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25/03/2010 | FRANCE | N°07-44656

France | France, Cour de cassation, Chambre sociale, 25 mars 2010, 07-44656


LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l'arrêt suivant :

Sur les premier et second moyens, réunis :
Attendu, selon l'arrêt attaqué (Paris, 6 septembre 2007) que Mme X... a été engagée le 28 mars 1975 en qualité de secrétaire générale par la société Trigano loisirs, aux droits de laquelle est venue la société Trigano ; que, par lettre du 31 mai 2002, la salariée a pris acte de la rupture de son contrat de travail aux torts de l'employeur, lui reprochant une rétrogradation imposée depuis février 2002 et caractérisée par une perte de responsabilités ; qu'e

lle a saisi la juridiction prud'homale d'une demande en paiement de diverses s...

LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l'arrêt suivant :

Sur les premier et second moyens, réunis :
Attendu, selon l'arrêt attaqué (Paris, 6 septembre 2007) que Mme X... a été engagée le 28 mars 1975 en qualité de secrétaire générale par la société Trigano loisirs, aux droits de laquelle est venue la société Trigano ; que, par lettre du 31 mai 2002, la salariée a pris acte de la rupture de son contrat de travail aux torts de l'employeur, lui reprochant une rétrogradation imposée depuis février 2002 et caractérisée par une perte de responsabilités ; qu'elle a saisi la juridiction prud'homale d'une demande en paiement de diverses sommes ;
Attendu que Mme X... fait grief à l'arrêt d'avoir requalifié sa prise d'acte en démission, et de l'avoir par conséquent déboutée de ses demandes d'indemnités au titre de la rupture, d'une part, d'indemnité en réparation du préjudice résultant de la perte de son droit de lever ses options, d'autre part, alors, selon le moyen :
1°/ que la modification des attributions et du niveau de responsabilités confiées à un salarié constitue une modification du contrat de travail qui ne peut être décidée sans l'accord de l'intéressé ; qu'en l'espèce, pour considérer que le contrat de travail de Mme X... n'a pas été modifié unilatéralement par la société Trigano à compter du mois de février 2002, la cour se borne à considérer, en substance, que les tâches confiées à la salariée en matière de gestion du personnel n'ont pas été réduites puisque le personnel concerné est celui d'un groupe qui comporte des dizaines de filiales et emploie plusieurs milliers de salariés ; qu'en statuant ainsi, sans rechercher comme elle y était pourtant invitée si la gestion du personnel confiée à Mme X... à compter du mois de février 2002 n'avait pas elle-même été réduite à l'exécution de tâches subalternes sans lien avec les attributions et responsabilités antérieures de la salariée, la cour en infirmant le jugement entrepris ne justifie pas légalement sa décision au regard de l'article 1134 du code civil, violé ;
2°/ qu'en tout état de cause, la qualification d'un salarié s'apprécie au regard des fonctions réellement exercées par lui ; qu'en l'espèce, pour considérer que Mme X... n'a subi aucune rétrogradation fonctionnelle à compter du mois de février 2002, la cour se borne à prendre en considération la seule description du poste figurant dans une note interne à la société Trigano et dans un courrier adressé à la salariée par l'employeur ; qu'en se déterminant ainsi, sans analyser, comme il le lui était demandé (conclusions pages 9 et s.), ce qu'il en était des fonctions réellement exercées par la salariée à compter du mois de février 2002, la cour d'appel ne donne pas de base légale à sa décision au regard de l'article 1134 du code civil, de plus fort violé ;
3°/ que le salarié qui ne peut, du fait de son licenciement sans cause réelle et sérieuse, exercer les options sur titre qui lui avaient été attribuées, a droit à la réparation du préjudice qui peut en résulter ; qu'aussi bien, la cassation qui ne manquera pas d'être prononcée sur le fondement du moyen de cassation devra entraîner par voie de conséquence l'annulation du chef ayant débouté Mme X... de sa demande d'indemnité en réparation du préjudice que lui a causé la perte de son droit de lever ses options et ce, en application des dispositions de l'article 624 du code de procédure civile ;
Mais attendu que lorsqu'un salarié prend acte de la rupture de son contrat de travail en raison de faits qu'il reproche à son employeur, cette rupture produit les effets soit d'un licenciement sans cause réelle et sérieuse si les faits invoqués la justifiaient, soit, dans le cas contraire, d'une démission ;
Et attendu, d'abord, que la cour d'appel, appréciant souverainement les faits et les preuves qui lui étaient soumis, et procédant à la recherche demandée, a constaté, sans être tenue de s'expliquer sur les pièces qu'elle écartait ni de suivre les parties dans le détail de leur argumentation, qu'après la réorganisation du secrétariat général intervenue en février 2002 conformément aux voeux et aux propositions de la salariée, les tâches de gestion du personnel dont celle-ci demeurait investie au sein d'un groupe comportant des dizaines de filiales et employant plusieurs milliers de salariés, n'étaient pas manifestement réduites ; qu'elle a pu en déduire qu'il n'y avait eu ni rétrogradation fonctionnelle ni perte de salaire pour Mme X..., de sorte que la prise d'acte par celle-ci de la rupture de son contrat de travail s'analysait en une démission ; que le moyen n'est pas fondé ;
Attendu, ensuite, que le rejet du premier moyen prive le second de tout fondement ;

