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08/06/2010 | FRANCE | N°08-42825

France | France, Cour de cassation, Chambre sociale, 08 juin 2010, 08-42825


LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l'arrêt suivant :

Attendu, selon l'arrêt attaqué, que M. X... a été engagé le 20 mars 1995 en qualité de chauffeur, puis de chauffeur dépanneur, par la société Royal Auto service, devenue Royal Auto service dépannages ; qu'il a démissionné de son emploi par lettre du 1er octobre 1999, puis a précisé par lettre du 29 octobre 1999 que la rupture du contrat de travail était imputable à l'employeur dans la mesure où il n'avait pas bénéficié de la véritable qualification de responsable d'exploitation du service dépannage

qu'il exerçait en fait, les heures supplémentaires et les astreintes effectu...

LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l'arrêt suivant :

Attendu, selon l'arrêt attaqué, que M. X... a été engagé le 20 mars 1995 en qualité de chauffeur, puis de chauffeur dépanneur, par la société Royal Auto service, devenue Royal Auto service dépannages ; qu'il a démissionné de son emploi par lettre du 1er octobre 1999, puis a précisé par lettre du 29 octobre 1999 que la rupture du contrat de travail était imputable à l'employeur dans la mesure où il n'avait pas bénéficié de la véritable qualification de responsable d'exploitation du service dépannage qu'il exerçait en fait, les heures supplémentaires et les astreintes effectuées ne lui avaient pas été payées et il n'avait pas bénéficié des congés payés légaux ; qu'il a saisi la juridiction prud'homale pour faire juger que la rupture du contrat de travail produisait les effets d'un licenciement sans cause réelle et sérieuse et obtenir le paiement de diverses sommes à titre de rappel d'heures supplémentaires et d'indemnité pour travail dissimulé ;
Sur le premier moyen :
Vu les articles L. 3171-4 du code du travail et 4 du code civil ;
Attendu que selon le premier de ces articles, en cas de litige relatif à l'existence ou au nombre d'heures de travail effectuées, l'employeur doit fournir au juge les éléments de nature à justifier les horaires effectivement réalisés par le salarié ; qu'au vu de ces éléments et de ceux fournis par le salarié à l'appui de sa demande, le juge forme sa conviction après avoir ordonné, en cas de besoin, toutes les mesures d'instruction qu'il estime utiles ; qu'il en résulte que si le juge retient l'existence d'heures supplémentaires, il doit en fixer le quantum ;
Attendu que pour rejeter la demande du salarié de paiement d'heures supplémentaires, l'arrêt retient que le salarié avait bien effectué des heures supplémentaires mais que les documents produits ne permettent pas d'en déterminer le quantum ; qu'une partie d'entre elles a été très probablement payée sous forme de primes ; que l'expertise judiciaire n'ayant pas permis de déterminer l'existence d'une créance à ce titre, la demande du salarié doit être rejetée ;Qu'en statuant comme elle a fait, alors qu'ayant reconnu l'existence d'heures supplémentaires, il lui appartenait d'en fixer le quantum au vu des éléments fournis tant par les parties que par la mesure d'instruction qu'elle avait ordonnée, la cour d'appel a violé les textes susvisés ;
Sur le deuxième moyen :
Attendu que la cassation intervenue sur le premier moyen entraîne par voie de conséquence la cassation du chef de l'indemnité pour travail dissimulé ;
Et sur le troisième moyen :
Vu l'article 1134 du code civil ;
Attendu que pour rejeter la demande en paiement de dommages et intérêts en réparation du préjudice moral résultant de l'exécution déloyale du contrat de travail, l'arrêt retient que le salarié qui a accepté sa rémunération pendant plusieurs années ne saurait invoquer l'exécution déloyale du contrat de travail ;
Qu'en statuant ainsi par un motif inopérant la cour d'appel a violé le texte susvisé ;
PAR CES MOTIFS, et sans qu'il y ait lieu de statuer sur le quatrième moyen qui ne serait pas de nature à permettre l'admission du pourvoi :
CASSE ET ANNULE, mais seulement en ce qu'il a rejeté, d'une part, les demandes du salarié relatives au paiement d'un rappel de salaire à titre d'heures supplémentaires, repos compensateurs et primes d'astreinte et d'une indemnité au titre du travail dissimulé et, d'autre part, sa demande de paiement de dommages-intérêts pour exécution déloyale du contrat de travail, l'arrêt rendu le 22 novembre 2007, entre les parties, par la cour d'appel de Paris ; remet, en conséquence, sur ces points, la cause et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant ledit arrêt et, pour être fait droit, les renvoie devant la cour d'appel de Paris, autrement composée ;
Condamne la société TDR 93 aux dépens ;
Vu l'article 700 du code de procédure civile, condamne la société TDR 93 à payer à M. X... la somme de 2 500 euros ;
Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite de l'arrêt partiellement cassé ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre sociale, et prononcé par le président en son audience publique du huit juin deux mille dix.

