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09/02/2010 | FRANCE | N°08-45045

France | France, Cour de cassation, Chambre sociale, 09 février 2010, 08-45045


LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l'arrêt suivant :

Sur le moyen unique :

Attendu, selon l'arrêt attaqué (Montpellier,15 octobre 2008), que Mme X... a été engagée le 15 janvier 1979 par la société Autodistribution Pueyo (la société) et occupait, en dernier lieu, un emploi d'assistante de direction et comptabilité ; que dans le cadre d'un projet de licenciement concernant huit des vingt-cinq salariés de l'entreprise, l'employeur l'a convoquée à un entretien préalable à son licenciement pour le 27 décembre 2005 ; que lors de cet entretien, il lui a

proposé le bénéfice d'une convention de reclassement personnalisé (CRP), ain...

LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l'arrêt suivant :

Sur le moyen unique :

Attendu, selon l'arrêt attaqué (Montpellier,15 octobre 2008), que Mme X... a été engagée le 15 janvier 1979 par la société Autodistribution Pueyo (la société) et occupait, en dernier lieu, un emploi d'assistante de direction et comptabilité ; que dans le cadre d'un projet de licenciement concernant huit des vingt-cinq salariés de l'entreprise, l'employeur l'a convoquée à un entretien préalable à son licenciement pour le 27 décembre 2005 ; que lors de cet entretien, il lui a proposé le bénéfice d'une convention de reclassement personnalisé (CRP), ainsi que des postes de reclassement au sein d'une société du groupe ; que par lettre recommandée du 6 janvier 2006, la société lui a rappelé qu'une CRP lui avait été proposée, qu'elle disposait d'un délai de réflexion de quatorze jours soit jusqu'au 10 janvier 2006 inclus pour y adhérer, qu'à défaut de réponse dans ce délai, elle serait réputée refuser la CRP proposée et que dans l'hypothèse où elle en accepterait le bénéfice dans le délai imparti, son contrat serait réputé rompu d'un commun accord au terme du délai de réflexion, soit le 10 janvier 2006 ; qu'il y était en outre précisé que, dans l'hypothèse où elle refuserait la CRP, cette lettre constituerait la notification de son licenciement pour motif économique et qu'elle disposait d'un délai jusqu'au 14 janvier pour accepter l'un des postes de reclassement interne qui lui avaient été proposés lors de l'entretien préalable ;

Attendu que Mme X... fait grief à l'arrêt de dire que son licenciement repose sur une cause réelle et sérieuse et de la débouter en conséquence de sa demande d'indemnité de ce chef, alors, selon le moyen, que :

1°/ si l'adhésion du salarié à une convention de reclassement personnalisé entraîne une rupture qui est réputée intervenir d'un commun accord, elle ne le prive pas de la possibilité de contester la méconnaissance par l'employeur de son obligation de reclassement interne ; qu'à cet égard, le délai de réflexion fixé pour que le salarié se prononce sur les propositions de reclassement qui lui sont faites dans le cadre d'un licenciement pour motif économique constitue une garantie de fond relevant de l'ordre public social et dont le non-respect par l'employeur emporte méconnaissance de son obligation de reclassement et prive le licenciement de cause réelle et sérieuse ; qu'il appartient à l'employeur d'aligner sur la même échéance les délais de réflexion donnés à la salariée pour se prononcer sur la convention de reclassement personnalisé et les propositions de reclassement en interne ; qu'en l'espèce, il ressort des énonciations de l'arrêt attaqué que, du fait de l'adhésion de Mme X... à la convention de reclassement personnalisé le 6 janvier 2006, la rupture du contrat de travail est intervenue le 10 janvier 2006, alors que Mme X... bénéficiait d'un délai de réflexion expirant le 13 janvier 2006 pour accepter ou refuser l'une des quatre propositions de reclassement en interne ; qu'en ayant ainsi privé Mme X... d'une partie du délai de réflexion dont elle disposait pour se prononcer sur les propositions de reclassement en interne, l'employeur avait méconnu son obligation de reclassement, sans qu'il importât de savoir si la salariée aurait ou non usé de ce délai de réflexion et accepté ou non l'une de ces propositions ; qu'en décidant le contraire, aux motifs inopérants « qu'en adhérant à la CRP, elle a elle-même provoqué la rupture du contrat pour bénéficier des diverses mesures du dispositif destinées à favoriser son reclassement et renoncé nécessairement aux propositions de reclassement au sein du groupe Autodistribution qui lui avaient été faites », la cour d'appel a violé les articles L. 1233-2, 1233-4, L. 1233-65 et L. 1233-67 du code du travail ;

