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21/04/2010 | FRANCE | N°09-40651

France | France, Cour de cassation, Chambre sociale, 21 avril 2010, 09-40651


LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l'arrêt suivant :

Attendu, selon l'arrêt attaqué (Reims, 10 décembre 2008), que M. X..., qui avait été engagé le 1er avril 1995 en qualité de pilote d'avion par la société Produits d'usines métallurgiques, aux droits de laquelle se trouve la société Arcelormittal, a été licencié le 3 mai 2005 en raison de manquements à la sécurité des personnes et du matériel, après avoir été mis à pied le 9 février ; qu'il a saisi la juridiction prud'homale le 23 novembre 2006 d'une demande de paiement d'une indemnité pour licenc

iement sans cause réelle et sérieuse ;
Sur le premier moyen :
Attendu que le sa...

LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l'arrêt suivant :

Attendu, selon l'arrêt attaqué (Reims, 10 décembre 2008), que M. X..., qui avait été engagé le 1er avril 1995 en qualité de pilote d'avion par la société Produits d'usines métallurgiques, aux droits de laquelle se trouve la société Arcelormittal, a été licencié le 3 mai 2005 en raison de manquements à la sécurité des personnes et du matériel, après avoir été mis à pied le 9 février ; qu'il a saisi la juridiction prud'homale le 23 novembre 2006 d'une demande de paiement d'une indemnité pour licenciement sans cause réelle et sérieuse ;
Sur le premier moyen :
Attendu que le salarié fait grief à l'arrêt de l'avoir débouté de sa demande, alors, selon le moyen :
1°/ que la mise à pied prononcée à titre conservatoire doit être immédiatement suivie de l'engagement d'une procédure de licenciement ; qu'à défaut, elle présente un caractère disciplinaire qui prive de cause réelle et sérieuse le licenciement ultérieurement prononcé pour les mêmes faits ; qu'en affirmant que le délai écoulé entre la mise à pied prononcée le 9 février 2005 et le début de la procédure de licenciement engagée le 23 mars 2005 était suffisamment bref pour qualifier la mise à pied de conservatoire, la cour d‘appel a violé les articles L. 1235-1, L. 1331-1, L. 1332-1 et L. 1332-3 du code du travail ;
2°/ que la mise à pied prononcée à titre conservatoire doit comporter une référence explicite à l'éventualité d'un licenciement ; qu'en jugeant que la mise à pied prononcée en février 2005 ne revêtait pas un caractère disciplinaire, sans constater que dans la lettre la notifiant à M. X..., l'employeur faisait état de l'éventualité d'un licenciement et de l'engagement immédiat de la procédure disciplinaire, la cour d'appel n'a pas légalement justifié sa décision au regard des articles L. 1235-1, L. 1331-1, L. 1332-1 et L. 1332-3 du code du travail ;
3°/ que la mise à pied présente le caractère d'une sanction disciplinaire lorsqu'elle n'a pas été rémunérée et qu'elle n'a pas été suivie d'un licenciement pour faute grave ou lourde ; qu'en relevant que le licenciement de monsieur X... était motivé par une cause réelle et sérieuse et en jugeant que la mise à pied prononcée en février 2005 ne présentait pas un caractère disciplinaire, sans constater, comme elle le devait, que l'exposant avait bien été rémunéré pendant la durée d'interdiction d'exercice de ses fonctions, la cour d'appel n'a pas légalement justifié sa décision au regard des articles L. 1235-1, L. 1331-1, L. 1332-1 et L. 1332-3 du code du travail ;