MOYENS ANNEXES au présent arrêt :


Moyens produits par la SCP Masse-Dessen et Thouvenin, avocat aux Conseils pour M. X...

PREMIER MOYEN DE CASSATION :

Le moyen fait grief à l'arrêt attaqué d'AVOIR débouté Monsieur Stéphane X... de ses demandes en paiements d'heures supplémentaires, congés payés et repos compensateurs y afférents et de primes d'astreinte.
AUX MOTIFS QU'au cours de ses opérations, il est apparu à l'expert : - que Stéphane X... avait bien effectué des heures supplémentaires, - que les documents produits ne permettaient pas d'en déterminer le quantum, - qu'elles avaient très probablement été rémunérées entre avril 1995 et mai 1997 par les frais de route importants qui lui avaient été octroyés à cette période, ce que l'employeur ne contestait pas, - qu'elles avaient été légalement payées de novembre 1998 à juillet 1999, leur rémunération apparaissant sur les bulletins de paie au taux de 125%, - que des primes, nombreuses et d'un montant plus important que d'usage avaient pu constituer la rémunération des astreintes, - que les attestations versées n'apportaient aucun élément de renseignement ni sur le principe, ni sur le quantum des astreintes ; que Stéphane X... ne produit aucun courrier adressé à son employeur pour lui rappeler les heures supplémentaires et les astreintes effectuées et lui en réclamer le paiement ; que l'expertise judiciaire confiée à monsieur Y... n'a pas permis de déterminer l'existence d'une créance à ce titre ; que le jugement du 23 juin 2003 doit donc être confirmé ; que la créance alléguée au titre de l'indemnité compensatrice de repos compensateur n'est pas davantage justifiée, la demande formulée de ce chef à titre principal comme à titre subsidiaire ne peut qu'être rejetée.
ET AUX MOTIFS éventuellement adoptés QUE le contrat de travail établi par écrit le 1er juillet 1997 par les parties précise les horaires de travail du demandeur, à savoir de 8 heures à 12 heures et de 13 heures à 17 heures du lundi au jeudi, l'horaire de son de journée étant ramené à 16 heures le vendredi ; que les documents produits par chacune des parties ne permettent pas au Conseil de contrôler le volume d'heures de travail effectué à la demande de l'employeur par Monsieur Stéphane X... ; qu'il ressort des tableaux mensuels de service que ce dernier était de repos entre 10 et 12 journées par mois, dimanche compris et hors vacances et que selon les annotations horaires portées sur ces tableaux il lui arrivait quelquefois de commencer plus tard ou plus tôt et de terminer également plus tard ou plus tôt que l'horaire contractuel ; que le rapprochement entre les quelques factures produites aux débats et lesdits tableaux semble être cohérent quant aux horaires particuliers portés ; qu'il ressort des attestations produites par l'employeur que le demandeur faisait des affaires personnelles pendant son temps de travail et qu'il préférait travailler plus d'heures pour pouvoir récupérer, ce qui peut expliquer le nombre de jours de repos pris certains mois (selon les tableaux de service) ; qu'enfin un simple calcul permet de constater l'incohérence du nombre prétendu de 564 heures travaillées par mois ce qui reviendrait à avoir travaillé en moyenne plus de 28 heures par jour si l'on tient compte des jours de repos et plus de 18 heures par jour si l'on considère 30 jours travaillés dans le mois ; qu'au vu des éléments produits par chacune des parties et selon ce qu'énoncent les articles précités, le demandeur ne peut qu'être débouté.