2°/ qu'il appartient à l'employeur d'aligner sur la même échéance les délais de réflexion donnés à la salariée pour se prononcer sur la convention de reclassement personnalisé et les propositions de reclassement en interne ; qu'en octroyant à la salariée deux délais distincts pour se prononcer, d'une part, sur la convention de reclassement personnalisé et, d'autre part, sur les propositions de reclassement en interne, l'employeur avait créé une confusion de nature à priver le salarié de la réflexion nécessaire à sa prise de décision ; que l'employeur n'ayant pas exécuté loyalement son obligation de reclassement, le licenciement se trouvait dépourvu de cause réelle et sérieuse ; qu'en décidant le contraire, la cour d'appel a violé les articles 1134 du code civil, L. 1233-2, 1233-4, L. 1233-65 et L. 1233-67 du code du travail ;

3°/ dans ses conclusions d'appel, la salariée soutenait à titre subsidiaire « qu'en outre, la société Pueyo a nécessairement manqué au devoir d'information à sa charge, en n'informant pas correctement la salariée de ce que l'acceptation de la CRP proposée lors de l'entretien préalable rendrait sans objet les propositions de reclassement internes faites le même jour ; que l'employeur a donc privé la salariée de sa possibilité d'accepter l'une des propositions de reclassement interne qui lui avaient été faites, la privant ainsi de la possibilité de poursuivre son activité au sein de l'entreprise (…)" ; que le moyen était pertinent, en ce qu'il soutenait que l'employeur avait l'obligation d'informer la salariée et de s'assurer par écrit qu'elle avait consenti de façon libre et éclairée à renoncer à un reclassement en interne pour préférer quitter l'entreprise sous le bénéfice de la convention de reclassement personnalisé ; que l'employeur avait ainsi manqué à son obligation d'exécuter loyalement le contrat de travail ; qu'en omettant de répondre à ce moyen, la cour d'appel a violé l'article 455 du code de procédure civile ;

Mais attendu que la cour d'appel, répondant aux prétentions prétendument délaissées, a constaté que Mme X... avait été régulièrement informée des conséquences, sur la rupture de son contrat de travail, de l' acceptation de la convention de reclassement personnalisé qui lui était proposée, à l'expiration du délai de quatorze jours dont elle disposait pour prendre parti ; qu'elle en a exactement déduit que l'acceptation de la convention avait entraîné la rupture du contrat de travail à l'expiration de ce délai et que la salariée avait nécessairement renoncé aux postes de reclassement qui lui avaient été proposés ;

D'où il suit que le moyen, nouveau et mélangé de fait et de droit dans sa deuxième branche et donc irrecevable, n'est pas fondé pour le surplus ;

PAR CES MOTIFS :

REJETTE le pourvoi ;

Condamne Mme X... aux dépens ;

Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre sociale, et prononcé par le président en son audience publique du neuf février deux mille dix.

MOYEN ANNEXE au présent arrêt :

Moyen produit par la SCP Tiffreau, avocat aux Conseils pour Mme X...

Mme X... reproche à la Cour d'appel d'AVOIR ainsi statué : « confirme le jugement du Conseil de prud'hommes de CARCASSONNE en date du 13 février 2008 en ce qu'il a dit le licenciement de Madame X... fondé sur une cause réelle et sérieuse ; le réforme pour le surplus et statuant à nouveau, déboute Jacqueline X... de sa demande en paiement d'une indemnité pour licenciement sans cause réelle et sérieuse ».

