LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l'arrêt suivant :
Sur le moyen unique :
Vu l'article L. 1332-3 du code du travail ;
Attendu, selon l'arrêt attaqué, que Mme X..., qui avait été engagée le 1er octobre 1998 par l'Association belmontaise de service et d'accompagnement pour personnes handicapées en qualité d'aide médico-psychologique, a été mise à pied à titre conservatoire le mardi 30 mai 2006, convoquée à un entretien préalable à un licenciement le 2 juin et licenciée le 15 juin 2006 pour faute grave pour avoir jeté les médicaments de quatre patients qu'elle avait à distribuer ; qu'elle a saisi la juridiction prud'homale d'une demande de paiement de diverses indemnités au titre de la rupture, outre le salaire de la mise à pied ;
Attendu que pour condamner l'employeur au paiement de diverses sommes en jugeant le licenciement sans cause réelle et sérieuse, l'arrêt infirmatif considère que la mise à pied ne vise aucunement l'intention de l'employeur d'engager une procédure de licenciement ou même de prendre une sanction disciplinaire et que le délai ayant été de trois jours ouvrables entre l'engagement de la procédure de licenciement et la mise à pied, celle-ci ne peut être qualifiée de conservatoire et a épuisé le pouvoir disciplinaire de l'employeur ;
Qu'en statuant ainsi, alors qu'il résultait de ses constatations que la mise à pied, qualifiée de conservatoire par l'employeur, avait été prise dans l'attente qu'il soit statué sur la suite à donner aux fautes constatées, la perte de salaire correspondante étant indiquée dépendre de la sanction finalement retenue, et qu'elle avait été rapidement suivie de l'engagement de la procédure disciplinaire par la convocation de la salariée à un entretien préalable, la cour d'appel a violé le texte susvisé ;
PAR CES MOTIFS :
CASSE ET ANNULE, dans toutes ses dispositions, l'arrêt rendu le 8 octobre 2008, entre les parties, par la cour d'appel de Montpellier ; remet, en conséquence, la cause et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant ledit arrêt et, pour être fait droit, les renvoie devant la cour d'appel de Nîmes ;
Condamne Mme X... aux dépens ;
Vu l'article 700 du code de procédure civile, rejette la demande de l'association ABSEAH ;
Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite de l'arrêt cassé ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre sociale, et prononcé par le président en son audience publique du vingt-six mai deux mille dix.
MOYEN ANNEXE au présent arrêt :
Moyen produit par la SCP Waquet, Farge et Hazan, avocat aux Conseils, pour l'association Belmontaise de service et d'accompagnement pour personnes handicapées
IL EST FAIT GRIEF à l'arrêt attaqué d'avoir condamné l'ABSEAH à payer à Madame X... diverses sommes à titre de salaire sur mise à pied, indemnité de préavis, indemnité de licenciement, et dommages intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse, ainsi qu'une indemnité au titre de l'article 700 du Code de procédure civile ;
AUX MOTIFS QUE la mise à pied conservatoire qu'autorise l'article L.1332-3 du Code du travail ne peut être prononcée que lorsque l'employeur envisage de licencier le salarié pour faute grave et doit intervenir en concomitance avec l'enclenchement de la procédure de licenciement ; que le mardi 30 mai 2006 à 12h05, l'ABSEAH remettait en mains propres à Madame X... la lettre suivante : « nous venons d'être informés de faits suffisamment graves pour prononcer à votre encontre une mise à pied conservatoire. Vous êtes dispensée, à compter de ce jour à 12 heures, d'exécuter votre travail en attendant qu'il soit statué sur la suite à donner aux fautes constatées. Pour cette période non travaillée, la perte de salaire dépendra de la sanction finalement retenue » ; que la mise à pied du 30 mai 2006 ne vise aucunement l'intention de l'employeur d'engager une procédure de licenciement ou même de prendre une sanction disciplinaire puisqu'elle se limite à suspendre l'exécution du travail dans l'attente de la suite à donner aux fautes constatées ; que la procédure de licenciement a été enclenchée trois jours plus tard, le 2 juin 2006 par la convocation à l'entretien préalable ; que ce délai de trois jours correspond à trois jours ouvrables consécutifs durant lesquels aucune interruption de l'activité de l'entreprise, y compris dans ses services administratifs, n'a été alléguée ; que dès lors la procédure de licenciement n'a pas été engagée concomitamment avec la mise à pied ; que celle-ci ne peut être qualifiée de conservatoire et a épuisé le pouvoir disciplinaire de l'employeur qui ne pouvait plus après son prononcé sanctionner les mêmes faits par un licenciement ; qu'en conséquence, le licenciement de Madame X... prononcé le 15 juin 2006 s'avère sans cause réelle et sérieuse ;
ALORS, D'UNE PART, QUE constitue une mise à pied conservatoire la mise à pied prononcée pour une durée indéterminée et suivie dans un bref délai de l'engagement d'une procédure de licenciement ; qu'en écartant la qualification de mise à pied conservatoire, tout en constatant que la mise à pied, qui précisait expressément son caractère conservatoire, avait été prononcée pour un temps indéterminé et suivie trois jours plus tard de l'engagement d'une procédure de licenciement pour faute grave par l'envoi d'une lettre de convocation à un entretien préalable rappelant son caractère conservatoire, la Cour d'appel n'a pas tiré les conséquences légales de ses propres constatations en violation de l'article L.122-44 ancien devenu L.1332-3 du Code du travail ;
ALORS, D'AUTRE PART, QUE la mise à pied énonçant qu'elle est prise «en attendant qu'il soit statué sur la suite à donner aux fautes constatées » et que la « la perte de salaire dépendra de la sanction finalement retenue », vise clairement l'éventualité d'une sanction disciplinaire pour les mêmes faits; qu'en retenant le contraire, la Cour d'appel a violé l'article 1134 du Code civil ;
ALORS, ENFIN, QUE la convocation du salarié à l'entretien préalable de licenciement doit être concomitante à la notification de la mise à pied conservatoire ou intervenir dans un bref délai après cette mise à pied ; qu'en l'espèce, l'arrêt constate que la procédure de licenciement a été engagée dans un bref délai de trois jours après la mise à pied, ce dont il résulte qu'elle présentait un caractère conservatoire ; qu'en décidant le contraire, au motif inopérant que les deux mesures n'étaient pas concomitantes, la Cour d'appel a violé l'article L.122-44 ancien devenu L.1332-3 du Code du travail.