LA COUR DE CASSATION, DEUXIÈME CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :
Sur le moyen unique, pris en sa troisième branche :
Vu l'article 1134 du code civil ;
Attendu, selon l'ordonnance attaquée, rendue par le premier président d'une cour d'appel, que M. X..., qui avait sollicité, pour un litige l'opposant en appel à une société d'assurances, les conseils et l'assistance de Mme Y..., avocat, exerçant au sein de la SELARL cabinet Isabelle Y..., a signé avec elle une convention d'honoraires prévoyant notamment un honoraire de résultat de 10 % HT des sommes obtenues ; que Mme Y... a cédé à M. Z... les parts de la SELARL cabinet Isabelle Y..., devenue SELARL FPL ; que la convention de cession a prévu que Mme Y... percevra à titre de rémunération les honoraires de résultat du dossier X... ; qu'à la suite d'un arrêt avant dire droit, la société d'assurances a versé une somme de 380 954, 51 euros ; que, Mme Y... ayant prélevé la somme de 50 000 euros, M. X... a saisi le bâtonnier de l'ordre des avocats en fixation des honoraires dus ; qu'après la décision du bâtonnier, la société d'assurances a été condamnée, le 22 mars 2007, à payer à M. X... une somme de 443 913, 13 euros arrêtée au 30 juin 2006, outre les trimestrialités postérieures ;
Attendu que, pour fixer l'honoraire de résultat dû par M. X... à Mme Y... à la somme de 38 095, 45 euros, le premier président retient que le mandat de cette dernière a pris fin avant l'arrêt de la cour d'appel du 22 mars 2007 ; que le résultat obtenu avant cet arrêt ne l'a pas été par jugement mais par le versement volontaire de la société d'assurances du 14 novembre 2005 ; que le cabinet Isabelle Y... ne justifie d'aucune créance pour les sommes obtenues postérieurement avec l'assistance de M. Z... ; que de plus la volonté des parties était d'appliquer 10 % à une somme ce qui excluait dans leur esprit des trimestrialités sur une période très prolongée ;
Qu'en statuant ainsi, alors que la convention d'honoraires prévoyait le versement d'un honoraire de résultat de 10 % du montant des sommes obtenues par jugement, transaction ou médiation et que l'arrêt du 22 mars 2007 avait condamné la société d'assurances à verser à M. X... la somme de 443 913, 13 euros, le premier président, qui a dénaturé cette convention, a violé le texte susvisé ;
PAR CES MOTIFS, et sans qu'il y ait lieu de statuer sur les autres branches du moyen :
CASSE ET ANNULE, en toutes ses dispositions, l'ordonnance rendue le 5 décembre 2007, entre les parties, par le premier président de la cour d'appel de Grenoble ; remet, en conséquence, la cause et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant ladite ordonnance de taxe et, pour être fait droit, les renvoie devant le premier président de la cour d'appel de Chambéry ;
Condamne M. X... aux dépens ;
Vu l'article 700 du code de procédure civile, rejette la demande de Mme Y... ;
Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite de l'ordonnance cassée ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, deuxième chambre civile, et prononcé par le président en son audience publique du vingt-cinq février deux mille dix.
MOYEN ANNEXE au présent arrêt :
Moyen produit par la SCP Thomas-Raquin et Bénabent, avocat aux Conseils, pour Mme Y...
