LA COUR DE CASSATION, DEUXIÈME CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :
Sur le moyen unique :
Vu l'article 4 du code de procédure civile ;
Attendu, selon l'arrêt attaqué, que la SCI Notre-Dame est propriétaire d'un local commercial situé avenue Notre-Dame à Nice dont elle loue le premier étage à l'association Arts et loisirs exploitée par M. X... ; que la société VGL, aux droits de laquelle vient la société Jouéclub Contesso (la société VGL), qui exploite un magasin de jouets dans l'immeuble contigu appartenant à la société Philippe Jouve et compagnie (la société Jouve), a installé en 1996 sur la toiture du bâtiment des appareils pour climatiser son espace de vente exploité au rez-de-chaussée ; que M. X..., se plaignant de nuisances causées par les ventilateurs et la colonne d'évacuation des fumées installés devant les ouvertures de la salle de sport, la SCI Notre-Dame a, après expertise ordonnée en référé, fait assigner la société Jouve et la société VGL devant un tribunal de grande instance afin de les voir condamner, sur le fondement de troubles anormaux de voisinage, à retirer les climatiseurs installés sur le toit terrasse du bâtiment appartenant à la société Jouve, à procéder aux modifications préconisées par l'expert judiciaire, à supprimer la tour d'évacuation des fumées et à l'indemniser du trouble subi
Attendu que pour déclarer recevables mais infondées, les demandes de la SCI Notre-Dame, l'arrêt énonce que le caractère inesthétique des installations n'avait pas été allégué par la SCI Notre-Dame ;
Qu'en statuant ainsi, alors que la SCI Notre-Dame invoquait dans ses conclusions d'appel le trouble esthétique causé par les installations de la société VGL au nombre de ses préjudices, la cour d'appel en a dénaturé les termes clairs et précis et a ainsi méconnu l'objet du litige ;
PAR CES MOTIFS :
CASSE ET ANNULE, dans toutes ses dispositions, l'arrêt rendu le 10 mars 2009, entre les parties, par la cour d'appel d'Aix-en-Provence ; remet, en conséquence, la cause et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant ledit arrêt et, pour être fait droit, les renvoie devant la cour d'appel d'Aix-en-Provence, autrement composée ;
Condamne les sociétés VGL, Jouéclub Contesso et Philippe Jouve et compagnie aux dépens ;
Vu l'article 700 du code de procédure civile, condamne, in solidum, condamne les sociétés VGL, Jouéclub Contesso et Philippe Jouve et compagnie à payer à la SCI Notre-Dame la somme de 2 000 euros ; rejette toutes les autres demandes présentées de ce chef ;
Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite de l'arrêt cassé ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, deuxième chambre civile, et prononcé par le président en son audience publique du quinze avril deux mille dix.
MOYEN ANNEXE au présent arrêt :
Moyen produit par la SCP Peignot et Garreau, avocat aux Conseils pour la SCI Notre-Dame
Le moyen reproche à l'arrêt infirmatif attaqué d'avoir déclaré recevables mais infondées les demandes de la SCI NOTRE DAME tendant, sous astreinte, à condamner in solidum la SARL VGL à l'enseigne CONTESSO SARL, la SARL JOUECLUB CONTESSO et la SNC PHILIPPE JOUVE ET COMPAGNIE, à supprimer les appareils de climatisation litigieux et à procéder aux modifications préconisées par l'expert judiciaire, à supprimer la tour litigieuse d'évacuation des fumées et, sous la même solidarité, à verser à la SCI NOTRE DAME la somme de 10.000 euros à titre de dommages et intérêts en réparation du trouble de jouissance ;
AUX MOTIFS QUE, sur l'existence d'un trouble anormal du voisinage, l'appelante conteste l'existence d'un tel trouble anormal que l'expertise n'aurait pas permis d'établir, contrairement à ce que soutiennent les intimées ; que la Cour constate que l'expert judiciaire qui a effectué plusieurs mesurages relatifs à la chaleur, au bruit, aux fumées et à l'esthétique des installations CONTESSO litigieuses, a considéré que la chaleur dégagée par les climatiseurs CONTESSO et susceptible d'influencer la température à l'intérieur des locaux de la SCI NOTRE DAME était négligeable : « toutes issues grandes ouvertes, après une période de stabilisation, on constate une augmentation de 0,4° à 1,0° maximum selon les pièces » ; qu'en toiture, l'écart constaté dans la partie réservée au passage des personnes fréquentant les locaux de la SCI NOTRE DAME est également très négligeable (27°2 /28°8) et ne suffit pas à caractériser un trouble anormal de voisinage ; que concernant les relevés acoustiques effectués à la demande de l'expert, il a été constaté un niveau de pression acoustique de 30 décibels à l'intérieur des locaux de la SCI NOTRE DAME, et de 58 décibels dans la zone de passage située sur la toiture : la Cour considère que les nuisances sonores (bruit d'émergence) ne sont pas caractérisées à l'intérieur des locaux, et qu'à l'endroit du passage, le bruit d'émergence ne constitue pas un trouble anormal de voisinage ; que la caractère inesthétique des installations n'a pas été allégué par la SCI NOTRE DAME ; que la Cour infirme, en conséquence, le jugement entrepris et déboute la SCI NOTRE DAME de ses demandes (arrêt critiqué, pp. 4-5) ;
1°) ALORS QUE les juges ne peuvent méconnaître l'objet du litige tel que déterminé par les prétentions respectives des parties ; qu'en l'espèce, dans ses conclusions d'appel (v. spéc. pp. 5 à 8), la SCI NOTRE DAME avait, au nombre de ses nombreux préjudices, invoqué le trouble esthétique causé par les installations litigieuses ; que dès lors, en déboutant la SCI NOTRE DAME de ses demandes au titre des troubles anormaux de voisinage, au motif que le caractère inesthétique des installations n'avait pas été allégué par la SCI NOTRE DAME, la Cour d'appel, qui a dénaturé l'objet du litige, tel que déterminé par les prétentions de ladite société, a violé l'article 4 du Code de procédure civile ;
2°) ALORS QUE les juges ne peuvent dénaturer les termes clairs et précis des conclusions ; qu'en l'espèce, dans ses conclusions d'appel (v. spéc. pp. 5 à 8), au soutien de ses demandes relatives aux troubles anormaux de voisinage, la SCI NOTRE DAME avait invoqué, en le démontrant, le caractère inesthétique des installations litigieuses ; que dès lors, en déboutant la SCI NOTRE DAME de ses demandes relatives aux troubles anormaux de voisinage au motif que le caractère inesthétique des installations n'avait pas été démontré, la Cour d'appel, qui a dénaturé les termes clairs et précis, des conclusions de la SCI NOTRE DAME, a encore violé l'article 4 du Code de procédure civile.