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27/05/2010 | FRANCE | N°09-12524

France | France, Cour de cassation, Chambre civile 1, 27 mai 2010, 09-12524


LA COUR DE CASSATION, PREMIÈRE CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :

Donne acte à M. et Mme X... et à l'Association vigilance environnement clermontais et sa région de leur désistement à l'égard de l'Etat français, préfet de la région Languedoc-Roussillon ;
Attendu que des parcelles classées en zone NAF (à vocation artisanale), acquises par M. et Mme X... en 1976 et 1977, ont été classées en zone NC (non constructibles) par modification du plan d'occupation des sols de la commune de Clermont l'Hérault intervenue en 1982, et confirmée par les plans approuvés l

e 11 janvier 1990 et le 10 mai 1995, ce dernier prévoyant une exception en ...

LA COUR DE CASSATION, PREMIÈRE CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :

Donne acte à M. et Mme X... et à l'Association vigilance environnement clermontais et sa région de leur désistement à l'égard de l'Etat français, préfet de la région Languedoc-Roussillon ;
Attendu que des parcelles classées en zone NAF (à vocation artisanale), acquises par M. et Mme X... en 1976 et 1977, ont été classées en zone NC (non constructibles) par modification du plan d'occupation des sols de la commune de Clermont l'Hérault intervenue en 1982, et confirmée par les plans approuvés le 11 janvier 1990 et le 10 mai 1995, ce dernier prévoyant une exception en faveur des bâtiments et équipements d'utilité publique ; qu'elles ont été déclarées cessibles au profit de l'Etat par arrêté du 21 janvier 1997 ; que par jugement du 11 avril 1997, confirmé par un arrêt de la cour d'appel de Nîmes rendu le 17 avril 2000 sur renvoi après cassation, l'indemnité d'expropriation a été fixée à la somme de 75 416,53 euros ; que par arrêt du 3 avril 2006, le conseil d'Etat a annulé le permis de construire par lequel le préfet de l'Hérault avait autorisé la direction départementale de l'équipement à construire sur ces parcelles des bâtiments constituant le centre autoroutier de Clermont l'Hérault ; que M et Mme X... ayant saisi le tribunal de grande instance de Montpellier sur le fondement d'une voie de fait commise par l'administration, de demandes tendant à la démolition du centre autoroutier et à la réparation du préjudice résultant de la différence entre l'indemnité qui leur avait été allouée et celle qu'ils auraient dû percevoir, l'agent judiciaire du Trésor et la commune ont soulevé l'incompétence des juridictions de l'ordre judiciaire ;
Sur le premier moyen, pris en ses trois branches, ci-après annexé :
Attendu que M. et Mme X... font grief à l'arrêt confirmatif attaqué (Montpellier, 16 décembre 2008), d'avoir fait droit à l'exception d'incompétence ;
Attendu qu'ayant justement retenu que la décision de classement en zone non constructible des parcelles litigieuses, même résultant d'une erreur manifeste d'appréciation, avait été prise dans l'exercice des pouvoirs, du conseil municipal, d'élaboration du plan d'occupation des sols, de telle sorte que la commune n'avait pas pris de décision portant une atteinte grave au droit de propriété qui serait manifestement insusceptible de se rattacher à un pouvoir appartenant à l'autorité administrative, la cour d'appel en a exactement déduit que les conditions de la voie de fait n'étaient pas réunies et que les juridictions de l'ordre judiciaires n'étaient pas compétentes ; que le moyen n'est pas fondé ;
Sur le second moyen, ci-après annexé :
Attendu que ces griefs ne sont pas de nature à permettre l'admission du pourvoi ;
PAR CES MOTIFS :
REJETTE le pourvoi ;
Condamne M. et Mme X... et l'Association vigilance environnement clermontais et sa région aux dépens ;
Vu l'article 700 du code de procédure civile, rejette les demandes ;

Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, première chambre civile, et prononcé par le président en son audience publique du vingt-sept mai deux mille dix.

