LA COUR DE CASSATION, TROISIÈME CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :
Joints les pourvois n° S 09-14.265 et n° K 09-10.418 ;
Sur le moyen unique de chacun des pourvois :
Attendu, selon l'arrêt attaqué (Douai, 21 octobre 2008), que M. X..., propriétaire et bailleur du lot n° 1 à usage commercial faisant partie du groupe d'immeubles en copropriété composé de deux bâtiments séparés par une cour intérieure couverte par une verrière, commandée par la SCI des Chats Bossus (la SCI) et édifiée par la société Europ construct, a assigné la SCI, M. Y..., associé de la SCI, la société Europ construct et la société Axa France IARD, assureur dommages ouvrage et assureur de responsabilité décennale de la société Europ construct en paiement du coût de réfection de la verrière et de tous préjudices pouvant en résulter ;
Attendu que la société Axa France IARD fait grief à l'arrêt de déclarer M. X... recevable en son action, alors, selon le moyen :
"1°/ que la cour d'appel qui se borne à retenir, pour justifier de l'intérêt à agir du bailleur, que l'exploitation du fonds est compromise par la violation des règles de sécurité, et que les non conformités sont susceptibles d'entraîner sa fermeture, sans s'expliquer sur le caractère actuel et certain de cet intérêt, prive sa décision de base légale au regard des articles 1792 du code civil et 15 de la loi n° 65-557 du 10 juillet 1965, ensemble l'article 31 du code de procédure civile ;
2°/ que seul le syndicat des copropriétaires a qualité pour agir en réparation des désordres affectant les parties communes d'un immeuble, un copropriétaire ne pouvant solliciter l'indemnisation des conséquences de ceux-ci qu'à la condition d'avoir subi un préjudice personnel distinct de l'atteinte aux parties communes ; qu'en l'espèce, pour juger que M. X... avait intérêt à agir en indemnisation des désordres affectant la verrière construite par la société Europ construct, en surplomb de la cour intérieure de l'immeuble, dont elle a constaté qu'elle constituait une partie commune, la cour d'appel a retenu que la non conformité de celle-ci aux normes de sécurité contre l'incendie compromettait l'exploitation du fonds de commerce dans le lot dont était propriétaire M. X... ; qu'en statuant ainsi, sans préciser quel préjudice propre, distinct de celui résultant consistant (sic) en un trouble d'exploitation qui n'atteignait que le propriétaire du fonds de commerce, le bailleur aurait personnellement subi, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard des articles 1792 du code civil et 15 de la loi n° 65-557 du 10 juillet 1965, ensemble l'article 31 du code de procédure civile" ;
Mais attendu qu'ayant relevé que la cour intérieure avait été affectée à la jouissance exclusive du lot n° 1 et que du fait du mode constructif de la verrière qui la surplombe, l'exploitation du local commercial dans ce lot était compromise en raison de la violation de la réglementation en matière de sécurité incendie relative aux bâtiments accueillant du public, la cour d'appel a pu retenir que M. X... justifiait d'un préjudice personnel lui conférant intérêt à agir à l'encontre de toute personne qui serait reconnue responsable de cette violation et de ses garants ;
D'où il suit que le moyen n'est pas fondé ;
PAR CES MOTIFS :
REJETTE les pourvois ;
Condamne la société Axa France IARD aux dépens ;
Vu l'article 700 du code de procédure civile, rejette la demande de la société Axa France IARD et celle de M. X... ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, troisième chambre civile, et prononcé par le président en son audience publique du dix février deux mille dix.
MOYEN ANNEXE au présent arrêt :
Moyen identique produit aux pourvois n° K 09-10.418 et n° S 09-14.265 par la SCP Célice, Blancpain et Soltner, avocat aux Conseils pour la société Axa France IARD.