Il est fait grief à l'ordonnance attaquée d'avoir fixé l'honoraire de résultat dû par Monsieur X... à 38. 095, 45 € H. T. et d'avoir en conséquence ordonné à Maître Y... de restituer à celui-ci la somme de 11. 904, 55 € ;
AUX MOTIFS QUE « par mail du 20 décembre 2005, Monsieur X... a chargé Maître Z... de la « continuité » de ses dossiers ; que celui-ci intervenant pour la SELARL FPL ne pouvait plus représenter le client dans la présente instance, que par lettre du 27 décembre, il a demandé à la SCP GRIMAUD de le faire ; que l'article 416 du nouveau Code de procédure civile dispense l'avoué de justifier du mandat donné par le client ; que le demande reconventionnelle est recevable ; que l'intervention de la SELARL FPL se rattache aux prétentions des parties par son objet même qui est l'honoraire dû par le client, ce qui constitue un lien suffisant ; que la SELARL qui se prétend seule créancière de cet honoraire a un intérêt évident à intervenir ; que le premier Président n'est pas compétent pour trancher un litige entre avocats, qu'il n'a donc pas compétence pour trancher sur une rétrocession d'honoraire mais qu'il doit statuer sur les contestations concernant les honoraires des avocats qui se sont succédés et doit donc rechercher quelle est la créance de chacun d'eux sur le client débiteur unique ; qu'il résulte des pièces que :
- le 23 mars 2004, le cabinet Isabelle Y..., dit dans la convention « l'avocat » a convenu avec le client d'un honoraire de résultat de 10 % H. T sur les « sommes obtenues par jugement ou transaction » constituant « le résultat obtenu chiffré ou chiffrable » ;
- le 26 mai 2005, le client étant représenté par Maître Y..., la Cour d'AIX a dit qu'AXA devait garantir le risque invalidité à compter du 14 octobre 1998 mais a rejeté la demande de provision ;
- le 7 juin 2005, convention réitérée le 26 août sauf sur le prix, Maître Y... a cédé à Maître Z... ses parts (799 / 800) avec la convention de l'article 8 que pendant la cogérance, la société prendrait en charge ses charges sociales et qu'en outre Maître Y... percevrait à titre de rémunération les honoraires de résultat du dossier X... ;
- lors de l'assemblée générale de la SELARL du 29 août 2005, Maître Y... a renoncé à la signature sociale ;
- le 14 novembre 2005, le compte CARPA de la SELARL a été crédité de 380. 954, 51 € versé par AXA à Monsieur X... ;
- le 22 Décembre 2005, la SELARL FPL a demandé à la CARPA le retrait par lettre-chèque à l'ordre de Maître Y... par bordereau signé par elle de 50. 000 € et par lettre-chèque à l'ordre de la SELARL de 9. 800 € ;
- le même jour une facture mal confectionnée par ordonnance à en-tête FPL de 59. 800 € T. T. C. a été dressée ;
- le 27 décembre 2005, le client demandait l'annulation de cette facture et redisait son accord sur un honoraire de résultat de 38. 000 € ;
- le 24 février 2006 le client demandait au bâtonnier le remboursement de 12. 000 € par lettre simple à laquelle il ne semble pas avoir été répondu ;
- le 12 septembre 2006, le bâtonnier accusait réception de la réclamation du client sur laquelle il a statué par la décision attaquée, sans observation de quiconque sur les délais ;
- le 22 mars 2007, Monsieur X..., représenté par Maître Z..., obtenir de la Cour d'AIX une condamnation d'AXA à payer 463. 913, 13 € plus trimestrialités postérieures selon contrat ;
qu'il ressort de ces pièces que le mandat de Maître Y... a pris fin le 20 décembre 2005 et en tout cas avant l'arrêt de la Cour du 22 mars 2007 ; que la convention d'honoraire de résultat ne contenait aucune disposition pour le cas où un autre avocat interviendrait ; que le résultat obtenu avant l'arrêt du 22 mars 2007 ne l'a as été par jugement mais par le versement volontaire d'AXA du 14 novembre 2005 ; que l'honoraire dû est de 38. 095, 45 € H. T ou 45. 562, 15 € T. T. C ; qu'il est dû au cabinet devenu SELARL FPL mais devait revenir pour la partie hors taxe à Maître Y..., en vertu de l'article 8 de la cession de parts ; que le client ne conteste pas le devoir à celle-ci à hauteur de 38. 000 € ; que le surplus a en toute hypothèse été trop prélevé soit 11. 904, 55 € dépassant même le montant de la TVA ; que le cabinet Isabelle Y... ne justifie d'aucune créance pour les sommes obtenues postérieurement en vertu de l'arrêt du 22 mars 2007 qui ont été obtenues avec l'assistance de Maître Z... ; que de plus la volonté des parties était d'appliquer 10 %