Mais attendu que la cour d'appel, qui a constaté que la mise à pied, prononcée à titre conservatoire, avait été prise dans l'attente du dépôt du rapport définitif de l'audit diligenté par l'employeur intervenu le 14 mars 2005 et que la convocation à l'entretien préalable engageant la procédure de licenciement avait été notifiée le 23 mars 2005, a pu en déduire que la mesure ne revêtait pas un caractère disciplinaire ; que le moyen n'est pas fondé ;
Et sur le second moyen :
Attendu que le salarié fait encore grief à la cour d'appel d'avoir statué comme elle l'a fait, alors, selon le moyen :
1°/ que le juge doit préciser le fondement juridique de sa décision ; qu'en affirmant qu'il avait méconnu les "règles de sécurité", sans préciser quelles étaient ces règles et en relevant même que "peu important par ailleurs que n'ait été visé aucun texte réglementaire ou aucun règlement intérieur", les juges du fond ont violé l'article 12 du code de procédure civile ;
2°/ que dans ses conclusions d'appel, il faisait valoir qu'il résultait du rapport établi par la société Dolphin Air Europe consulting aéronautique que l'audit effectué par la société Skytation ne reposait que sur le JAR OPS, texte de référence dans le transport public, et qu'il ne renvoyait pas à l'annexe 7 de l'OACI, seul texte applicable aux vols privés effectués, de sorte que cet audit, sur lequel était fondé son licenciement, était basé sur un texte inapplicable ; qu'en jugeant que le licenciement du commandant de bord reposait sur une cause réelle et sérieuse, sans répondre à ce chef pertinent des conclusions de l'exposant, les juges du fond ont violé l'article 455 du code de procédure civile ;
3°/ qu'en affirmant, aux motifs éventuellement adoptés, qu'il était la seule personne habilitée et responsable de la parfaite conformité de l'avion et des documents mis à sa disposition, sans répondre aux conclusions par lesquelles il faisait valoir qu'il n'était pas responsable de la conclusion des contrats d'assurance et d'entretien des moteurs de l'aéronef, que le classeur "weight et balances" existait en double exemplaire, de sorte qu'une copie était toujours à bord au moment des vols, et qu'il avait bien vérifié les certificats MNPS et RVSM des membres de l'équipage, la cour d'appel a violé l'article 455 du code de procédure civile ;
Mais attendu que la cour d'appel qui, par une décision motivée, a décidé dans l'exercice du pouvoir qu'elle tient de l'article L. 1235-1 du code du travail que le licenciement reposait sur une cause réelle et sérieuse caractérisée par les seuls manquements aux règles de sécurité, tels qu'ils résultaient du rapport définitif d'audit, tenant à des atterrissages effectués par le commandant de bord au mépris des distances de sécurité liées aux conditions météorologiques, n'encourt pas les griefs du moyen ;
PAR CES MOTIFS :
REJETTE le pourvoi ;
Condamne M. X... aux dépens ;
Vu l'article 700 du code de procédure civile, rejette les demandes ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre sociale, et prononcé par le président en son audience publique du vingt et un avril deux mille dix.

