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24/03/2010 | FRANCE | N°09-82500

France | France, Cour de cassation, Chambre criminelle, 24 mars 2010, 09-82500


LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE CRIMINELLE, a rendu l'arrêt suivant :
Statuant sur le pourvoi formé par :

- X... Alain, partie civile,

contre l'arrêt de la chambre de l'instruction de la cour d'appel de PARIS, 6e section, en date du 3 février 2009, qui, dans l'information suivie contre personne non dénommée, des chefs de présentation de bilans inexacts, diffusion d'informations trompeuses et abus de biens sociaux, a confirmé l'ordonnance de non-lieu du juge d'instruction ;
Vu le mémoire produit ;
Vu l'article 575, alinéa 2, 6,° du code de procédure pénale ;r>Sur le premier moyen de cassation, pris de la violation des articles 191, 592 et 5...

LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE CRIMINELLE, a rendu l'arrêt suivant :
Statuant sur le pourvoi formé par :

- X... Alain, partie civile,

contre l'arrêt de la chambre de l'instruction de la cour d'appel de PARIS, 6e section, en date du 3 février 2009, qui, dans l'information suivie contre personne non dénommée, des chefs de présentation de bilans inexacts, diffusion d'informations trompeuses et abus de biens sociaux, a confirmé l'ordonnance de non-lieu du juge d'instruction ;
Vu le mémoire produit ;
Vu l'article 575, alinéa 2, 6,° du code de procédure pénale ;
Sur le premier moyen de cassation, pris de la violation des articles 191, 592 et 593 du code de procédure pénale ;
"en ce que l'arrêt attaqué est rendu par trois magistrats dont M. Y..., « conseiller désigné par ordonnance du 6 octobre 2008 de M. le premier président de la cour d'appel » ;
"alors que les conseillers composant la chambre de l'instruction sont désignés par l'assemblée générale de la cour ; que l'arrêt attaqué, qui mentionne dans la composition de la cour lors des débats et du délibéré, M. Y..., « conseiller désigné par ordonnance du 6 octobre 2008 de M. le premier président de la cour d'appel », sans préciser que l'un des conseillers était empêché ou absent et que la réunion de l'assemblée générale des magistrats de la cour était impossible ne met pas la Cour de cassation en mesure de s'assurer de la régularité de la composition de la juridiction qui l'a rendu et ne satisfait pas, en la forme, aux conditions essentielles de son existence légale" ;
Attendu qu'il résulte des mentions de l'arrêt attaqué que les président et conseillers ayant siégé à l'audience de la chambre de l'instruction ont été désignés conformément à l'article 191 du code de procédure pénale ;
D'où il suit que le moyen doit être écarté ;
Sur le deuxième moyen de cassation, pris de la violation de l'article préliminaire, des articles 30, 33, 35, 49, 50, 85, 86, 175 et 184 dans leur rédaction, applicable en la cause, antérieure à la loi n° 2007-291 du 5 mars 2007, 206, 592 et 593 du code de procédure pénale, et de l'article 6 § 1 de la Convention européenne des droits de l'homme, défaut de motifs ;
"en ce que l'arrêt attaqué a confirmé l'ordonnance de non-lieu entreprise ;
"aux motifs que, s'agissant des moyens de nullité proposés par la partie civile pour violation de l'article 6 de la convention européenne des droits de l'homme aux motifs invoqués de la partialité du juge, de l'atteinte à l'égalité des armes et de la violation du devoir d'instruire, Alain X... d'une part, procède par la voie d'allégations relevant plus de l'attaque personnelle que d'une discussion objective et sérieuse d'éléments du dossier et, d'autre part, remet en cause le statut de la magistrature qui autorise, en conformité avec les règles nationales et européennes régissant le procès pénal, un magistrat à changer de fonctions et de passer, comme dans le cas présent, du siège au parquet ; que si M. Z... a été nommé procureur de la République de Nanterre, il n'est pas soutenu ni démontré que lorsqu'il a signé l'ordonnance entreprise, il avait été installé dans ses nouvelles fonctions, ce qui lui aurait fait perdre sa qualité de magistrat du siège et lui aurait interdit de rendre l'ordonnance de règlement de la procédure ; qu'au contraire, l'ordonnance du 23 avril 2007 a été signée par M. Philippe Z..., premier juge d'instruction au tribunal de grande instance de Paris ; que, si l'on doit regretter l'absence de motivation personnelle du juge d'instruction, lequel a purement et simplement adopté tant l'exposé des faits et de la procédure que la motivation du parquet, cette pratique antérieure à l'entrée en vigueur de la loi du 5 mars 2007 ne fait pas disparaître la volonté et la décision du juge d'instruction de faire siennes l'analyse et les conclusions du parquet et de statuer en exerçant les pouvoirs personnels qu'il tient des articles 176 et 177 du code de procédure pénale ;
