LA COUR DE CASSATION, TROISIÈME CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :
Sur le moyen unique, qui est recevable :
Vu l'article 1730 du code civil, ensemble l'article 555 du même code ;
Attendu que s'il a été fait un état des lieux entre le bailleur et le preneur, celui-ci doit rendre la chose telle qu'il l'a reçue, suivant cet état, excepté ce qui a péri ou a été dégradé par vétusté ou force majeure ;
Attendu, selon l'arrêt attaqué (Fort-de-France, 17 juillet 2008) que Mme X..., devenue propriétaire de parcelles de terrain louées à diverses personnes, dont MM. Y... et Z..., les a assignés pour obtenir paiement d'un arriéré de loyers, la résiliation des baux, leur expulsion et la remise en état des parcelles louées aux frais des occupants, outre des dommages-intérêts pour le préjudice subi ;
Attendu que pour déclarer MM. Y... et Z... constructeurs de bonne foi au sens du 4ème alinéa de l'article 555 du code civil et décider de leur indemnisation en application de ces dispositions, l'arrêt retient qu'ils ont fait édifier des constructions sur les terrains loués avec l'autorisation du bailleur ;
Qu'en statuant ainsi, alors que le terme de bonne foi, employé par l'article 555 du code civil, s'entend par référence à l'article 550 de ce code et ne vise que celui qui possède comme propriétaire, en vertu d'un titre translatif de propriété dont il ignore le vice et que le bailleur était en droit de réclamer la restitution de la chose louée en son état primitif, la cour d'appel a violé les textes susvisés ;
PAR CES MOTIFS :
CASSE ET ANNULE, mais seulement en ce qu'il a dit qu'Antoine Y... et Pierre Z... étaient constructeurs de bonne foi, avant dire droit sur l'évaluation de l'indemnisation des constructions édifiées sur les terrains loués, ordonné une expertise et débouté Mme X... de sa demande de dommages-intérêts, l'arrêt rendu le 17 juillet 2008, entre les parties, par la cour d'appel de Fort-de-France ; remet, en conséquence, sur ce point, la cause et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant ledit arrêt et, pour être fait droit, les renvoie devant la cour d'appel de Fort-de-France, autrement composée ;
Condamne MM. Y... et Z... aux dépens ;
Vu l'article 700 du code de procédure civile, rejette la demande de M. Z... ;
Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite de l'arrêt partiellement cassé ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, troisième chambre civile, et prononcé par le président en son audience publique du premier juin deux mille dix.
MOYEN ANNEXE au présent arrêt :
Moyen produit par la SCP Lyon-Caen, Fabiani et Thiriez, avocat aux Conseils pour Mme X...
Il est fait grief à l'arrêt infirmatif attaqué d'avoir, au visa de l'article 555, alinéa 4, du Code civil, dit qu'Antoine et Pierre Z... étaient constructeurs de bonne foi, débouté Madame X... de sa demande d'indemnité et, avant dire droit sur l'évaluation de l'indemnisation des constructions édifiées sur les terrains loués, d'avoir ordonné une expertise.
AUX MOTIFS Qu'il ressort des pièces versées aux débats et contradictoirement débattues que Rosemarie A... et Antoine Y... ont loué chacun pour leur part aux héritiers B...-C...une parcelle de terrain avec « autorisation de construire sur le terrain pour le loyer commençant le … 1964 » ; qu'Antoine Y... justifie d'ailleurs avoir réglé les taxes foncières au titre des propriétés bâties de 1980 à 1992 ; que ces éléments suffisent à établir la bonne foi des quatre occupants lorsqu'ils ont édifié des constructions sur les terrains loués ; que cette bonne foi n'est d'ailleurs pas sérieusement contestée par l'intimée, qui se borne à alléguer que les appelants ont multiplié les procédures ; qu'aux termes de l'article 555, alinéa 4, du Code civil, Aimée B..., épouse X..., en sa qualité de propriétaire, aura le choix de rembourser à Antoine Y... et Pierre Z... « soit une somme égale à celle dont le fonds a augmenté de valeur, soit le coût des matériaux et le prix de la main-d'oeuvre estimés à la date du remboursement, compte tenu de l'état dans lequel se trouvent lesdites constructions, plantations et ouvrages » ; (…) qu'il y a lieu en conséquence de faire droit à la demande d'expertise des deux appelants qui devront en avancer les frais ;
ALORS QUE le terme de « bonne foi » employé par l'alinéa 4 de l'article 555 du Code civil s'entend par référence à l'article 550 du même Code et ne vise que celui qui possède comme propriétaire en vertu d'un titre translatif de propriété dont il ignore les vices ; que la Cour d'appel qui, pour juger que Messieurs Antoine Y... et Pierre Z... étaient de bonne foi au sens de l'article 555, alinéa 4, du Code civil, a relevé qu'ils avaient édifié des constructions sur les terrains loués avec l'autorisation du bailleur, a violé ensemble les articles 1730 et 555, alinéa 4, du Code civil.