MOYENS ANNEXES au présent arrêt :


Moyens produits par la SCP Didier et Pinet, avocat aux Conseils pour M. X....
PREMIER MOYEN DE CASSATION :

Il est fait grief à l'arrêt attaqué d'AVOIR débouté monsieur X... de sa demande tendant à la condamnation de la SA Arcelormittal, venant aux droits de la SA Produits d'Usines Métallurgiques, à lui payer la somme de 225.000 euros à titre de dommages et intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse ;
AUX MOTIFS QU'il ne peut pas être reproché à la société PUM d'avoir attendu le dépôt du rapport définitif du 14 mars 2005 pour engager la procédure de licenciement par lettre recommandée avec demande d'avis de réception en date du 23 mars 2005 (l'entretien préalable ayant été fixé au 4 avril 2005 et la notification du licenciement étant intervenue en mai 2005) ; qu'en effet, le délai écoulé entre la mise à pied datant de février 2005 et le début de la procédure de licenciement engagée dès mars 2005 est suffisamment bref pour pouvoir qualifier la mise à pied de conservatoire ; qu'en conséquence, monsieur X... ne peut valablement prétendre que la mise à pied revêt un caractère disciplinaire, de telle sorte qu'il aurait été sanctionné à deux reprises, pour les mêmes faits ; qu'en conséquence, le jugement entrepris doit être confirmé en ce qu'il a rejeté l'ensemble des demandes formées par monsieur X... ;
ALORS, D'UNE PART, QUE la mise à pied prononcée à titre conservatoire doit être immédiatement suivie de l'engagement d'une procédure de licenciement ; qu'à défaut, elle présente un caractère disciplinaire qui prive de cause réelle et sérieuse le licenciement ultérieurement prononcé pour les mêmes faits ; qu'en affirmant que le délai écoulé entre la mise à pied prononcée le 9 février 2005 et le début de la procédure de licenciement engagée le 23 mars 2005 était suffisamment bref pour qualifier la mise à pied de conservatoire, la cour d‘appel a violé les articles L. 1235-1, L. 1331-1, L. 1332-1 et L. 1332-3 du code du travail ;
ALORS, DE DEUXIEME PART, QUE la mise à pied prononcée à titre conservatoire doit comporter une référence explicite à l'éventualité d'un licenciement ; qu'en jugeant que la mise à pied prononcée en février 2005 ne revêtait pas un caractère disciplinaire, sans constater que dans la lettre la notifiant à monsieur X..., l'employeur faisait état de l'éventualité d'un licenciement et de l'engagement immédiat de la procédure disciplinaire, la cour d'appel n'a pas légalement justifié sa décision au regard des articles L. 1235-1, L. 1331-1, L. 1332-1 et L. 1332-3 du code du travail ;
ALORS, DE TROISIEME PART ET SUBSIDIAIREMENT, QUE la mise à pied présente le caractère d'une sanction disciplinaire lorsqu'elle n'a pas été rémunérée et qu'elle n'a pas été suivie d'un licenciement pour faute grave ou lourde ; qu'en relevant que le licenciement de monsieur X... était motivé par une cause réelle et sérieuse et en jugeant que la mise à pied prononcée en février 2005 ne présentait pas un caractère disciplinaire, sans constater, comme elle le devait, que l'exposant avait bien été rémunéré pendant la durée d'interdiction d'exercice de ses fonctions, la cour d'appel n'a pas légalement justifié sa décision au regard des articles L. 1235-1, L. 1331-1, L. 1332-1 et L. 1332-3 du code du travail.
SECOND MOYEN DE CASSATION :

