres branches du moyen :
CASSE ET ANNULE, dans toutes ses dispositions, l'arrêt rendu le 21 février 2007, entre les parties, par la cour d'appel de Rouen ; remet, en conséquence, la cause et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant ledit arrêt et, pour être fait droit, les renvoie devant la cour d'appel de Caen ;
Condamne la société Metra verre et M. X..., ès qualités aux dépens ;
Vu l'article 700 du code de procédure civile, rejette la demande de la société Metra verre et de M. X..., ès qualités, les condamne in solidum à payer à l'URSSAF de la Seine-Maritime la somme de 2 300 euros ;
Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite de l'arrêt cassé ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, deuxième chambre civile, et prononcé par le président en son audience publique du dix-sept juin deux mille dix.

MOYEN ANNEXE au présent arrêt :


Moyen produit par la SCP Peignot et Garreau, avocat aux Conseils pour l'URSSAF de la Seine-Maritime
Le moyen reproche à l'arrêt infirmatif attaqué d'avoir dit que le point de départ du délai de la période répétible de trois ans est fixé au 1er janvier 2001, et condamné en conséquence l'URSSAF de la SEINE-MARITIME à rembourser à la SAS METRA VERRE la somme de 158.843,37 € au titre des cotisations indûment versées du 1er janvier 2001 au 1er mai 2002 sur les indemnités compensatrices de réduction du temps de travail ;
AUX MOTIFS QUE l'article L 243-6 alinéa 2 dispose que lorsque l'obligation de remboursement des cotisations de sécurité sociale et d'allocations familiales indûment versées « naît d'une décision juridictionnelle qui révèle la non-conformité de la règle de droit dont il a été fait application à une règle de droit supérieure, la demande ne peut porter que sur la période postérieure au 1er janvier de la troisième année précédant celle où la décision révélant la non-conformité est intervenue » ; que le débat porte sur l'interprétation à donner à l'expression « décision juridictionnelle qui révèle la non-conformité de la règle de droit dont il est fait application à une règle de droit supérieure »; que toute décision de la Cour de Cassation est une décision juridictionnelle ayant un caractère définitif; qu'elle répond au critère de l'alinéa 2 de l'article susvisé ; que la Cour de Cassation a prononcé le 20 janvier 2004 un arrêt rejetant le pourvoi formé par l'U.R.S.S.A.F. en cassation d'un arrêt rendu par la Cour d'appel de Rennes qui avait considéré les sommes versées à titre de compensation salariale comme des dommages et intérêts ; qu'au soutien de son pourvoi, l'organisme social avait développé le moyen que la loi du 20 décembre 1993 avait affirmé le caractère salarial de ces sommes incitatives à la réduction du temps de travail et que celles-ci ne pouvaient donc être constitutives de dommages et intérêts ; que, pour motiver ainsi le rejet du pourvoi, la Cour de Cassation a ainsi libellé son attendu : « destinées à compenser les pertes de rémunération induites par la réduction du temps de travail, les sommes versées aux salariés en application de l'accord d'entreprise prévu par l'article 39-l aliéna 2 de la loi «93-1313 du 20 décembre 1993 ont le caractère de dommages et intérêts » ; qu'en se prononçant ainsi en faisant explicitement référence à la loi, et en réponse au moyen de cassation soulevé, la Cour de Cassation a considéré que la disposition de la loi du 20décembre 1993 affirmant le caractère salarial des sommes ainsi répétibles devait être écarté ; qu'en statuant ainsi, la Cour de Cassation a considéré implicitement que cette disposition n'était pas conforme à une norme supérieure constitutionnelle dès lors que toute cotisation doit être assise sur un texte législatif, ce qui n'est pas le cas en l'espèce ; que, contrairement à ce que soutient l'U.R.S.S.A.F., l'appréciation de la non-conformité d'une norme à une norme supérieure, nationale ou internationale, n'est pas de la compétence exclusive du juge administratif ; qu'il appartient aux juridictions suprêmes de donner une interprétation des textes en conformité avec les normes supérieures, en particulier la Constitution, et d'établir une jurisprudence, elle-même normative, qui s'impose à tous dans le respect de la hiérarchie des normes ; qu'il existe donc bien une décision juridictionnelle qui a « révélé », au sens littéral du terme, le caractère indemnitaire des compensations salariales prévues par la loi du 20 décembre 1993 admettant ainsi que celle-ci n'était pas conforme en ce qu'elle retenait le caractère salarial de ces compensations et leur assujettissement à cotisations sociales ; qu'en conséquence, il convient de faire application de l'article L 243-6 alinéa 1 et 2 du Code de la sécurité sociale ; que les indemnités accordées dans le cadre des accords dits loi de ROBIEN sont exclues de l'assiette des cotisations sociales ; qu'elles doivent faire l'objet d'un remboursement par l'U.R.S.S.A.F. pour la période du 1er janvier 2001 au 1er mai 2002 ;
ALORS, D'UNE PART, QU'en estimant que l'arrêt rendu par la Cour de cassation le 20 janvier 2004 aurait considéré, même implicitement, que la disposition de la loi du 20 décembre 1993 affirmant le caractère salarial des sommes litigieuses n'était pas conforme à une norme supérieure constitutionnelle, la Cour d'appel a dénaturé le texte clair et précis de cet arrêt, en violation de l'article 1134 du Code Civil ;
ALORS, D'AUTRE PART, QU'en statuant ainsi au motif que toute cotisation doit être assise sur un texte législatif, sans rechercher si les cotisations litigieuses n'étaient pas précisément justifiées tant par la loi du 20 décembre 1993 telle que modifiée par la loi du 11 juin 1996 affirmant le caractère salarial des sommes ayant servi de base auxdites cotisations que par l'article L 242-1 incluant de manière générale dans l'assiette des cotisations sociales dans toutes les rémunérations, la Cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard des textes susvisés ;
ALORS, ENFIN, QU'en se prononçant de la sorte, sans constater en définitive qu'une décision juridictionnelle aurait invalidé l'un des textes susvisés, ou l'aurait déclaré incompatible avec une norme juridique supérieure, notamment constitutionnelle, la Cour d'appel a privé à nouveau sa décision de base légale au regard de l'article L 243-6 alinéas 1 et 2 du Code de la sécurité sociale.


