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24/03/2010 | FRANCE | N°08-43114

France | France, Cour de cassation, Chambre sociale, 24 mars 2010, 08-43114


LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l'arrêt suivant :

Attendu, selon l'arrêt attaqué, que Mme X..., engagée par la société Hôtel Ritz Limited à compter du 3 septembre 2001 en qualité de harpiste, a été licenciée par lettre du 3 janvier 2003 pour motif économique en raison des difficultés économiques rencontrées par la société depuis plusieurs années et de la nécessité de sauvegarder la compétitivité de l'entreprise ; que la salariée, contestant cette mesure et soutenant avoir travaillé dans le cadre d'un contrat à durée indéterminée à temps plei

n, a saisi la juridiction prud'homale de diverses demandes ;
Sur le premier moyen :...

LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l'arrêt suivant :

Attendu, selon l'arrêt attaqué, que Mme X..., engagée par la société Hôtel Ritz Limited à compter du 3 septembre 2001 en qualité de harpiste, a été licenciée par lettre du 3 janvier 2003 pour motif économique en raison des difficultés économiques rencontrées par la société depuis plusieurs années et de la nécessité de sauvegarder la compétitivité de l'entreprise ; que la salariée, contestant cette mesure et soutenant avoir travaillé dans le cadre d'un contrat à durée indéterminée à temps plein, a saisi la juridiction prud'homale de diverses demandes ;
Sur le premier moyen :
Vu l'article L. 3123-4 du code du travail ;
Attendu que pour débouter la salariée de ses demandes en requalification de son contrat de travail en un contrat à temps complet et paiement de dommages-intérêts en réparation du préjudice lié à la non-fourniture de travail à temps plein, l'arrêt retient qu'il ressort des feuilles de temps produites par l'employeur que la salariée, qui n'avait vocation à exercer son activité que l'après-midi ou en soirée, ne travaillait pas à temps complet, qu'il en résulte que la salariée avait la liberté de son temps au moins toutes les matinées, qu'elle ne dément pas qu'il lui était possible de refuser les vacations qui lui étaient proposées, que, par ailleurs, jusqu'en septembre 2004, elle a travaillé pour le conservatoire de Maison Lafitte, qu'enfin, dans un courrier qu'elle adressait à son employeur le 28 janvier 2003 aux termes duquel elle sollicitait la requalification de la relation contractuelle en un contrat à durée indéterminée, elle demandait l'établissement d'un contrat de travail à temps partiel annualisé et une limite à ses heures complémentaires avec une rémunération décomposée pour quatre heures travaillées par jour ;
Qu'en statuant ainsi, sans caractériser le fait que la salariée n'était pas placée dans l'impossibilité de prévoir à quel rythme elle devait travailler et qu'elle n'était pas dans l'obligation de se tenir constamment à la disposition de l'employeur, la cour d'appel a violé le texte susvisé ;
Et sur le second moyen, pris en ses troisième et quatrième branches :
Vu l'article L. 1233-4 du code du travail ;
Attendu que pour débouter la salariée de sa demande de dommages-intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse, l'arrêt retient, par motifs propres, que les résultats de l'entreprise étaient largement déficitaires depuis 1999, que dans son projet de réorganisation, l'employeur constatait, sans être démenti sur ce point, une « intensification de la concurrence», que les éléments produits justifient que la société Hôtel Ritz procède à des mesures de nature à sauvegarder sa compétitivité, que le poste de Mme X... avait bien été supprimé, que son reclassement en tant que musicienne s'est avéré impossible et, par motifs adoptés, que l'employeur, confronté à des difficultés économiques, avait décidé dans ce cadre de supprimer une partie de son personnel parmi ceux qui assuraient une animation musicale au sein de l'établissement, que ces choix stratégiques ne peuvent être remis en cause quand bien même ils apparaîtraient surprenants, qu'au regard des chiffres présentés sur le chute des revenus de l'hôtel, le licenciement économique peut être justifié, que l'employeur a considéré qu'il n'était pas en mesure de proposer un reclassement à Mme X..., notamment en raison de sa qualification professionnelle de harpiste, qu'en tout état de cause elle n'a jamais fait valoir une éventuelle demande de reclassement sur un emploi du secteur restauration et qu'aucun poste de harpiste n'avait été créé depuis son licenciement ;
Qu'en statuant comme elle a fait, alors qu'il résulte de ses constatations que l'employeur n'avait pas fait à la salariée d'offres de reclassement écrites et précises, sur un emploi relevant de la même catégorie que celui qu'elle occupait ou sur un emploi équivalent ou, à défaut, et sous réserve de l'accord exprès de l'intéressée, sur un emploi d'une catégorie inférieure, la cour d'appel, qui n'a pas tiré les conséquences de ces constatations, a violé le texte susvisé ;
PAR CES MOTIFS, et sans qu'il y ait lieu de statuer sur les première et deuxième branches du second moyen :
CASSE ET ANNULE, mais seulement en ses dispositions déboutant la salariée de ses demandes en requalification de son contrat de travail à temps partiel en un contrat à temps complet et paiement de dommages-intérêts en réparation du préjudice lié à la non-fourniture de travail à temps plein et de sa demande de dommages-intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse, l'arrêt rendu le 6 mai 2008, entre les parties, par la cour d'appel de Paris ; remet, en conséquence, sur ce point, la cause et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant ledit arrêt et, pour être fait droit, les renvoie devant la cour d'appel de Paris, autrement composée ;
Condamne la société The Ritz Hôtel Limited aux dépens ;
Vu l'article 700 du code de procédure civile, condamne la société The Ritz Hôtel Limited à payer à Mme X... la somme de 2 500 euros ;
Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite de l'arrêt partiellement cassé ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre sociale, et prononcé par le président en son audience publique du vingt-quatre mars deux mille dix.