ALORS QU'il résulte des énonciations de l'arrêt attaqué que Monsieur Stéphane X... « avait bien effectué des heures supplémentaires » ; qu'en le déboutant néanmoins de ses demandes, la Cour d'appel a violé l'article L.212-5 du Code du travail alors en vigueur, actuellement article L-3121-22 du Code du travail.
ALORS en outre QUE le juge saisi d'un litige relatif à l'existence ou au nombre d'heures de travail effectuées doit former sa conviction tant sur l'existence que sur le nombre de ces heures, au besoin en recourant à une ou plusieurs mesures d'instruction ; qu'en déboutant le salarié de ses demandes relatives aux heures supplémentaires effectuées aux motif pris de ce que « Stéphane X... avait bien effectué des heures supplémentaires » mais « que les documents produits ne permettaient pas d'en déterminer le quantum », en sorte que « l'expertise judiciaire confiée à monsieur Y... n'a pas permis de déterminer l'existence d'une créance à ce titre », la Cour d'appel a violé l'article L.212-1-1 du Code du travail alors en vigueur, actuellement article L. 3171-4 du Code du travail.
ET ALORS QU'en refusant de déterminer le nombre d'heures travaillées, indispensable à la détermination des droits du salarié, la Cour d'appel s'est rendue coupable du déni de justice prévu à l'article 4 du Code civil.
ALORS encore QUE la renonciation à un droit ne se présume pas ; qu'en retenant que « Stéphane X... ne produit aucun courrier adressé à son employeur pour lui rappeler les heures supplémentaires et les astreintes effectuées et lui en réclamer le paiement » pour le débouter de sa demande en paiement d'heures supplémentaires, la Cour d'appel a violé l'article 1134 du Code civil.
ET ALORS QUE l'action en paiement du salaire se prescrit par cinq ans ; qu'en retenant, pour débouter Monsieur Stéphane X... de sa demande en paiement des heures supplémentaires portant sur une période non atteinte par la prescription, qu'il « ne produit aucun courrier adressé à son employeur pour lui rappeler les heures supplémentaires et les astreintes effectuées et lui en réclamer le paiement », la Cour d'appel a violé ensemble les articles L.143-14 du Code du travail alors en vigueur, actuellement article L.3245-1 du Code du travail, et 2277 du Code civil.
ALORS enfin QU'en jugeant l'employeur fondé à s'affranchir des règles relatives au paiement des heures supplémentaires et à l'octroi des repos compensateurs par la seule allocation de primes, la Cour d'appel a violé l'article L.212-5 du Code du travail alors en vigueur, actuellement article L.3121-22 du Code du travail.
DEUXIEME MOYEN DE CASSATION :