à une somme ce qui excluait dans leur esprit des trimestrialités sur une période très prolongée ; que la TVA sur 38. 095, 45 € est due contractuellement au cabinet IPL devenu SELARL FPL ; que l'article 8 de la convention du 7 juin 2005 n'autorisait pas un associé à percevoir luimême cette taxe, que la question intéresse les rapports de la SELARL, qui ne demande pas la condamnation du client à la lui payer, et de l'ancien avocat et n'est pas de notre compétence mais de celle du bâtonnier que chaque avocat ou ex-avocat pourra saisir ; que de même le bâtonnier sera seul compétent sur les irrégularités comptables ou faites déontologiques qui pourraient être déduites de l'énoncé des faits ; que le client ne justifie pas d'une mise en demeure de restituer adressée à Maître Y... avant ses conclusions dans la présente instance, que les intérêts légaux courront de la décision de restitution confirmée » ;
ALORS, D'UNE PART, QUE la signification d'une cession de créance au débiteur cédé a pour conséquence de faire sortir le cédant du rapport d'obligation né de la créance, le cessionnaire étant désormais seul investi de la qualité de créancier et seul recevable à faire valoir les droits et actions attachées à la créance ; que le cédant est en conséquence irrecevable à agir dans la procédure opposant le cessionnaire au débiteur cédé en vue du recouvrement de ladite créance, que ce soit pour en solliciter le paiement à son profit ou au contraire pour y renoncer ; qu'en déclarant cependant en l'espèce recevable l'intervention volontaire de la SELARL FPL tendant à obtenir le paiement à son profit de l'honoraire de résultat dû dans la procédure opposant Maître Y... à Monsieur X..., tout en constatant qu'il n'était pas contesté que la créance correspondant à cet honoraire de résultat avait été cédée par la SELARL FPL à Maître Y... personnellement, laquelle avait fait procéder, à l'égard de Monsieur X..., à la signification du transport de créance, le Premier président de la Cour d'appel a violé l'article 1690 du Code civil, ensemble les articles 328 et suivants du Code de procédure civile ;
ALORS, D'AUTRE PART, QUE chaque avocat associé exerçant au sein d'une société d'exercice libéral exerce les fonction d'avocat au nom de la société ; qu'en l'espèce une convention d'honoraire ayant été signée entre le client, Monsieur X..., et la SELARL Cabinet Isabelle Y..., devenue ensuite la SELARL FPL, c'est avec cette personne morale et elle seule que le rapport d'obligation a été contracté par Monsieur X... ; que Maître Z... a seulement racheté les parts de Maître Y... dans la SELARL qui est restée la même personne morale et la même partie contractante à la convention d'honoraire ; qu'en décidant néanmoins que deux avocats « se sont succédés » et qu'il convenait de « rechercher quelle est la créance de chacun d'eux sur le client débiteur unique » et que « le cabinet Isabelle Y... ne justifie d'aucune créance pour les sommes obtenues postérieurement en vertu de l'arrêt du 22 mars 2007 qui ont été obtenues avec l'assistance de Maître Z... », cependant que Maître Z... était, par acte de cession du 26 août 2005, devenu propriétaire de la SELARL Cabinet Isabelle Y..., ensuite dénommée SELARL FPL, en sorte que l'avocat représentant Monsieur X... a toujours été le même, la SELARL Cabinet Isabelle Y... devenue SELARL FPL, laquelle avait cédé l'honoraire de résultat à Maître Isabelle Y..., le Premier Président a violé les article 20, 21 et 22 du décret n° 93-492 du 25 mars 1993 ;
ALORS ENFIN QUE la convention d'honoraire litigieuse prévoyait le versement d'un honoraire de résultat applicable « dans l'hypothèse d'un résultat chiffré ou chiffrable » et qui « s'élève à 10 % HT du montant des sommes obtenues par jugement, transaction ou médiation » ; qu'aux termes de l'arrêt du 22 mars 2007 mettant définitivement fin au litige opposant Monsieur X... à son assureur devant la Cour d'appel d'AIX-EN-PROVENCE, cette juridiction a condamné la compagnie AXA à verser à Monsieur X... la somme de 443. 913, 13 € arrêtée au 30 juin 2006, outre les trimestrialités postérieures ; qu'en fixant cependant à 38. 095, 45 € H. T. l'honoraire de résultat dû par Monsieur X..., le Premier Président de la Cour d'appel a dénaturé les termes clairs et précis de la convention d'honoraire, en violation de l'article 1134 du Code civil.