Il est fait grief à l'arrêt attaqué d'AVOIR débouté monsieur X... de sa demande tendant à la condamnation de la SA Arcelormittal, venant aux droits de la SA Produits d'Usines Métallurgiques, à lui payer la somme de 225.000 euros à titre de dommages et intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse ;
AUX MOTIFS PROPRES QU'aux termes de la lettre de licenciement qui fixe les limites du litige, il est notamment reproché à monsieur X... d'avoir, au vu de la réalisation d'un audit, « commis de graves manquements dans l'exécution de son contrat de travail, nuisant à la sécurité des personnes et du matériel … » ; que les termes de la lettre de rupture, qui font expressément référence à la sécurité des personnes et du matériel, sont suffisamment précis pour caractériser les motifs d'un licenciement ; qu'il appartient dès lors à la cour de vérifier la réalité desdits motifs ; qu'il importe à titre liminaire de préciser que monsieur X... était, en qualité de pilote d'avion, responsable « des opérations de vol, des opérations de sol ainsi que de la formation » (cf. organigramme du PUM) ; qu'aux termes d'un premier rapport d'audit en date du 3 février 2005, il était notamment conclu : - qu'un niveau acceptable de sécurité n'était pas atteint compte tenu de la répartition des tâches opérées par monsieur X..., - que ce dernier était à l'origine de plusieurs erreurs de gestions ; - qu'il était en conséquence nécessaire d'interrompre provisoirement l'exploitation du Hawker 800 et que le remplacement du commandant de bord était indispensable ; que ce rapport provisoire était suffisamment précis et rigoureux pour justifier la mise à pied opérée à titre conservatoire par la société PUM, cette dernière ayant eu le mérite de prendre diligemment les précautions qui s'imposaient compte tenu des risques encourus ; qu'il résulte clairement de la précision d'un rapport définitif remis le 14 mars 2005, que les règles de sécurité ont été méconnues par l'appelant, les décisions prises étant qualifiées « d'inadaptées », voire « d'inacceptables » ; qu'il résulte en particulier de l'analyse croisée des conditions météorologiques et des carnets de route effectuée par le cabinet Skytation, que le commandant de bord a procédé à des atterrissages au mépris des distances de sécurité liées aux conditions météorologiques ; que cette seule constatation caractérise incontestablement des graves manquements de l'exécution du contrat de travail, sans même qu'il soit besoin de pointer les autres manquements résultant du rapport d'audit ; que le rapport de la société « Dolphin Air Europe SA Consulting Aéronautique» produit par l'appelant, ne permet pas de remettre en cause les constatations relatives à la méconnaissance des règles de sécurité imputables à monsieur X..., peu important par ailleurs que n'ait été visé aucun texte réglementaire ou aucun règlement intérieur ; qu'au vu de ces éléments, c'est vainement que monsieur X... prétend n'avoir commis aucun manquement ;
ET AUX MOTIFS EVENTUELLEMENT ADOPTES QU'en l'espèce, monsieur X... a été licencié, selon les termes mêmes de la lettre de licenciement qui fixe les limites du litige, pour des manquements graves dans l'exercice de sa tâche nuisant à la sécurité des personnes et du matériel utilisé, le courrier de licenciement rappelant l'audit et le rapport d'étape du 3 février 2005 ayant fait ressortir ces manquements ; qu'en sa qualité de commandant de bord, monsieur X... était la seule personne habilitée et responsable de la parfaite conformité de l'avion et des documents mis à sa disposition ; qu'ainsi, et eu égard aux éléments soumis à son appréciation, le conseil constate la réalité des faits reprochés de nature à porter atteinte à la sécurité des personnes et des biens dont monsieur X... avait la responsabilité ; que le licenciement étant fondé, monsieur X... sera débouté de ses demandes ;
ALORS, D'UNE PART, QUE le juge doit préciser le fondement juridique de sa décision ; qu'en affirmant que monsieur X... avait méconnu les « règles de sécurité », sans préciser quelles étaient ces règles et en relevant même que « peu important par ailleurs que n'ait été visé aucun texte réglementaire ou aucun règlement intérieur », les juges du fond ont violé l'article 12 du code de procédure civile ;
ALORS, DE DEUXIEME PART, QUE dans ses conclusions d'appel (cf. p. 8), monsieur X... faisait valoir qu'il résultait du rapport établi par la société Dolphin Air Europe Consulting Aéronautique que l'audit effectué par la société Skytation ne reposait que sur le JAR OPS, texte de référence dans le transport public, et qu'il ne renvoyait pas à l'annexe 7 de l'OACI, seul texte applicable aux vols privés effectués, de sorte que cet audit, sur lequel était fondé son licenciement, était basé sur un texte inapplicable ; qu'en jugeant que le licenciement du commandant de bord reposait sur une cause réelle et sérieuse, sans répondre à ce chef pertinent des conclusions de l'exposant, les juges du fond ont violé l'article 455 du code de procédure civile ;
ALORS, DE TROISIEME PART, QU'en affirmant, aux motifs éventuellement adoptés, que monsieur X... était la seule personne habilitée et responsable de la parfaite conformité de l'avion et des documents mis à sa disposition, sans répondre aux conclusions par lesquelles l'exposant faisait valoir qu'il n'était pas responsable de la conclusion des contrats d'assurance et d'entretien des moteurs de l'aéronef, que le classeur « weight et balances » existait en double exemplaire, de sorte qu'une copie était toujours à bord au moment des vols, et qu'il avait bien vérifié les certificats MNPS et RVSM des membres de l'équipage, la cour d'appel a violé l'article 455 du code de procédure civile.


Synthèse
Formation : Chambre sociale
Numéro d'arrêt : 09-40651
Date de la décision : 21/04/2010
Sens de l'arrêt : Rejet
Type d'affaire : Sociale

Références :

Décision attaquée : Cour d'appel de Reims, 10 décembre 2008


Publications
Proposition de citation : Cass. Soc., 21 avr. 2010, pourvoi n°09-40651


Composition du Tribunal
Président : M. Bailly (conseiller le plus ancien faisant fonction de président)
Avocat(s) : SCP Célice, Blancpain et Soltner, SCP Didier et Pinet

Origine de la décision
Date de l'import : 15/09/2022
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CCASS:2010:09.40651
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