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02/06/2010 | FRANCE | N°08-44630

France | France, Cour de cassation, Chambre sociale, 02 juin 2010, 08-44630


LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l'arrêt suivant :
Sur le moyen unique :
Attendu, selon l'arrêt attaqué (Caen, 26 septembre 2008), que Mme X... a été engagée, en qualité d'agent de propreté, par la société Netto décor pour effectuer le remplacement de salariés absents, par sept contrats à durée déterminée du 21 mars 2003 au 7 octobre 2004, par un contrat à durée indéterminée avec avenants du 24 novembre 2004 au 10 février 2005, date de sa démission, et par sept contrats à durée déterminée du 10 février 2005 au 6 mai 2006 ; qu'estimant que ces co

ntrats s'analysaient en un contrat à durée indéterminée, la salariée a saisi la ...

LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l'arrêt suivant :
Sur le moyen unique :
Attendu, selon l'arrêt attaqué (Caen, 26 septembre 2008), que Mme X... a été engagée, en qualité d'agent de propreté, par la société Netto décor pour effectuer le remplacement de salariés absents, par sept contrats à durée déterminée du 21 mars 2003 au 7 octobre 2004, par un contrat à durée indéterminée avec avenants du 24 novembre 2004 au 10 février 2005, date de sa démission, et par sept contrats à durée déterminée du 10 février 2005 au 6 mai 2006 ; qu'estimant que ces contrats s'analysaient en un contrat à durée indéterminée, la salariée a saisi la juridiction prud'homale de diverses demandes ;
Attendu que la société Netto décor fait grief à l'arrêt de faire droit à la demande en requalification à compter du 21 mars 2003 et de la condamner à verser à Mme X... diverses sommes à ce titre, alors, selon le moyen :
1° / que le contrat de travail est conclu pour une durée déterminée dès lors qu'il précise expressément qu'il a pour objet de pourvoir au remplacement d'un salarié et qu'il mentionne le nom et la qualification du salarié remplacé ; qu'il importe peu que le salarié remplaçant ait préalablement assuré le remplacement d'autres salariés dans l'entreprise ; qu'en décidant néanmoins de requalifier le contrat de travail à durée déterminée de Mme X... en un contrat de travail à durée indéterminée, au motif qu'elle effectuait toujours le même travail avec la même qualification et la même référence de salaire pour remplacer les salariées absentes, sans rechercher si les contrats de travail à durée déterminée successivement conclus avec elle précisaient les noms et les qualifications des salariées remplacées, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard des articles L. 1242-1, L. 1242-2 et L. 1242-12 du code du travail ;
2° / que la succession de contrats de travail à durée déterminée ne peut avoir pour effet de créer entre les parties une relation de travail à durée indéterminée, dès lors que le salarié a conclu des contrats distincts, autonomes les uns par rapport aux autres pour le remplacement de salariés temporairement absents et nommément désignés ; qu'en décidant néanmoins de requalifier le contrat de Mme X... en un contrat à durée indéterminée, motif pris de ce qu'elle avait été appelée à treize reprises sur une période de deux ans sans interruption à l'exception de six semaines en 2004, à remplacer des salariées absentes, sans rechercher si les contrats de travail à durée déterminée qu'elle avait successivement conclus avec elle étaient des contrats distincts, autonomes les uns par rapport aux autres, ayant pour objet le remplacement de salariés temporairement absents et nommément désignés, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard des articles L. 1242-1, L. 1242-2 et L. 1242-12 du code du travail ;
3° / que les juges du fond ne peuvent décider que le recours aux contrats à durée déterminée a pour objet ou pour effet de pourvoir durablement un emploi lié à l'activité normale et permanente de l'entreprise sans tenir compte de la proportion de contrats à durée déterminée par rapport à l'effectif total de l'entreprise ; que dès lors, la cour d'appel ne pouvait faire droit à la demande de requalification du salarié sans rechercher si le nombre de recours aux contrats à durée déterminée était faible au regard de l'effectif de la société ; qu'en s'abstenant de procéder à une telle recherche, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard de l'article L. 1242-1 du code du travail ;
Mais attendu qu'aux termes de l'article L. 1242-1 du code du travail, le contrat de travail à durée déterminée ne peut avoir ni pour objet ni pour effet de pourvoir durablement un emploi lié à l'activité normale et permanente de l'entreprise ; qu'il en résulte que l'employeur ne peut employer des salariés sous contrat à durée déterminée pour faire face à un besoin structurel de main-d'oeuvre ;
Et attendu qu'ayant constaté que du 21 mars 2003 au 6 mai 2006, à l'exception de six semaines en 2004, et quel que soit le remplacement assuré à l'occasion des quatorze contrats à durée déterminée conclus et des avenants temporaires au contrat à durée indéterminée, la salariée avait effectué avec la même qualification et le même salaire des tâches similaires, pour des durées limitées et répétées et combler un besoin structurel de main d'oeuvre de l'employeur, la cour d'appel, qui n'avait pas à procéder aux recherches prétendument omises selon les première et troisième branches que ses constatations rendaient inopérantes, et qui en a déduit que les contrats litigieux, qui avaient pour effet de pourvoir durablement un emploi lié à l'activité normale et permanente de l'entreprise, devaient être requalifiés en contrat à durée indéterminée a légalement justifié sa décision ;
PAR CES MOTIFS :
REJETTE le pourvoi ;
Condamne la société Netto décor aux dépens ;
Vu les articles 700 du code de procédure civile et 37, alinéa 2, de la loi du 10 juillet 1991, condamne la société Netto décor à payer à la SCP Boullez, la somme de 2 500 euros, à charge pour cette dernière de renoncer à percevoir la part contributive de l'Etat versée au titre de l'aide juridictionnelle ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre sociale, et prononcé par le président en son audience publique du deux juin deux mille dix.

