La jurisprudence francophone des Cours suprêmes


recherche avancée

15/06/2010 | FRANCE | N°09-85784

France | France, Cour de cassation, Chambre criminelle, 15 juin 2010, 09-85784


LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE CRIMINELLE, a rendu l'arrêt suivant :
Statuant sur le pourvoi formé par :

- X... Vincent,

contre l'arrêt de la cour d'appel d'AIX-EN-PROVENCE, 7e chambre, en date du 2 juillet 2009, qui, pour homicide involontaire, l'a condamné à six mois d'emprisonnement avec sursis, et a prononcé sur les intérêts civils ;
Vu le mémoire produit et les observations au soutien du pourvoi ;
Sur le moyen unique de cassation, pris de la violation des articles 121-3 et 221-6 du code pénal, 591 et 593 du code de procédure pénale ;
"en ce que l'arrÃ

ªt attaqué a déclaré Vincent X... coupable d'homicide involontaire et, en répression...

LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE CRIMINELLE, a rendu l'arrêt suivant :
Statuant sur le pourvoi formé par :

- X... Vincent,

contre l'arrêt de la cour d'appel d'AIX-EN-PROVENCE, 7e chambre, en date du 2 juillet 2009, qui, pour homicide involontaire, l'a condamné à six mois d'emprisonnement avec sursis, et a prononcé sur les intérêts civils ;
Vu le mémoire produit et les observations au soutien du pourvoi ;
Sur le moyen unique de cassation, pris de la violation des articles 121-3 et 221-6 du code pénal, 591 et 593 du code de procédure pénale ;
"en ce que l'arrêt attaqué a déclaré Vincent X... coupable d'homicide involontaire et, en répression, l'a condamné à une peine de six mois d'emprisonnement avec sursis dans les conditions des articles 132-29 à 132-39 du code pénal et a prononcé sur les intérêts civils ;
"aux motifs que si le prévenu Vincent X... et son assureur la compagnie Aéras dommages font valoir qu'il n'existe aucun lien de causalité entre le débridage de la motocyclette et l'accident, que c'est la victime qui, par son comportement, est à l'origine de l'accident, que c'est le père de Ludovic Y... qui a acheté la moto en toute connaissance de cause, que la violation de la norme (le débridage) qui n'est pas contestée est étrangère à la réalisation du dommage en soutenant que le débridage ne modifie en rien la puissance de la moto lors du démarrage et sur les cent premiers mètres, que le débridage ne modifie en rien la puissance de la moto dont la puissance d'origine est bien supérieure à 15 CV en s'appuyant sur les constatations dans un procès-verbal de constat du 1er décembre 2005 de Me Z... requis par le prévenu faisant état que, dans sa configuration d'origine et alors qu'elle n'est pas débridée de la manière prévue par le constructeur, la moto a une puissance bien supérieure au 15 CV comme indiqué dans l'homologation, il n'en demeure pas moins que le prévenu Vincent X... savait parfaitement que la motocyclette était destinée au jeune Ludovic Y..., mineur âgé de 16 ans et 9 mois, lors de l'achat par son père auquel il était présent, qu'il ne peut être valablement soutenu que Patrice Y..., père de Ludovic Y..., avait acheté cet engin en connaissance de cause alors qu'à aucun moment le prévenu n'avait signalé que la motocyclette avait été débridée ; que, par ailleurs, l'affirmation suivant laquelle l'accident se serait produit compte tenu du comportement de Ludovic Y... même si l'engin avait été conservé dans sa configuration d'origine et n'avait pas été débridé compte tenu de sa puissance d'origine bien supérieure à 15 CV ne repose sur aucun élément technique suffisamment significatif et sérieux et se trouve totalement contredite par l'avis de l'expert judiciaire, Jean-François A..., qui a retenu dans ses rapports que la machine 125 de marque Gasgas ne possédait plus ses caractéristiques techniques pour l'homologation 125 CC (motocyclette légère MTL), qu'en effet, par le débridage opéré, sa puissance s'était vue augmentée d'une manière conséquente et ne correspondait plus à celle délivrée pour le respect de la norme d'homologation MTL (15CV) et donc, notamment, pour la conduite autorisée de ce deux roues à l'âge de 16 ans minimum (permis A1 exigé), que la motocyclette ainsi