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11/05/2010 | FRANCE | N°09-82521

France | France, Cour de cassation, Chambre criminelle, 11 mai 2010, 09-82521


LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE CRIMINELLE, a rendu l'arrêt suivant :
Statuant sur le pourvoi formé par :

- X... Valérie, partie civile,

contre l'arrêt de la chambre de l'instruction de la cour d'appel de SAINT-DENIS DE LA RÉUNION, en date du 3 mars 2009, qui, dans l'information suivie contre Thierry Y..., Rodolphe Z... et Dominique A..., du chef d'injure publique envers particulier, a prononcé sur une demande d'annulation de pièces de la procédure et constaté la prescription de l'action publique ;
Vu l'article 58 de la loi du 29 juillet 1881 ;
Vu les mémoire

s en demande, en défense et les observations complémentaires produits ;
Sur l...

LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE CRIMINELLE, a rendu l'arrêt suivant :
Statuant sur le pourvoi formé par :

- X... Valérie, partie civile,

contre l'arrêt de la chambre de l'instruction de la cour d'appel de SAINT-DENIS DE LA RÉUNION, en date du 3 mars 2009, qui, dans l'information suivie contre Thierry Y..., Rodolphe Z... et Dominique A..., du chef d'injure publique envers particulier, a prononcé sur une demande d'annulation de pièces de la procédure et constaté la prescription de l'action publique ;
Vu l'article 58 de la loi du 29 juillet 1881 ;
Vu les mémoires en demande, en défense et les observations complémentaires produits ;
Sur le moyen unique de cassation, pris de la violation des articles 151, 170, 173 et 593 du code de procédure pénale, ensemble violation des articles 50 et 65 de la loi du 29 juillet 1881, violation de l'article préliminaire du code de procédure pénale et de l'article 6 § 1 de la Convention européenne des droits de l'homme ;
" en ce que la chambre de l'instruction a jugé que la plainte avec constitution de partie civile du 11 février 2008 et le réquisitoire introductif du 25 février 2008 ne sont pas conformes à l'exigence d'articulation posée par l'article 50 de la loi du 29 juillet 1881 et d'avoir constaté que s'était écoulée une période de plus de trois mois sans que le cours de la prescription n'ait été efficacement interrompu par un acte régulier d'instruction, si bien que l'action publique du chef d'injures envers un particulier se trouve éteinte par l'acquisition de la prescription de trois mois édictée par l'article 65 de la loi du 29 juillet 1981 ;
" aux motifs que la plainte déposée par Valérie X... vise des propos tenus par Thierry Y... à son endroit : « Quelle pute » lors de l'émission « Salut les terriens » qui aurait été diffusée les 12 et 15 janvier 2008 en métropole et le 21 janvier 2008 à la Réunion ; qu'en matière de diffamation et d'injure, la plainte avec constitution de partie civile doit articuler les faits, les qualifier précisément et viser les articles de la loi correspondant à cette qualification ; qu'au mépris des dispositions de l'article 50 de la loi de 1881 qui impose ses exigences, il apparaît que dans la plainte de Valérie X... datée du 8 février 2008 et reçue au greffe le 11 février 2008, les émissions poursuivies ne sont pas clairement identifiées puisqu'il est fait état non seulement de la diffusion des émissions des 12 janvier 2008 en métropole sur Canal + et 21 janvier 2008 sur Canal satellite à la Réunion mais aussi d'une diffusion de l'émission litigieuse le 15 janvier 2008 en métropole qui, selon les mis en examen, n'aurait pas existé ; qu'en tout cas son existence n'est nullement rapportée par les investigations effectuées ou les pièces produites et que, du reste, la plaignante ne conteste pas les affirmations des mis en examen sur ce point ; qu'aux termes de la plainte, la responsabilité pénale de Rodolphe Z..., directeur de publication de Canal + et celle de Dominique A..., président de Canal + Réunion est mise en cause à titre d'auteurs principaux pour le délit d'injures