MOYENS ANNEXES au présent arrêt :


Moyens produits par Me Haas, avocat aux Conseils pour Mme X....
PREMIER MOYEN DE CASSATION :

Il est fait grief à l'arrêt attaqué, infirmatif de ce chef, D'AVOIR débouté Mme X... de ses demandes en requalification de son contrat de travail en un contrat à temps complet et paiement de dommages-intérêts en réparation du préjudice lié à la non-fourniture de travail à temps plein ;
AUX MOTIFS QU'il ressort des feuilles de temps produites par l'employeur que la salariée, qui n'avait vocation à exercer son activité que l'après-midi ou en soirée, ne travaillait pas à temps complet ; qu'il en résulte que la salariée avait la liberté de son temps au moins toutes les matinées ; qu'elle ne dément pas qu'il lui était possible de refuser les vacations qui lui étaient proposées ; que, par ailleurs, jusqu'en septembre 2004, elle a travaillé pour le Conservatoire de Maison Lafitte ; qu'enfin, dans un courrier qu'elle adressait à son employeur le 28 janvier 2003 aux termes duquel elle sollicitait la requalification de la relation contractuelle en un contrat à durée indéterminée, elle demandait l'établissement d'un contrat de travail à temps partiel annualisé et une limite à ses heures complémentaires avec une rémunération décomposée pour quatre heures travaillées par jour ; que Mme X... était bien salariée à temps partiel ;
ALORS QU'en l'absence d'un écrit constatant l'existence d'un contrat de travail à temps partiel, le contrat est présumé avoir été conclu pour un temps complet ; qu'il incombe à l'employeur qui conteste cette présomption de rapporter la preuve, d'une part, qu'il s'agissait d'un emploi à temps partiel, d'autre part, que le salarié n'était pas placé dans l'impossibilité de prévoir à quel rythme il devait travailler et qu'il n'était pas dans l'obligation de se tenir constamment à la disposition de l'employeur ; qu'en se déterminant par des considérations dont il ne résulte pas que l'employeur ait rapporté la preuve que la salariée était à même de prévoir quand et à quel rythme il serait fait appel à ses services, la cour d'appel n'a pas donné de base légale à sa décision au regard de l'article L. 3123-4 du code du travail.
SECOND MOYEN DE CASSATION :