débridée développait une puissance du double de celle autorisée soit plus de 34 CV moteur, que la machine ainsi débridée se trouvait bien configuration de puissance d'un moteur restant néanmoins et incontestablement plus violent qu'en situation d'homologation et ce même en cinématique de début d'évolution qu'en définitive et s'il est aussi constant que le bridage donne son effet lorsque la moto monte en régime cela n'enlève en rien le fait que cette libération en plage haute s'engage sur tous les rapports et touche par conséquent toutes les phases d'évolution notamment celle du démarrage en jouant sur les tours ; que Ludovic Y..., âgé de 16 ans et neuf mois, ne peut être valablement considéré comme un motocycliste déjà expérimenté et comme maîtrisant la puissance du moteur de son engin dès lors qu'il l'avait déjà piloté entre Grasse et Nice en suivant son père et en connaissant des incidents techniques avec son engin alors que l'expert judiciaire, Jean-François A..., a retenu dans son rapport que le débridage opéré sur la motocyclette ne correspondait plus à la qualification initiale du pilote qui en pareil cas d'une telle augmentation de puissance exigeait de sa part toute la maturité, la formation et l'expérience indispensables à la conduite d'un tel engin, afin notamment de pouvoir en garder la maîtrise, que par la puissance en l'état développée par cette motocyclette de plus de 34 CV moteur il fallait non seulement être détenteur d'un permis A mais avoir aussi 21 ans (ou permis A à 18 ans et accès 2 ans après), et enfin que Ludovic Y... n'avait pas l'âge requis et n'était pas autorisé à évoluer sur une telle machine ainsi débridée ; que la conjonction de ces éléments permet à la cour en considérant la causalité indirecte de retenir que par l'ensemble de ces fautes le prévenu Vincent X..., qui a gravement manqué à son obligation de mise en garde et de conseil en omettant de signaler le débridage opéré et la puissance exacte de l'engin sachant qu'il était destiné à un mineur, a créé ou contribué à créer la situation à l'origine du dommage soit en l'espèce à la mort de Ludovic Y... indépendamment des fautes de ce dernier en ne prenant pas les mesures pour l'éviter et en commettant une faute caractérisée au sens de l'article 121-3, alinéa 4, du code pénal en exposant Ludovic Y... à un risque d'une particulière gravité qu'il ne pouvait ignorer en tant que professionnel en vendant au père de Ludovic Y... pour le compte et l'usage de ce dernier, mineur âgé de moins de 17 ans, un engin débridé surpuissant ne correspondant plus du tout aux caractéristiques de l'homologation des motocyclettes légères de 125 cm3 qui exigeaient de la part de son pilote une maturité une formation spécifique et une expérience indispensable à la conduite d'un tel engin qui lui faisaient défaut ainsi que d'être titulaire d'un permis A et d'être âgé d'au moins 20 ans, étant précisé que le débridage opéré avait nécessairement des conséquences sur la vitesse au démarrage celui ayant une incidence sur toutes les phases d'évolution de l'engin, le violence inattendue de l'accélération de l'engin surpuissant ayant sans nul doute contribué à la réalisation de l'accident mortel ;
"1) alors que les personnes physiques poursuivies qui n'ont pas causé directement le dommage mais ont contribué à créer la situation qui a permis sa réalisation, ne sont pénalement responsables que s'il est établi qu'elles ont commis une faute caractérisée qui exposait autrui à un risque d'une particulière gravité qu'elles ne pouvaient ignorer ; qu'outre l'intensité de la faute, le juge doit caractériser une conscience concrète de l'existence et de la gravité du risque créé ; que, si l'obligation de compétence qui pèse sur le professionnel postule la compréhension et l'anticipation de l'ensemble des dangers inhérents à son activité, la qualité de la victime du dommage, profane ou non, doit également être prise en considération pour apprécier l'existence d'une faute caractérisée ; que dans le cas de vente d'un bien potentiellement dangereux, l'étendue de l'obligation de mise en garde et de conseil qui pèse sur le vendeur s'apprécie nécessairement en fonction de la qualité de l'acheteur, profane ou non ; qu'en l'espèce, la cour d'appel, pour retenir l'existence d'une faute caractérisée de Vincent X... exposant Ludovic Y... à un risque d'une particulière gravité qu'il ne pouvait ignorer, n'a pas pris en compte la qualité de l'acheteur Patrice Y..., qui était un connaisseur de motos et qui avait souhaité acheter une moto surpuissante à son fils en toute connaissance de cause ; qu'elle a ainsi entaché ainsi sa décision d'une violation des dispositions susvisées ;