publiques envers un particulier « pour les émissions diffusées les 12, 15 et 21 janvier 2008 », que celle de Thierry Y... n'étant retenue qu'à titre de complice ; qu'il existe dans la plainte une imprécision quant aux faits imputés à Rodolphe Z..., directeur de publication de Canal + et ceux reprochés à Dominique A..., président de Canal satellite Réunion ; que, pour Dominique A..., président de Canal satellite Réunion, la plainte de Valérie X... est imprécise quant aux faits qui lui sont reprochés, qu'elle dénonce « les émissions diffusées les 12, 15 et 21 janvier 2008 à l'encontre de Thierry Y..., en qualité de complice, à l'encontre du directeur de la publication de la société Canal +, en qualité d'auteur principal, à l'encontre du président de Canal satellite Réunion, en qualité d'auteur principal », ce qui suggère que ce dernier se voit imputer les diffusions des 12 et 15 janvier 2008 en métropole et pas seulement celle du 21 janvier 2008 à la Réunion ; qu'à cet égard, il existe une incertitude sur le point de savoir s'il doit répondre des faits prétendument commis les 12 et 15 janvier 2008 ; que, s'agissant de Rodolphe Z..., président de Canal +, la plainte mentionne qu'il doit être considéré comme « également responsable pour avoir laissé diffuser l'émission du 21 janvier (à la Réunion) » fait par ailleurs reproché à Dominique A..., président de Canal satellite Réunion, et ce, alors que la diffusion d'un programme donné sur un territoire déterminé ne peut relever que de la responsabilité d'un seul service de télévision dûment autorisé par le CSA ; qu'à supposer que ces éléments figurent dans la plainte, il ne lie pas le ministère public qui détermine librement les personnes susceptibles d'être poursuivies comme auteurs ou complices ainsi que la qualification sous lesquelles les poursuites doivent être engagées, que dans le réquisitoire introductif en date du 25 février 2008, au mépris de l'article 50 susvisé, aucun élément sur l'imputation ne précise les faits reprochés ; qu'il résulte contre les susnommés des présomptions d'injures publiques envers Valérie X... par un moyen de communication audiovisuelle qui résulte des termes injurieux prononcés dans une émission intitulé « Salut les terriens » animée par Thierry Y... diffusée en métropole les 12 et 15 janvier 2008 et à l'Ile de la Réunion le 21 janvier 2008 » ; qu'ainsi, la plainte ne respecte pas les exigences de l'article 50 du code de procédure pénale, à vrai dire de la loi du 29 juillet 1981), que les poursuites sont d'ailleurs frappées d'une nullité d'ordre public ;
" alors que la plainte faisait état clairement des propos suivants tenus par Thierry Y... : " quelle histoire quand même, quand je pense que je l'ai reçue sur ce plateau, je ne savais rien du tout pour ces photos, quelle pute hein ! … En tout cas moi, elle m'a bien niqué " … ; que la plaignante insistait sur le fait que l'expression « quelle pute » employée par Thierry Y... était constitutive du délit d'injure publique envers un particulier lors d'une émission de télévision, émission diffusée en métropole devant des millions de téléspectateurs le 12 janvier 2008 sur Canal + et le 21 janvier 2008 sur Canal satellite à la Réunion ; qu'il était encore ajouté dans la plainte que l'expression « quelle pute » est pénalement répréhensible et constitutif du délit d'injure publique envers un particulier, fait prévu et puni par les articles 29, alinéa 2, 33, alinéa 2, de la loi du 29 janvier 1981, 93-3, alinéa 1 et 3 de la loi du 29 juillet 1982, 42, 43, 47, 48 de la loi du 29 juillet 1881 ; qu'en affirmant qu'il existerait une incertitude sur le point de savoir qui doit répondre des faits prétendument commis les 12 et 15 janvier 2008, la chambre de l'instruction viole les articles 50 et 65 de la loi du 29 juillet 1881 sur la presse " ;
Vu l'article 50 de la loi du 29 juillet 1881 ;
