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24/03/2010 | FRANCE | N°08-44441

France | France, Cour de cassation, Chambre sociale, 24 mars 2010, 08-44441


LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l'arrêt suivant :

Sur le moyen unique :
Vu l'article 1273 du code civil ;
Attendu, selon l'arrêt attaqué, que Mme X..., engagée par la société Séduction à compter du 1er janvier 1985, en qualité de directrice commerciale, a été licenciée le 4 octobre 2002 pour motif économique ; que la société a été mise en liquidation judiciaire le 13 juin 2005 ; que Mme X... a saisi la juridiction prud'homale d'une demande à titre de rappel de salaires et congés payés afférents ;
Attendu que pour débouter la salariée de sa

demande, l'arrêt retient que l'intéressée, directrice commerciale d'une société ayan...

LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l'arrêt suivant :

Sur le moyen unique :
Vu l'article 1273 du code civil ;
Attendu, selon l'arrêt attaqué, que Mme X..., engagée par la société Séduction à compter du 1er janvier 1985, en qualité de directrice commerciale, a été licenciée le 4 octobre 2002 pour motif économique ; que la société a été mise en liquidation judiciaire le 13 juin 2005 ; que Mme X... a saisi la juridiction prud'homale d'une demande à titre de rappel de salaires et congés payés afférents ;
Attendu que pour débouter la salariée de sa demande, l'arrêt retient que l'intéressée, directrice commerciale d'une société ayant le caractère d'une entreprise familiale dont les parts étaient détenues par son mari, son fils et elle-même, avait, afin de favoriser la société dans laquelle elle avait des intérêts importants, attendu la liquidation judiciaire pour réclamer ses salaires, s'était ainsi positionnée de façon identique à son mari gérant et avait adhéré au paiement prioritaire des fournisseurs et que, de ce fait, il y avait eu novation de sa créance salariale en une créance commerciale ;
Qu'en statuant ainsi, alors qu'elle ne pouvait déduire d'une absence de réclamation de paiement de salaires motivée par le souci de permettre à l'entreprise de surmonter ses difficultés de trésorerie une volonté non équivoque de la salariée d'éteindre l'obligation de paiement de ses salaires née du contrat de travail pour lui substituer une obligation nouvelle de nature commerciale, la cour d'appel a violé le texte susvisé ;

PAR CES MOTIFS :
CASSE ET ANNULE, dans toutes ses dispositions, l'arrêt rendu le 1er juillet 2008, entre les parties, par la cour d'appel de Paris ; remet, en conséquence, la cause et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant ledit arrêt et, pour être fait droit, les renvoie devant la cour d'appel de Paris, autrement composée ;
Condamne Mme Y..., ès qualités aux dépens ;
Vu l'article 700 du code de procédure civile, la condamne à payer à Mme X... la somme de 2 500 euros ;
Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite de l'arrêt cassé ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre sociale, et prononcé par le président en son audience publique du vingt-quatre mars deux mille dix.

MOYEN ANNEXE au présent arrêt :


Moyen produit par la SCP Masse-Dessen et Thouvenin, avocat aux Conseils pour Mme X...