"1°) alors que le juge d'instruction doit être en mesure de décider en toute indépendance s'il existe ou non des charges suffisantes contre quiconque d'avoir commis les infractions visées à la plainte ; que ne répond pas à l'exigence d'indépendance et d'impartialité le juge d'instruction qui, d'ores et déjà désigné par décret pour exercer les fonctions de procureur de la République de Nanterre est placé sous l'autorité du procureur général près la cour d'appel de Paris ; que M. Z..., qui avait été nommé procureur de la République de Nanterre par décret en date du 19 mars 2007, ne pouvait dès lors valablement prendre et signer l'ordonnance de renvoi en date du 23 avril 2007 ;
"2°) alors que les ordonnances de règlement indiquent la qualification légale du fait imputé à la personne mise en examen et, de façon précise, les motifs pour lesquels il existe ou non contre elle des charges suffisantes ; qu'il appartient au juge d'instruction, juge du siège ayant le devoir d'instruire à charge et à décharge, de décider lui-même, par une décision dont la motivation lui est personnelle, s'il existe ou non de telles charges ; qu'en décidant toutefois que l'ordonnance de renvoi entreprise, qui n'était que la copie mot pour mot du réquisitoire du parquet, n'encourait pas la nullité motif pris de ce que cette pratique antérieure à l'entrée en vigueur de la loi du 5 mars 2007 ne faisait pas disparaître la volonté et la décision du juge d'instruction de faire siennes l'analyse et les conclusions du parquet, la cour d'appel a violé l'article 184 du code de procédure pénale" ;
Attendu que le moyen, qui se borne à reprendre l'argumentation que, par une motivation exempte d'insuffisance comme de contradiction, la chambre de l'instruction a écartée, à bon droit, ne saurait être accueilli ;
Sur le troisième moyen de cassation, pris de la violation des articles L. 242-6 et L. 225-252 du code de commerce, 206, 591 et 593 du code de procédure pénale ;
"en ce que l'arrêt attaqué a dit qu'Alain X... n'est pas recevable à exercer l'action ut singuli au nom du Crédit Lyonnais ;
"aux motifs que la SA Crédit Lyonnais ayant pour nom commercial LCL-Le Crédit Lyonnais étant présente à l'audience, Alain X... n'est pas recevable à intervenir sur le fondement de l'article L. 225-252 du code de commerce ;
"alors que l'intervention du représentant légal de la société ne prive pas l'actionnaire de son droit propre de présenter des demandes au profit de la société et d'interjeter appel en son nom" ;
Attendu que, si c'est à tort que la chambre de l'instruction énonce, dans ses motifs, que, la société LCL-Le Crédit Lyonnais étant présente à l'audience, Alain X... n'est pas recevable à intervenir sur le fondement de l'article L. 225-252 du code de commerce, l'arrêt n'encourt néanmoins pas la censure, dès lors qu'il n'en a tiré aucune conséquence et a répondu au mémoire produit par ce dernier ;
Que le moyen ne saurait dès lors être accueilli ;
Sur le quatrième moyen de cassation, pris de la violation des articles 437 2° de la loi n° 66-537 du 24 juillet 1966 devenu l'article L. 242-6 2° du code de commerce, 121-1 et 121-7 du code pénal et 593 du code de procédure pénale, défaut de motifs ;
"en ce que l'arrêt attaqué a confirmé l'ordonnance de non-lieu entreprise du chef de présentation de bilans inexacts et de diffusion d'informations trompeuses et rejeté les demandes d'information d'Alain X... ;
"aux motifs que les juges d'instruction successifs ont utilement et avec succès, dès l'origine de cette procédure initiée par Alain X..., procédé aux investigations nécessaires à la manifestation de la vérité lorsque les faits dénoncés concernaient la gestion calamiteuse du Crédit Lyonnais sous la présidence de Jean-Yves A... ; qu'il aurait été contraire à la réalité de cette affaire de placer sur le même plan la gestion de Jean B... et les décisions prises dans la période considérée par la direction du Crédit Lyonnais et les organes de contrôle externe (commission bancaire, direction du Trésor) ; qu'en effet, il convient de ne pas oublier dans quelles conditions Jean B... a accepté la présidence du Crédit Lyonnais avec pour objectifs de sauver la personne morale, son personnel, ses clients