MOYENS ANNEXES au présent arrêt :

.
Moyens produits par la SCP Boré et Salve de Bruneton, avocat aux Conseils, pour M. et Mme X... et l'Association vigilance environnement clermontais et sa région.
PREMIER MOYEN DE CASSATION :

Il est fait grief à l'arrêt confirmatif attaqué d'AVOIR dit qu'aucune voie de fait pouvant donner compétence aux juridictions de l'ordre judiciaire ne peut être reprochée à la Commune de CLERMONT L'HERAULT ou à l'Etat français et d'AVOIR dit que les demandes d'indemnisation et de cessation des troubles présentées par les époux X... et l'Association VIGILANCE ENVIRONNEMENT CLERMONTAIS ET SA REGION relèvent de la compétence des juridictions administratives ;
AUX MOTIFS PROPRES QUE les époux X... et l'Association VIGILANCE ENVIRONNEMENT CLERMONTAIS ET SA REGION font valoir, au soutien de leur action, que la Commune de CLERMONT L'HERAULT et l'Etat français ont, par leur collusion frauduleuse, commis une voie de fait à son détriment ; que pour qu'un agissement administratif puisse être regardé comme constituant une voie de fait, trois éléments doivent coexister : une activité matérielle d'exécution, une atteinte portée au droit de propriété ou à une liberté fondamentale et, enfin, une irrégularité grossière affectant l'action de l'Administration ; qu'il est constant, en l'espèce, que les parcelles de terrain concernées ont été acquises par les époux X... en 1976 et 1977, alors qu'elles étaient classées, au plan d'occupation des sols en vigueur, en zone NAF, à vocation artisanale ; que le plan d'occupation des sols, approuvé le 27 octobre 1982, les a classées en zone NC ; que le plan, approuvé le 11 janvier 1990, a maintenu ce terrain en zone inconstructible NC et l'a inscrit en emplacement réservé A1 au profit de l'Etat en vue du réaménagement de la RN 9 en autoroute ; que le plan, approuvé le 10 mai 1995, a maintenu les parcelles en emplacement A1 réservé au profit de l'Etat et a modifié la zone NC concernant les terres des époux X... en créant un secteur NC 1 où toute construction nouvelle est interdite, à l'exception des bâtiments et équipements d'utilité publique ; qu'il est établi, par ailleurs, que les époux X... ont fait l'objet d'une procédure d'expropriation dont la chronologie peut ainsi être résumée ; que par arrêté du 20 septembre 1994, le Préfet de l'Hérault a ouvert une enquête parcellaire sur le projet d'ouvrage du centre autoroutier A 75 sur le territoire de la Commune de CLERMONT L'HERAULT ; que par arrêté du 21 janvier 1997, le Préfet de l'Hérault a déclaré cessible au profit de l'Etat les parcelles cadastrées section AP n° 39, 40, 275, 276 et 279, appartenant aux époux X... ; que le Juge de l'expropriation a prononcé l'ordonnance d'expropriation des parcelles CINESI le 25 mars 1997 et a fixé, par jugement du 11 avril 1997 confirmé par l'arrêt de renvoi de la Cour d'appel de NIMES, le montant de l'indemnité globale de dépossession à la somme de 494.700 francs ; qu'il est acquis, enfin, que le Préfet de l'Hérault a, selon un permis délivré le 16 juin 1997, autorisé la D.D.E. de l'Hérault à construire sur diverses parcelles dont celle ayant appartenu aux époux X..., cinq des bâtiments constituant le centre autoroutier de CLERMONT L'HERAULT ; que le Conseil d'Etat, considérant que le classement des parcelles CINESI en zone NC du P.O.S., définie comme une zone de richesses économiques dans laquelle les terrains doivent être réservés à l'activité agricole, à l'élevage et à l'exploitation des ressources du sous-sol ou de la forêt, procédait, dès lors que les parcelles litigieuses supportaient déjà des bâtiments à vocation artisanale, qu'elles étaient équipées de tous les réseaux publics et qu'elles étaient contiguës à d'autres parcelles classées en zone NA supportant de nombreux et importants bâtiments à vocation d'activité artisanale, industrielle ou commerciale, d'une dénaturation des pièces du dossier, a en conséquence, par arrêt du 3 avril 2006, annulé l'arrêté du 16 juin 1997 ; que les époux X... et l'Association VIGILANCE ENVIRONNEMENT CLERMONTAIS ET SA REGION ne peuvent soutenir que cette succession d'actes de la part de l'Etat et de la Commune, qui seraient coupables d'une collusion frauduleuse, est constitutive d'une voie de fait au sens qui en a été précédemment donné ; qu'aucune atteinte au droit de propriété, et encore moins à une liberté fondamentale, n'est caractérisée ; qu'au moment où le permis de construire a été délivré et où la construction a été réalisée, l'expropriation des époux X... était, en effet, définitivement intervenue ; que la seule irrégularité reconnue par le Juge administratif est l'erreur manifeste d'appréciation commise par l'Administration dans le classement des terrains CINESI en zone NC du P.O.S. ; que ce classement qui ne peut être considéré comme manifestement insusceptible de se rattacher à un pouvoir de l'Administration, n'est, à l'évidence, pas grossièrement irrégulier ; que les conditions cumulatives de la voie de fait n'étant pas réunies en l'espèce, c'est à juste titre que le premier Juge, dont la décision sera confirmée de ce chef, a dit que le Tribunal de grande instance n'était pas compétent pour connaître des demandes et a renvoyé les époux X... et l'Association à mieux se pourvoir ; qu'il n'est, au demeurant, pas sans intérêt d'observer que les époux X... et l'Association, tout en saisissant le Tribunal de grande instance de MONTPELLIER suivant actes des 17 et 21 novembre 2003, ont saisi le Tribunal administratif de cette ville, suivant requête du 29 décembre 2003, d'une action en démolition et en réparation et que cette juridiction a, par un jugement du 2 juillet 2007 dont appel, condamné la Commune de CLERMONT L'HERAULT à payer aux époux X... la somme de francs, correspondant à la différence entre la valeur du terrain agricole non constructible sur la base de laquelle ils ont été indemnisés et la valeur du terrain constructible qu'ils auraient pu obtenir si leur terrain n'avait pas été classé en zone agricole ;