Il est fait grief à l'arrêt infirmatif attaqué D'AVOIR déclaré Monsieur X... recevable en son action et D'AVOIR condamné in solidum la SCI DES CHATS BOSSUS, Monsieur Y..., la société EUROP CONSTRUCT et la compagnie AXA FRANCE IARD, en sa qualité d'assureur de responsabilité décennale, à lui verser la somme de 160.081,01 € TTC, indexée sur la variation de l'indice BT 01 depuis le 10 juillet 2003 jusqu'à la date de l'arrêt, outre une indemnité de procédure de 6.000 €,
AUX MOTIFS QUE « sur la fin de non recevoir tirée du défaut de qualité et d'intérêt à agir : M. X... fait grief au jugement de l'avoir estimé dépourvu d'intérêt à agir alors d'une part qu'il est bien propriétaire de cette cour qui, depuis les travaux de transformation réalisés en1995, fait partie intégrante du local commercial loué à la société SONIA RYKIEL, ce que les syndicats des copropriétaires a d'ailleurs confirmé au terme d'une délibération du 31 mai 2005, d'autre part qu'il justifie d'un intérêt personnel à agir dès lors qu'en tant que bailleur, tenu d'un certain nombre d'obligations envers sa locataire, il subit un préjudice du fait de la non-conformité et des désordres affectant la verrière ; que s'agissant de sa qualité de propriétaire, la cour constate, à la suite du tribunal, que le titre de propriété de M. X... désigne le lot acquis comme étant un « local à usage commercial situé au rez de chaussée » sans autre précision ; que n'a pas été versé aux débats l'acte du 28 décembre 1995 au terme duquel ce lot a été apporté en nature à la SCI LIEGE, éventuellement susceptible d'éclairer la cour sur la description du bien vendu ; que se référant au règlement de copropriété, le tribunal a utilement observé que la cour séparant les deux bâtiments ne figurait pas dans l'énoncé des parties privatives mais que, par contre, dans les parties communes était mentionnée les « installations d'éclairage de la cour commune », ce dont il a logiquement déduit le caractère commun de la cour ; que M. X... objecte que les expertises judiciaires ont établi qu'à l'occasion des travaux réalisés fin 1995, la cour en question a été transformée en pièce couverte annexée au local commercial, ce dont se déduit son caractère privatif ; qu'il est effectivement avéré que M. Z..., devenu propriétaire le 3 octobre 1995 de tout l'ensemble immobilier, a, dès cette date, « privatisé » la cour séparant les deux bâtiments puisque le bail conclu le même jour avec la société DANIEL HECHTER l'englobait et que les travaux projetés, objet du permis de construire obtenu le 18 septembre 1995, ont notamment consisté à démolir le mur séparant le lot commercial de la cour et à couvrir celle-ci de façon à accroître la surface commerciale ; qu'il s'en déduit certes une volonté de M. Z... d'affecter la cour à la jouissance exclusive du lot 1 mais pas nécessairement l'intention de rendre la cour privative, ce que contredit le règlement de copropriété établi, quelques jours plus tard, le 6 octobre 1995, compte tenu des mentions ci-dessus rappelées ; que M. X... fait encore valoir que la copropriété lui reconnaît la qualité de propriétaire de la cour ainsi qu'il ressort d'une délibération de l'assemblée générale du 31 mai 2005, consécutive au jugement entrepris ; que l'affirmation du caractère privatif de la cour, en préambule d'une délibération destinée à décider d'une éventuelle intervention du syndicat en appel (qui n'a d'ailleurs donné lieu à aucun vote), sans que l'assemblée n'ait été invitée à se prononcer sur la nature des droits (droit de jouissance ou droit de propriété) de M. X... au regard de son titre et du règlement de copropriété, et sur une éventuelle modification de ce dernier, sous les conditions de majorité de l'article 26 de la loi du 10 juillet 1965, ne permet pas de remettre en cause les dispositions du règlement de copropriété ci-dessus rappelées qui font obstacle à la revendication de M. X... ; qu'en revanche, celui-ci, en tant que bailleur d'un local commercial englobant la cour, dont l'exploitation est compromise en raison de la violation de la réglementation en matière de sécurité incendie relative aux bâtiments accueillant du public, du fait du mode constructif de la verrière qui la surplombe, justifie d'un préjudice personnel qui lui confère un intérêt à agir à l'encontre de toute personne qui serait reconnue responsable de cette violation et de ses garants ; que le jugement sera donc réformé en ce qu'il déclare M. X... dépourvu d'intérêt à agir et son action déclarée recevable » ;
1°) ALORS QUE la Cour d'appel qui se borne à retenir, pour justifier de l'intérêt à agir du bailleur, que « l'exploitation du fonds est compromise » par la violation des règles de sécurité, et que les non conformités sont « susceptibles d'entraîner sa fermeture », sans s'expliquer sur le caractère actuel et certain de cet intérêt, prive sa décision de base légale au regard des articles 1792 du Code civil et 15 de la loi n°65-557 du 10 juillet 1965, ensemble l'article 31 du Code de procédure civile ;
2°) ALORS QU'AU SURPLUS seul le syndicat des copropriétaires a qualité pour agir en réparation des désordres affectant les parties communes d'un immeuble, un copropriétaire ne pouvant solliciter l'indemnisation des conséquences de ceux-ci qu'à la condition d'avoir subi un préjudice personnel distinct de l'atteinte aux parties communes ; qu'en l'espèce, pour juger que Monsieur X... avait intérêt à agir en indemnisation des désordres affectant la verrière construite par la société EUROP CONSTRUCT, en surplomb de la cour intérieure de l'immeuble, dont elle a constaté qu'elle constituait une partie commune, la Cour d'appel a retenu que la non-conformité de celle-ci aux normes de sécurité contre l'incendie compromettait l'exploitation du fonds de commerce dans le lot dont était propriétaire Monsieur X... ; qu'en statuant ainsi, sans préciser quel préjudice propre, distinct de celui résultant consistant en un trouble d'exploitation qui n'atteignait que le propriétaire du fonds de commerce, le bailleur aurait personnellement subi, la Cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard des articles 1792 du Code civil et 15 de la loi n°65-557 du 10 juillet 1965, ensemble l'article 31 du Code de procédure civile.