La jurisprudence francophone des Cours suprêmes


recherche avancée

10/03/2010 | FRANCE | N°09-81948

France | France, Cour de cassation, Chambre criminelle, 10 mars 2010, 09-81948


Statuant sur les pourvois formés par :
- X... Amir,- Y... Sofiane,

contre l'arrêt de la cour d'appel de DOUAI, 4e chambre, en date du 20 janvier 2009, qui a condamné le premier, pour infractions à la législation sur les stupéfiants en récidive, détention et transport de marchandises prohibées, à quatre ans d'emprisonnement, à une amende douanière et, pour prise du nom d'un tiers, à six mois d'emprisonnement, le second, pour infractions à la législation sur les stupéfiants, détention et transport de marchandises prohibées, à trois ans d'emprisonnement, dix ans d'in

terdiction du territoire français, à une amende douanière et, pour prise du...

Statuant sur les pourvois formés par :
- X... Amir,- Y... Sofiane,

contre l'arrêt de la cour d'appel de DOUAI, 4e chambre, en date du 20 janvier 2009, qui a condamné le premier, pour infractions à la législation sur les stupéfiants en récidive, détention et transport de marchandises prohibées, à quatre ans d'emprisonnement, à une amende douanière et, pour prise du nom d'un tiers, à six mois d'emprisonnement, le second, pour infractions à la législation sur les stupéfiants, détention et transport de marchandises prohibées, à trois ans d'emprisonnement, dix ans d'interdiction du territoire français, à une amende douanière et, pour prise du nom d'un tiers en récidive, à deux ans d'emprisonnement, a décerné mandat de dépôt, et a ordonné des mesures de confiscation ;
Joignant les pourvois en raison de la connexité ;
Vu le mémoire commun aux demandeurs et le mémoire en défense produits ;
Sur le premier moyen de cassation, pris de la violation des articles 31, 32, 513, 547 et 592 du code de procédure pénale ;
" en ce qu'il ne ressort nullement des mentions de l'arrêt attaqué que le représentant du procureur général près la cour d'appel de Douai était présent lorsque la décision a été prononcée " ;
Attendu que l'arrêt mentionne l'audition du ministère public à l'audience des débats ;
Attendu qu'en cet état, il n'importe qu'il ne soit pas fait mention de sa présence lors du prononcé de la décision, dès lors que, selon l'article 592 du code de procédure pénale, seules sont déclarées nulles les décisions rendues sans que le ministère public ait été entendu ;
D'où il suit que le moyen ne peut qu'être écarté ;
Sur le deuxième moyen de cassation, pris de la violation des articles 397-1, 591 à 593 du code de procédure pénale, défaut de motifs, manque de base légale, dénaturation des pièces de la procédure ;
" en ce que l'arrêt attaqué a annulé le jugement du tribunal correctionnel de Valenciennes en date du 29 décembre 2008 ayant renvoyé l'audience de jugement au 23 mars 2009 ;
" aux motifs qu'il ressort des dispositions de l'article 397-1, alinéa 2, du code de procédure pénale, que le prévenu qui encourt une peine d'emprisonnement supérieure ou égale à sept ans, peut, par exception au délai de droit commun de six semaines, demander à ce que l'affaire soit renvoyée à une audience de comparution immédiate sur le fond qui devra avoir lieu dans un délai qui ne peut être inférieur à deux mois, sans être supérieur à quatre mois, ces dispositions, qui dérogent à l'article 397-1, alinéa 1, du code de procédure pénale, nécessitant une demande du prévenu qui doit au préalable être informé de l'étendue de ses droits ; en l'espèce, le tribunal saisi, selon la procédure de comparution immédiate à l'encontre d'Amir X... et de Sofiane Y..., a renvoyé l'affaire sur le fond à une audience devant se tenir dans un délai supérieur à six semaines, alors pourtant qu'aucune demande expresse n'avait été formulée par les prévenus en ce sens ;
" alors qu'en vertu de l'article 397-1, alinéa 2, du code de procédure pénale, lorsque la peine encourue est supérieure à sept ans d'emprisonnement, le prévenu, informé de l'étendue de ses droits, peut demander que l'affaire soit renvoyée à une audience qui devra avoir lieu dans un délai qui ne peut être inférieur à deux mois ; qu'en l'espèce, le tribunal correctionnel de Valenciennes, saisi le 29 décembre 2008 selon la procédure de comparution immédiate pour des prévenus encourant une peine supérieure à sept ans d'emprisonnement, a renvoyé l'affaire à une nouvelle audience du 23 mars 2009, après que les prévenus ont demandé un délai pour préparer leur défense ; que, dès lors, en retenant, pour annuler ce jugement, qu'aucune demande expresse n'avait été formulée par les prévenus dans le sens d'un renvoi dans un délai supérieur à six semaines, la cour d'appel a ajouté une condition non prévue par la loi et ainsi a violé les textes et principes susvisés " ;