Il est fait grief à l'arrêt attaqué D'AVOIR débouté Mme X... de sa demande de dommages-intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse ;
AUX MOTIFS PROPRES QUE les résultats de l'entreprise étaient largement déficitaires depuis 1999 ; que dans son projet de réorganisation, l'employeur constatait, sans être démenti sur ce point, une « intensification de la concurrence » en raison de la réouverture des établissements de prestige après remise aux normes et de nouveaux établissements rue de la Paix et rue de Courcelles pour un montant total de 668 nouvelles chambres dans le coeur de Paris ; que ces éléments justifiaient que la société Hôtel Ritz procède à des mesures de nature à sauvegarder sa compétitivité ; que le poste de Mme X... a bien été supprimé ; que son reclassement en tant que musicienne s'est avéré impossible ;
ET AUX MOTIFS ADOPTES QUE l'employeur produit des éléments dont il résulte qu'il rencontre des difficultés économiques depuis plusieurs années ; qu'il a décidé dans ce cadre de supprimer une partie de son personnel parmi ceux qui assuraient une animation musicale au sein de l'établissement ; que ces choix stratégiques ne peuvent être remis en cause quand bien même ils apparaîtraient surprenants ; qu'au regard des chiffres présentés sur le chute des revenus de l'hôtel, le licenciement économique peut être justifié ; que l'employeur a considéré qu'il n'était pas en mesure de proposer un reclassement à Mme X..., notamment en raison de sa qualification professionnelle de harpiste ; qu'en tout état de cause elle n'a jamais fait valoir une éventuelle demande de reclassement sur un emploi du secteur restauration ; qu'aucun poste de harpiste n'a été créé depuis son licenciement ;
ALORS, en premier lieu, QU'en ne recherchant pas, comme elle y était pourtant invitée, si la réorganisation dans le cadre de laquelle avait été décidée la suppression de l'emploi de harpiste occupé par Mme X... était indispensable à la sauvegarde de la compétitivité de l'entreprise, la cour d'appel n'a pas donné de base légale à sa décision au regard de l'article L. 1233-3 du code du travail ;
ALORS, en deuxième lieu, QUE la lettre de licenciement fixe les limites du litige ; qu'en considérant, par motifs adoptés, que les difficultés économiques invoquées constituaient une cause économique de licenciement, cependant que, dans la lettre de licenciement, l'employeur se prévalait uniquement d'une réorganisation destinée à sauvegarder la compétitivité de l'entreprise, la cour d'appel a violé l'article L. 1232-6 du code du travail ;
ALORS, en troisième lieu, QUE dans le cadre de son obligation de reclassement dans l'entreprise, l'employeur doit, en cas de suppression ou transformation d'emplois, proposer aux salariés concernés des emplois disponibles de même catégorie, ou, à défaut, de catégorie inférieure, fût- ce par voie de modification substantielle des contrats de travail ; qu'en se bornant à relever, pour retenir que l'employeur avait satisfait à son obligation de reclassement, que le reclassement de l'intéressée «en tant que musicienne» s'était avéré impossible, sans rechercher si des emplois d'une autre nature n'auraient pas pu lui être proposés, la cour d'appel n'a pas donné de base légale à sa décision au regard de l'article L. 1233-4 du code du travail ;
ALORS, en quatrième lieu, QUE les contours de l'obligation de reclassement pesant sur l'employeur ne dépendent pas des souhaits ou demandes formulés par le salarié dont le licenciement est envisagé ; qu'en considérant, par motifs adoptés, que la salariée n'avait jamais demandé à être reclassée sur un emploi du secteur restauration, cependant qu'il appartenait à l'employeur de prendre l'initiative de lui proposer les emplois disponibles qu'elle était susceptible d'occuper, la cour d'appel a violé l'article L. 1233-4 du code du travail.


Synthèse
Formation : Chambre sociale
Numéro d'arrêt : 08-43114
Date de la décision : 24/03/2010
Sens de l'arrêt : Cassation partielle
Type d'affaire : Sociale

Références :

ARRET du 06 mai 2008, Cour d'appel de Paris, 6 mai 2008, 06/11562

Décision attaquée : Cour d'appel de Paris, 06 mai 2008


Publications
Proposition de citation : Cass. Soc., 24 mar. 2010, pourvoi n°08-43114


Composition du Tribunal
Président : M. Gosselin (conseiller le plus ancien faisant fonction de président)
Avocat(s) : Me Haas, SCP Célice, Blancpain et Soltner

Origine de la décision
Date de l'import : 15/09/2022
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CCASS:2010:08.43114
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