MOYEN ANNEXE au présent arrêt :


Moyen produit par la SCP Lyon-Caen, Fabiani et Thiriez, avocat aux Conseils pour la société Netto décor.
Le moyen fait grief à l'arrêt infirmatif attaqué d'AVOIR requalifié en contrat à durée indéterminée les contrats de travail conclus entre la société Netto Décor et Madame X... à compter du 21 mars 2003 et d'AVOIR en conséquence condamné la société Netto Décor à verser à la salariée diverses sommes à titre d'indemnité compensatrice de préavis, outre les congés payés afférents, d'indemnité de requalification et de dommages-intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse ;
AUX MOTIFS QUE I) Sur la requalification. Alors qu'en vertu de l'article L. 122-1 devenu l'article L. 1242-1 du code du travail, le recours aux contrats à durée déterminée doit toujours rester subsidiaire et que l'activité exercée ou l'emploi occupé par le salarié ainsi recruté ne peut présenter un caractère permanent, il ne résulte d'aucun des éléments versés aux débats, que Madame X..., appelée à 13 reprises sur une période de deux ans sans interruption à l'exception de six semaines en 2004, à remplacer des salariées absentes, n'ait pas en réalité comblé un besoin structurel de main d'oeuvre de la société, ce d'autant que la salariée a conservé pendant toute la durée de la relation contractuelle c'est-à-dire pendant plus de deux ans, la même qualification et la même référence de salaire. Et il ne peut être tiré aucune conséquence de ce que le 24 novembre 2004 ait été signé un contrat de travail à durée indéterminée concernant un chantier pour lequel Madame X... démissionnera spécifiquement le 10 février 2005, la conclusion dans le cadre de ce contrat à durée indéterminée de deux avenants prévoyant provisoirement et en remplacement de salariés absents, l'octroi de missions complémentaires, ainsi que la continuation dès le jour de la démission du chantier FOUQUET le 10 février, de la situation antérieure à savoir la conclusion de nouveaux contrats à durée déterminée en remplacement de salariés absents, permettant d'estimer au regard de la situation globalement considérée, qu'existait une seule et même relation de travail qui a commencé le 21 mars 2003 avec la conclusion du premier contrat à durée déterminée, Madame X... reconnaissant avoir démissionné le 2 octobre 2002 du premier contrat à durée indéterminée conclu le 14 novembre 2001. II) Sur les conséquences de la requalification. a) Sur l'indemnité de requalification. En application de l'article L. 122-3-13 devenu L. 1245-1 et suivants du code du travail lorsqu'il est fait droit à la demande de requalification du contrat à durée déterminée la juridiction saisie doit d'office condamner l'employeur à payer au salarié une indemnité qui ne peut être inférieure à un mois de salaire. À ce titre eu égard à la requalification intervenue, et alors que la société SAS NETTO DECOR n'a pas contesté le montant du salaire moyen sur lequel la salariée s'est fondée pour calculer le montant des sommes qu'elle sollicitait il sera alloué à Madame X... la somme de 908, 52 Euros. b) Sur la rupture du contrat de travail. Il n'est pas contesté que l'employeur a interrompu la relation contractuelle à l'échéance du dernier contrat, sans avoir informé sous quelque forme que ce soit Madame X... de ses intentions. Ce faisant, alors que le contrat en cause a été requalifié comme étant à durée indéterminée, l'employeur n'a évidemment pas respecté les dispositions de l'article L. 122-14-4 devenu L. 1235-12 et L. 1235 13 du code du travail. En conséquence, la rupture intervenue doit être analysée en un licenciement sans cause réelle et sérieuse et seront allouées à Madame X..., dont l'ancienneté était supérieure à deux ans dans une entreprise dont il n'est pas contesté qu'elle compte plus de onze salariés, les indemnités attachées à l'irrégularité de son licenciement dans les conditions suivantes :- sur l'indemnité de préavis : 1. 817, 04 Euros, outre les congés payés y afférent, soit 181, 70 Euros, l'employeur devant être condamné à remettre les bulletins de salaires afférents à cette période sans que le prononcé d'une astreinte apparaisse nécessaire à l'exécution de cette partie la décision,- sur les dommages et intérêts : alors que Madame X... ne justifie d'aucun préjudice particulier, compte tenu de son ancienneté dans l'entreprise et des conditions dans lesquelles est intervenue la rupture, sur la base d'un salaire mensuel moyen de 908, 52 €, il lui sera alloué la somme de 8 000 € ;
