LA COUR DE CASSATION, PREMIÈRE CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :
Sur le moyen unique, pris en sa première branche :
Vu l'article 1251-3° du code civil, ensemble l'article 1382 du même code ;
Attendu que Mme X... a vendu un bien immobilier lui appartenant, dont le prix lui a été remis par le notaire instrumentaire, M. Y..., au vu d'un état hypothécaire ne mentionnant aucune inscription ; que, lors de la publication de l'acte de vente, il est apparu que l'ex-époux de Mme X... avait fait inscrire une hypothèque judiciaire provisoire sur ce bien, convertie en hypothèque judiciaire définitive à la suite de la condamnation de Mme X... à payer une certaine somme au créancier inscrit ; que la société Les Mutuelles du Mans assurances IARD, assureur de M. Y..., ayant versé au créancier hypothécaire, qui lui a délivré une quittance subrogative, une indemnité correspondant au montant de la créance à l'encontre de Mme X..., a assigné celle-ci en remboursement de cette somme ;
Attendu que pour accueillir la demande, l'arrêt attaqué retient qu'en se dessaisissant des fonds sans s'être assuré de la situation de l'immeuble au vu d'un état hypothécaire récent, M. Y... a commis une faute de nature à engager sa responsabilité civile professionnelle tant envers le créancier hypothécaire qu'envers les acquéreurs puisque celui-là était fondé à engager à l'encontre de ceux-ci une procédure de saisie immobilière en vertu de son droit de suite, et que la compagnie Les Mutuelles du Mans, assureur du notaire, tenue avec ou pour Mme X... au paiement de la dette qu'elle avait intérêt à acquitter, se trouve légalement subrogée dans les droits du créancier hypothécaire ;
Qu'en se déterminant ainsi, alors que, le créancier hypothécaire n'ayant pas usé de la faculté d'exercer son droit de suite à l'encontre des acquéreurs, son préjudice n'était pas certain, de sorte que la compagnie d'assurance n'était pas juridiquement tenue de garantir la responsabilité civile professionnelle du notaire dont les conditions n'étaient pas réunies, la cour d'appel a violé les textes susvisés ;
PAR CES MOTIFS, et sans qu'il y ait lieu de statuer sur la seconde branche du moyen :
CASSE ET ANNULE, dans toutes ses dispositions, l'arrêt rendu le 30 janvier 2008, entre les parties, par la cour d'appel de Poitiers ; remet, en conséquence, la cause et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant ledit arrêt et, pour être fait droit, les renvoie devant la cour d'appel d'Angers ;
Condamne la société Mutuelle du Mans assurances IARD aux dépens ;
Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite de l'arrêt cassé ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, première chambre civile, et prononcé par Mme Crédeville, conseiller le plus ancien faisant fonction de président, en son audience publique du onze février deux mille dix.
MOYEN ANNEXE au présent arrêt :
Moyen produit par la SCP Ancel et Couturier-Heller, avocat aux Conseils pour Mme X...
Le moyen reproché à l'arrêt confirmatif attaqué d'avoir condamné Mme X... à payer aux Mutuelles du Mans la somme de 72.381,11 euros avec intérêts à compter du 26 mars 2002 outre une indemnité au titre de l'article 700 du code de procédure civile ;
AUX MOTIFS QUE « sur la subrogation légale de l'article 1251-3 du Code civil »
« Mme X... Jacqueline soutient que la Mutuelle du Mans Assurances IARD ne rapporte pas la preuve, d'une part, qu'elle était tenue de payer à M. René Z... en vertu de leur contrat d'assurance en lieu et place de leur assuré en responsabilité civile, Me Y..., et, d'autre part, que Me Y... était lui-même tenu de payer M. René Z... en vertu de sa responsabilité professionnelle ;
…
sur l'existence d'une faute de Me Y... de nature à mettre en oeuvre sa responsabilité, il convient de constater que si Me Y... a bien pris le soin de lever, avant la vente, un état hypothécaire, il apparaît que cet état lui a été remis le 24 juillet 1997 avec la mention d'une mise à jour au 1er juillet 1997. Or, la vente étant intervenue le 3 septembre 1997 soit deux mois après la dernière mise à jour, Me Y... aurait dû s'assurer de la situation de l'immeuble au vu d'un état hypothécaire récent et ce avant de remettre le prix de vente à Mme X... Jacqueline. En se dessaisissant des fonds sans cette précaution, Me Y... a commis une faute de nature à engager sa responsabilité civile professionnelle tant envers M. Z... qu'envers les acquéreurs puisqu'il est incontestable que M. Z... titulaire d'une inscription d'hypothèque judiciaire en garantie de sa créance à l'encontre de Mme X... laquelle refusait de s'en acquitter était fondé à engager une procédure de saisie immobilière à l'encontre des époux A..., acquéreurs, et ce en vertu de son droit de suite.
L'article 1251-3° du Code civil dispose que la subrogation a lieu de plein droit au profit de celui qui, étant tenu avec d'autres ou pour d'autres au paiement de la dette, avait intérêt à l'acquitter.
Au vu des éléments rappelés ci-dessus, il apparaît que la Mutuelle du Mans Assurances IARD se trouve subrogée de plein droit dans les droits de M. Z....
En outre, la Mutuelle du Mans Assurances IARD bénéficie d'une subrogation conventionnelle dans la mesure où il résulte des pièces produites que M. René Z... a établi à son profit une quittance subrogative portant sur la somme de 72.381,11 euros, subrogation expresse et faite en même temps que la quittance d'indemnité de sinistre » ;
ALORS D'UNE PART QUE la faute du notaire n'avait causé aucun préjudice certain à M. Z... qui disposait en vertu de sa créance hypothécaire du droit de suite sur l'immeuble vendu, de telle sorte que l'assureur du notaire n'était pas juridiquement tenu au paiement de la dette de la venderesse, Mme X..., envers M. Z... ;
qu'en retenant la subrogation légale de l'assureur, la Cour d'appel a violé l'article 1251 3° du Code civil ;
ALORS D'AUTRE PART QUE la quittance ne fait pas, par elle-même, preuve de la concomitance de la subrogation et du paiement ;
D'où il résulte que la Cour d'appel ne pouvait s'abstenir de toute explication sur les conclusions de Mme X... qui faisait valoir que la concomitance de la subrogation et du paiement faisait défaut, les pièces produites démontrant que la subrogation était intervenue postérieurement au paiement ; qu'elle a ainsi violé l'article 455 du code de procédure civile ;