ET AUX MOTIFS ADOPTES QU'il convient de rappeler que, suivant ordonnance rendue le 25 mars 1997 par le Juge de l'expropriation, les époux X... ont été expropriés de leurs parcelles A 39, 40, 275, 276 et 279 à CLERMONT L'HERAULT ; qu'une nouvelle ordonnance rendue le 26 septembre 1997 par le même juge de l'expropriation a été nécessaire pour obtenir leur expulsion ; que l'expropriation est définitive et sans recours, quelle que soit la légalité ou l'illégalité de l'utilisation ensuite faite des parcelles expropriées ; que ce n'est évidemment pas une telle expropriation résultant d'une décision judiciaire qui peut être qualifiée de voie de fait ; que la voie de fait doit s'entendre comme un fait commis par une autorité publique sans se fonder sur aucun acte lui donnant une apparence de légalité et aboutissant à une violation manifeste du droit de propriété ou d'un autre droit fondamental individuel ; qu'un permis de construire constitue, même s'il est ensuite définitivement annulé, un acte juridique donnant au moins une apparence de légalité aux faits accomplis sur son fondement par l'Administration ; qu'en l'espèce il convient de souligner que le permis de construire a été validé par arrêt de la Cour administrative d'appel de MARSEILLE en date du 1er avril 2004 ; que surabondamment les émissions sonores ou polluantes émanant d'un centre autoroutier ne sont pas d'une gravité suffisante pour constituer une violation d'un droit fondamental individuel ; qu'en outre, la modification d'un règlement d'urbanisme et la vente d'un terrain par une commune constituent des actes juridiques et non des faits manifestement illégaux ; qu'il est donc constant et sans qu'il ne soit ni nécessaire ni utile d'avoir recours à de plus longs développements que la construction d'un centre autoroutier sur le fondement d'un acte de permis de construire valable à ce jour ne peut constituer une voie de fait ; qu'en l'absence de voie de fait, le juge judiciaire n'a pas compétence pour statuer sur les demandes d'indemnisation présentées contre des personnes publiques en réparation des suites dommageables de la construction de ce centre ; que toutes les demandes formulées tant par les époux X... que par l'Association VIGILANCE ENVIRONNEMENT CLERMONTAIS ET SA REGION sont de la compétence des juridictions administratives ;
1°) ALORS QUE la voie de fait peut résulter d'actes administratifs qui n'ont pas été reconnus irréguliers par le juge administratif ; qu'en affirmant que la Commune de CLERMONT L'HERAULT et l'Etat n'auraient pu commettre aucune voie de fait, en ce que l'expropriation des époux X... était définitivement intervenue au moment où le permis de construire a été délivré et la construction du centre autoroutier réalisée et que la seule irrégularité reconnue par le juge administratif était l'erreur manifeste d'appréciation commise par l'administration dans le classement des terrains des époux X... en zone N.C du P.O.S, la Cour d'appel a violé l'article 545 du Code civil et la loi des 16-24 août 1790 ;
2°) ALORS QUE sont constitutifs d'une voie de fait comme étant manifestement insusceptibles de se rattacher à un pouvoir de l'administration, des actes administratifs réalisés dans un but qui en dénature l'objet même ; qu'en considérant que la Commune de CLERMONT L'HERAULT n'aurait pas commis, de concert avec l'Etat, une voie de fait en classant les terrains des époux X... en zone N.C du P.O.S et en déplaçant l'assiette du projet de construction du centre autoroutier sur ces terrains, alors qu'il devait initialement être réalisé sur des parcelles appartenant à la Commune, ce qui avait permis à celle-ci d'exproprier les époux X... à bas prix et de revendre à un prix élevé à une société tierce les terrains constituant l'assiette initiale du projet, sans que l'Etat exerce son droit de préemption sur ces terrains afin d'y réaliser la construction, bien que l'ensemble de ces actes n'avaient été pris que pour permettre à la Commune de réaliser une opération financière avantageuse dans son seul intérêt et, partant, dans un but qui en dénaturait l'objet même, la Cour d'appel a violé l'article 545 du Code civil et la loi des 16-24 août 1790 ;
3°) ALORS QUE sont constitutifs d'une atteinte au droit de propriété constitutive d'une voie de fait, des actes administratifs qui aboutissent à priver des particuliers de la propriété de leurs terrains et d'une juste indemnisation des préjudices qui en résultent pour eux ; qu'en affirmant qu'aucune atteinte au droit de propriété n'aurait été caractérisée en l'espèce, quand les actes pris par la Commune de CLERMONT L'HERAULT, de concert avec l'Etat, avaient abouti à priver les époux X... de la propriété de leurs terrains, sans que l'intégralité des préjudices résultant de cette atteinte à leur droit de propriété n'ait été indemnisée, la Cour d'appel a violé l'article 545 du Code civil et la loi des 16-24 août 1790.
SECOND MOYEN DE CASSATION :