ALORS, D'UNE PART, QUE le contrat de travail est conclu pour une durée déterminée dès lors qu'il précise expressément qu'il a pour objet de pourvoir au remplacement d'un salarié et qu'il mentionne le nom et la qualification du salarié remplacé ; qu'il importe peu que le salarié remplaçant ait préalablement assuré le remplacement d'autres salariés dans l'entreprise ; qu'en décidant néanmoins de requalifier le contrat de travail à durée déterminée de Madame X... en un contrat de travail à durée indéterminée, au motif inopérant qu'elle effectuait toujours le même travail avec la même qualification et la même référence de salaire pour remplacer les salariées absentes, sans rechercher si les contrats de travail à durée déterminée qu'elle avait successivement conclus avec la société Netto Décor précisaient les noms et les qualifications des salariées remplacées, la Cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard des articles L. 122-1, L. 122-1-1 et L. 122-3-1 du Code du travail, devenus articles L. 1242-1, L. 1242-2 et L. 1242-12 de ce code ;
ALORS, D'AUTRE PART, QUE la succession de contrats de travail à durée déterminée ne peut avoir pour effet de créer entre les parties une relation de travail à durée indéterminée, dès lors que le salarié a conclu des contrats distincts, autonomes les uns par rapport aux autres pour le remplacement de salariés temporairement absents et nommément désignés ; qu'en décidant néanmoins de requalifier le contrat de Madame X... en un contrat à durée indéterminée, motif pris de ce qu'elle avait été appelée à 13 reprises sur une période de deux ans sans interruption à l'exception de six semaines en 2004, à remplacer des salariées absentes, sans rechercher si les contrats de travail à durée déterminée qu'elle avait successivement conclus avec la société Netto Décor étaient des contrats distincts, autonomes les uns par rapport aux autres, ayant pour objet le remplacement de salariés temporairement absents et nommément désignés, la Cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard des articles L. 122-1, L. 122-1-1 et L. 122-3-1 du Code du travail, devenus articles L. 1242-1, L. 1242-2 et L. 1242-12 de ce code ;
ALORS, ENFIN, QUE les juges du fond ne peuvent décider que le recours aux contrats à durée déterminée a pour objet ou pour effet de pourvoir durablement un emploi lié à l'activité normale et permanente de l'entreprise sans tenir compte de la proportion de contrats à durée déterminée par rapport à l'effectif total de l'entreprise ; que dès lors, la Cour d'appel ne pouvait faire droit à la demande de requalification du salarié de ses contrats de travail à durée déterminée en contrats à durée indéterminée sans rechercher si le nombre de recours aux contrats à durée déterminée était faible au regard de l'effectif de la société ; qu'en s'abstenant de procéder à une telle recherche, la Cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard de l'article L. 122-1 du Code du travail, devenu article L. 1242-1 de ce code.


Synthèse
Formation : Chambre sociale
Numéro d'arrêt : 08-44630
Date de la décision : 02/06/2010
Sens de l'arrêt : Rejet
Type d'affaire : Sociale

Références :

Cour d'appel de Caen, Chambre sociale, 26 septembre 2008, 07/3420

Décision attaquée : Cour d'appel de Caen, 26 septembre 2008


Publications
Proposition de citation : Cass. Soc., 02 jui. 2010, pourvoi n°08-44630


Composition du Tribunal
Président : Mme Collomp (président)
Avocat(s) : SCP Boullez, SCP Lyon-Caen, Fabiani et Thiriez

Origine de la décision
Date de l'import : 15/09/2022
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CCASS:2010:08.44630
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