AUX MOTIFS PROPRES QUE « Dans ce cadre » de son obligation de reclassement « la Société PUEYO justifie avoir, par courriels des 1 et 23 décembre 2005, contacté les sociétés du groupe AUTODISTRIBUTION en vue du reclassement des 8 salariés visés par le projet de licenciement économique et, dans cette perspective, transmis aux diverses sociétés du groupe les fiches des salariés concernés ; elle a, à l'issue de ses recherches, communiqué à Mme X..., par courrier remis en main propre le 27 décembre 2005, lors de l'entretien préalable, quatre propositions de reclassement sur des postes d'agent comptable au sein d'une société du groupe, la société AD GADSO, à Lescar (64), accompagnées des fiches des postes à pourvoir ; il n'est pas soutenu que ces recherches de reclassement ont été incomplètes ou imprécises ; certes, l'employeur avait lui-même, dans son courrier du 27 décembre 2005, imparti un délai jusqu'au 13 janvier 2006 pour faire connaître si elle acceptait ou pas les propositions d reclassement ; pour autant, en adhérant le 6 janvier 2006 à la CRP, la salariée n'ignorait pas que, sauf rétractation de sa part, son contrat serait rompu du commun accord des parties à la date du 10 janvier 2006, à l'expiration du délai de 14 jours dont elle disposait pour accepter ou refuser la CRP à partir de la remise du document d'information le 27 décembre 2005 ; elle ne saurait soutenir que l'employeur a manqué à son obligation de reclassement, dès lors qu'en adhérant à la CRP, elle a elle-même provoqué la rupture du contrat pour bénéficier des diverses mesures du dispositif destinées à favoriser son reclassement et renoncé nécessairement aux propositions de reclassement au sein du groupe AUTODISTRIBUTION qui lui avaient été faites ; Madame X... ne peut, dans ces conditions, qu'être déboutée de sa demande en paiement d'une indemnité pour licenciement sans cause réelle et sérieuse,

ET AUX MOTIFS EVENTUELLEMENT ADOPTES QUE « (…) il a été proposé aussi à Madame X... quatre postes en vue de son reclassement professionnel et qu'elle disposait d'un délai de réflexion jusqu'au vendredi 13 janvier ; en l'espèce, Madame X... disposait au-delà du 10 janvier (date de la rupture d'un commun accord) de 4 jours de réflexion pour se prononcer sur les propositions de reclassement ; que la date de la rupture du contrat de travail a été prononcée antérieurement à la date butoir du délai de réflexion concernant le reclassement professionnel ; attendu qu'en application de l'article L. 321-1 dernier alinéa du Code du travail, l'employeur ne peut procéder au licenciement économique du salarié que si son reclassement s'est révélé impossible ; attendu que la rupture du contrat de travail prononcée antérieurement à la date butoir du délai de réflexion a privé Madame X... de se prononcer sur son reclassement proposé par son employeur jusqu'au délai imparti ; en conséquence, la procédure de licenciement n'étant pas respectée, Madame X... est en droit de demander des dommages-intérêts ; attendu que le motif économique n'est pas contesté par la salariée, en conséquence le licenciement est pourvu d'une cause réelle et sérieuse (…) ».