"2) alors qu'il résulte des propres constatations de l'arrêt que la victime Ludovic Y..., qui avait mal attaché son casque, roulait après avoir volontairement procédé à une accélération et dépassé le témoin au moment de l'accident à une vitesse de 70 km/h alors que la vitesse maximale autorisée était de 30 km/h ; que ces circonstances, sans lesquelles l'accident mortel ne serait jamais survenu, sont nécessairement exclusives de la commission par le prévenu d'une faute caractérisée au sens de l'article 121-3 du code pénal ; qu'en déclarant, cependant, Vincent X... coupable de l'infraction reprochée, l'arrêt n'a pas tiré les conséquences légales de ses propres constatations et a violé les articles susvisés" ;
Attendu qu'il résulte de l'arrêt attaqué et des pièces de procédure que Ludovic Y... est décédé, a l'âgé de 16 ans, des suites de ses blessures après avoir perdu le contrôle de la motocyclette acquise le même jour par son père ; que le vendeur, Vincent X..., a été poursuivi pour avoir, en cédant une motocyclette non conforme à la réglementation en vigueur, contribué à causer le décès de la victime ; que les premiers juges l'ont relaxé et ont débouté les parties civiles de leurs demandes ;
Attendu que, pour infirmer le jugement et déclarer Vincent X... coupable, l'arrêt retient que, sachant que la motocyclette serait utilisée par un mineur, il a vendu au père de ce dernier un engin dont la puissance avait été portée à un niveau supérieur à celui du modèle homologué, imposant à son conducteur la possession depuis deux ans d'un permis A qui ne peut être obtenu qu'à l'âge de 18 ans, sans l'informer des modalités, du niveau et des conséquences exacts de cette augmentation de puissance ; que les juges ajoutent qu'il a ainsi créé ou contribué à créer la situation qui a permis la réalisation du dommage et commis une faute caractérisée exposant le mineur à un risque d'une particulière gravité qu'en sa qualité de professionnel il ne pouvait ignorer ;
Attendu qu'en l'état de ces motifs procédant de son appréciation souveraine et qui caractérisent en tous ses éléments le délit d'homicide involontaire, la cour d'appel a justifié sa décision ;
D'où il suit que le moyen doit être écarté ;
Et attendu que l'arrêt est régulier en la forme ;
REJETTE le pourvoi ;
Ainsi jugé et prononcé par la Cour de cassation, chambre criminelle, en son audience publique, les jour, mois et an que dessus ;
Etaient présents aux débats et au délibéré, dans la formation prévue à l'article 567-1-1 du code de procédure pénale : M. Louvel président, M. Palisse conseiller rapporteur, M. Blondet conseiller de la chambre ;
Greffier de chambre : Mme Randouin ;
En foi de quoi le présent arrêt a été signé par le président, le rapporteur et le greffier de chambre.


Synthèse
Formation : Chambre criminelle
Numéro d'arrêt : 09-85784
Date de la décision : 15/06/2010
Sens de l'arrêt : Rejet
Type d'affaire : Criminelle

Références :

Décision attaquée : Cour d'appel d'Aix-en-Provence, 02 juillet 2009


Publications
Proposition de citation : Cass. Crim., 15 jui. 2010, pourvoi n°09-85784


Composition du Tribunal
Président : M. Louvel (président)
Avocat(s) : SCP Baraduc et Duhamel, SCP Monod et Colin

Origine de la décision
Date de l'import : 15/09/2022
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CCASS:2010:09.85784
Association des cours judiciaires suprmes francophones
Organisation internationale de la francophonie
Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie. Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie.
Logo iall 2012 website award