Le moyen fait grief à l'arrêt confirmatif attaqué d'AVOIR considéré qu'il y avait au novation de la créance salariale de Madame X... en créance commerciale et de l'AVOIR en conséquence déboutée de sa demande tendant à fixer au passif de la société SEDUCTION la somme de 45.727,45 euros net au titre des salaries du 1er février au 3 décembre 2002.
AUX MOTIFS propres QU'il résulte des pièces versées aux débats que la société SEDUCTION était une entreprise familiale dont les parts étaient détenues jusqu'au 24 mai 2002 à raison de 25 % par l'époux de Madame X..., Guy X..., à raison de 55% par son fils Yohan X..., et à raison de 25% par elle-même. Madame X... a cédé ses parts à Mademoiselle A... le 24 mai 2002 tandis que le mari et le fils de l'intéressée ont gardé leur part et Monsieur Guy X... est resté gérant de la société dont Madame X... avait elle-même exercé la gérance entre 1994 et 1998 ; qu'il résulte ainsi des éléments versés aux débats qu'au regard de sa position d'épouse et de mère des porteurs de parts majoritaires et de ses liens avec le gérant, Madame X... avait intérêt à ne pas percevoir ses salaires pour générer de la trésorerie au profit de la société et lui permettre de faire face aux règlements alors que la société se trouvait en situation difficile ; qu'il est en effet établi que Madame X... a volontairement omis de réclamer le paiement de ses salaires pendant la période qui précédait son licenciement pour motif économique et celle du préavis ainsi que cela résulte d'une lettre du 12 novembre 2005 adressée par Madame X... à l'AGS précisant : « Il est vrai que je n'ai jamais écrit à la SARL SEDUCTION pour obtenir le paiement des salaires qui m'étaient dus. Mon mari qui était le gérant de la société a préféré payer ses fournisseurs en priorité et il est bien évident que je n'allais pas lui adresser un courrier pour lui réclamer le paiement de mes salaires » ; qu'en l'espèce, Madame X... a été licenciée pour motif économique le 4 octobre 2002 et ce n'est que trois ans et demi plus tard, postérieurement à la liquidation judiciaire de la société que Madame X... a saisi le Conseil de prud'hommes pour obtenir le paiement de salaires ; que cette attitude a eu pour conséquence de modifier la nature de la créance qui s'est trouvée novée en créance commerciale non susceptible de bénéficier de la garantie de l'AGS ; qu'en effet, s'il est vrai que l'intention de nover ne se présume pas, il résulte en l'espèce des faits de la cause que Madame X..., qui n'a pas perçu de rémunération pendant une partie de l'année 2002, n'a réclamé le paiement de ses salaires que postérieurement à la liquidation judiciaire pour favoriser la société dans laquelle elle avait des intérêts importants ; que, dès lors, c'est à juste titre que le Conseil de prud'hommes a relevé que Madame X... avait attendu la liquidation judiciaire pour réclamer ses salaires, qu'elle s'est ainsi positionnée de façon identique à son mari gérant et a adhéré au paiement prioritaire des fournisseurs et a décidé que, de ce fait, sa créance salariale s'est transformée et a constaté qu'il y avait novation de créance de salariale en commerciale.
AUX MOTIFS adoptés QUE Madame X... a attendu la liquidation judiciaire pour réclamer ses salaires, qu'elle n'a jamais réclamé auparavant ; qu'elle se positionne alors de façon identique à son mari gérant ; qu'elle adhère au paiement prioritaire des fournisseurs ; que de ce fait, sa créance salariale prioritaire se transforme ; qu'il y a novation de créance, de salariale en commerciale, en donnant priorité aux choix du gérant, son mari.
ALORS QU'il résulte de l'article 1273 du Code civil que la novation ne peut résulter que d'actes positifs démontrant sans équivoque une intention de nover ; que, pour retenir l'existence d'une novation de la créance de salaires de Madame X... en une créance commerciale, la Cour d'appel s'est fondée sur la qualité d'épouse et de mère des porteurs de parts majoritaires, sur ses liens avec le gérant, son époux, et sur le caractère tardif de la réclamation, cependant non prescrite, de ses salaires de l'année 2002 postérieurement à la liquidation judiciaire de la société aux fins de favoriser la société ; qu'en statuant ainsi, par des motifs impropres à caractériser une volonté claire et non équivoque de nover sa créance la Cour d'appel a violé l'article susvisé.
ALORS encore à cet égard QUE Madame X... avait fait valoir que sa créance avait fait l'objet d'acomptes réguliers versés postérieurement à son licenciement entre le 1er avril 2004 et le 25 avril 2005, lesquels excluaient son intention de transformer la nature salariale de sa créance ; qu'en omettant de vérifier, comme il était soutenu, si ces acomptes partiels n'infirmaient pas toute volonté de la salariée de renoncer à sa créance salariale, la Cour d'appel n'a pas légalement justifié sa décision au regard de l'article 1273 du Code civil.


Synthèse
Formation : Chambre sociale
Numéro d'arrêt : 08-44441
Date de la décision : 24/03/2010
Sens de l'arrêt : Cassation
Type d'affaire : Sociale

Références :

ARRET du 01 juillet 2008, Cour d'appel de Paris, 1 juillet 2008, 06/12456

Décision attaquée : Cour d'appel de Paris, 01 juillet 2008


Publications
Proposition de citation : Cass. Soc., 24 mar. 2010, pourvoi n°08-44441


Composition du Tribunal
Président : M. Linden (conseiller le plus ancien faisant fonction de président)
Avocat(s) : Me Bertrand, SCP Masse-Dessen et Thouvenin

Origine de la décision
Date de l'import : 15/09/2022
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CCASS:2010:08.44441
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