ALORS QUE 1°), si l'adhésion du salarié à une convention de reclassement personnalisé entraîne une rupture qui est réputée intervenir d'un commun accord, elle ne le prive pas de la possibilité de contester la méconnaissance par l'employeur de son obligation de reclassement interne ; qu'à cet égard, le délai de réflexion fixé pour que le salarié se prononce sur les propositions de reclassement qui lui sont faites dans le cadre d'un licenciement pour motif économique constitue une garantie de fond relevant de l'ordre public social et dont le non-respect par l'employeur emporte méconnaissance de son obligation de reclassement et prive le licenciement de cause réelle et sérieuse ; qu'il appartient à l'employeur d'aligner sur la même échéance les délais de réflexion donnés à la salariée pour se prononcer sur la convention de reclassement personnalisé et les propositions de reclassement en interne ; qu'en l'espèce, il ressort des énonciations de l'arrêt attaqué que, du fait de l'adhésion de Mme X... à la convention de reclassement personnalisé le 6 janvier 2006, la rupture du contrat de travail est intervenue le 10 janvier 2006, alors que Mme X... bénéficiait d'un délai de réflexion expirant le 13 janvier 2006 pour accepter ou refuser l'une des quatre propositions de reclassement en interne ; qu'en ayant ainsi privé Mme X... d'une partie du délai de réflexion dont elle disposait pour se prononcer sur les propositions de reclassement en interne, l'employeur avait méconnu son obligation de reclassement, sans qu'il importât de savoir si la salariée aurait ou non usé de ce délai de réflexion et accepté ou non l'une de ces propositions ; qu'en décidant le contraire, aux motifs inopérants « qu'en adhérant à la CRP, elle a elle-même provoqué la rupture du contrat pour bénéficier des diverses mesures du dispositif destinées à favorisé son reclassement et renoncé nécessairement aux propositions de reclassement au sein du groupe AUTODISTRIBUTION qui lui avaient été faites », la Cour d'appel a violé les articles L. 1233-2, 1233-4, L. 1233-65 et L. 1233-67 du Code du travail.

ALORS QUE 2°), au surplus, qu'il appartient à l'employeur d'aligner sur la même échéance les délais de réflexion donnés à la salariée pour se prononcer sur la convention de reclassement personnalisé et les propositions de reclassement en interne ; qu'en octroyant à la salariée deux délais distincts pour se prononcer, d'une part, sur la convention de reclassement personnalisé et, d'autre part, sur les propositions de reclassement en interne, l'employeur avait créé une confusion de nature à priver le salarié de la réflexion nécessaire à sa prise de décision ; que l'employeur n'ayant pas exécuté loyalement son obligation de reclassement, le licenciement se trouvait dépourvu de cause réelle et sérieuse ; qu'en décidant le contraire, la Cour d'appel a violé les articles 1134 du Code civil, L. 1233-2, 1233-4, L. 1233-65 et L. 1233-67 du Code du travail.

ALORS QUE 3°), au reste, dans ses conclusions d'appel (p. 8), la salariée soutenait à titre subsidiaire « qu'en outre, la société PUEYO a nécessairement manqué au devoir d'information à sa charge, en n'informant pas correctement la salariée de ce que l'acceptation de la CRP proposée lors de l'entretien préalable rendrait sans objet les propositions de reclassement internes faites le même jour ; que l'employeur a donc privé la salariée de sa possibilité d'accepter l'une des propositions de reclassement interne qui lui avaient été faites, la privant ainsi de sa possibilité de poursuivre son activité au sein de l'entreprise (…) ; que le moyen était pertinent, en ce qu'il soutenait que l'employeur avait l'obligation d'informer la salariée et de s'assurer par écrit qu'elle avait consenti de façon libre et éclairée à renoncer à un reclassement en interne pour préférer quitter l'entreprise sous le bénéfice de la convention de reclassement personnalisé ; que l'employeur avait ainsi manqué à son obligation d'exécuter loyalement le contrat de travail ; qu'en omettant de répondre à ce moyen, la Cour d'appel a violé l'article 455 du Code de procédure civile.


Synthèse
Formation : Chambre sociale
Numéro d'arrêt : 08-45045
Date de la décision : 09/02/2010
Sens de l'arrêt : Rejet
Type d'affaire : Sociale

Références :

Décision attaquée : Cour d'appel de Montpellier, 15 octobre 2008


Publications
Proposition de citation : Cass. Soc., 09 fév. 2010, pourvoi n°08-45045


Composition du Tribunal
Président : M. Chauviré (conseiller le plus ancien faisant fonction de président)
Avocat(s) : SCP Tiffreau-Corlay

Origine de la décision
Date de l'import : 15/09/2022
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CCASS:2010:08.45045
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