PAR CES MOTIFS :
REJETTE le pourvoi ;
Condamne Mme X... aux dépens ;
Vu l'article 700 du code de procédure civile, rejette sa demande ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre sociale, et prononcé par le président en son audience publique du vingt-cinq mars deux mille dix.

MOYENS ANNEXES au présent arrêt :


Moyens produits par Me Blondel, avocat aux Conseils, pour Mme X...

Il est reproché à l'arrêt infirmatif sur ce point attaqué d'avoir dit que la prise d'acte de la rupture par Madame X... doit s'analyser en une démission et d'avoir débouté la susnommée de ses diverses demandes d'indemnités au titre de la rupture ;
AUX MOTIFS QUE lorsqu'un salarié prend acte de la rupture de son contrat de travail, en raison de faits qu'il reproche à son employeur, cette rupture produit les effets d'un licenciement sans cause réelle et sérieuse si les faits invoqués le justifient ; que si le comportement fautif de l'employeur n'est pas établi, la prise d'acte aura les effets d'une démission ; que dans son courrier du 31 mai 2002, Hélène X... reproche à son employeur une rétrogradation depuis février 2002 caractérisée par une perte de responsabilité « sans fondement » ; qu'il résulte de pièces des débats que, jusqu'à une note du février 2002, existait au sein de la société TRIGANO un service juridique qui avait la responsabilité de la rédaction des contrats et protocoles, de la gestion des contentieux, du secrétariat des sociétés (partiellement), du droit des sociétés, de l'immobilier, de la propriété industrielle (partiellement) et du comité de groupe ; que le secrétariat général dont Hélène X... était responsable avait lui en charge la gestion du personnel, le secrétariat des sociétés (partiellement) la propriété industrielle (partiellement) les procurations bancaires et l'enregistrement des contrats ; que la note précitée a rappelé que les différentes fonctions juridiques de la société TRIGANO étaient réparties entre deux services, que cette répartition entre service était « peu claire, sujette à erreurs, retards et absence de fluidité » ; La fonction secrétariat des sociétés présentait des retards importants dans la retranscription des procès-verbaux sur les différents registres sociaux ; qu'il a été décidé en conséquence qu'Hélène X... devrait se concentrer sur les fonctions de gestion du personnel (TRIGANO et ses filiales, gestion de la paie, gestion des cadres dirigeants du groupe, gestion des régimes de prévoyance santé, audit social des filiales etc.) au suivi et à la mise à jour des procurations bancaires, ainsi qu'à des missions spécifiques dans le cadre de la politique pilotée par la direction générale de croissance externe ; qu'elle continuera à dépendre hiérarchiquement du directeur général adjoint et bénéficiera d'un secrétariat adapté aux besoins ; que cette réorganisation a été préparée et voulue par Hélène X... comme le démontre sa lettre du 9 mars 2001 en réponse à son évaluation ; que dans cette lettre elle dit aspirer à ce que la charge de travail induite par ses trois fonctions – propriété industrielle, secrétariat des sociétés, secrétariat général du personnel – qui n'a jamais cessé de croître, puisse s'accomplir dans des conditions telles qu'elles préservent ses capacités de travail et tiennent compte de ses antécédents de santé ; qu'elle a en outre transmis à sa direction le 16 mars 2001 une note comportant des propositions de réorganisation ; que faisant suite à la note du 22 février 2002, une lettre du même jour a précisé à Hélène X... son nouveau périmètre d'intervention comportant la fonction de gestion du personnel pour la société TRIGANO et ses filiales, le suivi et la mise à jour des procurations bancaires, des fonctions d'audit social pour les opérations de croissance externe ; que son salaire a été augmenté à partir du 1er janvier 2002 et qu'il lui a été confirmé le bénéfice d'une prime annuelle de 4 600 euros ; la direction précise avoir pris en compte son ancienneté, sa loyauté et son sens de l'entreprise ainsi que sa santé précaire pour ne pas modifier sa dépendance hiérarchique ; qu'en conséquence, contrairement à ce que soutient Hélène X..., la réorganisation du secrétariat général s'est faite en tenant compte de ses propositions, de son souhait d'être déchargée de plusieurs dossiers et des problèmes de santé qu'elle a invoquée ; que les tâches restant dévolues au secrétariat général après réorganisation n'étaient pas manifestement réduites, pour un groupe qui comporte des dizaines de filiales et emploie plusieurs milliers de salariés ; qu'il n'y avait ni rétrogradation fonctionnelle ni perte de salaire ; que par suite la prise d'acte du 31 mai 2002 doit s'analyser comme une démission de la salariée ; que le jugement sera infirmé de ce chef ; que le contrat est ainsi rompu à la date de la lettre de la prise d'acte et tout licenciement postérieur doit être considéré comme non avenu sans qu'il y ait lieu d'examiner le ou les griefs allégués ;