Attendu qu'il résulte de l'arrêt attaqué et des pièces de procédure qu'Amir X... et Sofiane Y... ont été traduits le 29 décembre 2008, selon la procédure de comparution immédiate, devant le tribunal correctionnel des chefs, notamment, d'infractions à la législation sur les stupéfiants ; que, les prévenus ayant sollicité un délai pour préparer leur défense, l'affaire a été renvoyée à l'audience du 23 mars 2009 ;
Attendu que, pour faire droit à l'appel du ministère public, le déclarer immédiatement recevable, annuler le jugement, évoquer et statuer au fond, la cour d'appel prononce par les motifs repris au moyen ;
Attendu qu'en se déterminant ainsi, et dès lors que les prévenus, informés de l'étendue de leurs droits, n'ont pas expressément demandé l'application des dispositions de l'article 397-1, alinéa 2, du code de procédure pénale, la cour d'appel a justifié sa décision ;
D'où il suit que le moyen ne saurait être accueilli ;
Sur le troisième moyen de cassation, pris de la violation des articles 5 et 6 de la Convention européenne des droits de l'homme, de l'article préliminaire et des articles 63-1, 591 à 593 du code de procédure pénale, défaut de motifs, manque de base légale, ensemble dénaturation des pièces de la procédure, violation du principe de loyauté et des droits de la défense ;
" en ce que l'arrêt attaqué a refusé d'annuler les mesures de garde à vue d'Amir X... et Sofiane Y..., ainsi que tous les actes subséquents dont elles sont le support nécessaire ;
" aux motifs que l'article 63-1 du code de procédure pénale dispose en son premier alinéa que toute personne gardée à vue doit être informée immédiatement par un officier de police judiciaire, ou, sous le contrôle de celui-ci, par un agent de police judiciaire, de la nature de l'infraction sur laquelle porte l'enquête ; il est soutenu par la défense des prévenus in limine litis que la notification de placement en garde à vue des intéressés serait nulle puisque les procès-verbaux de notification indiquent « que pour les nécessités de l'enquête et au vu d'une ou plusieurs raisons plausibles de soupçonner qu'il a commis ou tenté de commettre l'infraction de ILS (trafic) » ils sont placés en garde à vue et que le terme « ILS (trafic) » ne correspond à aucune infraction prévue dans le code pénal ou par tout autre texte ; toutefois, tant Amir X... que Sofiane Y... avaient fait l'objet d'une interpellation et d'une rétention par les services des douanes avant la procédure policière et avaient tous deux été interpellés et s'étaient tous deux expliqués, comme en attestent les procès-verbaux n° 69-1 / 5 folio 2, 69 4 / 5 folio 1, 2 et 69 5 / 5 folio 1 et 2 qui figurent dans la procédure, sur les « stupéfiants », le terme exact étant repris dans leurs auditions, qui se trouvaient dans le véhicule ; la cour considère dès lors qu'ils avaient été, préalablement à la notification de l'article 63-1 du code pénal par les services de police, parfaitement informés de la nature des infractions qui leur étaient reprochés ; la cour ajoute que lors de la notification de la retenue douanière que les deux intéressés ont signée à dix-huit heures cinquante (PV des douanes n° 69 2 / 5 folio 1 et PV n° 69 3 / 5 folio 1) il est indiqué le motif de la rétention, à savoir circulation irrégulière de marchandises prohibées (stupéfiants), ce qui démontre là encore la parfaite information qu'avaient Amir X... et Sofiane Y... des motifs de leur rétention puis de la garde à vue ;
" 1°) alors, qu'en vertu de l'article 63-1 du code de procédure pénale, la personne gardée à vue doit être avisée de la nature de l'infraction sur laquelle porte l'enquête et ne peut être entendue que sur les faits se rapportant à ladite infraction ; que, dès lors que l'officier de police judiciaire a notifié à Amir X... et Sofiane Y... qu'ils étaient placés en garde à vue pour les nécessités de l'enquête et au vu d'une ou plusieurs raisons plausibles de soupçonner qu'ils ont commis ou tenté de commettre l'infraction de ILS (trafic), termes qui ne correspondent à aucune infraction prévue dans le code pénal ou par tout autre texte et qui ne permettaient pas aux gardés à vue de connaître la nature de l'infraction sur laquelle portait l'enquête, les gardes à vue ainsi que tous les actes dont elles étaient le support nécessaire devaient être annulés ;
" 2°) alors que, l'accomplissement de la formalité substantielle d'information de la nature de l'infraction doit résulter sans ambiguïté de la procédure de garde à vue ; que dès lors, la cour d'appel ne pouvait pas se satisfaire, pour justifier de l'accomplissement de la notification de la nature de l'infraction sur laquelle porte l'enquête, du fait que lors des rétentions douanières un agent des douanes, qui n'était ni officier de police judiciaire, ni agent de police judiciaire, aurait indiqué aux retenus qu'elles portaient sur la circulation irrégulière de marchandises prohibées (stupéfiants), infraction qui est de nature différente de celles sur lesquelles avait porté la garde à vue ; que dès lors, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard des textes susvisés ;