Synthèse
Formation : Chambre civile 2
Numéro d'arrêt : 07-13447
Date de la décision : 17/06/2010
Sens de l'arrêt : Cassation
Type d'affaire : Civile

Analyses

SECURITE SOCIALE - Cotisations - Paiement indu - Action en répétition - Période de répétition - Période de répétition lorsque l'obligation de remboursement est née d'une décision juridictionnelle qui a révélé la non-conformité de la règle de droit dont il a été fait application à une règle de droit supérieure - Etendue - Détermination - Portée

Selon l'article L. 243-6, alinéa 2, du code de la sécurité sociale (dans sa rédaction issue de la loi n° 2003-1199 du 18 décembre 2003 [art. 70-II]), lorsque l'obligation au remboursement des cotisations de sécurité sociale naît d'une décision juridictionnelle qui révèle la non-conformité de la règle de droit dont il a été fait application à une règle de droit supérieure, la demande de remboursement ne peut porter que sur la période postérieure au 1er janvier de la troisième année précédant celle où la décision révélant la non-conformité est intervenue. Viole ce texte la cour d'appel qui, pour fixer le point de départ de la période de répétition des cotisations afférentes aux indemnités versées aux salariés en compensation de la réduction de la durée du travail en application d'un accord de réduction du temps de travail conclu dans le cadre de l'article 39-1 de la loi n° 93-1313 du 20 décembre 1993, retient que, dans un arrêt de la 2e chambre civile du 20 janvier 2004, la Cour de cassation a reconnu aux indemnités en cause le caractère de dommages-intérêts, alors que la Cour de cassation n'avait fait que procéder, dans cet arrêt, à l'interprétation des dispositions de l'article 39-1 de la loi du 20 décembre 1993


Références :

article L. 243-6, alinéa 2, du code de la sécurité sociale (dans sa rédaction issue de la loi n° 2003-1199 du 18 décembre 2003 [art. 70-II])

Décision attaquée : Cour d'appel de Rouen, 21 février 2007


Publications
Proposition de citation : Cass. Civ. 2e, 17 jui. 2010, pourvoi n°07-13447, Bull. civ. 2010, II, n° 119
Publié au bulletin des arrêts des chambres civiles 2010, II, n° 119

Composition du Tribunal
Président : M. Loriferne
Rapporteur ?: M. Prétot
Avocat(s) : SCP Peignot et Garreau, SCP Piwnica et Molinié

Origine de la décision
Date de l'import : 14/10/2011
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CCASS:2010:07.13447
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