ALORS QUE, D'UNE PART, la modification des attributions et du niveau de responsabilités confiées à un salarié constitue une modification du contrat de travail qui ne peut être décidée sans l'accord de l'intéressé ; qu'en l'espèce, pour considérer que le contrat de travail de Madame X... n'a pas été modifié unilatéralement par la société TRIGANO à compter du mois de février 2002, la Cour se borne à considérer, en substance, que les tâches confiées à la salariée en matière de gestion du personnel n'ont pas été réduites puisque le personnel concerné est celui d'un groupe qui comporte des dizaines de filiales et emploie plusieurs milliers de salariés ; qu'en statuant ainsi, sans rechercher comme elle y était pourtant invitée (conclusions Madame X... page 12) si la gestion du personnel confiée à Madame X... à compter du mois de février 2002 n'avait pas elle-même été réduite à l'exécution de tâches subalternes sans lien avec les attributions et responsabilités antérieures de la salariée, la Cour en infirmant le jugement entrepris ne justifie pas légalement sa décision au regard de l'article 1134 du Code civil, violé;
ALORS QUE, D'AUTRE PART, et en tout état de cause, la qualification d'un salarié s'apprécie au regard des fonctions réellement exercées par lui ; qu'en l'espèce, pour considérer que Madame X... n'a subi aucune rétrogradation fonctionnelle à compter du mois de février 2002, la Cour se borne à prendre en considération la seule description du poste figurant dans une note interne à la société TRIGANO et dans un courrier adressé à la salariée par l'employeur ; qu'en se déterminant ainsi, sans analyser, comme il le lui était demandé (conclusions pages 9 et s.), ce qu'il en était des fonctions réellement exercées par la salariée à compter du mois de février 2002, la cour d'appel ne donne pas de base légale à sa décision au regard de l'article 1134 du Code civil, de plus fort violé.
MOYEN D'ANNULATION :
Il est reproché à l'arrêt attaqué d'avoir débouté Madame X... de sa demande d'indemnité en réparation du préjudice résultant de la perte de son droit de lever ses options ;
AUX MOTIFS QUE le 31 décembre 2001, le Conseil d'administration de la société TRIGANO a attribué à Hélène X... 250 actions avec option d'achat, la période d'exercice des options commençant à courir le 14 novembre 2006 ; que cependant en vertu de l'article quatre du Plan d'options de souscription d'actions, le bénéficiaire perd son droit d'option en cas de démission, de licenciement, de départ à la retraite et préretraite, ou révocation, la possibilité de lever l'option prenant fin, en particulier, dès réception de la lettre de démission ; qu'ainsi la lettre de prise d'acte a privé Hélène X... du droit d'exercer ses options ; elle ne saurait en conséquence réclamer une indemnisation ;
ALORS QUE le salarié qui ne peut, du fait de son licenciement sans cause réelle et sérieuse, exercer les options sur titre qui lui avaient été attribuées, a droit à la réparation du préjudice qui peut en résulter ; qu'aussi bien, la cassation qui ne manquera d'être prononcée sur le fondement du moyen de cassation devra entraîner par voie de conséquence l'annulation du chef ayant débouté Madame X... de sa demande d'indemnité en réparation du préjudice que lui a causé la perte de son droit de lever ses options et ce, en application des dispositions des articles 624 du Code de procédure civile.


Synthèse
Formation : Chambre sociale
Numéro d'arrêt : 07-44656
Date de la décision : 25/03/2010
Sens de l'arrêt : Rejet
Type d'affaire : Sociale

Références :

Cour d'appel de Paris, 6 septembre 2007, 06/01481

Décision attaquée : Cour d'appel de Paris, 06 septembre 2007


Publications
Proposition de citation : Cass. Soc., 25 mar. 2010, pourvoi n°07-44656


Composition du Tribunal
Président : Mme Mazars (conseiller doyen faisant fonction de président)
Avocat(s) : Me Blondel, SCP Delaporte, Briard et Trichet

Origine de la décision
Date de l'import : 15/09/2022
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CCASS:2010:07.44656
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