Le moyen fait grief à l'arrêt attaqué d'AVOIR débouté Monsieur Stéphane X... de sa demande en paiement d'une indemnité pour travail dissimulé.
AUX MOTIFS QUE, sur les dommages et intérêts pour travail dissimulé et pour exécution déloyale du contrat, la dissimulation d'heures salariées sanctionnée par les articles L. 324-10 et L.324-11-1 du Code du travail n'est pas caractérisée dès lors que les heures travaillées n'ont pu être déterminées, que l'employeur les a rémunérées au moyen de primes et que son intention frauduleuse n'est pas démontrée ; que le salarié qui a accepté cette rémunération pendant plusieurs années ne saurait invoquer l'exécution déloyale du contrat de travail.
ALORS QUE constitue le délit de travail dissimulé le fait pour l'employeur de mentionner sur le bulletin de paie un nombre d'heures de travail inférieur à celui réellement effectué ; que la rémunération des heures supplémentaires au moyen de primes permettant à l'employeur de ne pas mentionner sur les bulletins de paie l'intégralité des heures de travail effectuées caractérise l'élément intentionnel de l'infraction ; que la Cour d'appel, qui a constaté que l'employeur rémunérait les heures supplémentaires au moyen de primes, n'a pas tiré les conséquences légales de ses propres constatations au regard de l'article L.324-10 du Code du travail alors en vigueur, actuellement articles L.8221-3 et L.8221-5 du Code du travail.
ET ALORS en tout cas QUE la cassation à intervenir sur le premier moyen emportera, par application des articles 624 et 625 du Code de procédure civile, cassation par voie de conséquence du chef de l'indemnité pour travail dissimulé.
TROISIEME MOYEN DE CASSATION :

Le moyen fait grief à l'arrêt attaqué d'AVOIR débouté Monsieur Stéphane X... de sa demande en paiement de dommages-intérêts en réparation du préjudice moral résultant de l'exécution déloyale du contrat de travail par la société ROYAL AUTO SERVICE.
AUX MOTIFS QUE, sur les dommages et intérêts pour travail dissimulé et pour exécution déloyale du contrat, la dissimulation d'heures salariées sanctionnée par les articles L. 324-10 et L.324-11-1 du Code du travail n'est pas caractérisée dès lors que les heures travaillées n'ont pu être déterminées, que l'employeur les a rémunérées au moyen de primes et que son intention frauduleuse n'est pas démontrée ; que le salarié qui a accepté cette rémunération pendant plusieurs années ne saurait invoquer l'exécution déloyale du contrat de travail.
ALORS QUE la renonciation à un droit ne se présume pas ; qu'en retenant que « le salarié qui a accepté cette rémunération pendant plusieurs années ne saurait invoquer l'exécution déloyale du contrat de travail » pour le débouter de sa demande en paiement de dommagesintérêts en réparation du préjudice moral résultant de l'exécution déloyale du contrat de travail par la société ROYAL AUTO SERVICE, la Cour d'appel a violé l'article 1134 du Code civil.
ALORS QUE Monsieur Stéphane X... poursuivait le paiement de dommages-intérêts en réparation du préjudice résultant non seulement du défaut de décompte et de paiement des heures supplémentaires et de la privation des repos compensateurs, mais également de la privation de la prime de suppléance due à raison de l'exécution de tâches ne relevant pas de sa catégorie ; qu'en se prononçant au seul regard des heures de travail et non au regard de cet autre chef de préjudice invoqué, la Cour d'appel a méconnu l'objet du litige en violation des articles 4 et 5 du Code de procédure civile.
QU'à tout le moins, elle a ainsi entaché sa décision d'un défaut de réponse à conclusions en violation de l'article 455 du Code de procédure civile.


Synthèse
Formation : Chambre sociale
Numéro d'arrêt : 08-42825
Date de la décision : 08/06/2010
Sens de l'arrêt : Cassation partielle
Type d'affaire : Sociale

Références :

Cour d'appel de Paris, 22 novembre 2007, 02/34643

Décision attaquée : Cour d'appel de Paris, 22 novembre 2007


Publications
Proposition de citation : Cass. Soc., 08 jui. 2010, pourvoi n°08-42825


Composition du Tribunal
Président : M. Gosselin (conseiller le plus ancien faisant fonction de président)
Avocat(s) : SCP Coutard, Mayer et Munier-Apaire, SCP Masse-Dessen et Thouvenin

Origine de la décision
Date de l'import : 15/09/2022
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CCASS:2010:08.42825
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