et ses actionnaires et son approche que Jean B... qualifie lui-même à plusieurs reprises « d'intuitive » dans la mesure où, y compris pour l'arrêté des comptes 1993, de nouveaux sinistres sont apparus, l'étendue de ceux déjà connus a été modifiée et la mise en place de la structure de défaisance a été retardée et contrariée par des discussions complexes avec l'ensemble des parties prenantes à l'opération, sans que ces contretemps, hésitations, imprécisions et insuffisances relèvent d'une intention frauduleuse et d'une volonté de tromper les actionnaires ; que ces paramètres incontournables permettent de porter une appréciation plus équilibrée et objective sur le déroulement du deuxième volet de l'information judiciaire, sur le fait que les investigations n'ont pas été aussi complètes que la partie civile le souhaitait, encore que les experts judiciaires ont largement débordé le strict cadre du provisionnement du risque immobilier et ont émis, sans complaisance, un avis qui permet en l'état de statuer ; que l'information donnée au public par les organes de presse est un autre élément qui ne doit pas être occulté et qui a permis notamment aux actionnaires d'avoir une information complémentaire sur la réalité de la situation du Crédit Lyonnais, sur les incertitudes hypothéquant l'avenir de la banque au gré de la découverte de nouveaux sinistres ; que, d'ailleurs, Alain X... a saisi le juge d'instruction des faits d'abus de biens sociaux les 21 mars et 1er avril 2007 (D21 et D18) ; en se référant à un article de presse ; qu'enfin la partie civile respectueuse des principes directeurs du procès pénal, oublie qu'il convient également de respecter le délai raisonnable et de ne pas prolonger inutilement des investigations vouées à l'échec alors que les éléments déjà réunis permettent de statuer dans le respect des droits de toutes les parties ; que la partie civile n'a pas accepté les éléments qui ont été pris en compte par le juge d'instruction pour aboutir à un non lieu pour absence d'élément intentionnel du délit de présentation de comptes et bilans inexacts ; qu'en effet, il résulte des pièces de la procédure, des documents qui ont été saisis et des déclarations recueillies qu'aucun des participants à l'établissement des comptes, au moment de cette élaboration, n'a été mis en mesure d'en faire une évaluation précise, la plupart d'entre eux ayant le sentiment qu'il y avait lieu « pour l'avenir » de compléter le provisionnement arrêté ; que l'ampleur des pertes n'a été clairement déterminée qu'après l'approbation des comptes et non avant ; que des solutions pour remédier à cette situation ont été recherchées et adoptées : mise en place d'une structure de défaisance, recours à la garantie de l'Etat, étalement dans le temps du provisionnement ; que, par ailleurs, la responsabilité apparaît diluée entre les autorités étant intervenues dans les choix ayant prévalu lors de l'élaboration des comptes ; qu'enfin il convient de souligner que le nouveau président du Crédit Lyonnais, Jean B... a manifesté de façon affirmée sa volonté de changer la politique et de se démarquer des pratiques suivies par son prédécesseur ; qu'il y a lieu de tenir compte également de la situation très obérée qu'il a trouvée lors de sa prise de fonctions et de son souci de procéder au rétablissement de la banque ; que la cour approuve cette analyse dans la mesure où la situation des prévenus jugés dans le premier volet du dossier et condamnés le 23 février 2005 par la cour d'appel n'est pas comparable à celle de la nouvelle direction du Crédit Lyonnais qui a pris des décisions au fur et à mesure de la découverte des insuffisances de provisions, en avisant les autorités de tutelle et les contrôleurs internes de la banque et en mesurant les risques d'un provisionnement total et sur un seul exercice comptable ou en étalant les provisions sur plusieurs exercices, selon la pratique dite de place, contestée par la partie civile et les experts car ne répondant pas à l'orthodoxie comptable mais qui a finalement été autorisée par les autorités de tutelle rassurées par l'importante opération de défaisance, en partie garantie par l'Etat, afin d'assurer la pérennité de la banque, non pas en fraude des droits des actionnaires ;