Attendu que, selon ce texte, l'acte initial de poursuite doit, à peine de nullité, articuler et qualifier les provocations, outrages, diffamations et injures à raison desquels la poursuite est intentée, et indiquer les textes dont l'application est demandée ; qu'il n'appartient pas aux juges de subordonner la régularité de cet acte à d'autres conditions, dès lors qu'il ne peut exister d'incertitude sur l'objet de la poursuite ;
Attendu qu'il résulte de l'arrêt attaqué et des pièces de la procédure que Valérie X... a porté plainte et s'est constituée partie civile, du chef d'injure publique envers particulier, en raison de la diffusion, les 12 et 15 janvier 2008, en France métropolitaine, par la chaîne Canal +, et le 21 janvier 2008, à La Réunion, par la chaîne Canal satellite, d'une émission de télévision intitulée " Salut les terriens ", au cours de laquelle l'animateur Thierry Y... l'a désignée par l'expression " Quelle pute ! " ; que Rodolphe Z..., directeur de publication de CANAL +, et Dominique A..., directeur de publication de Canal satellite, ainsi que Thierry Y..., ont été mis en examen ; que les deux premiers ont déposé une requête en nullité de pièces de la procédure ;
Attendu que, pour faire droit à la demande des mis en examen excipant de l'irrégularité de la plainte initiale, annuler celle-ci et constater la prescription, l'arrêt retient que les émissions poursuivies ne sont pas clairement identifiées, l'existence de celle du 15 janvier 2008 étant douteuse, et que la plainte comporte une incertitude quant aux faits reprochés aux deux directeurs de publication, appelés à répondre conjointement des mêmes émissions ; qu'ainsi, la plainte n'articule pas suffisamment les faits, au mépris des dispositions de l'article 50 de la loi du 29 juillet 1881 ;
Mais attendu qu'en se déterminant ainsi, alors que la plainte assortie de constitution de partie civile énonçait avec précision, outre la qualification et les textes applicables, le propos incriminé, ainsi que les dates et circonstances de sa diffusion par les deux moyens de communication audiovisuelle concernés, de sorte qu'il ne pouvait exister aucune ambiguïté sur les faits dont les mis en examen avaient à répondre, la chambre de l'instruction a méconnu le texte susvisé et le principe ci-dessus énoncé ;
D'où il suit que la cassation est encourue ;
Par ces motifs :
CASSE et ANNULE, en toutes ses dispositions, l'arrêt susvisé de la chambre de l'instruction de la cour d'appel de Saint-Denis de la Réunion, en date du 3 mars 2009, et pour qu'il soit à nouveau jugé, conformément à la loi,
RENVOIE la cause et les parties devant la chambre de l'instruction de la cour d'appel de Paris, à ce désignée par délibération spéciale prise en chambre du conseil ;
ORDONNE l'impression du présent arrêt, sa transcription sur les registres du greffe de la chambre de l'instruction de la cour d'appel de Saint-Denis de la Réunion et sa mention en marge ou à la suite de l'arrêt annulé ;
Ainsi jugé et prononcé par la Cour de cassation, chambre criminelle, en son audience publique, les jour, mois et an que dessus ;
Etaient présents aux débats et au délibéré, dans la formation prévue à l'article 567-1-1 du code de procédure pénale : M. Louvel président, M. Monfort conseiller rapporteur, Mme Anzani conseiller de la chambre ;
Greffier de chambre : Mme Villar ;
En foi de quoi le présent arrêt a été signé par le président, le rapporteur et le greffier de chambre ;


Synthèse
Formation : Chambre criminelle
Numéro d'arrêt : 09-82521
Date de la décision : 11/05/2010
Sens de l'arrêt : Cassation
Type d'affaire : Criminelle

Références :

Décision attaquée : Cour d'appel de Saint-Denis de la Réunion, 03 mars 2009


Publications
Proposition de citation : Cass. Crim., 11 mai. 2010, pourvoi n°09-82521


Composition du Tribunal
Président : M. Louvel (président)
Avocat(s) : Me Blondel, SCP Boutet

Origine de la décision
Date de l'import : 15/09/2022
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CCASS:2010:09.82521
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