Il est fait grief à l'arrêt confirmatif attaqué d'AVOIR rejeté le moyen tiré par les époux X... et l'Association VIGILANCE ENVIRONNEMENT CLERMONTAIS ET SA REGION de l'article 1er du Protocole additionnel n° 1 à la Convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales du 4 novembre 1950 et d'AVOIR, en conséquence, rejeté leurs demandes ;
AUX MOTIFS QUE les époux X... ayant été privés de leur propriété pour cause d'utilité publique, le moyen tiré de l'article 1er du Protocole additionnel à la Convention de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales du 4 novembre 1950 est, à l'évidence, sans application en l'espèce ;
1°) ALORS QUE l'administration qui prive des particuliers de leur droit de propriété uniquement dans son propre intérêt financier, ne le fait pas pour cause d'utilité publique ; qu'en affirmant que les époux X... ont été privés de leur propriété pour cause d'utilité publique, quand la Commune de CLERMONT L'HERAULT, en classant leurs terrains en zone N.C du P.O.S et en déplaçant l'assiette du projet de construction du centre autoroutier sur ces terrains, alors qu'il devait initialement être réalisé sur des parcelles appartenant à la Commune, ce qui avait permis à celle-ci d'exproprier les époux X... à bas prix et de revendre à un prix élevé à une société tierce les terrains constituant l'assiette initiale du projet, avait réalisé une opération financière avantageuse dans son seul intérêt, la Cour d'appel a violé l'article 1er du Protocole additionnel n° 1 à la Convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
2°)ALORS en toute hypothèse QU'il est attenté au droit de propriété des particuliers lorsqu'ils ne reçoivent pas une juste indemnisation en contrepartie d'une telle atteinte ; qu'en considérant que l'article 1er du premier Protocole additionnel à la Convention européenne des droits de l'homme protégeant le droit de propriété ne serait pas applicable en l'espèce, au seul motif que les époux X... auraient été privés de leur propriété pour cause d'utilité publique, quand ceux-ci faisaient valoir qu'ils n'avaient pas reçu une juste indemnisation des préjudices nés de leur privation de propriété, la Cour d'appel a violé l'article 1er du Protocole additionnel n° 1 à la Convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales.


Synthèse
Formation : Chambre civile 1
Numéro d'arrêt : 09-12524
Date de la décision : 27/05/2010
Sens de l'arrêt : Rejet
Type d'affaire : Civile

Références :

Décision attaquée : Cour d'appel de Montpellier, 16 décembre 2008


Publications
Proposition de citation : Cass. Civ. 1re, 27 mai. 2010, pourvoi n°09-12524


Composition du Tribunal
Président : M. Charruault (président)
Avocat(s) : SCP Ancel et Couturier-Heller, SCP Boré et Salve de Bruneton, SCP Nicolaý, de Lanouvelle et Hannotin

Origine de la décision
Date de l'import : 15/09/2022
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CCASS:2010:09.12524
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