"alors que tout arrêt de la chambre de l'instruction doit comporter les motifs propres à justifier la décision et répondre aux articulations essentielles des mémoires des parties, l'insuffisance de motifs équivalant à leur absence ; que le délit de présentation de comptes infidèles est constitué par la seule connaissance par les dirigeants du caractère irrégulier des comptes publiés ; qu'en retenant, pour confirmer l'ordonnance de non-lieu et rejeter les demandes d'information d'Alain X..., que l'élément intentionnel faisait défaut au motif du mobile honorable poursuivi par les protagonistes de l'affaire, à savoir sauver la banque dont la situation était très obérée, sans répondre aux articulations essentielles du mémoire d'Alain X... selon lesquelles la volonté de dissimulation de la situation réelle de la banque et l'objectif d'un sous-provisionnement délibéré étaient partagés en vue de l'arrêté des comptes, l'arrêt attaqué, motivé en pure opportunité, ne satisfait pas, en la forme, aux conditions essentielles de son existence légale" ;
Sur le cinquième moyen de cassation, pris de la violation des articles L. 225-38 et L. 242-6 3° et 4° du code de commerce, 85, 86 et 593 du code de procédure pénale, 6 de la Convention européenne des droits de l'homme, défaut de motifs ;
"en ce que l'arrêt attaqué a confirmé l'ordonnance de non-lieu entreprise du chef d'abus de pouvoir et de voix ;
"aux motifs que, sur les infractions d'abus de pouvoirs visées par la partie civile relatives à ces opérations dans la mesure où François C..., administrateur du Crédit Lyonnais, était indirectement intéressé à ces conventions qui concernaient la société Artemis dont il était le président et principal actionnaire, les éléments du dossier sont insuffisants pour caractériser cette infraction ;
"alors que tout arrêt de la chambre de l'instruction doit comporter les motifs propres à justifier la décision et répondre aux articulations essentielles des mémoires des parties, l'insuffisance de motifs équivalant à leur absence ; qu'Alain X... faisait précisément valoir que l'infraction prévue par l'article L. 225-38 était nécessairement constituée dès lors que des conventions avaient été passées, sans autorisation du conseil d'administration du Crédit Lyonnais, avec la société Artemis, dirigée par François C..., administrateur du Crédit Lyonnais, cependant que Jean B... était lui-même associé de la SARL
C...
Truste ; qu'en se bornant à énoncer que « les éléments du dossier sont insuffisants pour caractériser l'infraction », l'arrêt attaqué ne répond pas aux articulations essentielles du mémoire de la partie civile et ne répond pas, en la forme, aux conditions essentielles de son existence légale" ;
Les moyens étant réunis ;
Attendu que les énonciations de l'arrêt attaqué mettent la Cour de cassation en mesure de s'assurer que, pour confirmer l'ordonnance de non-lieu entreprise, la chambre de l'instruction, après avoir analysé l'ensemble des faits dénoncés dans la plainte et répondu aux articulations essentielles du mémoire produit par la partie civile appelante, a exposé les motifs pour lesquels elle a estimé qu'il n'existait pas de charges suffisantes contre quiconque d'avoir commis les délits reprochés, ni toute autre infraction ;
Que le demandeur se borne à critiquer ces motifs, sans justifier d'aucun des griefs que l'article 575 du code de procédure pénale autorise la partie civile à formuler à l'appui de son pourvoi contre un arrêt de chambre de l'instruction en l'absence de recours du ministère public ;
Que, dès lors, moyens sont irrecevables ;
Et attendu que l'arrêt est régulier en la forme ;
REJETTE le pourvoi ;
Ainsi jugé et prononcé par la Cour de cassation, chambre criminelle, en son audience publique, les jour, mois et an que dessus ;
Etaient présents aux débats et au délibéré, dans la formation prévue à l'article 567-1-1 du code de procédure pénale : M. Louvel président, Mme Ract-Madoux conseiller rapporteur, M. Dulin conseiller de la chambre ;
Greffier de chambre : Mme Daudé ;
En foi de quoi le présent arrêt a été signé par le président, le rapporteur et le greffier de chambre ;


Synthèse
Formation : Chambre criminelle
Numéro d'arrêt : 09-82500
Date de la décision : 24/03/2010
Sens de l'arrêt : Rejet
Type d'affaire : Criminelle

Références :

Décision attaquée : Chambre de l'instruction de la cour d'appel de Paris, 03 février 2009


Publications
Proposition de citation : Cass. Crim., 24 mar. 2010, pourvoi n°09-82500


Composition du Tribunal
Président : M. Louvel (président)
Avocat(s) : SCP Gaschignard, SCP Vier, Barthélemy et Matuchansky

Origine de la décision
Date de l'import : 15/09/2022
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CCASS:2010:09.82500
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