" 3°) alors que, enfin, la cour d'appel ne pouvait pas non plus se borner à relever que lors des retenues douanières, Amir X... et Sofiane Y... s'étaient expliqués sur la présence de « stupéfiants » dans le véhicule Renault Twingo ; que de telles circonstances ne permettaient pas de suppléer l'irrégularité de la notification des infractions reprochées lors de leur garde à vue ; que ce faisant, la cour d'appel n'a pas légalement justifié sa décision au regard de l'article 63-1 du code de procédure pénale " ;
Attendu que le moyen, qui se borne à reprendre l'argumentation que, par une motivation exempte d'insuffisance comme de contradiction, la cour d'appel a écartée à bon droit, ne saurait être admis ;
Mais sur le quatrième moyen de cassation, pris de la violation des articles 434-23, 591 à 593 du code de procédure pénale, défaut de motifs, manque de base légale ;
" en ce que l'arrêt attaqué a déclaré Amir X... et Sofiane Y... coupables d'usurpation d'identité et en répression les a respectivement condamnés à six mois et deux ans d'emprisonnement ferme ;
" aux motifs que les deux prévenus ont été interpellés en flagrant délit de possession des six kilos de résines de cannabis dissimulés dans le véhicule de Sofiane Y..., qu'ils ont tous deux donné une fausse identité et fourni des documents à d'autres noms, ce qui révèle leur volonté d'échapper à des poursuites ;
" alors que le délit d'usurpation d'identité civil n'est constitué qu'autant que la personne dont l'identité a été usurpée existe réellement ; qu'en l'espèce, la cour d'appel, pour condamner Amir X... et Sofiane Y... du chef d'usurpation d'identité, s'est bornée à relever qu'ils ont tous deux donné une fausse identité et fourni des documents à d'autres noms, ce qui révèle leur volonté d'échapper à des poursuites ; que, dès lors, en statuant ainsi, sans rechercher si les noms pris par les prévenus était ceux de tiers existants réellement, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard des textes susvisés " ;
Vu l'article 434-23 du code pénal, ensemble l'article 593 du code de procédure pénale ;
Attendu que le juge répressif ne peut prononcer une peine sans avoir relevé tous les éléments constitutifs de l'infraction qu'il réprime ;
Attendu que, pour déclarer Amir X... et Sofiane Y... coupables de prise du nom d'un tiers, l'arrêt énonce que, pour échapper aux poursuites, ceux-ci ont donné de fausses identités, le premier en prenant le nom de Z... Mohamed et le second celui de A... Mourad ;
Mais attendu qu'en l'état de ces seuls motifs, alors que le délit de prise du nom d'un tiers n'est constitué qu'autant que la fausse identité est susceptible de déterminer des poursuites pénales à l'encontre de tiers réellement existants la cour d'appel n'a pas mis la Cour de cassation en mesure d'exercer son contrôle sur la légalité de la décision ;
D'où il suit que la cassation est encourue de ce chef ;
Par ces motifs :
CASSE et ANNULE, l'arrêt susvisé de la cour d'appel de DOUAI, en date du 20 janvier 2009, mais en ses seules dispositions ayant condamné Amir X... du chef de prise du nom d'un tiers et Sofiane Y... du même chef en récidive, toutes autres dispositions étant expressément maintenues ;
Et, pour qu'il soit à nouveau jugé, conformément à la loi, dans les limites de la cassation prononcée,
RENVOIE la cause et les parties devant la cour d'appel d'Amiens, à ce désignée par délibération spéciale prise en chambre du conseil ;
ORDONNE l'impression du présent arrêt, sa transcription sur les registres du greffe de la cour d'appel de Douai et sa mention en marge ou à la suite de l'arrêt partiellement annulé ;
Ainsi jugé et prononcé par la Cour de cassation, chambre criminelle, en son audience publique, les jour, mois et an que dessus ;
Etaient présents aux débats et au délibéré, dans la formation prévue à l'article 567-1-1 du code de procédure pénale : M. Louvel président, Mme Canivet-Beuzit conseiller rapporteur, M. Dulin conseiller de la chambre ;
Greffier de chambre : Mme Villar ;
En foi de quoi le présent arrêt a été signé par le président, le rapporteur et le greffier de chambre.


Synthèse
Formation : Chambre criminelle
Numéro d'arrêt : 09-81948
Date de la décision : 10/03/2010
Sens de l'arrêt : Cassation partielle
Type d'affaire : Criminelle

Références :

Décision attaquée : Cour d'appel de Douai, 20 janvier 2009


Publications
Proposition de citation : Cass. Crim., 10 mar. 2010, pourvoi n°09-81948


Composition du Tribunal
Président : M. Louvel (président)
Avocat(s) : SCP Boré et Salve de Bruneton, SCP Waquet, Farge et Hazan

Origine de la décision
Date de l'import : 15/09/2022
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CCASS:2010:09.81948
Association des cours judiciaires suprmes francophones
Organisation internationale de la francophonie
Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie. Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie.
Logo iall 2012 website award